Le concept de télévision communautaire - article ; n°1 ; vol.21, pg 66-80
16 pages
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Description

Communications - Année 1974 - Volume 21 - Numéro 1 - Pages 66-80
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1974
Nombre de lectures 17
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Luc Couron
Le concept de télévision communautaire
In: Communications, 21, 1974. pp. 66-80.
Citer ce document / Cite this document :
Couron Jean-Luc. Le concept de télévision communautaire. In: Communications, 21, 1974. pp. 66-80.
doi : 10.3406/comm.1974.1316
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1974_num_21_1_1316Jean-Luc Couron
Le concept de télévision communautaire
Les discours et les pratiques des agents des media dits « communautaires » en
général, de la télévision communautaire (TVC) en particulier, s'appuient sur
quatre grands thèmes idéologiques : le développement et le changement social ;
la participation et le ; le travail social, l'animation sociale et le
développement culturel ; la liberté d'expression et le libre accès, enfin. Ces thèmes
se retrouvent à des degrés divers, mais de manière constante et répétée, dans la
bouche ou sous la plume de tous les promoteurs de ces nouvelles formes de com
munication *. .
Le développement et le changement social.
Distinguons la croissance économique, qui se traduit par l'augmentation du
revenu national, du développement économique qui suppose la mobilisation des
ressources humaines, conçues non seulement en terme de capital humain, mais
surtout comme agents sociaux qui influencent le cours de ce développement. D'où
l'objectif fondamental du changement des mentalités et l'importance de l'éduca
tion et de la culture ; d'où aussi la nécessité d'une analyse et d'un traitement des
facteurs non économiques par une stratégie d'intervention sociale. Le changement
social est le pivot autour duquel s'articulent toutes les stratégies des acteurs du
secteur dit « communautaire ». Or notre époque supporte des bouleversements
continuels dus au passage au néo-capitalisme et aux réactions violentes de ceux
qui en sont les victimes. C'est d'une part pour prévenir ces conflits et d'autre part
pour lutter contre les phénomènes de passivité et de résistance latentes qui sont
un frein au développement du système que se multiplient les idéologies mobilistes
du changement social. Celles-ci, à travers l'apparente variété de leurs objets, sont
unanimes à dénoncer les « structures archaïques », les « méthodes désuètes », les
« mentalités sclérosées, figées, vieillotes, dépassées », auxquelles elles opposent
la rationalité de la modernité et les bienfaits du progrès, qui imposent de « faire
bouger, adapter, dégeler, animer » pour « débloquer la société ». On comprend
mieux dès lors, après avoir rappelé les réalités que recouvre la notion de change
ment social et les finalités des idéologies positivistes qui la sous-tendent, la nature
et le sens des stratégies interventionnistes, que ce soit l'organisation communau-
1. Cet article résume une thèse de doctorat de 3e cycle sur a les media communaut
aires », que l'auteur vient de soutenir à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes (VIe"
section).
66 Le concept de télévision communautaire
taire en Amérique du Nord, l'animation et le développement culturel en France,
le développement communautaire dans les pays du tiers-monde.
La participation.
Aujourd'hui l'idée de participation est liée à la crise du système représentatif
des démocraties occidentales : les citoyens sont de plus en plus conscients du fait
que le fossé s'accroît entre eux et leurs représentants et que, de par les structures
économiques et l'organisation sociale, les véritables décisions sont prises ailleurs
que dans les centres officiels du pouvoir. Dans le projet participationniste, que ce
soit pour des motifs humanistes ou idéalistes (par exemple d'inspiration chré
tienne), ou pour des visées technicistes et rationalisatrices (développement pla
nifié), ou simplement dans une perspective cynique d'intégration, le but reste
toujours la réduction des antagonismes de classe et des conflits dans les limites
compatibles avec le développement du système capitaliste. D'où la prééminence
des idéologies réconciliantes et des notions d'harmonie, de consensus et de rational
ité, l'objectif étant une démocratie organique de cogestion qui s'établirait par la
participation, définie comme un mécanisme de partage des pouvoirs. On voit bien
les limites de ce projet réformiste puisque la participation d'une part ne s'applique
en général que dans des secteurs marginaux (éducation, santé, bien-être...), qui
d'ailleurs l'exigent pour des raisons d'efficacité, d'autre part ne porte jamais sur
les décisions, mais s'effectue soit avant sous forme de consultations qui n'engagent
pas les responsables, soit après par la mobilisation de la base pour appliquer les
mesures prises. Il s'agit donc de susciter la participation dans des cadres et pour
des objectifs, voire même selon des modalités et par deg activités, non définis au
départ par les participants eux-mêmes.
La communauté.
Le milieu local naturel engendre une communauté d'intérêt qui implique la
participation de tous à son amélioration, donnant naissance au sentiment com
munautaire. Les deux principaux fondements de la communauté sont d'une part
un regroupement géographique, d'autre part une interaction sociale. Cette der
nière met l'accent sur les petits groupes primaires reposant sur des contacts per
sonnels et volontaires. Au xvme siècle, le modèle anglais de gouvernement local
est étendu aux colonies de la Nouvelle-Angleterre puis à tout le continent nord-
américain : il s'agit alors d'un • développement communautaire de transforma
tion et d'organisation d'un milieu hostile. La tradition anglaise de méfiance
envers l'État et de décentralisation par le gouvernement local va être accentuée
par le phénomène colonial et l'idéalisation de l'époque héroïque des pionniers,
d'où ces principes d'autonomie et de volontariat local qui sont les fondements
de la « démocratie de base » américaine (grass roots democracy). Cet idéal de
démocratie directe et de participation est symbolisé à merveille par la pratique
du Town Hall meeting des petites villes de la Nouvelle- Angleterre : ces « assem
blées d'hôtel de ville » qui réunissaient dans une égalité formelle tous les éléments
masculins de la localité pour prendre les décisions importantes, étaient le creuset
du consensus sur lequel s'édifiaient les idéologies communautaires.
Et il est très révélateur de constater que c'est à partir des [mêmes . notions
qu'Amitaï Etzioni (de Columbia University) propose un système électronique de
téléconférence ( « Minerva ») qui permettrait à chacun de participer à des réunions
67 Jean-Luc Couron
brisant publiques ainsi, ou à dit-il, des groupes l'isolement de discussion des citoyens ou de et leur décision aliénation sans quitter due à son leur foyer, non-
participation au pouvoir, tout en dégageant « un véritable consensus de groupe ».
De même, au Québec, la théorisation de la notion de « place publique » par les
organisations communautaires de Sherbrooke et en France la vogue du thème
de la TVC, comme « nouvelle place du village ».
Or, si aujourd'hui on éprouve le besoin de faire renaître la communauté, c'est
bien parce que celle-ci a disparu. Elle a éclaté sous les poussées successives de
l'industrialisation, de l'exode rural, de l'urbanisation massive, de la division du
travail, de la formalisation des rapports sociaux, de la mobilité sociale, du dépé
rissement des structures grégaires (famille, etc.), qui ont rompu les liens traditionn
els, dilué les références sentimentales, désorganisé le système social. La
recrudescence des idéologies et des pratiques dites « communautaires » est donc
paradoxalement le signe de la crise de la communauté locale et du déclin des
valeurs communautaires. En effet celles-ci s'opposent au système capitaliste dans
lequel les rapports de compétition et de concurrence contraignent les relations
entre les personnes à s'établir sur la base des intérêts individuels : le mode de
production d

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