Le jugement catégorique et le jugement thétique : exemples tirés de la syntaxe japonaise - article ; n°30 ; vol.8, pg 81-110
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Description

Langages - Année 1973 - Volume 8 - Numéro 30 - Pages 81-110
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 140
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

S. Y. Kuroda
Marie-Lise Beffa
Maurice Borel
Le jugement catégorique et le jugement thétique : exemples
tirés de la syntaxe japonaise
In: Langages, 8e année, n°30, 1973. pp. 81-110.
Citer ce document / Cite this document :
Kuroda S. Y., Beffa Marie-Lise, Borel Maurice. Le jugement catégorique et le jugement thétique : exemples tirés de la syntaxe
japonaise. In: Langages, 8e année, n°30, 1973. pp. 81-110.
doi : 10.3406/lgge.1973.2229
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1973_num_8_30_2229Y. KURODA S.
San Diego
LE JUGEMENT CATÉGORIQUE
ET LE THÉTIQUE
EXEMPLES TIRÉS DE LA SYNTAXE JAPONAISE
1. Introduction.
Comme chacun sait, le mérite d'avoir débarrassé la logique mathé
matique des notions de sujet et de prédicat sur lesquelles était basée la
logique traditionnelle revient à Frege. Pour citer Kneale et Kneale г :
« Selon les plus anciens logiciens, on ne pouvait représenter
adéquatement un jugement sans distinguer entre sujet et prédicat,
mais Frege rejette ce dogme. A la vérité, il peut y avoir une différence
rhétorique entre « Les Grecs ont défait les Perses » et « Les Perses
ont été défaits par les »; mais le contenu conceptuel des deux
énoncés est le même, car l'un d'eux peut se substituer à l'autre comme
prémisse sans affecter la validité de notre raisonnement, et c'est tout
ce que nous avons besoin de considérer quand nous essayons de
construire un langage qui réponde aux objectifs que Frege s'est
fixé » (p. 479).
Peut-être cet aspect du développement de la logique traditionnelle à la
logique moderne concerne-t-il davantage le linguiste, parce que les
notions de sujet et de prédicat sont fondamentales aussi en grammaire
traditionnelle. Tant qu'on a cru que la logique traditionnelle représentait
la vérité indubitable, il était normal de présumer que sujet et prédicat
en grammaire avaient un fondement assuré. Une fois leur base logique
évanouie, sujet et prédicat comme notions grammaticales peuvent
sembler dénués de fondement. De même qu'en logique, toutes les phrases
assertives devraient donc être considérées comme une fonction du pré
dicat représentée par un verbe (ou la copule + adjectif ou nom) auquel
un ou plusieurs termes nominaux sont attachés, sans que l'on privilégie
l'un comme sujet par rapport aux autres. La différence entre l'active et
la passive dans une paire comme celle contenue dans la citation ci-dessus
serait simplement une question de différence dans les détails de réalisation
des formes de discours, à peu près du même ordre que la différence entre
des phrases comme :
1. W. et M. Kneale, The Development of Logic, The Clarendon Press, Oxford, 1964,
p. 479.
LANGAGES № 30 6 82
(1) John gave the book to Mary.
(Jean a donné le livre à Marie.)
et
(2) John gave Mary the book.
(Jean a donné à Marie le livre.)
La notion de sujet, si l'on doit encore reconnaître une telle chose, serait
alors comparable à des phénomènes marginaux tels que l'accent emphat
ique sur un constituant de phrase.
A peu près au même moment où Frege combattait la logique tra
ditionnelle se produisait un autre mouvement dans la théorie du jugement
qui, cependant, semble avoir été largement négligé, au moins dans les
cercles linguistiques, soumis dès lors à l'influence puissante de la logique
mathématique sur la pensée moderne. Je veux parler de la théorie du
jugement proposée par Franz Brentano, et poursuivie et élaborée, en
particulier en rapport avec la théorie grammaticale, par Anton Marty.
Cette théorie pose, à la différence de la logique traditionnelle ou de la
logique moderne, qu'il y a deux types différents de jugements fonda
mentaux 2 : le catégorique et le thétique. Seul le premier d'entre eux se
conforme au paradigme traditionnel de sujet-prédicat, tandis que le
dernier représente simplement la reconnaissance ou le rejet de la matière
du jugement. En outre, le jugement catégorique est supposé se composer
de deux actes séparés : l'un, l'acte de reconnaître ce qui doit constituer
le sujet, et l'autre l'acte d'affirmer ou nier ce qu'exprime le predicate
propos du sujet. Avec cette analyse à l'esprit, les jugements thétiques
et catégoriques sont aussi appelés le jugement simple (Ein fâche Urteil)
et le jugement double (Doppelurteil).
Pour illustrer cette théorie, des phrases existentielles comme Gott ist,
et es gibt gelbe Blumen, ou des phrases dites impersonnelles comme : es
regnet, représentent des jugements thétiques. Des phrases : ich
urteile; der Kôrper ist auf der Erde; Dieses Pferd ist ein Schimmel; repré
sentent des jugements catégoriques 3. Et finalement, ce qui est important
à l'égard de la position épistémologique de Brentano, les jugements
universels, tels que : Aile Dreiecke haben zut Winkelsumme zwei Rechte,
sont thétiques, étant identiques à ceux que représentent des phrases
existentielles négatives comme : es gibt nicht ein Dreieck, welches nicht
zur Winkelsumme zwei Rechte halte 4.
Les phrases qui sont censées représenter des jugements thétiques
sont cependant censées, selon la théorie linguistique de Marty, posséder
la structure sujet-prédicat en tant que phrases. Et l'écart possible entre
2. Utiliser un terme de psychologie comme « jugement » en référence à la logique
moderne est, à strictement parler, fautif. Mais ce mésusage du terme ne devrait pas
engendrer de confusion sérieuse. Il est plus commode d'agir ainsi que de conserver
le terme uniquement pour se référer aux théories pré-modernes et de le changer en
« énoncé » ou « proposition » quand on se réfère à la logique moderne.
3. Anton Marty, Gesammelte Schriften, II Band, I. Abteilung, Max Niemeyer,
Halle, 1918, p. 272, et Psyche und Sprachstruktur », Berne, 1965, p. 137f. Verlag
A. Francké.
4. Cf. A. Marty, Gesammelte Schriften, II. Band, I. Abteilung, p. 260. 83
la structure de la phrase et celle du jugement qu'elle représente est
traité par sa théorie de la forme discursive profonde 5.
Pour le logicien et le grammairien traditionnels, la structure sujet-
prédicat d'une phrase reflétait la structure similaire du jugement. Pour
Brentano et Marty aussi, la phrase, telle qu'elle se manifeste dans la
forme discursive, possède la structure sujet-prédicat, mais le jugement
qu'elle représente peut avoir ou non cette structure. Si le linguiste continue
à soutenir que la phrase se conforme au modèle traditionnel de sujet-
prédicat, le logicien moderne dirait maintenant que la structure de
surface d'une phrase ne représente pas totalement la structure du jugement
sous-jacent. Pour le logicien traditionnel, la de la phrase se
conforme pleinement à celle du jugement; pour Brentano et Marty,
l'existence même de la structure de phrase sujet-prédicat est motivée
par de la similaire dans le jugement, bien que toute
phrase possédant cette peut ne pas représenter la structure
sous-jacente du jugement. D'un autre côté, pour le logicien moderne,
une fois reconnu l'écart entre l'apparence de la phrase et son contenu,
il n'y a aucune raison de ne pas supposer que la structure superficielle
de la phrase n'est en aucune façon reliée à la structure du jugement qui
la sous-tend.
L'arrière-plan intellectuel sur lequel la théorie de Brentano fut
avancée est évidemment différent de celui d'aujourd'hui : le point crucial
pour lui était d'accorder un statut légitime aux jugements dénués de
sujets (i.e. thétiques). L'affirmation de Brentano qu'un jugement uni
versel est thétique, et qu'il n'implique donc pas l'existence de l'entité
à laquelle réfère le terme-sujet, était certainement liée de façon essentielle
à sa position philosophique de réalisme. L'affirmation qu'il y a aussi des
phrases, existentielles et impersonnelles, qui ne représentent pas des
jugements universels et qui doivent cependant être considérées comme
dénuées de sujet, en dépit de leur apparence de phrase du type sujet-
prédicat, se trouva alors, on l'imagine aisément, renforcer l'affirmation
précédente et la position philosophique géné

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