Le meurtre des femmes chez le théologien et chez le pornographe - article ; n°1 ; vol.26, pg 43-53
12 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Le meurtre des femmes chez le théologien et chez le pornographe - article ; n°1 ; vol.26, pg 43-53

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
12 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Les Cahiers du GRIF - Année 1983 - Volume 26 - Numéro 1 - Pages 43-53
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 45
Langue Français

Extrait

Jeanne Lapointe
Le meurtre des femmes chez le théologien et chez le
pornographe
In: Les Cahiers du GRIF, N. 26, 1983. Jouir. pp. 43-53.
Citer ce document / Cite this document :
Lapointe Jeanne. Le meurtre des femmes chez le théologien et chez le pornographe. In: Les Cahiers du GRIF, N. 26, 1983.
Jouir. pp. 43-53.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/grif_0770-6081_1983_num_26_1_1368Le meurtre des femmes
chez le théologien et le pornographe
Jeanne Lapointe
«Le corps de la femme... lieu privilégié de l'attentat»
Robbe-Grillet
«La pornographie est un meurtre» Mara, Journal d'une
femme soumise
Une même rage de destruction de l'être féminin anime les Anne-Marie Dardigna, Les châ
teaux d'Eros ou l'infortune du textes dont nous parlerons ici. Une même stratégie: dis
sexe des femmes, Maspero, 1980, sociation manichéenne ou schizophrénique de la femme
p. 21, note S (Robbe-Grillet, interentre corps et esprit, réduction de la femme à sa fonction view dans Le Monde).
dans un événement corporel. Donc meurtre psychique de
la femme. Et souvent ensuite mort physique. Laquelle Mara, postface de Michèle
Causse, Journal d'une femme apparaît désirable à l'extrémité de l'abjection.
soumise, Textes-Flammarion,
1979.
Sur quelles notions au sujet de la femme s'est fondée Le soupçon
l'Inquisition, qui en fit mourir sur le bûcher non pas des
centaines ou des milliers, mais sans doute des millions en
Europe (Empire germanique, France, Italie, Espagne,
Pays-Bas) un seul évêque écrit qu'il en a condamné
mille en une seule fois . La persécution des femmes
dura trois siècles. Le Malleus malefïcarum (marteau des Henry Institoris et Jacques Spren-
ger, Le marteau des sorcières, trmaléficières) Marteau des sorcières est le guide théorique
aduction et présentation par et pratique qu'utilisaient les moines dominicains, memb Amand Davet, Pion, 197S.
res des tribunaux itinérants établis par le pape Grégoire
IX en 1431. Le gros volume de 600 pages indique les pro Les chiffres entre parenthèse ren
voient aux pages de ce livre. cédures à suivre pour découvrir, interroger, torturer et
condamner au bûcher les femmes sorcières. En arrivant Michelet, La sorcière. Gamier
dans la ville où il doit siéger, le tribunal oblige, par pro Flammarion, 1966, Livre
clamation, tous les citoyens à dévoiler, sous peine deuxième, chapitre H: «Le mar
teau des sorcières», pp. 151-161. d'excommunication, «s'ils ont su, vu et entendu que telle
personne est hérétique, sorcière, manifeste ou suspecte,
spécialement si elle pratique des choses qui peuvent tour
ner au détriment des hommes, des bêtes et des fruits de la
terre». Alors commence la sombre nuit du soupçon
généralisé, de la délation où vont se déchaîner toutes les
inimitiés et les angoisses. Les déboires les plus intimes,
les moindres défaillances sexuelles et même le sentiment
amoureux obligent à s'interroger sur toute femme du
voisinage capable de jeter des sorts. Car une peut
être sorcière même sans le savoir; elle a pu coucher avec
le diable (un incube, démon masculin) déguisé sous les
apparences de son propre mari. 43 maléfices L'énumération des maléfices, par le théologien inquisiLes
teur, peut inspirer aux hommes la crainte non seulement
de toutes les femmes mais de la sexualité en général.
«Les femmes sorcières sont plus nombreuses que les
hommes. Mais les hommes eux sont davantage ensorcelés
(459). Dieu permet le maléfice sur l'acte vénérien selon
cinq catégories: 1) le démon peut empêcher le corps de la
femme et le corps de l'homme de s'approcher l'un de
l'autre; 2) un deuxième moyen, c'est quand le diable
brûle quelqu'un d'amour pour une femme...; 3) un tro
isième moyen: quand il perturbe l'appréciation... au
point de rendre une personne insupportable à une autre;
car il peut influencer l'imagination; 4) le quatrième
mode: il peut réprimer la vigueur du membre nécessaire à
la procréation; 5) cinquième mode: il empêche le flux de
la semence, comme en obturant le conduit séminal... Ail
leurs, parmi les maléfices attribuables aux sorcières:
(elles peuvent) susciter chez un homme un amour insensé
pour une femme ou chez une femme pour un homme...
(Il y a) ceux que l'on dit ensorcelés au point de ne pas
pouvoir user de leur puissance génitale à l'égard de leur
femme-ou vice-versa, de la «femelle» à de son
homme».
C'est également aux sorcières que sont attribuables la
maladie et même la mort et enfin la folie; «elles peuvent
causer les maladies et la mort des animaux soit par le tou
cher soit d'un seul regard». Elles peuvent causer l'orage
et la grêle.
La passion amoureuse est dénoncée, sous le nom
d'« Amour fou», et même l'amour conjugal. «U est
adultère envers sa propre femme celui qui l'aime trop;
ceux qui aiment sont plus souvent ensorcelés en ce
domaine». Les sages-femmes sont parmi les sorcières les
plus dangereuses parce qu'elles peuvent causer des avor
tements ou bien consacrer en secret le nouveau-né à
Satan, prince des démons.
Un montage de citations résumera ici les longues pages Image
de rationalisations sur lesquelles se fondent le mépris, la théologienne
haine et la peur des femmes qui ont entraîné pour celles-
de la femme ci trois siècles d'épouvante, de torture et de mort.
«Ce genre de perfidie se trouve davantage chez le sexe
faible» (198); car elles «ne savent pas tenir le juste 44 milieu en fait de bonté et de malice»... «elles passent les
bornes». Selon l'Ecclésiaste, toute malice n'est rien
auprès de la malice d'une femme. Selon Chrysostome,
puis Cicéron: la femme est la tentation naturelle, le mal
nécessaire. Une qui pense seule pense à mal. Une
femme qui pleure est un mensonge et une ruse. Selon
l'Ecclésiaste: la femme est plus amère que la mort, et
même la femme bonne est soumise à la passion de la
chair».
«Les femmes sont crédules, impressionnables, bavardes
et faibles, déficientes dans leurs forces d'âme et de
corps. Elles sont presque comme des enfants. La raison
de cela, c'est que la femme est plus charnelle que
l'homme; elle a moins de foi; plus vite aussi elle abjure la
foi, ce qui est fondamental chez les sorcières. Par le
défaut d'intelligence, elles renient plus facilement la foi
et par leurs affections et passions désordonnées, elles
infligent diverses vengeances. Il n'est pas étonnant qu'il
existe tant de sorcières de ce sexe. En outre, c'est un
défaut naturel chez elles de ne pas vouloir être
gouvernées (205). Il faut redouter la domination des
femmes (205). A propos du désir charnel des femmes,
disons avec Coton d'Utique:
«Si le monde pouvait être sans femmes, nous vivrions
comme des dieux. La femme, son aspect est beau,
son contact fétide, sa compagnie mortelle. Menteuse
par nature, elle l'est dans son langage; elle est un ennemi
charmant et dissimulé. Toutes ces choses de la sorcelle
rie proviennent de la passion charnelle qui est dans les
femmes insatiable. Pour satisfaire leur passion, elles
folâtrent avec les démons... en conséquence on appelle
cette hérésie non des sorciers mais des sorcières. Béni
soit le Très Haut qui préserve le sexe mâle d'un pareil & montage M fait de dtations
fléau ». tirées des pages 198 à 209.
On voit déjà le fantasme mâle et la peur de la castration
réduire ici la femme à sa relation au corps masculin, à la
passion charnelle, en définitive à la sexualité toujours
dangereuse. La femme est peu intelligente. Et l'histoire
ne nous a légué aucune parole de toutes ces femmes
condamnées et brûlées sans appel. Sauf la parole chaste
et rebelle de Jeanne d'Arc, simple enjeu politique entre la
France et l'Angleterre.
45 Sautons trois ou quatre siècles. En 1937, à l'Université Image
Laval, se donnait un cours intitulé Philosophie des sexes. philosophienne
Au nom d'un dualisme matière/forme et de S. Thomas,
de la femme le professeur reprend la même association obsessionnelle
entre la femme et le corps. Au lieu d'être ax&#

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents