Le paiement des dîmes dans les États des croisés. - article ; n°1 ; vol.150, pg 71-83
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Description

Bibliothèque de l'école des chartes - Année 1992 - Volume 150 - Numéro 1 - Pages 71-83
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 7
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Richard
Le paiement des dîmes dans les États des croisés.
In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1992, tome 150, livraison 1. pp. 71-83.
Citer ce document / Cite this document :
Richard Jean. Le paiement des dîmes dans les États des croisés. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1992, tome 150,
livraison 1. pp. 71-83.
doi : 10.3406/bec.1992.450644
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1992_num_150_1_450644LE PAIEMENT DES DIMES
DANS LES ÉTATS DES CROISÉS *
par
Jean RICHARD
La question du paiement des dîmes, et en particulier celle de l'assujetti
ssement à ce paiement des non-Latins, a été envisagée tant dans le cadre
du royaume latin de Jérusalem et des autres principautés franques de Syrie
et de Palestine que dans celui du royaume de Chypre et de l'empire de
Constantinople1. Elle n'appelle pas partout une réponse identique, et elle
paraît demander un nouvel examen.
Au temps où les Croisés sont arrivés en Terre-Sainte, le mouvement de
« restitution des dîmes » battait son plein en Occident. L'Église, faisant remont
er l'origine de la levée de la dîme aux textes des Pères et aux décisions
des conciles des Ve et VIe siècles qui, s'appuyant sur des prescriptions de
la loi juive et des passages de l'Évangile, avaient affirmé que le dixième
des revenus des chrétiens devait être consacré à Dieu pour le remercier de
les faire jouir des biens de la terre, soutenait qu'elle était en droit de rece
voir cette redevance. Elle affirmait donc l'origine ecclésiastique de la dîme,
dont la généralisation remontait en tout état de cause au capitulaire de Heristal
(779) 2- lorsque des laïcs étaient en possession de sa levée, c'était donc la
conséquence d'usurpations, d'un accaparement de biens d'Église séculari-
* Le présent article reprend une communication présentée au Congrès international des
sciences historiques de Madrid (1990). Nous remercions M. Eloy Benito Ruano, président
du Comité espagnol des sciences historiques, qui a bien voulu en autoriser la publication
dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes.
1. Bernard Hamilton, The Latin Church in the crusader states, the secular Church,
London, 1980, p. 145-150; cf. aussi Emmanuel-Guillaume Rey, Les colonies franques de
Syrie aux XIIe et XIIIe siècles, Paris, 1883, p. 248, 270, et Gaston Dodu, Histoire des institu
tions monarchiques dans le royaume latin de Jérusalem, 1099-1291, Paris, 1894, p. 316.
Jean Richard, Documents chypriotes des Archives du Vatican, XIVe et XV siècles, Paris, 1962,
p. 62-63, et The establishment of the Latin Church in the Empire of Constantinople,
1204-1227, dans Latins and Greeks in the Eastern Mediterranean after 1204, London,
1989, p. 57.
2. Paul Viard, Histoire de la dîme ecclésiastique, principalement en France, jusqu'au décret
de Graden, Dijon, 1909 (le cas de la Palestine des Croisés est envisagé, p. 241-249).
Bibliothèque de l'École des chartes, t. 150, 1992. .
JEAN RICHARD 72
ses par la royauté pour fournir des bénéfices à ses fidèles. On sait que cer
tains auteurs ont mis cette théorie en doute, en suggérant que les Carolin
giens auraient affecté à l'Eglise un prélèvement qui, précédemment, était
une redevance agraire, ceci expliquant à leurs yeux comment cet accapare
ment de la dîme a pu être aussi étendu3. Il n'en reste pas moins que,
depuis les dernières années du Xe siècle, les ecclésiastiques ont réclamé avec
persévérance l'abandon des dîmes par ceux des laïcs qui les possédaient,
et que cet abandon, sans être jamais complet, faisait apparaître la dîme comme
un revenu essentiellement ecclésiastique.
Les plus anciens textes faisaient de la perception de la dîme un droit de
l'évêque, à qui il revenait d'en répartir le produit pour subvenir aux besoins
du culte et de ses desservants, secourir les pauvres et racheter les captifs.
Les textes carolingiens maintenaient le principe de la propriété épiscopale,
en précisant qu'une proportion fixée à l'avance devait être affectée à la
paroisse dans le cadre de laquelle s'effectuait la levée. Le Ken entre le cadre
paroissial et la dîme est encore plus nettement affirmé au temps de la « res
titution des dîmes » : les laïcs et souvent les évêques, en donnant des églises
paroissiales à des monastères ou à d'autres établissements religieux, leur
concèdent en même temps le revenu des dîmes, qui est une dépendance
de l'autel paroissial4.
En Orient, la situation était toute différente. Les Musulmans connaissaient
une dîme, celle dont les prescriptions coraniques imposaient le paiement
aux croyants pour les besoins de la communauté. La paysannerie, non-
musulmane dans son ensemble à l'origine, était chargée de redevances et
de taxes qui tendirent à se généraliser et que les Croisés maintinrent à leur
profit5; mais la dîme n'en faisait pas partie. Les chrétiens orientaux, aussi
bien dans l'empire byzantin que dans les territoires soumis à la domination
3. Guy de Neufbourg et Marguerite Gonon, Les dîmes en Forez, Mâcon, 1957 (Fondation
Georges Guichard, Chartes du Forez, t. XV).
4. La répartition des dîmes en quatre parts apparaît déjà au concile de Mâcon (588);
les capitulaires réservent une de ces parts à l'évêque. Ce schéma, généralement admis en
France (P. Viard, Histoire de la dîme), l'est aussi en Italie : Catherine E. Boyd, Tithes and
parishes in medieval Italy, New York, 1952. La Summa decretorum de Rufin distingue les
dîmes « prédiales », levées au profit de la paroisse où sont situées les terres soumises à la
dîme, et les dîmes « personnelles », payées à la paroisse où réside le contribuable et où
il reçoit les sacrements. Cf. Giles Constable, Monastic tithes from their origin to the twelfth
century, Cambridge, 1964.
5. Sur ces charges, cf. Claude Cahen, Le régime rural syrien au temps de la domination
franque, dans Bulletin de la Faculté des lettres de l'Université de Strasbourg, 1952 (reproduit
dans Turco-Byzantina et Oriens christianus, London, 1974, H), p. 299-302. La principale
est le kharàj, impôt proportionnel à la récolte. Le deimûs, défini dans des textes plus tardifs
(J. Sauvaget et R. Mantran, Règlements fiscaux ottomans : les provinces syriennes, Paris, 1951,
p. 5-7) comme ayant un montant fixe, est sans doute une imposition introduite lors de la
reconquête byzantine de la Syrie. LA DÎME DANS LES ÉTATS DES CROISÉS 73
musulmane, assuraient l'entretien de leur clergé et de leurs églises par des
versements en principe volontaires, en fait devenus coutumiers. Une no-
velle d'Isaac Comnène (1057) avait même réparti les foyers en groupes qui
devaient acquitter collectivement au profit de l'Eglise une taxe dont le mont
ant était fixé, et qui n'était pas proportionnelle à la récolte 6.
L'occupation de terres, les unes précédemment byzantines, les autres sous
domination musulmane, par les Croisés, s'était accompagnée de la mise en
place de cadres ecclésiastiques, c'est-à-dire avant tout de diocèses repro
duisant les anciens diocèses d'avant la conquête musulmane et confiés à
des évêques qui, le plus souvent, recevaient chacun la charge de plusieurs
de ces diocèses; le nombre de ces évêchés alla d'ailleurs en s' accroissant7.
Ces évêchés de rite latin, qui se superposaient à la carte des évêchés orien
taux sans abolir l'existence de ceux-ci (même si les Latins prirent posses
sion de certaines des « grandes églises » précédemment grecques, notam
ment dans la principauté d'Antioche), reçurent une dotation conçue sur le
modèle occidental, constituée d'un certain nombre de villages et de reve
nus prélevés sur l'activité économique. Mais les évêques revendiquèrent dès
l'origine leur droit à lever les dîmes, ce droit dont ils jouissaient de façon
générale en Occident.
On le constate dès les premières années de l'établissement des Croisés.
Lorsque le patriarche Arnoul, sans doute vers 1112, donna aux chanoines
latins du Saint-Sépulcre8 leur organisat

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