Les déboires de la candidature officielle dans un canton d Ille-et-Vilaine sous le Second Empire - article ; n°2 ; vol.77, pg 301-341
42 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Les déboires de la candidature officielle dans un canton d'Ille-et-Vilaine sous le Second Empire - article ; n°2 ; vol.77, pg 301-341

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
42 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Annales de Bretagne - Année 1970 - Volume 77 - Numéro 2 - Pages 301-341
41 pages

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Henri Goallou
Les déboires de la candidature officielle dans un canton d'Ille-et-
Vilaine sous le Second Empire
In: Annales de Bretagne. Tome 77, numéro 2-3, 1970. pp. 301-341.
Citer ce document / Cite this document :
Goallou Henri. Les déboires de la candidature officielle dans un canton d'Ille-et-Vilaine sous le Second Empire. In: Annales de
Bretagne. Tome 77, numéro 2-3, 1970. pp. 301-341.
doi : 10.3406/abpo.1970.2539
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1970_num_77_2_2539HENRI GOALLOU
LES DÉBOIRES
DE LA CANDIDATURE OFFICIELLE
DANS UN CANTON D'ILLE-ET- VILAINE
SOUS LE SECOND EMPIRE .
Sous le second Empire, les conseillers généraux d'Ille-
et-Vilaine sont presque tous des candidats officiels. Parmi
les rares exceptions, Mathurin Guibert de 1852 à 1855, puis
son fils et homonyme à partir de 1856, ont représenté le
canton de Châteauneuf, élus grâce à leur puissance écono
mique et à l'appui du clergé, malgré les efforts et l'action
parfois brutale des préfets.
LE CANTON DE CHATEAUNEUF
D'ILLE-ET-VILAINE
Le canton de Châteauneuf, dans l'arrondissement de
Saint-Malo, un peu au sud de Saint-Servan, longe sur plu
sieurs kilomètres l'estuaire de la Rance (1). La densité
de population est forte (2), l'habitat généralement dis
persé (3). Le corps électoral (4) comprend très peu de rent
iers, de commerçants, de fonctionnaires, 7 % de marins
mais qui résident presque tous à La Ville-ès-Nonais et à
Saint-Suliac où ils constituent 41 et 46 % des électeurs,
(1) II comprend huit communes : Châteauneuf, Lillemer, Miniac-
Morvan, Plerguer, Saint-Guinoux, Saint-Père, Saint-Suliac et la Ville-
ès-Nonais, ces deux dernières ayant une longue façade sur l'estuaire
de la Rance.
(2) En 1851, la population est de 12 544 habitants sur un territoire
dt> 103 km2. La densité kilométrique est de 122 et assez régulière ; Pler-
guer seule est un peu au-dessous de 100.
(3) II n'y a que les 810 habitants de Châteauneuf à être très agglo
mérés (près de 90 %) ; la dispersion est extrême dans les deux grosses
communes : 90 % à Miniac-Morvan (3 270 habitants) et 94 % à Plerguer
(2 965 habitants).
(4) 3 251 inscrits en 1852, 3 188 en 1864. 302 LES DÉBOIRES DE LA CANDIDATURE
20 % d'artisans et d'ouvriers dont plus de la moitié tra
vaille dans le bâtiment ; le reste, les deux tiers, les gens
de la terre, les propriétaires exploitants qui sont les plus
nombreux, les fermiers, les journaliers et les domesti
ques (5).
Sur ces électeurs de condition modeste, qui tous se disent
catholiques, qui ont voté massivement pour l'Empire aux
plébiscites et aux élections législatives, la famille Guibert
exerce une profonde influence.
St-Malo
* St-Servan
*&t-Sulia<
Ville-ès-Nonais
Plerguer
Tronchet
Côtes-du-Nord
LE CANTON DE CHATEAUNEUF
D'ILLE-ET-VILAINE
(5) En 1851, 1 295 propriétaires exploitants, 261 fermiers, 204 fer
miers propriétaires et seulement 5 métayers. Il y a 151 journaliers pro
priétaires, 832 journaliers et 359 domestiques de ferme ; beaucoup de
ces deux dernières catégories n'ont pas atteint leur majorité et donc ne
sont pas électeurs. DÉBOIRES DE LA CANDIDATURE 303 LES
La puissance de la famille Guibert
Sous le Second Empire, la famille Guibert est l'une des
plus riches et des plus influentes de l'arrondissement de
Saint-Malo ; elle occupe plus de 800 marins pour la grande
pêche de Terre-Neuve et le commerce, un important per
sonnel aux constructions navales et à la préparation de la
morue. Très nombreuse et très unie, elle reconnaît un chef,
le fils aîné de la branche aînée, toujours prénommé Mathu-
rin, qui dirige la maison et habite Saint-Servan. Dans cette
ville, elle a de l'influence, mais plutôt par ses « relations
commerciales .» que par « affection » (6). Elle est puissante
dans le canton de Châteauneuf et par son importance éc
onomique et par l'attachement que lui porte la population.
L'importance économique vient des propriétés et surtout de
l'activité maritime. La valeur des biens immobiliers, qui
.sont particulièrement étendus dans les communes de
Miniac-Morvan, de Saint-Père et de la Ville-ès-Nonais, est
estimée entre 1 200 000 et 1 500 000 F et donne à la famille
« le prestige, toujours si puissant aux yeux des habitants
de la campagne, d'une grande puissance territoriale » (7).
D'autre part, presque tous les marins et les ouvriers habi
tent le canton ; les paysans vendent leurs produits pour le
ravitaillement de la flotte ; une commune même, celle de la
Ville-ès-Nonais, dépend à peu près entièrement des Guibert.
Cette famille a pu gagner ainsi la population « par une
multitude de services et de liens de toute nature » (8).
Du point de vue politique, les Guibert sont légitimistes.
De 1824 à 1830, Mathurin Guibert père a été maire de
Saint-Servan ; il a démissionné à l'avènement de Louis-
Philippe ; toutefois son attachement aux Bourbons ne l'a
pas empêché de se rapprocher de la Monarchie de Juillet
par désir de redevenir maire, puis de s'accommoder fort
bien de l'Empire ; c'est avant tout un homme d'ordre ;
(6) 3 Mf 3. — Rapport du sous-préfet de Saint-Malo au préfet,
6 avril 1833.
(7) 3 Mf 10. — Lettre du inaire de Saint-Servan, Gouazon, au sous-
préfet, 20 mars 1856.
(8) 3 Mf 10. — Lettre de Houïtte de la Chesnais au préfet, 30 mars
1856 LES DÉBOIRES DE LA CANDIDATURE 304
comme l'écrit un sous-préfet de Saint-Malo, « ne peut pas
être tenu pour ennemi du gouvernement ; son opinion, c'est
surtout l'intérêt et la frayeur ; il s'est pressé contre le
pouvoir tutélaire qui pouvait sauver son avoir, a prêté et
prêtera de nouveau serment sans hésitation et même sans
arrière-pensée » (9). Le fils, de son côté, se défend d'être
opposant ; dans une lettre de 1856, il affirme n'être pas
« un homme hostile au gouvernement » (10). Trente-deux
ans plus tard, à sa mort, le journal malouin royaliste Le
Salut écrit : « Homme politique, il fut toute sa vie dévoué
aux idées d'ordre et de conservation sociale. » (11)
La famille Guibert est catholique (12), aide les prêtres,
donne pour leurs œuvres, embellit l'église de Miniac-
Morvan, construit en partie celle de la Ville-ès-Nonais. Le
clergé lui en est profondément reconnaissant (13) et appuie
énergiquement les candidats en distribuant leurs bulletins,
en faisant de la propagande en leur faveur dans l'intimité
des conversations et même en intervenant pour eux officie
llement en chaire. Le curé de Miniac-Morvan reconnaît avoir
dit au prône au début de 1856 : « Vous voyez, mes frères,
les dérangements que nous avons faits à la chapelle Saint-
Jean ; c'est pour y mettre un autel magnifique que M. Gui
bert a bien voulu nous donner. Je suis heureux de vous
faire connaître ses bienfaits ; c'est lui encore qui nous a
donné la pierre pour parer notre église. Si j'ai été assez
heureux pour pouvoir assister dans cette année un grand
nombre de malheureux, c'est à la générosité de M. Guibert
que vous devez ces secours. Soyez donc reconnaissants et
priez pour lui. Nous lui avons donné nos voix pour nous
(9) 3 Mf 3. — Rapport du sous-préfet au préfet.. 26 juillet 1832.
(10) 3 Mf 10. — Lettre de Guibert à son cousin de Matty de Latour,
22 mars 1856.
(11) Le Salut, 17e année, n° 2186, 12 et 13 juin 1888.
(12) Le 1T n° 12 et 13 écrit de Mathu-
rin Guibert fils : « Chrétien pratiquant et convaincu, M. Mathurin Gui
bert fut toujours pour son entourage un modèle. Vivant au contact des
marins, il aimait comme eux se reposer en Dieu, le maître des des
tinées. »
(13) Le Salut, 17e année, n° 2187, samedi 16 et dimanche 17 juin
1888 : « Plus de quarante prêtres précédaient le cercueil » de Mathurin
Guibert fils. DÉBOIRES DE LA CANDIDATURE 305^ LES
représenter au conseil général. Nous l'avons perdu, mais on
espère que le Gouvernement nous présentera son fils pour
lui succéder ; nous serons heureux de lui donner nos voix
pour lui témoigner notre reconnaissance. » (14)
Mais la puissance d'

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents