Les déplacements des Parisiens dans la ville aux XVIIème et XVIIIème siècles. Un essai de problématique - article ; n°2 ; vol.2, pg 205-253
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Description

Histoire, économie et société - Année 1983 - Volume 2 - Numéro 2 - Pages 205-253
49 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Annik Pardailhe-Galabrun
Les déplacements des Parisiens dans la ville aux XVIIème et
XVIIIème siècles. Un essai de problématique
In: Histoire, économie et société. 1983, 2e année, n°2. pp. 205-253.
Citer ce document / Cite this document :
Pardailhe-Galabrun Annik. Les déplacements des Parisiens dans la ville aux XVIIème et XVIIIème siècles. Un essai de
problématique. In: Histoire, économie et société. 1983, 2e année, n°2. pp. 205-253.
doi : 10.3406/hes.1983.1324
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1983_num_2_2_1324DÉPLACEMENTS DES PARISIENS LES
DANS LA VILLE
AUX XVIIème et XVIIIème SIECLES
Un essai de problématique
par Annik PARDAILHE-GALABRUN
C'est dans le cadre d'une enquête dirigée par Pierre Chaunu, sur le foyer parisien
aux XVIIème et XVIIIème siècles, à travers les inventaires après décès, que s'est posée
la question du mouvement des habitants dans l'espace de leur cité. Après avoir cheminé
sur les pas des notaires dans les intérieurs des maisons, pour rentrer dans l'intimité du
vécu quotidien de la population, notre souhait est de suivre maintenant ces Parisiens
dans leurs déplacements dans Paris : une fois franchie la porte de leur logis, ils parcourent
les rues, les places publiques, les lieux de promenades de la ville et des environs soit en
groupe, soit individuellement, à pied pour la majorité, ou encore au moyen d'une mont
ure ou d'un véhicule. Vivant pour une grande partie d'entre eux entassés dans des log
ements exigus et sombres, composés souvent d'une ou deux pièces, mal chauffés, dépour
vus d'éléments de confort (1), les Parisiens de cette époque ne dissocient pas, semble-t-il,
comme nous le faisons de nos jours, le dedans et le dehors. L'espace de la rue tient une
place importante dans leur vie quotidienne, malgré les aléas du climat. Certes, la rue est
un élément vital, un refuge pour les catégories sociales les plus pauvres de la population
urbaine (2). Mais la rue est avant tout «un espace entre les maisons pour servir de pas
sage au public», selon la définition de Furetière (3), et c'est en tant que voie de commun
ication qu'elle retiendra notre attention dans ces pages.
Les écrivains, les mémorialistes, les voyageurs des XVIIème et XVIIIème siècles dé
crivent les rues de Paris encombrées d'une multitude de piétons, de chevaux, de carrosses.
Le visiteur est véritablement agressé par le tumulte, l'agitation, la saleté de la rue (4).
Les embarras de Paris sont devenus un thème littéraire. Le sujet développé par Boileau,
en 1660, inspira encore un génois, Jean-Paul Marana, auteur présumé de la Lettre d'un
1 . Sur 850 foyers dont les inventaires ont été dépouillés par les étudiants en maîtrise de M. Chaunu,
pour la période 1 640-1730, nous avons calculé qu'il y avait 34% de logements à pièce unique. Pour la
période 1730-1770, nous trouvons pour 776 foyers étudiés 24% de Parisiens vivant dans une pièce
unique.
2. Ces aspects de la rue sont bien mis en valeur dans A. Farge, Vivre dans la rue au XVIIIème siècle ,
Paris, 1979, p. 20.
3. Furetière, Dictionnaire universel, Paris, 1690, 3 vol., t. 3, p. 453.
4. A. Farge, op. cit., p. 17. 206 Annik PARDAILHÊ-GALABRUN
Sicilien à un de ses amis, de 1692, ainsi que Montesquieu dans les Lettres Persanes (5).
Louis-Sébastien Mercier reprend le même thème à la veille de la Révolution dans le
Tableau de Paris (6). Les témoignages des voyageurs, notamment des étrangers, en maj
orité anglais, qui visitèrent Paris, en grand nombre au cours du XVIIIème siècle, sont
intéressants à cet égard, parce qu'ils nous livrent un regard autre et concret sur la vie de
la capitale. Un savant anglais, le docteur Martin Lister, qui passa six mois à Paris, en
1698, est frappé par l'étroitesse des rues, et s'apitoie sur le sort des malheureux piétons :
«Les passants sont mal protégés contre la presse et la rapidité des voitures qui, lancées
au grand trot sur le pavé entre des maisons hautes et retentissantes, font une sorte de
musique qui ne saurait guère être agréable à d'autres oreilles qu'à celles des Parisiens»
(7). Un jardinier écossais, Thomas Blaikie, fait des remarques du même ordre, en 1775 :
«Paris, écrit-il dans son Diary, est très incommode, en particulier pour les gens du peu
ple qui vont à pied et risquent constamment leur vie vu le nombre de carrosses, char
rettes et l'étroitesse des rues, spécialement la nuit à l'approche de l'Opéra ou d'autres
endroits de divertissement. On ne peut traverser ces rues sans attendre parfois une heure,
et si vous êtes à pied, il vous faut courir pour sauver votre vie et vous mettre à l'abri à
chaque porte, de crainte d'être renversé par les roues des carrosses, car les cochers con
duisent extrêmement vite et semblent très habiles pour conduire et tourner dans ces
rues» (8). Un autre voyageur anglais, John Moore, déplore, à la date de 1781, le manque
de trottoir dans les rues à l'exception du Pont-Neuf, du Pont-Royal et des quais situés
entre ces deux ponts, où il y avait des sortes de banquettes. En conséquence de cette
incommodité, «les malheureux piétons, écrit ce voyageur, sont obligés de se traîner le
moins mal qu'il leur est possible, en se réfugiant derrière les piliers ou dans les boutiques
qui se présentent sur leur route, pour éviter d'être écrasés par les voitures qui, s'appro-
chant aussi près des maisons que les cochers le jugent à propos, les poussent devant eux
à peu près comme le chaume est chassé par le vent» (9).
Les voyageurs allemands mettent aussi en garde leurs compatriotes contre les incon
vénients de la circulation dans les rues de Paris. J. C. Nemeitz écrit en 1718 : «Outre la
grande foule de ceux qui nous rencontrent à pied et qui s'entrechoquent quelquefois, il
y a là aussi l'embarras d'un nombre indicible de carrosses et de fiacres qui roulent çà et
là jusqu'à la nuit serrée, et ces voitures ne vont pas doucement, elles vont le grand galop,
surtout si les chevaux sont bons. Il faut avoir l'œil de tous côtés. Pour éviter celui qui
est devant vous, vous êtes déjà pressé par celui qui vous suit, parce qu'on ne le peut pas
toujours entendre pour tout le tintamarre et le fracas des voitures» (10). Nemeitz recom-
5. Y. Bellenger, «La description de Paris dans la lettre d'un Sicilien datée de 1692», in La découv
erte de la France au XVIIème siècle, 9ème colloque de Marseille, 25-28 janvier 1979 ; J. P. Marana,
Lettre d'un Sicilien à un de ses amis, introduction et notes par l'abbé Valentin Dufour, Paris, 1883.
J. P. Marana est l'auteur de L'espion turc (1710) qui inspira les Lettres Persanes de Montesquieu, de
1721. Dans cet ouvrage le thème des embarras de Paris est évoqué dans la Lettre XXIV, t. 1, p. 165,
dans Oeuvres Complètes, Bibliothèque de la Pléiade.
6. L. S. Mercier, Le Tableau de Paris, Amsterdam, 12 vol., 1781-1788, t. 1, p. 70. On peut lire ce
passage aussi dans A. Farge, op. cit., p. 18.
7. M. Lister, Voyage de Lister à Paris en 1698, traduit pour la première fois, publié et annoté par
la Société des bibliophiles français, Paris, 1873, p. 24.
8. Thomas Blaikie, Diary of a Scotch Gardener at the French Court at the End of the XVIIIe
Century, Londres, 1931, p. 24.
9. Dr John Moore, Lettres d'un voyageur anglais sur la France, la Suisse et l'Allemagne, traduit de
l'anglais par Henri Rieu, Genève, 1781-58,4 vol., t. 1, p. 27.
10. J. C. Nemeitz, Séjour de Paris, c'est-à-dire Instructions fidèles pour les voyageurs de condition...
durant leur séjour à Paris, Leide, 1 727, p. 116. DES PARISIENS 207 DEPLACEMENTS
mande aussi aux voyageurs de se méfier des filous et des coupe-bourses toujours nom
breux dans les endroits envahis par la foule. Un autre voyageur allemand, J. J. Volkmann,
est frappé, en 1787, par la saleté des rues de Paris à tel point que les passants risquent
«d'être éclaboussés, poussés, et qu'il n'est pas recommandé d'y aller à pied bien habillé ;
c'est d'ailleurs contre le bon goût de se rendre à pied dans une maison de qualité» (11).
Les voyageurs italiens habitués au soleil, à pouvoir aseptisant, sont très sensibles
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