Les femmes et la législation matrimoniale anglaise de la restauration à la loi Hardwicke - article ; n°1 ; vol.12, pg 7-28
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XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles - Année 1981 - Volume 12 - Numéro 1 - Pages 7-28
22 pages

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Publié le 01 janvier 1981
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Langue Français
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Extrait

Paul Denizot
Les femmes et la législation matrimoniale anglaise de la
restauration à la loi Hardwicke
In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles. N°12, 1981. pp. 7-28.
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Denizot Paul. Les femmes et la législation matrimoniale anglaise de la restauration à la loi Hardwicke. In: XVII-XVIII. Bulletin de
la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles. N°12, 1981. pp. 7-28.
doi : 10.3406/xvii.1981.1873
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xvii_0291-3798_1981_num_12_1_1873LES FEMMES ET
LA LEGISLATION MATRIMONIALE ANGLAISE
DE LA RESTAURATION A LA LOI HARDWICKE
Etudier la législation matrimoniale anglaise de 1660 à
1753 tient presque de la gageure, tant elle est mal définie et
lacunaire. Certes, il existe des canons garantissant la légalité
du mariage - ceux fixés en 1604 sous le règne de Jacques 1er -,
mais leur application est on ne peut moins rigoureuse et il n'e
xiste pas de corpus de lois régissant avec précision les modalités
du mariage ainsi que les droits et devoirs respectifs de l'homme
et de la femme. Le laxisme de la législation en vigueur favorise
implicitement le concubinage et permet la bigamie; la célébration
du mariage à l'église passe souvent pour un luxe onéreux, et,
chez les pauvres, les unions se font et se défont d'une manière
anarchique.
Législation lacunaire, donc, sans décrets ni statuts, et
pourtant effective à en juger d'après le grand nombre d'affaires
soumises aux tribunaux civils et ecclésiastiques entre 1660 et
1753. Législation coutumière et jurisprudentielle aussi, dans
laquelle chaque cas individuel sert de référence et aide à juger
les litiges à venir. Or, cette multitude d'affaires pallient
peut-être la carence des lois, mais posent un important problème
de sélection et d'organisation. Répertoriées dans l'ouvrage du
comte de Halsbury intitulé The Laws of England , elles montrent
que la complexité de la législation matrimoniale anglaise n'a ces
sé de s'accroître à partir de la Restauration. Toutefois, en dépit
de leur nombre et de leur complexité croissante, elles ne permet
tent de se prononcer que sur certains éléments de cette législation - - 8
Car ce n'est qu'au cours du XIXe siècle que les notions de pro
priété séparée, de biens réservés et de droit au divorce, ont
fait l'objet de lois, de décrets ou de statuts publics, et plus
seulement de décisions privées. Témoin les Marriage Acts de 1823
et 1836, le Marriage and Registration Act de 1856, et les Divorce
Acts de 1857 et 1864.
Nous nous sommes donc attaché à étudier quelques aspects
majeurs de la législation matrimoniale anglaise d'avant 1753 :
contrats de mariage, droit à la propriété, disposition des biens,
responsabilités de la femme, séparation et divorce. Il faudrait
être juriste soi-même pour maîtriser parfaitement le jeu subtil
des usufruits, des rentes viagères, de la réversion, ou le rôle
des f ideicommissaires i Enfin, les affaires jugées entre 1660 et
1753 montrent que la législation matrimoniale ne s'intéresse à
la femme qu'en raison des biens meubles et immeubles qu'elle
transmet à son époux le jour de son mariage, et fait plus rarement
état de ses droits que de la dévolution ou de l'administration de
ses biens : ce qui donne à penser qu'après une période relativement
faste - le Moyen Age - la condition juridique de la femme s'est
mise à régresser et qu'à la Restauration, elle était devenue à
peine plus enviable que celle des femmes sous l'empire romain.
Un bref rappel historique permet de retracer l'évolution
de la législation du mariage depuis le Moyen Age jusqu'à l'Angle
terre réformée d'après 1534. Au Moyen Age, la partie laïque du
mariage résidait déjà dans le contrat conclu par les familles des
conjoints. Ce contrat consistait en un échange de biens auquel
venaient s'ajouter des clauses garantissant la protection de la
femme en cas de décès de son mari, d'abandon ou de divorce. Dans
les couches populaires, la cérémonie religieuse passait souvent
pour une formalité coûteuse et superfétatoire. Et ce n'est qu'au
XlIIe siècle que l'Eglise s'est prononcée clairement sur le carac
tère monogamique et indissoluble du mariage, en même temps qu'elle
condamnait l'inceste, la fornication et l'adultère.
S'il existait une législation du mariage avant 1753, on
ne peut dire pour autant qu'elle était complète et rigoureuse.
En effet, entre la Restauration et le vote de la loi Hardwicke,
les modalités du mariage sont encore variables et mal définies. - - 9
Le contrat écrit de mariage lie les intérêts des deux familles;
les épousailles, échange officiel de promesse orale, ont presque
autant d'importance que la cérémonie religieuse qui, en principe,
doit être célébrée dans un lieu du culte autorisé. Sans doute la
triple publication de bans fait-elle également partie du processus
légal, mais ces dispositions sont loin d'être toujours respectées.
Dans la pratique, tout échange de promesse verbale faite devant
témoins a valeur d'union légale et autorise la consommation du
mariage.
De cette tolérance résulte une certaine confusion en ma
tière de mariage. Bien qu'au cours du XVIIe siècle, l'église an
glicane soit devenue un peu plus rigoureuse, ce qui a eu pour
conséquence de faire admettre le caractère indispensable de la
cérémonie religieuse, cette transformation idéologique n'a pas
entraîné une réforme législative spectaculaire. Les hommes de loi
ont continué à reconnaître la validité du contrat per verba de
futuro, c'est-à-dire la promesse de mariage, son indissolubilité
ou sa dissolubilité dépendant alors de la consommation ou de la
non- con sommât ion du mariage, cette dernière hypothèse permettant
de rompre par consentement mutuel.
On notera encore que l'Eglise anglicane reconnaît la va
lidité d'un autre type de contrat : le contrat per verba de prae-
senti, qui a, lui aussi, valeur de mariage, et interdit de ce fait
toute union avec une autre personne. Ainsi, les tribunaux ecclé
siastiques déclarent-ils nul et adultère un mariage contracté après
une promesse per verba de praesenti ou per verba de futuro lorsque
cette dernière a été suivie de consommation. De plus, les canons
de 1604 précisent que le mariage religieux doit être célébré entre
8 heures du matin et midi, dans l'église du village d'un des con-
(2) joints, après que l'annonce en ait été faite à trois reprises
Ce qui revient à dire qu'avant la loi Hardwicke, l'Eglise condam
nait déjà les mariages célébrés de nuit, dans des auberges ou des
lieux impropres à la pratique du culte, ou dans des villages éloi
gnés du lieu d'habitation des conjoints. En outre, elle rappelait
aux pasteurs coupables de telles irrégularités qu'ils s'exposaient
à des poursuites, et interdisait aux mineurs de moins de 21 ans
de se marier sans l'autorisation de leurs parents ou de leur tuteur
Or, ces canons de 1604 ne sont pas dénués d'ambiguïté; - - 10
s'ils condamnent les mariages entachés d'irrégularité, ils en
reconnaissent néanmoins la validité et l'indissolubilité. En
d'autres termes, le manque de rigueur de leur application a pour
effet d'entretenir un "commerce" du mariage et d'enrichir les
pasteurs peu scrupuleux, l'ampleur maximale de ces infractions à
la législation du mariage étant atteinte à la fin du XVIIe et au
début du XVIIIe siècle. Il apparaît qu'à cette époque, certaines
églises de Londres étaient spécialisées dans les mariages "hâtifs" :
telle l'église St James où, selon L. Stone, plus de 40 000 mariages
furent célébrés entre 1664 et 1691, sans parler de ceux célébrés
à la sauvette dans Fleet Street. Moins onéreuses que la procédure
officielle, véritable aubaine pour les pauvres qui vivaient à
proximité de Londres, ces unions marginales ont connu un vif succ

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