Les politiques de la vieillesse - article ; n°1 ; vol.37, pg 105-123
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Les politiques de la vieillesse - article ; n°1 ; vol.37, pg 105-123

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Description

Communications - Année 1983 - Volume 37 - Numéro 1 - Pages 105-123
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Anne-Marie Guillemard
Les politiques de la vieillesse
In: Communications, 37, 1983. pp. 105-123.
Citer ce document / Cite this document :
Guillemard Anne-Marie. Les politiques de la vieillesse. In: Communications, 37, 1983. pp. 105-123.
doi : 10.3406/comm.1983.1555
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1983_num_37_1_1555Anne -Marie Guillemard
La production des politiques
de la vieillesse
Débats, enjeux, rapports sociaux sous-jacents
Durant les trois dernières décennies, la gestion de la vieillesse s'est, dans la
plupart des nations industrialisées, progressivement socialisée. Longtemps
considérée comme relevant de la sphère privée et familiale, ou exceptionnelle
ment du réseau traditionnel d'assistance à la pauvreté, la vieillesse a donné lieu
à la définition d'un ensemble d'orientations et d'interventions publiques
spécifiques.
Sans doute, l'essor de cette politique s'inscrit-il dans le considérable
développement qu'ont connu depuis la Seconde Guerre mondiale l'ensemble
des politiques sociales.
Dans le domaine de la vieillesse, comme dans les autres domaines sociaux,
cette extension des interventions sociales publiques a pu être analysée comme
une marche en avant inéluctable suscitée par un double mouvement : celui de
l'appareil de production engendrant de nouvelles demandes et tensions, celui,
appelé en retour, d'une intervention élargie de l'Etat. Cette évolution n'aurait
trouvé son terme que dans le resserrement des contraintes économiques qui.
dans le milieu des années 70. a ouvert une crise des systèmes collectifs de
protection sociale.
Une telle approche nous semble présenter une double limitation : d une part,
elle réduit le social à l'économique : d'autre part, elle s'appuie sur une
conception de type technocratique de 1 Etat, considéré comme un acteur
indépendant placé au-dessus de la société et doté d'une capacité constante
d'intervention. La recherche que nous menons depuis plusieurs années sur le
thème de la politique de la vieillesse est plus particulièrement axée sur l'étude
des îrjodes successifs de prise en charge de la vieillesse, en tant qu'ils
représentent un travail de définition de la dernière étape de vie et mettent en
œuvre un ensemble spécifique de pratiques politiques, ces deux niveaux devant
être Jus en fonction des rapports sociaux qui les construisent.
Dans cette perspective, les politiques sociales apparaissent autant comme
productrices de nouvelles catégories culturelles — dont la caractéristique est
d'ailleurs de se donner le plus souvent comme « naturelles » ou même
« naturalisées » parla pratique administrât i\e (ainsi la vieillesse, la maladie) —
que comme productrices d'ensembles particuliers de décisions politico-
administratives. A cet égard. 1 émergence d'un nom eau territoire de la politique
sociale, qui va prendre au début des années ()() le nom de « politique de la
vieillesse ». ne peut s'anahser indépendamment du nom eau découpage social
qu'elle suppose, qui laisse percevoir le groupe des personnes âgées comme un
10Ô Anne-Marie Guillemard
ensemble cohérent et autonome, autorisant la mise en œuvre d'un mode de
gestion spécifique.
Ce texte voudrait proposer, en s'appuyant sur un ensemble de recherches,
soit achevées, soit en cours ', un schéma interprétatif général de la formation et
de l'évolution de la politique française de la vieillesse. Il sera nourri d'une série
d'observations empiriques sur le développement de la politique de la vieillesse,
visant à mieux cerner les perspectives précises de recherche sur lesquelles ouvre
le cadre d'analyse proposé.
En premier lieu, nous tenterons de recomposer l'histoire des prises en charge
de la vieillesse, en distinguant des modes de fonctionnement, et en observant
leur dominance selon les périodes. En second lieu, nous nous attacherons à
déchiffrer les configurations singulières de rapports sociaux qui peuvent rendre
compte du passage d'un mode de fonctionnement de la gestion de la vieillesse à
un autre, et ébaucherons une grille de lecture de la formation de ces modes
successifs de prise en charge.
Les prises en charge de la vieillesse
comme figures successives d'un double débat.
La socialisation de la gestion de la vieillesse peut être recomposée à partir de
la prise en considération de trois éléments fondamentaux :
— les principaux enjeux autour desquels elle s'est développée ;
— les systèmes d'acteurs en conflit autour de ces enjeux ;
— les relations polémiques qu'entretiennent entre eux les débats ainsi
reconstruits.
La reconstruction que nous ébaucherons des principaux enjeux et acteurs
autour de la question de la vieillesse se fonde sur une analyse, selon ces trois
axes, d'un ensemble documentaire original constitué principalement :
1 ) du dépouillement des articles du journal le Monde, de 1946 à aujourd'hui,
traitant de la vieillesse ou de la retraite ;
2) d'une analyse sur la même période des principaux organes de la presse
syndicale ouvrière ;
3) de la consultation sur la même période des principaux débats ayant eu
lieu à l'Assemblée nationale et au Conseil économique et social sur ces
questions.
L'ensemble de ce traitement documentaire n'est pas encore achevé. Il a
été complété par de nombreux entretiens auprès d'acteurs et des observations
directes (participation aux commissions du commissariat au Plan en particul
ier).
Deux enjeux majeurs, deux systèmes d'acteurs.
En l'état actuel de la recherche, les débats sur la vieillesse nous semblent
tourner autour de deux enjeux majeurs. La fixation des moyens d'existence des
travailleurs vieillissants représente le premier enjeu. 11 est au centre du débat
sur les retraites et l'âge de la retraite qui, commencé dès le XIXe siècle, se
106 La production des politiques de la vieillesse
prolonge jusqu'à aujourd'hui où il prend, en particulier, la forme de négociat
ions sur la préretraite.
Sans entrer dans les discussions sur la genèse des systèmes de retraite et la
constitution de la Sécurité sociale, on peut dire que ces politiques reflètent les
rapports sociaux qui se sont noués entre le Capital et le Travail ou, plus
précisément, entre certaines fractions de ces deux forces 2.
Les acteurs en lutte autour de cet enjeu sont principalement aujourd'hui,
avec l'institutionalisation des conflits de travail, les syndicats et le patronat,
l'État ne faisant le plus souvent que sanctionner par la loi le résultat des
négociations.
Le second enjeu concerne, non plus le niveau de vie, mais le mode de vie de la
population âgée et son niveau d'insertion sociale. Il est apparu, pour l'essentiel,
au début des années soixante. L'instauration d'un tel type de débat présuppos
ait en effet que la vieillesse renvoie à une certaine identité de condition, qu'elle
soit identifiable pour devenir la cible d'une intervention publique spécifique.
Or, c'est justement la diffusion des retraites qui a été l'opérateur d'un
nouveau découpage des âges de la vie. En redéfinissant les limites et le contenu
de la dernière étape, les retraites ont conféré à la vieillesse une dimension
homogène — une situation commune d'inactivité pensionnée — alors qu'elle
avait auparavant les contours extrêmement contrastés du patrimoine familial
détenu 3.
Les principaux acteurs regroupés autour du deuxième enjeu peuvent être
définis comme étant les représentants de différents segments de l'État dans
leurs relations avec certains groupes modernisateurs, et les populations qu'ils
gèrent, ou ceux qui parlent en leur nom. Ainsi, l'énoncé et la mise en œuvre
d'une politique publique ambitieuse d'équipements et de services coordonnés,
destinés au maintien de l'insertion sociale des personnes âgées se sont-ils
développés principalement à l'initiative de l'État, et à la faveur d'un compromis
instable entre : d'une part, un groupe d'innovateurs composé essentiellement de
hauts fonctionnaires associés à quelques universitaires, membres d'associations
privées et responsables d'institutions de retraites complémentai

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