Les premiers voyages portugais à Pasai et à Pegou (1512-1520) - article ; n°1 ; vol.18, pg 127-157
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Les premiers voyages portugais à Pasai et à Pegou (1512-1520) - article ; n°1 ; vol.18, pg 127-157

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Description

Archipel - Année 1979 - Volume 18 - Numéro 1 - Pages 127-157
31 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Geneviève Bouchon
Les premiers voyages portugais à Pasai et à Pegou (1512-
1520)
In: Archipel. Volume 18, 1979. pp. 127-157.
Citer ce document / Cite this document :
Bouchon Geneviève. Les premiers voyages portugais à Pasai et à Pegou (1512-1520). In: Archipel. Volume 18, 1979. pp. 127-
157.
doi : 10.3406/arch.1979.1506
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1979_num_18_1_1506127
LES PREMIERS VOYAGES PORTUGAIS A PASAI ET A
PEGOU (1512-1520)
par Geneviève BOUCHON
Un ouvrage édité à Lisbonne il y a une dizaine d'années a récemment
attiré l'attention des histor ens des pavs riverains du Golfe du Bengal
e (1). Il s'agit de la publication des livres de comptes d'un agent
portugais, qui était allé par deux fois à Sumatra et à Pégou à bord
d'une jonque malaise (1512-1514). Ces pièces d'archives ne complètent
pas seulement la relation bien connue que Tome Pires a faite de ces
régions : elles donnent tout leur sens aux informations éparses dans la
correspondance de l'époque et les récits des chroniqueurs. Les fragments
d'un troisième livre de comptes dont nous avons compulsé le manuscrit
— celui-là de 1519 (2) — ajoute encore à la connaissance de Pasai et de
Pégou et marque l'évolution des réactions locales à l'égard de l'expan
sion portugaise.
(!) L.F. Thomaz, De Malaca a Pegu, viagens dé um feitor português (1512-1515),
Lisbonne, 1966, Cf. dans Archipel, 9 (1975) le compte rendu de P.- Y. Manguin,
p. 205-209, et G. Bouchon, Une route maritime du Golfe du Bengale au début
du XV le siècle, dans Mare Luso-indicum, 3 (1976), p. 194-198.
(2) TdT, Nûcleo Antigo n°807. Alors que la présente étude était en cours de rédact
ion, ce texte a été publié par les soins de M.L F« Thomaz accompagné d'une
étude bien documentée sur l'activité diplomatique et militaire d'Antonio Correia
et de tableaux récapitulatifs (A viagem de Antonio Correia a Pegu em 1519
Lisbonne, 1976). 128
Nos trois registres témoignent que chacun de ces voyages fut
organisé dans un but bien particulier. Les expéditions de 1512 et de
1514, effectuées à bord de jonques autochtones, avaient un caractère
commercial tandis que celle de 1519 fut accomplie par un vaisseau
portugais à des fins diplomatiques. Les deux premières fournissent des
renseignements très précis sur Pégou et Martaban, la troisième permet
de situer dans le temps l'anarchique succession des derniers sultans de
Pasai. En fait, les trois documents se complètent, chacun apportant sa
propre contribution à la connaissance de l'histoire politique, des
échanges commerciaux, des techniques et des aspects quotidiens de la
vie sociale.
Un volume serait nécessaire à l'étude exhaustive de ces trois
voyages, bien que M. Luis Filipe Thomaz en ait déjà dégagé les princ
ipaux éléments économiques et financiers. Mais devant la richesse
exceptionnelle de tels documents, et en dépit de la sélection qu'elle
impose, il nous a paru utile de classer l'ensemble de leurs données, de
les rapprocher d'autres sources encore souvent inédites, d'inscrire enfin
toutes ces informations dans leur contexte historique afin de les rendre
accessibles à ceux qui se consacrent à l'étude de l'Océan Indien oriental.
Introduction
"Çamatarra" et Pégou sont tous deux mentionnés dans le rapport
rédigé en 1499 par l'informateur de Vasco da Gama (3). Ces deux
contrées ne devaient plus cesser de figurer dans les projets de "décou
verte" que les Portugais se proposaient de réaliser. Les premières
descriptions de Sumatra, dues aux Italiens Nicolo de'Conti et Girolamo
da Santo Stefano avaient été traduites et imprimées à Lisbonne en
1502 (4). Cependant, empêchés par les difficultés que les Musulmans
leur suscitaient au Malabar, les Portugais durent attendre dix ans avant
de toucher les rivages de l'île.
Leur intérêt avait été soutenu et attisé par les récits de leurs
informateurs indiens. Si l'on connaissait mal l'arrière-pays de Sumatra,
que l'on disait pourtant regorger d'or, les ports qui s'ouvraient à
l'embouchure des rivières de la côte septentrionale accueillaient tous
les marchands de l'Océan Indien. Aceh, Pidir, Pirada, Pasai — que l'on
(3) F. Hiimmerich, Estudo critico sobre o roteiro da primeîra viagem de Vasco da
Gama, 1497-1499, Porto, 1945, p. 234-235.
(4) Marco Paulo, ho lyvro de Nycolao veneto e trallado da carta de hûu genoves
das ditas terras, imprimado per Valentim Fernandas alemâao, Lisbonne, 1502. 129
appelait aussi Sumatra — étaient animés par une population de religion
islamique dont la fortune était fondée sur l'exportation du poivre
introduit, semble-t-il, en même temps que l'islam (3). Ce poivre était
plus long, plus creux et moins piquant que celui du Malabar, mais
cependant très apprécié sur les marchés chinois. Pasai, alors en pleine
expansion, en vendait huit à dix mille bàhar chaque année, ainsi qua
du brai, du benjoin, de la soie brute, du camphre et du soufre (6). La cité
vent" était au qui carrefour reliait Malaka de trois à Pégou routes et maritimes au Bengale : celle ; celle des de "pays la Chine sous où lé
s'engageaient les jonques de poivre en transitant par Malaka ; celle de
la Mer Rouge enfin, qui traversait l'Océan en droiture à travers les atolls
des Maldives ou remontait par Ceylan, les échelles du Kerala et celles
du Gujarat.
Les Bengalis envoyaient à Pasai quatre ou cinq vaisseaux chaque
année. Les Pégouans y troquaient le riz contre le poivre et négociaient
aussi les rubis et le musc de l'Arakan. D'autres jonques de riz venaient
de Java tandis que celles de Malaka apportaient les soieries et les
porcelaines de Chine. Les Gujaratis enfin, qui avaient la haute main sur
tous les trafics de la route en droiture, procuraient le cuivre et le
mercure d'Occident, l'eau de rose et les cuirs ouvragés du monde arabe,
les esclaves et les bonites des Maldives, et la gamme infinie de leurs
cotonnades exportées depuis Diu et Cambaye. Pasai commerçait aussi
avec Tenasserim, Calicut, Nagor, Fansur. Aussi, la ville était-elle peuplée
de nombreux agents étrangers. Outre une importante colonie de résidents
bengalis, on y rencontrait des Turcs, des Arabes, des Persans, des
Tamouls et des Malais (7), souvent au service des hommes d'affaires du
Gujarat.
Dès 1506, les Portugais connaissaient les rapports existant entre
Malaka, Sumatra et Pégou. Deux ans plus tard, ils s'inquiétaient de
l'activité des ports de Sumatra : la route des Maldives n'était-elle pas
utilisée pour acheminer vers Djeddah le poivre de Pidir et de Pasai et
(■>) D. Lombard, Le sultanat d'Atjeh au temps d'Iskandar Muda, Paris, 1967, p. 32.
(6) Referir de Francesco dal Bocchier dans J. Aubin, Francisco de Albuquerque, un
juif castillan au service de l'Inde portugaise (1510-1515), Arquivos do Centro
cultural português, 7(1974), p. 196; Pires, p. 118, 138, 144; Correia, H/1, p.
40-41 ; Albuquerque à D. Manuel, de Cochin, 20. VIII. 1512, CA, I, p. 75. Le
bahar de Pasai valait environ 165 kg.
(?) Pires, p. 92, 96, 142 ; F. de Albuquerque, Referir, p. 196 ; Albuquerque à D.
Manuel, de Cananor, 1.XII.1513, CA, I, p. 168 ; Barros, III/3-6, p. 139 ; le
sultan de Pasai à D. Manuel, TdT, Cartas orientais n°59. Cette lettre en arabe
nous a été communiquée par M. J. Aubin, que nous remercions de son obligeance. 130
ravitailler ainsi les Vénitiens (8) ? L'apparition de ce marché parallèle
menaçait le monopole des épices que les Portugais s'efforçaient de
conquérir. Une première mission fut envoyée dans le Golfe du Bengale
en août 1506, mais elle fut molestée par les marchands du Coromandel
et dut rebrousser chemin (9) .
Le 28 août 1509, une petite escadre commandée par Diogo Lôpes de
Sequeira quittait Cochin pour Malaka. Le capitaine était chargé par le
roi D. Manuel d'aller reconnaître la cité et de faire escale au passage
à l'île de "Çamatar" (10). Au large de Pidir, les navires portugais
rencontrèrent une flottille d'almadies montées par des musulmans "à
longue barbe" qui les escortèrent jusqu'au port. Leur arrivée, marquée
par les salves de leurs bombardes, provoqua un mouvement de panique,
vite apaisé par le geste

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