Linguistique et brouillons, dynamique et synchronisation - article ; n°147 ; vol.36, pg 113-123
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Description

Langages - Année 2002 - Volume 36 - Numéro 147 - Pages 113-123
The paper aims to find suitable basic theoretical assumptions which could underly the analysis of successive manuscripts as traces of text genesis. The major linguistic theories in the twentieth century fail to account simulaneously for verbal production, for relevant temporal properties and for specific textual dimensions. They are unable to propound dynamical forms for the succession of writing and rewriting stages and, for each of these stages, to separate (and link) mental and verbal processes, prospecctive and executive moments, as well as anticipating and memorizing ones. The complexity of the relations between these activities can lead to conflicts between them and to lacks of synchronization. Neuropsycholinguistics can offer some interesting parameters to deal with this problem.
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Yves Schwartz
Linguistique et brouillons, dynamique et synchronisation
In: Langages, 36e année, n°147, 2002. pp. 113-123.
Abstract
The paper aims to find suitable basic theoretical assumptions which could underly the analysis of successive manuscripts as
traces of text genesis. The major linguistic theories in the twentieth century fail to account simulaneously for verbal production, for
relevant temporal properties and for specific textual dimensions. They are unable to propound dynamical forms for the
succession of writing and rewriting stages and, for each of these stages, to separate (and link) mental and verbal processes,
prospecctive and executive moments, as well as anticipating and memorizing ones. The complexity of the relations between
these activities can lead to conflicts between them and to lacks of synchronization. Neuropsycholinguistics can offer some
interesting parameters to deal with this problem.
Citer ce document / Cite this document :
Schwartz Yves. Linguistique et brouillons, dynamique et synchronisation. In: Langages, 36e année, n°147, 2002. pp. 113-123.
doi : 10.3406/lgge.2002.2416
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_2002_num_36_147_2416Blanche-Noëlle Grunig
Université Paris VIII & ITEM, CNRS
LINGUISTIQUE ET BROUILLONS,
DYNAMIQUE ET SYNCHRONISATION
1. Les théories linguistiques à l'épreuve des brouillons
La linguistique pendant tout le vingtième siècle s'est peu préoccupée de
production verbale, qu'elle soit écrite ou orale. À l'exception de la sous-discipline
que constituait la phonétique, elle était en effet pour cela fort démunie du point de
vue expérimental et - c'est d'ailleurs un compliment scientifique à lui faire - elle a
presque toujours refusé le recours à l'introspection et manifesté de la réticence à
considérer comme fortement pertinentes et révélatrices les impressions qu'un
locuteur ou scripteur pouvait garder en tête de ce qu'il avait dit, des raisons qui
l'y avait poussé et des buts qu'ainsi il croyait poursuivre.
Le bilan du siècle écoulé ne peut donc faire état de théorie linguistique globale
qui saurait accompagner les chercheurs en génétique textuelle dans leur observat
ion des manuscrits, ainsi que dans leur réflexion théorique spécifique. (On mesur
era l'ampleur de cette réflexion en consultant, par exemple, les seize numéros
déjà parus de la revue Genesis et l'ouvrage de Grésillon 1994.)
Que pouvait en effet trouver le généticien dans les prémisses behavioristes de
Bloomfield (1935) selon lesquelles le langage permet à une personne, Jack, de
produire une réaction R, alors que c'est une autre personne, Jill, qui a reçu un
stimulus S : Jill recevant, du côté de son estomac, ce stimulus S, fait quelques petits
mouvements dans sa gorge et sa bouche qui produisent un peu de bruit. Ce bruit
agit comme stimulus sur Jack, dont la réaction R est de se précipiter pour cueillir sur
l'arbre la pomme verbalement évoquée par Jill. Bloomfield (p. 33) ne manque pas,
bien évidemment, de remarquer lui-même que, pour mettre en œuvre cette situation
en d'autres occasions que le désir d'une pomme, il faudrait pouvoir connaître « the
exact structure of the body » au moment concerné et celle du « nervous system » (de
Jill). Ces termes matérialistes (et même, dira-t-il, mécanistes) sont exactement ceux
qu'emploie Bloomfield et il en appelle, pour un avenir qu'il prévoit lointain, aux
méthodes de la physique et de la chimie ainsi qu'au concours des physiologues et
des psychologues. Nous verrons ci-dessous que des débuts d'esquisses de réponse
s'ébauchent aujourd'hui, sans pour autant partager toute l'ambition de Bloomfield !
Harris (1951), autre monument du structuralisme américain, ne bâtissait pas
exactement sur les mêmes prémisses. Son axiome central était qu'il fallait mettre en
corrélation les situations d'émission et les paroles émises. Aussi radicalement "anti-
mentaliste" que Bloomfield, il a su magistralement s'en tenir à la forme perceptible
des produits écrits et oraux (et a d'ailleurs très rapidement renoncé aux paramètres
113 situationnels). La rigueur de ses méthodes (pouvant même être exploitées dans des
traitements automatiques) a séduit les linguistes européens et singulièrement
français : la clé de tout l'édifice intellectuel est en fait la relation d'équivalence. Tel, tel et
tel fragments sont (distributionnellement) équivalents s'ils peuvent occuper les
mêmes positions dans le corpus considéré. Le point de vue a pu (par Harris lui-même
mais aussi, par exemple, par Maingueneau 1976) être étendu à des textes dans toute
leur ampleur envisageable. Les généticiens n'ont-ils quant à eux rien trouvé qui les
séduise dans cette construction formellement remarquable ? Si, à certains égards :
lorsqu'une rature, par exemple, affecte un terme t, qui est remplacé par t2, il y a forma
tion d'une classe d'équivalence et la distribution de ces types de classes dans les
textes, ainsi que d'éventuels effacements ou permutations (outils présents également
dans la boîte à outils de Harris) dit quelque chose sur la genèse. Il est particulièrement
intéressant de noter en quels points du texte ces (parfois) longues classes d'équiva
lence se placent. L'interprétation de ces changements successifs (encore faut-il tenter
de déterminer l'ordre de cette succession, ce qui n'était pas le propos de Harris) relève
d'une autre problématique mais ils signalent des lieux "sensibles " dans l'écriture. À
moins que nous puissions suggérer, au contraire, que ce qui ne donne pas lieu à
rature (ou modification semblable) trouve dans sa permanence matérielle une force à
considérer comme un trait caractéristique majeur de la genèse étudiée. Si une classe
d'équivalence de raturés peut à bon droit se prévaloir du prestige intellectuel de
Harris et même de celui des mathématiques, un autre principe spécifique de la
méthode harrissienne nous semble au contraire n'être plus pertinent pour le
généticien : l'objet d'analyse considéré par Harris est une totalité. Totalité d'une phrase
à l'occasion, totalité d'un texte ou d'un discours tout aussi souvent. La distribution
harrissienne se conçoit au sein du tout, pour et par le tout. C'est peut-être d'ailleurs ce
point qui, en fin de compte, a séduit les théoriciens français dans les années 1960.
Mais il est clair que le travail du généticien doit s'imposer de considérer le texte non
comme un tout achevé, mais en tant qu'il est en train de se faire ou d'être fait :
processus dans son déroulement continu ou processus interrompu puis repris et
ressoudé, ou abandonné sans suite, perdu, éternellement fragmenté. Dans ce néces
saire rapport au(x) temps, les faits importants pour le généticien ne sont pas le(s)
premier (s) mot(s) et le(s) dernier (s). Ce sont les chemins entre des points que l'analyse
a pu considérer comme saillants (au sens que les psychologues donnent à ce terme).
L'ultime fragment ou l'ultime texte (en supposant qu'ils soient effectivement repéra-
bles) n'est de toute façon pas l'aune à laquelle on mesure ce qui l'a précédé. Les géné-
ticens sont nets sur ce point (cf. par exemple Grésillon 1994, pp. 136-140 et de Biasi
2000, pp. 87-89). En exagérant à peine on pourrait dire que les très fameux numéros
de Communications (4 et 8) et la leçon de Propp n'ont aucun prix pour la méthode
génétique : on ne découpe pas une totalité en morceaux, graphes, sous-graphes, d'un
début à une fin, on cherche plutôt à trouver des fragments qui soient candidats à être
débuts, fins et intermédiaires potentiels. Nous avions eu ailleurs pour le théâtre
l'occasion de remarquer le caractère inadéquat de la méthode distributionnelle en tant
qu'elle vaut pour la distribution au sein d'une totalité. Sauf cas particulier de grande
érudition ou de mémoire fort exercée, le spectateur au théâtre ne dispose pas du tout :
il capte au fur et à mesure qu'on lui donne à voir et à entendre. Le généticien est dans
la même situation du côté de la production, à ceci près qu'il faut le plus souvent qu'il

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