Luttes politiques et mass media en Chine depuis la Révolution culturelle - article ; n°1 ; vol.28, pg 219-233
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Luttes politiques et mass media en Chine depuis la Révolution culturelle - article ; n°1 ; vol.28, pg 219-233

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Description

Communications - Année 1978 - Volume 28 - Numéro 1 - Pages 219-233
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Alain Peyraube
Luttes politiques et mass media en Chine depuis la Révolution
culturelle
In: Communications, 28, 1978. pp. 219-233.
Citer ce document / Cite this document :
Peyraube Alain. Luttes politiques et mass media en Chine depuis la Révolution culturelle. In: Communications, 28, 1978. pp.
219-233.
doi : 10.3406/comm.1978.1426
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1978_num_28_1_1426Alain Peyraube
Luttes politiques et mass media en Chine
depuis la Révolution culturelle
Comme dans la plupart des autres pays en voie de développement, l'implan
tation des principaux moyens de communication de masse (presse, radiodiffus
ion, télévision, affiche, cinéma) a précédé, en Chine, l'industrialisation. C'est
que leur rôle politique et idéologique est primordial. Dès l'établissement de la
République populaire, en 1949, ils ont été conçus comme devant être « non seul
ement un propagandiste collectif et un agitateur politique, mais encore un orga
nisateur collectif », conformément aux conceptions de Lénine sur la presse.
A la différence de beaucoup d'autres pays du Tiers Monde, ce ne sont pas les
technocrates des sociétés (post-) industrielles qui définissent en Chine les pro
blèmes posés par les mass media et élaborent les messages qu'ils doivent diffuser.
Si l'influence de l'Union soviétique a été non négligeable dans ce domaine pen
dant les premières années du régime socialiste, elle est nulle désormais. La Révol
ution culturelle (1966-1969), en intervenant au niveau des différentes super
structures — politique, culturelle, idéologique, etc. — a marqué une nette rupture
avec les dix-sept années précédentes et a défini de nouveaux principes régissant
la nature et le fonctionnement des moyens de communication de masse.
Depuis, de nombreuses luttes se sont déroulées au sein de l'appareil central
de propagande, entraînant la proposition de stratégies différentes en matière de
media. On examinera ces luttes tout en présentant sommairement le système des
mass media chinois, car aucune description le concernant n'a encore été entre
prise jusqu'à maintenant. On distinguera, selon le célèbre paradigme de Lasswell :
« Qui dit quoi, avec quels effets? » : 1) les sources émettrices; 2) le contenu des
messages diffusés; 3) l'audience et les effets sur le public.
1. Les émetteurs.
Le contenu des messages étant élaboré presque exclusivement par les émetteurs,
c'est pour le contrôle de ceux-ci que les luttes les plus vives ont été menées pen
dant et depuis la Révolution culturelle. L'absence de toute source émettrice
privée donne en effet un pouvoir théoriquement considérable à ceux qui contrô
lent les émetteurs. En général, ce sont les mêmes que ceux qui détiennent le
pouvoir économique. Mais pas nécessairement.
Avant la Révolution culturelle, les différents organes d'information et de pro
pagande étaient en partie concentrés dans les mains de ceux que les maoïstes
appelaient « la bourgeoisie infiltrée au sein du Parti ». Celle-ci fixait la production
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culturelle, contrôlait la presse, la radio, la télévision. Des œuvres théâtrales
comme la Destitution de Hai Rui (1961) de l'historien Wu Han, ont ainsi pu voir
le jour1. De même, Deng Tuo et « le village des trois familles » (Deng Tuo, Wu
Han, Liao Mosha) assuraient dans le quotidien Beijing wanbao (Pékin-soir) et
dans Qianxian [le Front) des chroniques régulières, dont les célèbres « Propos
du soir à Yanshan », où étaient discutés, de manière ironique et allusive, diff
érents problèmes politiques contemporains, à travers des exemples empruntés
à l'histoire de la Chine ancienne. Ces textes désapprouvaient la politique du Parti
au moment du Grand Bond en avant (1958) et critiquaient Mao Zedong.
Le 10 novembre 1965, la publication d'un article virulent de Yao Wenyuan
condamnant la Destitution de Hai Rui déclenchait la Révolution culturelle.
Peu de temps après, le « village des trois familles » était à son tour violemment
pris à partie et les appareils régissant la culture et les mass media rapidement
démantelés : élimination des responsables du travail idéologique et culturel de
la municipalité de Pékin, disparition des publications incriminées. On se rendit
vite compte, cependant, que l'existence même de pièces/chroniques subversives
avait nécessité l'approbation, sinon directe, du moins indirecte, de plusieurs
responsables de haut niveau qui fixaient les objectifs économiques et politiques
de l'époque (Peng Zhen, Deng Xiaoping, Liu Shaoqi) et la Révolution culturelle
devait déboucher sur une critique des thèses génétistes-économistes défendues
par la ligne liushaoquiste.
De la Révolution culturelle à la mort de Mao Zedong, les luttes pour le contrôle
des moyens de communication de masse ont été aussi vives, bien que moins spec
taculaires, et ont reflété les luttes menées au sein des cercles dirigeants et non
les tensions sociales manifestées à la base.
Radicalement rénovés dès le début de la Révolution culturelle, les responsables
des mass media ont suivi jusqu'en 1971 les conceptions de Lin Biao et de ses
partisans. La valse des dirigeants au sommet des appareils de propagande a
certes été ininterrompue pendant et immédiatement après la Révolution culturelle
mais n'a pas entraîné de changement majeur au niveau du contenu des messages
véhiculés par les media 2. Ils exaltent alors la pensée - Mao Zedong — « phare
de l'humanité ; arme la plus tranchante et la plus acérée de la révolution mondiale ;
vérité universelle » — ossifiée par Lin Biao qui en est le garant. C'est l'époque
où des millions de Chinois vocifèrent des mots d'ordre pour le moins schématiques
et gesticulent, le petit livre rouge à la main.
L'élimination de Chen Boda d'abord, de Lin Biao ensuite n'apporte que des
modifications mineures. Ceux qui restent de l'ancien Groupe central de la Révo
lution culturelle (Jiang Qing, Zhang Chunqiao, Yao Wenyuan) continuent alors
d'exercer un contrôle strict sur les mass media et les diverses productions cul-
1. Mettant en scène un haut fonctionnaire de la dynastie des Ming, écarté du pouvoir
pour avoir soutenu les masses opprimées, la pièce demandait en fait la réhabilitation
du maréchal Peng Dehuai, destitué en 1959 pour avoir notamment critiqué l'établi
ssement des communes populaires. On peut trouver une traduction anglaise de cette
pièce dans Robert Tung, Proscribed Chinese Writings, Scandinavian Institute of
Asian Studies, 1971.
2. Automne 1967 : élimination de Mu Xin, rédacteur en chef du Guangming ribao
(Clarté) et de Wang Li, premier rédacteur en chef du Hongqi (Drapeau Rouge) ; 1968 :
élimination de Qi Benyu, rédacteur en chef du Drapeau rouge; été 1970 : chute de Chen
Boda, rédacteur en chef du Drapeau rouge.
220 Luttes politiques et mass media en Chine
turelles. Le contenu des messages diffusés varie cependant, dès la « restauration »
de 1972. On critique les conceptions réductrices de Lin Biao 1 et on se lance dans
une étude approfondie des textes théoriques du marxisme-léninisme. Mais, alors
que le pouvoir économique se concentre de plus en plus dans les mains des « tech
nocrates » (retour de nombreux cadres critiqués pendant la Révolution culturelle,
rappel de Deng Xiaoping par Zhou Enlai en avril 1973) aucun changement majeur
n'intervient dans le contrôle des media.
Celui-ci reste assuré, jusqu'à la mort de Mao Zedong, par les « idéologues »,
célèbres désormais sous le nom de « bande des quatre » : Wang Hongwen, Zhang
Chunquiao, Jiang Qing, Yao Wenyuan. Leurs amis politiques étaient à la direc
tion des organes de presse centraux (Lu Ying au Quotidien du Peuple) et
d'information (Deng Gang à la radio et à la télévision) et tenaient le ministère
de la Culture (Yu Huiyong, Hao Kiang et Liu Qingtang). Ils disposaient en outre
de relais de propagande efficaces aux universités de Pékin (Wang Lianlong,
le groupe Liang Xiao, Chi Qun et Xie Jingyi) et de Shanghai (Luo Siding, Chi
Heng), ainsi qu'à l'Académie des sciences (Liu Chongyang), pour

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