Melqart - article ; n°3 ; vol.25, pg 205-230
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Description

Syria - Année 1946 - Volume 25 - Numéro 3 - Pages 205-230
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1946
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

René Dussaud
Melqart
In: Syria. Tome 25 fascicule 3-4, 1946. pp. 205-230.
Citer ce document / Cite this document :
Dussaud René. Melqart. In: Syria. Tome 25 fascicule 3-4, 1946. pp. 205-230.
doi : 10.3406/syria.1946.4467
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/syria_0039-7946_1946_num_25_3_4467MELQART
PAR
RENÉ DUSSAUD
Les découvertes de ce dernier quart de siècle et les recherches poussées
en tous sens ont fort étendu notre connaissance de la religion phénicienne.
Il est permis aujourd'hui de mesurer plus exactement le rôle que les Phénic
iens ont joué dans l'histoire des religions. Nous prendrons comme exemple
le dieu Melqart (melek-qart, le roi de la Ville, c'est-à-dire de Tyr), dit aussi
Baal Sor ou Ba'al de Tyr, divinité célèbre, mais d'une physionomie « diffi
cile à saisir (1) ». Nous examinerons avec quels éléments le dieu a été constitué,
quel a été son rôle dans le panthéon phénicien et comment, s'étant répandu
sur les mers, il a précisément emprunté aux rivaux de son peuple le nom et
les traits d'Héraclès.
1. Nature de Melqart. — La mention du dieu n'apparaît pas dans les
textes de Ras Shamra ni dans les tablettes d'El Amarna et cela ne doit pas
surprendre, car sa personnalité n'a été constituée qu'au début de la puissance
maritime tyrienne. Nous croyons, en effet, avoir montré qu'il est le produit
d'un syncrétisme entre Ba'al (Hadad) et le dieu Yam '2>.
Alors que le vieux mythe phénicien, qui a pénétré jusqu'en Egypte, mett
ait aux prises Ba'al et le dieu-Mer, mythe qui s'est perpétué à Béryte jusqu'à
basse époque dans la lutte entre Dionysos et Poseidon pour la possession de
la nymphe Béroé (3), les théologiens de Tyr se sont avisés, pour répondre à
(*) Le P. Lagrange, Études sur les Religions 2e trimestre 1937) au nom d'un IAMBAL,
sémitiques, 2e édit., p. 99. Ralsillecis fil(i)us, où il reconnaissait le nom
du dieu Yam. En effet, IAMBAL peut se '•) Astarté, Pontos et Ba'al, dans Comptes
comprendre « le dieu Yam est maître ». rendus Acad. des Inscr., 1947, p. 215 et suiv.
Au sujet de cet article, M. Julien Guey m'a (*) Identification faite par Eckhel, sur les
signalé qu'il avait, en 1936, relevé dans ses monnaies de Béryte, grâce à un passage de
fouilles de Ksilia (Tunisie) une stèle funéraire Nonnos; cf. E. Babelon, Les Perses Achè-
(voir le n° 10 publié dans la Revue africaine, ménides, p. clxv, Catalogue, n°« 1265, 1279, etc.
Syria. — XXV. 26 206 SYRIA
l'extension tyrienne, de conjuguer les deux entités divines en une seule qu'ils
qualifièrent de « roi de la Ville » (melek-Qart) ou deBa'al Sor, Ba'al de Tyr.
En tant que Ba'al, dont il a conservé le nom, Melqart est le dieu de la végé
tation hivernale, le dispensateur de la fertilité (1). D'autre part, il a pris cer
tains attributs du dieu-Mer, le dieu Yam (fig. 1), à tel titre que les anciennes
monnaies de Tyr le représentent chevauchant un hippocampe ailé dont il
saisit les rênes dans la main droite tandis qu'il tient l'arc dans la gauche (2)
(fig- 3).
Ce double caractère du dieu se marque
dans le temple de Tyr par les deux stèles
que signale Hérodote (3) et dont les deux
cippes bilingues de Malte offrent vraisemFig. 1. — Le dieu Yam
blablement la réplique (4). Les pierres am- sur les monnaies d'Aradus.
brosiennes figurées sur les monnaies (5) se
rattachent à la même légende, rapportée par Philon de Byblos, d'après
laquelle Ousôos, qui le premier osa s'élancer sur la mer, aurait consacré
deux stèles au feu et au vent (6). Or, Melqart était qualifié à'anax pyros (7),
ce qui doit s'entendre du feu du ciel et le rattache à Ba'al (Hadad), tandis
que le vent appartient au domaine du dieu Yam.
Il est probable que l'origine du terme géographique « colonnes d'Hercule »
a pour origine, comme le dit Strabon (8), les deux fameuses stèles de bronze
dressées devant le temple de Melqart, près de Gadès. Le terme aura été abu
sivement étendu ensuite au détroit de Gibraltar lui-même et l'imagination
populaire en aura cherché diverses justifications (9).
Le caractère agraire de Melqart, qu'il tient de Ba'al, a été éclipsé par ses
f1) Nonnos, Dionys., XL, 369 et suiv. vier et épigraphe); XXXVII, 16 (forme cylin
(2) Cet arc signale déjà l'identification du dieu drique; olivier et épigraphe) ; XXXVIII, 7 et 8
avec Héraclès sur lequel nous revenons ci-aprè^. (en relation avec Héraclès-Melqart) ; XXXVIII,
Il ne serait donc pas impossible qu'à Larnax 23, 24, 25.
Lapethos (Chypre), on ait identifié Melqart à (8) Philon de Byblos, fr. II, 8.
Poseidon, comme on l'a proposé; cf. Wadding- (7) Nonnos, Dionys., XL, 369.
ton, 2779 et CIS, I, 95. («) Strabon, III, 5, 5.
(•) Victor Bérard, Les Phéniciens et VOdys- (3) Hérodote, II, 44.
sée, I, p. 205; cf. Gsell, Hist. anc. de l'Afrique (*) CIS, I, 122.
(8) Babelon, Les Perses achéménides, du Nord, IV, p. 307.
p. cxciv, pi. XXXVI, 16; XXXVII, 11 MELQART 207
prouesses maritimes et ses conquêtes; il est cependant essentiel à son culte et
explique que le dieu meure et renaisse chaque année.
La vie des populations syriennes, qui ne sont séparées du désert que par
une mince bande de territoire fertile, est suspendue à la chute des pluies
d'hiver. Le Deutéronome insiste sur la différence de régime entre l'Egypte
et la Syrie en notant que, dans la vallée du Nil, il suffit de jeter la semence
sur la terre qui s'irrigue comme un jardin, tandis que Canaan, pays de mont
agnes et de plaines, attend tout de la pluie du, ciel (1). Aussi, dès l'âge du
Bronze et avec une remarquable continuité, les populations syriennes ont-
elles effectué des installations hydrauliques remarquables, non seulement en
forant des puits et en creusant des citernes, mais aussi en construisant des
barrages pour constituer des birké et même en creusant des tunnels pour
l'adduction lointaine des eaux (2).
On a généralement mal compris en quoi consistait le réveil annuel de
Melqart : Uégersis du dieu se pratique au mois de Péritios (février-mars) (z\
au moment où les pluies vont cesser de tomber et dans l'intention d'en assurer
la pérennité. Baudissin a justement noté que Melqart et Adonis étaient des
divinités distinctes (4), ce qui lui fait écarter qu'il y eut une fête d'Adonis en
février-mars. Mais il ne tient pas compte des différences essentielles de climat
et de régime avec nos régions européennes. Il admet que la fête du printemps
en Phénicie marque le renouveau de la végétation parce que, suppose-t-il,
Melqart possédait une nature solaire (5), ce qui constitue une double erreur. n'est pas de nature solaire et la fête qu'on célébrait à Tyr cherchait
uniquement à pallier la défaillance du dieu. La date choisie exclut toute signi
fication solaire.
Il faut comprendre qu'on procède à un véritable sacrifice du dieu dans
(1) Deutér., XI, 10-11; cf. 17 où Dieu manif (8) Josèphe, Antiq., VIII, 5, 3, et Contra
este sa colère en fermant le ciel et en arrê Apion, I, 18.
tant les pluies. (4) Baudissin, Adonis und Esmun, p. 172.
(2) A. -G. Barrois, Précis d'archéologie bi (5)ibid., p. 494 et suiv. Cette
blique, p. 43 et suiv. On trouvera des relevés erreur remonte à Movers, Die Phœnizier, I,
importants qui expliquent le développement p. 385, qui (suivi par V. Bérard, Origine des
en plein désert d'une ville comme Palmyre cultes arcadiens, p. 255) a identifié le rév«il
de Melqart avec la fête du 25 décembre ou dans R. Mouterde et A. Poidebard, Le
Limes de Chalcis (1945); voir Syria, XXV Natalis Solis invicti sur la simple mention
(1946-48), p. 146 et suiv. d'une dédicace à Hercules Tyrius invictus. 208 SYRIA
l'intention de le ranimer par la vertu du feu comme dans la fête du bûcher
à Hiérapolis (Menbidj), en l'honneur de Hadad (1>, c'est-à-dire de Ba'al. La
croyance à la résurrection par le feu se relève dans un texte de Ras Shamra (2)
où Ba'al, entraîné par sa passion de la chasse, s'égare jusqu'à tomber dans la
fournaise de la déesse Sapas (le Soleil). Ses frères se mettent à sa recherche et

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