De la croyance
2 pages
Français

De la croyance

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
2 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Victor BrochardÉtudes de philosophie ancienne et de philosophie moderneJ. Vrin, 1926 (pp. 462-488).C’est un véritable service que M. Cl. Gayte a rendu à la philosophie en publiant son Essai sur la croyance (Paris, Germer Baillière,1883.) et en ramenant l’attention sur un sujet si important. Aucune philosophie ne devrait s’en désintéresser ; presque toutes lenégligent ou l’esquivent. L’empirisme et le positivisme se devraient à eux-mêmes de dire comment ils définissent la certitude, etquelle différence ils font entre croire et être certain ; ils laissent généralement cette question de côté. Le spiritualisme a toujourscompris l’importance du problème de la certitude : sauf quelques exceptions, il prête moins d’attention à la croyance. Il n’est pasmême facile de dire dans quelle partie de la philosophie cette question devrait trouver sa place. Les psychologues ne s’en occupentguère, parce qu’il leur paraît qu’elle appartient aux logiciens. Les logiciens, tels que Stuart Mill, la renvoient aux métaphysiciens. Maisles métaphysiciens ont bien d’autres visées. Pressés d’arriver aux conclusions qui leur tiennent au cœur, ils l’oublient ou l’ajournent.C’est pourtant par là qu’il faudrait commencer.Dans la philosophie généralement enseignée en France, la croyance est considérée comme tout à fait distincte de la certitude ; elleest autre chose, si elle n’est pas le contraire, et elle est fort au-dessous. C’est une sorte de pis-aller dont on ne se contente qu’àregret ...

Informations

Publié par
Nombre de lectures 47
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Victor Brochard Étudesdephliosophieancienneetdephilosophiemoderne J. Vrin, 1926 (pp. 462-488).
CestunvéirtableservicequeM.C.lGaytearenduàlaphliosophieenpubliantsonEssaisurlacroyance(Pairs,GermerBaiillère, 1883.)etenramenantlattentionsurunsujetsiimportant.Aucunephliosophienedevraitsendésintéresser;presquetoutesle négligentoulesquiven.tLempiirsmeetlepositivismesedevraientàeux-mêmesdedirecommentlisdéifnissentlacertitude,et quelledifférenceilsfontentrecroireetêtrecertain;lislaissentgénéralementcettequestiondecôté.Lespiritualismeatoujours compirslimportanceduproblèmedelacertitude:saufquelquesexceptions,ilprêtemoinsdattentionàlacroyance.lInestpas mêmefacliedediredansquelleparitedelaphilosophiecettequesitondevraittrouversaplace.Lespsychologuesnesenoccupent guère,parcequlileurparaîtquelleapparitentauxlogiciens.Leslogicienst,elsqueStuartMlil,larenvoientauxmétaphysiciens.Mais lesmétaphysiciensontbiendautresvisées.Pressésdarirverauxconclusionsquileuritennentaucœur,lisloubilentoulajournent. Cestpourtantparlàqufliaudraitcommencer.
DanslaphliosophiegénéralementenseignéeenFrance,lacroyanceestconsidéréecommetoutàfaitdistinctedelacerittude;elle estautrechose,siellenestpaslecontraire,etelleestfortau-dessous.Cestunesortedepis-allerdontonnesecontentequà regretetqui,parsuite,neméirteguèrequonsyarrête.Lœuvrepropreduphliosopheestdechercherlacerittude;cestàelleseule quliaaffaire.Riendemieux,assurémen,tetcenestpasnousquicontesteronsledevoirquiobligetoutphliosopheàdonnerson adhésionàtoutevéritéclairementetdisitnctementaperçue.Nousnavonsgardedeméconnaîtrecequilyadenobleetdélevédans cettemanièredecomprendrelerôledelaphliosophie;noussavonslesdangersdufidéisme;lidéalquetantdephliosophessesont proposé,quelespluslilustresdentreeuxseproposentencore,doitêtrepoursuivisansrelâche.Maiscettecertitudesienitère,si absolue,quinelaisseplaceàaucundoute,lephilosophelarencontre-tli-partout?larencontre-tli-souvent?Nya-t-ilpasbiendes quesitonsoù,aprèsdelonguesrecherches,enprésencededifficultéstoujoursrenaissantes,enfacedesdivergencesquiséparent irrémédiablementlesmellieursesprits,etlespluséclairés,etlesplussincères,ilestforcédesavouerquelavériténesimposepas aveclairgueuretlanécessitédunedémonstrationgéométirque?Ilpeutcroirepourtant,etsacroyanceestlégiitme.Nousnesavons guèrededoctirneplusdangereuse,etquifasseauscepticismeplusbeaujeu,quecellequi,entrelacerittudeabsolueetnécessaire, etlignoranceouledoute,nevoitdeplacepouraucunintermédiaire.Maissionrevendiqueledroitdecroirerationnellement,na-t-on pasparlàmêmeledevoirdexaminerlanaturedelacroyance,desenquéirrdesmotifssurlesquelsellesefonde,dechercher commentelleseproduit?Si,commeilsemblebienqulifautenconvenir,lacroyanceitent,danslessystèmesdephliosophie,autant deplacequelacerittude,pourquoiréservertoutesonattentionàlacertitudeetreléguerlacroyanceausecondplan,commechose secondaire?Letempsnestplusoùlessystèmesdemétaphysiqueseprésentaientcommedesvéritésirgoureusementdéduites dunprincipeévident,etprétendaientsimposerdetoutespiècesàlespir,tcommecesdémonstraitonsgéométriquesdontlis empruntaientquelquefoislaformeetdontlisenviaientlarigueurincontestée.Spinoza,Leibnitz,Hege,lpouvaientbiencroirequils démontraientaprioirleurdoctirne:quioserait,aujourdhui,afifcherdetellesprétenitons?lIyaencorebiendessystèmes,etles expilcaitonsdelunivers,endépitdesprédictionspositivistes,quiproclamaientlamétaphysiquemortepourtoujours,n'ontjamaisété plusnombreusesquedenotretemps.Maisellesdéclarentqueleurspirncipessontdesinductions:lpsueaxtcmene,tellessoffrent commedeshypothèsescapablesderendrecomptedetouslesfaits,etdignesparconséquen,tsicetteprétentionestfondée,de passeràlétatdevérité,suivantlaméthodefortlégitimementappilquéedanslessciencesdelanature.Lafiertédogmatiquea singulièrement baissé le ton ; la métaphysique est devenue modeste. Mais dire que les théories sont des hypothèses, c’est dire quellesfont,endernièreanalyse,appelàlacroyance,etparlaforcedeschoses,lathéoiredelacroyancenedevient-ellepasune desparitesprincipalesdelathéoiredelaconnaissance,silessystèmesseproposentcommedescroyances,aulieudesimposer comme des certitudes ?
Ensupposantmêmequelacroyancesoitmaintenueaurangsubatlerneoùonlareléguéejusquici,etquoncontribueàlaconfondre, nonsansquelquedédain,aveclopinion;enadmettantquellesattache,danslaviepraitqueetfautedemieux,àdesimples probabiiltés,etquàcetitreellesoitfortéloignéedelahauteetpleinecerittudeàlaquelleaspirelephliosophe,neméirterait-ellepas encore une étude attentive ? La plupart des hommes, et même tous les hommes, dans les circonstances les plus importantes de leur vie,sedécidentsurdescroyancesetnonsurdescerittudes.«Lesage,disaitdéjàCicéron,quandlientreprendunvoyagesurme,r quandilensemencesonchamp,quandilsemarie,quandiladesenfants,dansmilleautresoccasions,faiti-lautrechosequede suivredesprobabiiltés?»(Cic.,Acad,.il.vII,34,109.)Quedeviendraitlartoratoiresilamassedeshommesnagissait[pas]plus parpersuasionqueparconviciton?Maissilacroyancetienttantdeplacedanslavie,etsilyaunephliosophiedelespritquidoit nousapprendreànousrendrecomptedecequenousfaisons,létudedelacroyancenedoit-ellepasaussitenirquelqueplacedans cettephliosophie?Quecesoitdanslapsychologieoudanslalogique,cestuneautrequesitondontnousnavonscurepourle moment.Àcoupsûr,lephilosophesansrenonceràsonidéaldecerittude,nedérogerapasensenoccupant.
Maisliyaplus:lathéoire,tropfacilementacceptée,quidistinguejusquàlesopposerlacertitudeetlacroyance,estelle-mêmefort contestable.Généralemen,tonévitedinsistersurcepoint:lisemblequonsenréfèreausenscommunpourreconnatîreentrela certitude et la croyance une différence spécifique. Mais peut-être ne faudrait-il pas insister beaucoup auprès du sens commun pour obtenir de lui l’aveu qu’après tout, être certain est une manière de croire, et que si on peut croire sans être certain, on n’est pas certainsanscroire:endautrestermes,lacroyanceestungenredontlacertitudeestuneespèce.Enréailté,lesrapportsdela certitudeetdelacroyancesontunequesitonàdébattreentrephliosophes.O,rilsetrouveplusieurspenseursquilarésolventtout autrementquonnefaitdordinaire.StuartMilldisaitdéjà,maissansinsister,etsansenitreraucuneconséquence,quelacertitude estuneespècedecroyance.CestàM.Renouvierquapparitentincontestablementlhonneurdavoirlepremiermontrétoute ilmportancedelaquestion,etdelavoirtraitéeaveccettevigueuretcetteirgueurquisontlamarquedisitncitvedesonespirt. Dautresaprèsluisontentrésdanslamêmevoie,et,toutrécemmen,tM.Gayte,danslatrèsintéressanteétudequenoussignailons au début de cet article, a examiné, en ajoutant beaucoup d’arguments nouveaux, tous les points principaux de ce grave sujet : lhistoiredabord,dumoinslhistoiremoderne,carlesthéoiresanciennessurlacroyance,fortcurieusesetfortimportantes, demanderaientàellesseulestoutunvolume:puislobjetdelacroyance,sesrapportsaveclévidence,aveclapassion,avecla volonté.Nousvoudirons,ànotretou,rexamineravecM.Gayte,maisenlesenvisageantsousunaspectunpeudifférent,lesdeux quesitonsessentiellesànosyeuxdanslathéoiredelacroyance,celledelévidenceetcelledurôledelavolontédanslacroyance.
== I== lInestpasaisé,desavoirexactementpourquoilesenscommunetlesphliosophesontcreuséunfosséentrelacertitudeetla croyance. Est-ce, comme on le dit quelquefois, parce que la croyance comporte une foule de degrés, tandis que la certitude est absolue?Maislacroyance,ausensusuelcommeausensphliosophiquedumo,tnest-ellepas,enbiendescas,cetteadhésion pleine,enitère,absolue,sansaucundoutepossible,quonappellelacerittude?Lesreilgionsfaussesonteudesmartyrsdont ladhésionàdesidéeserronéesétaitpsychologiquementindiscernabledelacerittudedusavan.tDira-t-onquelepropredela cerittudeestdesimposeràlespritsansaucunerésistancepossible,dedompterlaraisonlaplusrebelle,decontraindrelailberté, tandisquelacroyancelaisseuneplaceàlailbertéetausenitment,supposedelapartducroyantunecertainebonnevolontéet exige,commeondit,quilymetteunpeudusien?Maisdabordlescroyancesoùmanifestementlavolontéeltechoixrélféchiontle plusdepart,commelescroyancesphilosophiques,revendiquentlenomdecerittude,etceladelaveumêmedespersonnesquisont leplusdisposéesàreconnaîtrelimportancedelélémentsubjectifentoutecroyance.Enoutre,sanspalrerdeceuxquirésistentà descerittudes,jugéespardautresirrésistibles,nest-cepaslepropredetouteslesfortescroyances,fussent-elleslesplusfausses, deprétendreàcecaractèredenécessité,dévidenceabsolue,quondonnepourlamarquedisitncitvedelacertitude?Lintolérance, soustoutessesformes,napasdautreoirgine. Lacertitude,dit-onencore,estfondéesurlévidence,aulieuquelacroyancenereposequesurdesprobabilités.Cestune explicaitonclaireenapparenceetdontbeaucoupdepersonnessecontentent.Examinons-ladunpeuprès,enprenantpourpointde départlidéequonestgénéralementdisposéàsefairedelacerittude,saufàléclaircirpeuàpeuetàluidonnerplusdeprécision. À première vue, l’évidence apparaît comme une propriété intrinsèque des choses ou des idées auxquelles on l’attribue. Quand on dit quunechoseouquuneidéeestévidente,onentendquellelestparelle-même,indépendammentdetoutrapportavecnotreespir,t etquellenecesseraitpasdelêtrealorsmêmequenouscesserionsdelaconnatîreoudexister. Admettonsqueleschosesoulesidéespossèdentparelles-mêmescettepropirété.Onconviendraquecettepropiréténepeutavoir dinlfuencesurlétatdâmeappelécertitude,êtrecausedecerittude,quautantquelleproduitsurnousuneimpression,un changement d’une certaine nature. Nous ne sortons pas de nous-mêmes pour aller constater dans les choses ou dans les idées ce caractère qu’on appelle l’évidence : c’est en nous seulement, par le contre-coup qu’elle provoque, que nous pouvons la connaître. Aucunecontestaitonnestpossiblesurcepoint. Maisceteffetquelévidenceproduitennous,cecontre-coupquelleadansnotreâme,cestprécisémentcequonappellela certitude.Cestparlacerittudequenousjugeonsdelévidence:unechoseestévidenteparcequenoussommescertains; lévidenceestmoinslecritériumdelacerittudequelacerittudeceluidelévidence.Celaestsivraiquenousdisonsindifféremment dunechosequelleestévidente,ouquelleestcertaine. Touslesphliosophesquiontétudiéattenitvemenltaquestionconviennentdecequenousvenonsdedire.Nedéclarenti-lspas,avec Spinoza,celuidetouspeut-êtrequisestexprimésurcepointavecleplusdenetteté,quelavéritéestàelle-mêmesapropremarque (satirevtsisefalietasunorm,rptE.h,tet,uineaîtrenerèimulolbéiuqartidemmenuteestcoévidencqerleuuoocnechS),olXL.I,II lassentiment?Commenousreconnaissonslalumièreàcefaitquenoussommeséclairés,nousreconnaissonslévidenceoula vérité à ce signe que nous sommes certains.
Évidenceetcertitudesontdoncdeuxexpressionsabsolumentsynonymes:ellesdésignentlamêmechose,luneàunpointdevue objectif,lautreàunpointdevuesubjecitf.Ouplutôtcesmotsdesubjectifetdobjecitfdoiventêtreécartésdetoutephliosophie dogmatique:ilsneserventquàamenerdeséquivoques.Lacertitudeestbienunétatdusuje,tlévidenceestconçuecommeune propirétédelobjet:maislacerittude,étatdusuje,tnepeutsedéifnirquecommelapossessiondelobjet.lInestpasdexpression plusimpropreetplusincorrectequecelledecertitudesubjecitvequonavuequelquefoisparatîredenosjours:cestune contradicitondanslestermes:lacerittudenaplusirendelacertitudesiellenestquesubjective.Demêmesilévidenceestune propriétédelobjet,lobjetnepossèdecettequalitéquàlacondiitondêtrereprésentédanslesujet:lemotmêmedévidence impilqueprésencedunêtrequivoi.tAuvrai,quandonpalredecertitudeoudévidence,lesujetetlobjetseconfondentetnefont qu’un.
Lareconnaissancedecetteidentitédelacertitudeetdelévidencenariendallieursquidoiveinquiéterledogmaitsmeleplus absolu.Onpeutdire,eneffetquesilévidenceserévèleànousparlacertitude,cequiestlepointdevuedelaconnaissance,la cerittudeestproduiteparlévidence,cequiesltepointdevuedelexistence.Cestparcequeunechoseestévidenteouvraie,que noussommescertains;etcestparcequenoussommescertains,quenousreconnaissonslachosecommevraie.Maiscettethèse nepeutsesoutenirquàunecondition:silacertitudeestproduiteennousparcettepropriétéintirnsèquedelobjetquonnomme lévidence,sielleenestlamarque,oumieuxencoreléquivalent,lifautdetoutenécessitéquellenepuisseêtreproduitequepar elle:parsuite,ilfautquennousellesoitpsychologiquementdistinctedetouslesautresétatsplusoumoinsanalogues:ilfautquen regardantattenitvementennous,nouspuissionsdécouvrirunedifférencespéciifqueentrelacerittudeeltacroyance.
Cestcequontexpressémentreconnulesphliosophesquionlteplusprofondémentétudiélaquesiton.Lavéirté,disentlesstoïciens, gravesonempreintedanslesprit(signat in animo suam speciemquque,uneqieuirtsuin,issi,teettéacarcinamenuniserè),dparelileempreintenesauraitprovenirdunobjetssansréailté.Cestladéifniitonmêmedelareprésentationcompréhensive.
Lesstoïcienssontsensualistesetparlentunlangagematériailste:Spinoza,placéàuntoutautrepointdevue,nesexprimepas autrement.Cenesontpaslesobjetssensiblesqui,selonlui,fontsurlâmeuneimpressionmatéirelle.Maislidéeclaireetdisitncte soffreàlespirtdetellemanièrequellediffèrespéciifquementdetouteautre,etelleesttoujoursaccompagnéedecertitude:la certitudeestunétatsuigeneris,queseulelavéritépeutproduire,etquilaccompagnetoujours.Onnestjamaiscertaindufaux. « Jamais, dit-il énergiquement, nous ne dirons qu’un homme qui se trompe puisse être certain, si forte que soit son adhésion à lerreu.r»(Spinoza,Eth.,prop.XLIX,Scho.l;pr.XLIII).Limpossibliitédêtrecertaindufaux,limpossibilitépourunechosequinest pasréelledefairesurlâmeuneimpressionégaleàcellequiestproduiteparunobjetréel,voliàoùconduitforcémentlathèse dogmaitque.Ilfautabsolumentrenonceràcettethèse,ousouscrireàcetteconséquence.
Aupremierabordcetteconséquencepeutparaîtreacceptable.Lesenscommunlui-mêmesembleladmettre:silhommequise trompedi,taumomentoùilsetrompe:jesuiscertain;quandilareconnusonerreur,lidit:jemecroyaiscertain.Etilnyalàirende choquan,tsi,commelefaitlesenscommun,daccordencelaavecledogmatisme,ondéifnitlacertitudeladhésionàlavérité.Mais lesenscommunnyregardepasdetrèsprès:desphliosophesontledevoirdêtreplusvigliants.Or,ilsnontpasledroitdefaire entrercetélément,ladhésionàlavéirté,dansladéfinitiondelacerittude.Onvientdevoireneffetquelavéirténestconnuequepar lintermédiairedelacerittude;onnesaitquunechoseestvraiequeparcequonenestcertain;onvadelacertitudeàlavéirté,non delavéirtéàlacerittude.Endautrestermes,sionveutéviterunpitoyablecerclevicieuxi,flautdéfinirlacertitudeenelle-même,telle quelleapparatîdanslesuje,tetnefaireentrerdanscettedéfinitionquelesdonnéesdelaconscience;elledoitêtreexpriméeen termespurementpsychologiques,etilfautenexcluretoutélémentmétaphysique.Onpourradirequelleestuneadhésion,ouun consentemententie,rirrésisitble,inébranlable,sansaucunmélangededoute.Etainsidéfinieentermespurementsubjectifs,la certitudedoittoujoursdifférerspéciifquementdelacroyance.
Celaposé,sommes-nousendroitdedirequilexisteunetelledifférencespécifique?Nenousarrive-t-lipasdedonneràlerreur cetteadhésionentière,irrésisitble(autantdumoinsquenousenpouvonsjuger),inébranlable(aumoinstoutletempsquedurela croyance) ? Osera-t-on soutenir qu’à chaque instant nous ne soyons pas certains du faux ? Nous avons beau déclarer, une fois notre erreurreconnue,quenétantpascertains,nouscroyionslêtre;cestaprèscoupquenousfaisonscettedistinciton.Aumomentmême oùaileucettecroyancequenousappelonscerittude,lobservationlaplusattenitve,laréflexionlaplusscrupuleuse,lasincéritélaplus entière,labonnefoilaplusparfaitenenousdécouvrent,enbiendescas,irendesuspect:nouscroyonsdetoutnotrecœu,ret pourtantnousnoustrompons.lIesitnutiledecitericidesexemplesquisoffrentenfouleàlesprit:lesplusfollessuperstitionstrouvent des adeptes sincères ; les plus extravagantes utopies, des défenseurs zélés et désintéressés ; les plus mauvaises causes, des serviteurs passionnés et des martyrs.
Sidetelsexemplesneparaissentpasassezprobants,lesphilosophesnousenoffrentdautres,oùlonnesauraitsuspecternila bonne foi, ni les lumières. Eux aussi sont attachés à leurs systèmes de toute l’ardeur de leurs convictions, de toutes les forces de leur espirtetdeleurcœur:leurâmeestinondéedecetteéblouissantelumièrequinousapparatîcommelamarquedistincitve,dela vérité.Ilssontcertains:etpourtantquelques-unsdumoinssetrompent,puisquesisouventlisecontredisen.tSpinozaditifèrement qu’on n’est jamais certain du faux. Ses idées sont irrésistiblement claires pour lui : le sont-elles pour tant d’autres qui les ont combattues?etlesidéesirrésistiblementclairesdetantdautres,desonmaîtreDescartesparexemple,létaient-ellespourlui?lI fautenconvenir:sicestdanslaplénitudedeladhésion,ouduconsentemen,tdanslintensitédelaffirmationetlardeurdela croyancequoncherchelamarquedistinctivedelévidenceoudelavéirté,unetellemarquenexistepas.Laforceaveclaquelleon aiffrmeunechoseneserajamaislapreuvequecettechoseestvraie.Lerreurseraittropfacileàéviter,sientrelacerittudeetla croyance,liyavaitunedifférencespécifique:cequifaitjustementladifficutléduproblème,cestlimpossibiiltéoùnoussommesde fairecettedistinction.Lacertitudenepeutêtreenifndecomptequuneespècedecroyance.
Est-ceàdirequondoiverenonceràpalrerdecertitude,etquedanscegenreappelécroyance,onnedoivepasregarderlacerittude commeuneespècedisitncte,ayantsadifférencepropre?Laconséquenceseraitgrave.IlnenousparatîpasqueM.Gayte,dans lexcellenteltumineuxchapitrequliaconsacréàcettequesitonaitétésuffisammentexpilcite:contentdavoirréduitlacerittudeàla croyance,linecherchepassilnyapasdescroyancesquiaientdroitautitredecerittude.
Laseuleconclusionàtirerdesconsidérationsquiprécèdentcestquesliyauncirtériumdevéritéi,lfautrenonceràletrouverdans ladhésion,oudequelquenomquonveullielappele,rassenitment,acquiescementouconsentement.Ilfautdistinguerladhésionde lidéeàlaquelleonadhère.Lesenscommunetmêmelesphliosophes,ontquelquepeineàfairecettedistinction:lanalyselexige. Pirmitivemen,tlesprithumainneséparepaslesidéesetleschoses:ilprendlesidéespourdeschoses:liestnaïvemen,tréailste. Delà,lepirncipesilongtempsadmiscommeunaxiome:Onnepensepascequinestpas.Lexpéirence,cest-à-direladécouverte de l’erreur, ne tarde pas à proueulenesinsi:aneannuquvudoùàlordboauedaysesohcxqreliuvujseettnotsidugniele lobjet.Cettepremièreséparationaccomplie,lienresteunesecondequinesefaitquebeaucoupplustard:danslesujetlui-mêmei,l fautdistinguerlacteparlequeloncroitdelachoseouplutôtdelidéeàlaquelleoncroit.Cesdeuxfaits,ordinairementunis,nelesont nitoujours,ninécessairement:lisnesontpasfonctionlundelautre.
Ilnyapas,nousvenonsdelemontrer,decroyancesnécessaires.Ya-tli-dumoinsdesidéesouplutôtdesrapportsentrelesidées, quisimposentnécessairementàlapensée?Voilààquoiseréduitendernièreanalyselaquesitonducritérium.Lesdogmatistesde touslestempsontbienvuquilnyapointdecirtéirumslinyapasdenécessité,silespirtfailtui-même,etfaitseul,lavéirté,sirien nestdonné.Seulemen,tcettenécessité,lisontcrulatrouverdanslemodedadhésionaccordéeàcertainesidées,cest-à-diredans lacerittude:orlexpéirencedémontrequunetellenécessitéestillusoire.Excluedeladhésion,lanécessitéseretrouvepeut-être danslessynthèsesmentales:àcetteconditionseulementonpourradirequliyauncirtéirumdevérité.
Dabord,lepirncipedecontradictionnousattestequilyadessynthèsesdidéesnécessaires.Onpeut,commelesÉpicuriens,et biendautres,nepascroireauxvéirtésmathématiques:maisilestimpossibledepenser,jeveuxdiredeilerdesidées,silon nobservelepirncipedecontradiction.Sesoumettreàcetteloi,voilàunenécessitéàlaquellelapenséenepeutsesoustrairesans sedétruire.Encesens,ilyauncritérium,etnouspouvonsdéclarerquetoutcequiimpliquecontradicitonestfaux.
Toutefois,cenesltàencorequuncritériuminfaiillbledelerreur;ousilpeutserviràconnatîrequelquevérité,cenestjamaisquune véritédéirvéeetenfindecomptehypothétique.Enmathématiqueetenlogiquelesconséquenceslesplusrigoureusementdéduites nesontjamaisvraiesquensupposantvraieslesprémissesdoùonlesitre.Lesstoïciensontmieuxquepersonnemarquéle caractère des vérités de cet ordre : les majeures de leurs syllogismes ne sont jamais comme les nôtres, présentées à titre dasseritonscatégoirques:lisdironttoujours:SiSocrateesthomme,ilestmortel:o,retc.lIrestetoujoursàtrouverlecirtérium,non delavéirtédéduite,maisdelavéritéréelle.
Lavéritéréelleestlaccord,nondenosidéesentreelles,maisdenosidéesavecleschoses.O,rilyaunenécessitéanalogueàla précédente,maisempirique,quinousempêchedeliernossensaitonsautrementquedunecertainemanière.Sidissemblables quellespuissentêtreauxcausesquilesprovoquent,nossensaitons,entantquedisitnctesdesimages,entantquedonnées,se succèdentsuivantunordrequlinenousappartientpasdemodiifer:nouslesubissonssanslefaire.
lIyadessynthèsessubjectivementnécessaires:ilyadessynthèsesobjecitvementnécessaires:voilàledoublecritérium correspondantauxdeuxsortesdevéirté.Touteslesfoisqueladhésionseradonnéeàlunedecessynthèses,riennempêcherade lappelercertitude:ceseralacertitudemétaphysiqueoulogiquedanslepremiercas,lacerittudephysiquedanslesecond.Toutes lesfoisquelavérificaitonneserapaspossible,apiroirouaposteirori,onsecontenteradumotcroyance,oudumotfoi.lIsepeut dailleursquecettecroyanceatteignesubjectivementleplushautdegrédintensité,etparlàressembleàlacerittude.Lappeler cerittudemorale,commelefontquelquesauteurs,cestdaborddétournerlemotdesonsenshabituel:carilestconsacrépar lusageàdésigneruneautresortedecroyance.Cestensuitepréparerdeséquivoqueseneffaçantladistinctionlaplusnettequon puissetrouverentrelesdifférentessortesdecroyances.
Cettethéorieestaufond,bienqulisnesesoientpeut-êtrepastoujoursexpirmésavecuneirgueursuffisante,cellequontdéfendue lesplusgrandsphliosophes.lIarrivebienàDescartesdeprendreladhésionelle-même,oulimpossibiiltédedouterpourcirtéirum delavérité:ainsiquandilproclamelecogito,lidéclarequelesplusextravagantessuppositionsdesscepitquesnesauraient lébranler.Maisordinairement,linepalrequedelaclartéetdeladisitncitondesidées:cestdanslélémentintellectue,lprisenlui-mêmeetisolédetoutautre,quiltrouvesoncirtéirum.EtSpinozaitentàpeuprèslemêmelangage. Lexpressionsifréquemmentusitée,cirtéirumdelacertitude,estsouverainementimpropre.Siondéifnitlacertitudecommele dogmaitsmecartésien,ellenapasbesoindecirtéirum,ainsiqueSpinozalatrèsjustementfaitremarquer(Veigsnoolltegeatiruns, Spinoza,Deintellectusemendatione,p.12),etnensauraitavoir:carelleestunétatdelâmesuigeneris,etcestellequiestle critérium de l’évidence. Si on entend la certitude comme une forme de la croyance, suivant la théorie qui vient d’être exposée, il y a ileusansdoutedesedemanderenquelcas,etsousquellesgaranties,nousdevonsaccordernotreassentimen:tcestalorsquilya uncritéirum(etremarquonsquencomprenantainsilecritérium,lesenscommunadmetimpilcitementquelassenitmentdépendde nous,etconfirmedunemanièreassezinattendue,notrethéoire);maiscenestplusalorslacertitude,cestlavéirtéquecette marqueserviraàreconnaître.Entoutehypothèseetentoutedoctirne,ilfaudraitshabitueràneparlerqueducritéirumdelavérité. Cecritérium,lesujetletrouve,onvientdelevoir,ensisolantenquelquesortedelasensibiiltéetdelavolontépourneconsulterque sonintelligence.Noserreursviennentdecequelaplupartdutemps,etpeut-êtretoujours,nouscroyonsavecnotreâmetoutenitère.lI faudrai,tpourêtresûrdatteindrelavéirté,nefaireusagequedesesidées,etagircommedepursesprits.Est-cepossible?Et entendreainsilecirtéirum,nest-cepasdirequilnyenapas? Nous conviendrons sans peine qu’une telle opération, une telle mutilation psychologique, pourrait-on dire, est pratiquement impossible,outoutaumoinsfortdififcile.Maisdirequelavériténesedécouvrequemalaisément,qulifautdelongs,pénibleset incessantseffortspourlatteindre,etquondoitencoresedéfierdesoi-mêmequandonseflattedelavoiratteinte,cenestpas irsquerunparadoxebienhardi.Cequiseraitsurprenan,tceseraitderencontreruncirtéirumduneapplicaitonsifacile,quelavérité sétabilraitcommedelle-même,etquelesdivisionsséculairesentretouslesespritsdisparaîtraientcommeparenchantement.Faclie ounon,cecritéirumestleseuldontnousdisposions:etcestdanslamesureoùnouspouvonsnousrapprocherdecetétatidéalque nous sommes capables d’approcher de la vérité. Ensupposantmêmeachevéeetparfaitecetteséparaitondelespirtetdelasensibliité,ilresteraitdesdifficultés.Silyades synthèsesréellementnécessairespourtoutepenséehumaine,ilestincontestablequecertainessynthèses,contingentesenelles-mêmes, revêtent en certains cas pour l’esprit un caractère de nécessité apparente et trompeuse : il y a des synthèses qu’à un momentdonnénousnepouvonsrompre,quoiqueabsolumentparlan,tellespuissentêtrerompuesparunepenséeplusexercéeou plusaffranchiequelanôtre:oncitemllieexemplesdecesnécessitéstemporairesetenquelquesorteprovisoiresquisesont imposéesàlapenséedequelquesindividus,etnonàcelledetous.Ilfautbienconvenirquilestpourchacundenousfortmalaiséde savoir si nous ne sommes pas, en telle ou telle circonstance, dupes d’une illusion de ce genre. C’est pourquoi, même dans la scienceli,nefautpasêtretropabsolu:latoléranceetladéfiancedesoi-mêmesontdanstouslescas,etàtouslesdegrés,choses recommandables:linyapointdindividusinfaiillbles.Maissichacundenouspeutetdoittoujoursgarderquelqueréserveàlégard desesilaisonsdidéesmêmelespluséprouvées,saconifancepeutêtreentièrequandlivoiltesautresespritségalementculitvéset exercés, tomber d’accord avec lui. L’entente des hommes qui ont fait les mêmes efforts, et soumis leurs pensées aux mêmes épreuves,estlapproximaitonetlagarantielaplushautequenouspuissionsavoirdecettenécessitéquisimposeàtoutepensée humaine.Levraicritériumdelavéirtédanslascience,cestlaccorddessavants,cequi,bienentendu,esttoutautrechosequele consentementuniversel.Ondirapeut-êtreque,mêmequandlissontdaccord,lessavantspeuventsetromper:ilyenades exemples.lIsemblequelavéritédéifniitvereculechaquefoisquoncroitlasaisir.Maisquandonaccorderaitqueniunindividu,ni mêmeungroupeconsidérabledepersonnescompétentes,nesontjamaisabsolumentsûrsdepossédersurunpointdonnél,avéirté, lisuifftquecettenécessité,égalepourtoutepenséehumaine,quenousavonsprisepourcritéirum,soitconçuecommeunidéalquon poursuittoujours,etdontonpeutserapprochersanscesse.Ausurplus,lesdififcultésdecegenresontpurementthéoirques.Dansla pratiqueoncroi,te,tdanslesensvulgairedumot,onestcertain,sansfairetantdefaçons:etonabienraison.Maisrienpeut-êtrene montreplusclairemenltevéirtablecaractèredeladhésionquenousaccordons,mêmeàcellesdenosidéesquisemblentsimposer ànousavecleplusdenécessité:elleestdordreessenitellementpraitqueetsubjectif:ilfauttoujoursymettreunpeudebonne volonté. II Cestlanaturemêmedelactedecroyancequlinousresteàprésentàdéterminer:iciencorenousrencontronsdegrandes dififcutlés. Généralementl,acroyanceestregardéecommeunacteintellectuel:ellefaitenquelquesortepariteintégrantedelidée.Pourtantil semblebienquecroireoujugersoitautrechosequepenser.«Quest-cequejuge,rditexcellemmentM.Gayte(p.104),sicenest arrêterlapensée,suspendrelatteniton?Réfléchir,cestpasserparunesuccessiondejugementsquitous,aumomentoùlissont présentsàlaconscience,sontlobjetdenotrecroyance.Pluslarélfexionestintense,pluslaséireesltongue.Quinousobilgedoncà neplusréfléchir?linteillgencenesarrêtepasdelle-même.Unefoisquelleareçulimpulsion,ellepoursuitsaroute;elleroule toujoursinfatigable,sonroche,rsansjamaisleifxerausommet;ellefaitdérouler,devantlesyeuxdeceuxquimarchentàsasuite,les possiblesennombreindéfini,maisellenemesurepaslaréailté.Lavolontéluiimposeunarrêt,enluiifxantunbu.tJaipirs,par exemple,larésoluitonderélféchirsurleproblèmedelaliberté.Maisceproblèmenemelaissepasindifféren.tJedésireounedésire pasêtreilbre.Suivantlunoulautredecesdésirs,jeportemonattenitondepréférencesurlunedesdeuxatlernativespossiblesl:a ilbertéouledéterminisme,cest-à-direjecherche,jeveuxdesargumentsenfaveurdeluneoudelautre;carjeneleschercherais passijenelesvoulaispas.Cestdoncunbutquelavolontésimposeàelle-même;etlorsquellelaatteint,cest-à-direlorsqueelle sestdonnéàelle-mêmedesmoitfsdaffirmerlathéoirequiestlebutdesesefforts,ellesereposedanslacertitude,ellecroi.tCest doncàcausedubutatteintquedanscertainscaslaréflexionsarrête.Autrementellenetrouveraitpasdeilmites:parconséquent ellenaboutiraitàaucuneaffirmation.Lescepitcismeestunepreuvevivantedufaitquenousavançons:lescepitqueeneffe,testune intelligencetoujoursenmouvemen,tuneattenitontoujourstendue,quidemandeàlapenséeelle-mêmeunedécisionquellene sauraitluidonner.Ilnesattacheàaucunethéorie,parcequlinesaitpasvouloir.lIdélibèretoujoursparcequilestincapabledarrêter sa pensée par un acte de libre arbitreli: nela domine pas ; il se laisse dominer par elle. La multitude des opinions qui se présentent àlui,lécrase,ilnapaslecouragedenfaireunesienne.Cetteindécisionquenousremarquonsenluiserait-ellepossible,siles idéesavaientlavertudesimposerparelles-mêmes?» Àunpointdevuepurementlogique,lisuffitdunpeudattenitonpourvoirquepenserousereprésenterunechose,etlaposercomme réelle,sontdeuxactesdistincts;carlunpeutavoirileusanslautre.Sionlesregardetousdeuxcommedenatureintellectuelle, encorefaut-ilbiendisitnguercesdeuxfoncitonsdeilnteillgence.Ilfaudraunnomparitcuilerpourlaseconde.Cesera,silonveu,tle motjugement;maisdèslors,ondevrasinterdirerigoureusementlemploidecetermepourdésignerlopéraitontoutementalequi consisteàétabilrdesrapportsentredesreprésentations,etquonappelleraparexemplesynthèsementale.Leslogiciensnontpas toujoursobservécettedisitncitonpourtantsinécessaire. Maislejugementainsidéfini,doit-livraimentêtreappeléunacteintellectuel?Silesmotsontunsensprécisi,lfautdirequepenser, cestavoirprésentesàlespirtcertainesidéesouencoreunirdesidéesoudessensaitonsparunrapportdéterminé.Maisle jugemen,tsionentendseulementparlàlactedaffirmer,nestniuneidée,niunrapport:ilnajoutepasuneidéeaucontenudeildée surlaquelleilporte,carautrementcetteidéeneseraitplusexactementcelledelachosequelespirtsereprésente.Avantcomme aprèslaiffrmation,lidéeresteexactementcequelleétai.tIlyaquelquechosedenouveaupourtant;maiscequiestsurvenunest pas un élément de représentation ou de pensée proprement dite : c’est un acte d’un tout autre ordre, qui dans la conscience donne à ildée,objetdelafifrmation,uneposiiton,uneformenouvelle.Cetactenétantpasdordreintellectue,lonnepeutmieuxledésigner quenlappelantactedevolonté.Jugerouaffirmer,cestfaireensortequelidéeàlaquelleonadhèresoit,nonpascertesvraieen soi,maisvraiepourceluiquiycroit(cequiestlaseulemanièrepourelledêtre,àlégardduneconsciencedonnée,vraieensoi); cestluiconférer,parunactesuigeneirs,unesortederéailté,quiestleseuléquivalentpossibledelaréalitévéritable. Maisdéclarerquejugeroucroirecestvouloir,nest-cepasfaireausenscommunetaulangageunevéritableviolence?Cette proposiitonaleprivilègedétonnernoscontemporains,etdenindignerquelques-uns.Ellenestpourtantpasnouvelle.Lesstoïciens, quiétaient,commeonsai,tfortbonslogiciens,lontformuléelespremiers;ettouslesphilosophesgrecspostéireursàAristote,si promptsàladispute,neparaissentavoirsoulevéaucunedififcutlésurcepoint.Parmilesmodernes,Descartes,Malebranche, Spinozasontdumêmeavis.Cesautoritésdevraientdonneràrélféchir. Poursimpilife,rcommençonsparécarterunequesiton,àlavéirtéfortétroitementiléeàcellequenousexaminons,disitnctepourtant, celledelailberté.Sansêtrepartisandulibrearbitre,onpeutsoutenirquelafifrmationestactedevolonté:lesstoïciensetSpinozaen sontlapreuve.Mêmeensupposantquelentendementetlavolonténesoientquelesdeuxaspectsdunemêmechose,onpeutdire avecSpinoza(Eth.I,Ip.rXLVIII.)quelaffirmaitonestlaspectvolontairedelapensée:ledéterministeleplusrésolupeutdire quaffirmercestvouloi,rmaisnécessairemen.tOnpeutdoncréservericilaquestionduilbrearbitre:liyatoutintérêtàétudier séparément deux problèmes si difficiles. Lobjection,quiseprésentecommedelle-même,estcelle-ci.Commentdirequejuge,rcestvouloir?Puisj-enepasvouloirquedeux etdeuxfassentquatre?Lepropredesvéirtésdecegenrenest-ilpasdesimposersansrésistancepossible?Nycroit-onpasdès quonlescomprend?Jeneveuxpasquelestroisanglesduntiranglesoientégauxàdeuxdroits:celaes,tquejeleveuilleounon.Quliyaitlàunevéritablenécessité,maisseulementpourlapensée,cestcequepersonneneconteste,etcequenousavons reconnu tout à l’heure. Mais autre chose est la nécessité de penser ou de lier des idées ; autre chose, la nécessité de croire, c’est-à-diredeposercommevraiesabsolumentlessynthèsesquelespritnepeutrompre.Àlarigueu,ronpeutcomprendreunevérité géométirque,sansycroire.Polyénusgrandmathémaitcien,dontpalreCicéron(Acad,.I,I33,106.),sétantrangéàlavisdÉpicure, déclaraquetoutelagéométrieétaitfausse:ilnelavaitpourtantpasoubilée.Lesépicuirens,gensfortdogmaitquesdallieurs,ne croyaientpasauxmathémaitques:lessceptiquesendoutaien.tSeulement,commenousnavonsdordinaireaucuneraisonde contesterlesvéirtésdecetordre,nousycroyonsenmêmetempsquenousypensons.Parcequliestspontanénotreassenitment faitpourainsidirecorpsavecildée:etlanécessitédelidéesétendenquelquefaçonàlassenitmentquilaccompagne.Maiscest làunelilusionpsychologique.Lacroyance,icimême,estautrechosequelapensée;cestpourcetteraisonquellepeutsurvivreàla pensée,etquenouspouvons,commedisaitDescartes,tenirencorecertainesproposiitons,pourvraies,aprèsmêmequenous avonscessédypenser,cest-à-diredenapercevoirclairemen,tetdensentirlanécessité. Direquecroire,cestvouloir,cenestpasdirequoncroitcequonveut.Personne,eneffet,nesouitentquelacroyancesoitunacte devolontéarbitraire,etnesoitquunactedevolonté.lIfautdesraisonsàlacroyance,commeilfautdesmotifsàlavolonté.Croire pourtan,tcestvouloir,cest-à-diresarrêteràuneidée,sedécideràlaffirmer,lachoisirentreplusieurs,laifxercommedéfinitive,non seulementpournotrepenséeactuelle,maispourtoujoursetpourtoutepensée.Cestassurémentfaireautrechosequedesela représenter. Lephliosophequiasoumislathéoriedelacroyancevolontaireàlaciritquelaplusserréeetlaplusvigoureuse,estM.PaulJanet:
nousnesauironspassersoussliencelesargumentsquilfaitvaloiravectantdautoirté:«Ilnyapaslieu,selonnous,diti-l(Traité élémentairedephilosophie,p.278,Pairs,Delagrave,1880.),deconfondrelaffirmationetlavoiltion.lInyanulrapportentrece jugement:jafifrmequelaterreestronde,etcetautre:jeveuxmouvoirmonbras.Sansdoute,aumomentoùjeveux,jaffirmemon vouloir;maismonaffirmationnestpaslevouloirlui-même;demêmequelorsquejedis:jesouffre,jaffirmemasouffrance,maisma souffrancenestpasenelle-mêmeuneaffirmaiton.Lorsquejedis:jeveuxmouvoirmonbras,oùestlavoiltion?Est-cedans laffirmaitonquemonbrasestmû?maiscenesltàqueleffetdemonvouloi,rcenestpaslevouloirlui-même;àplusforteraison,il nestpasdanscetautrejugement:monbrasaétémû.Dira-t-onquelejugementvoiltifconsisteàdire:monbrasseramû?Maisce nestlàquuneprévision,uneinduction;cenestpasune,volition.Enunmo,ttoutjugementportesurleprésen,tlepasséoulavenir; o,raucundecesjugementsnereprésentelefaitdelavolition.Dira-t-onquicilejugementportesurlepouvoir,nonsurlefait?Mais dire : je peux mouvoir mon bras, ce n’est pas dire : je veux le mouvoir. De quelque manière qu’on s’y prenne, jamais on ne fera que laffirmationreprésenteunevoiltion,àmoinsdechangerlesensdumotaiffrmation,etquonneluifassedireprécisémentceque signiifelemotvoliiton;maisalorsilnyauraplusdetermepoursignifiercequenousappelonsdordinaireaiffrmaiton.Dailleurs, afifrmerunfaitseratoujoursautrechosequevouloirunacte.Afifrmerunfait,cestdirequunfaitexiste:vouloirunacte,cestfaire quilsoi,tcestladifférencedelindicaitfetdusubjoncitf.Lefiatluxnestpasuneaffirmaiton,cestuneaction.Danslafifrmaiton (quandelleestvraie),ilnyairendeplusquecequliyadanslidée.Danslavoliitonli,yaquelquechosedeplus:lexistenceelle-même, le passage du non-être à l’être, le changement. «Onpourraitdirequelavolonténestquunacteintellectue:lcarvouloir,cestchoisi,rcestpréférer,cesttrouverunechosemeilleure quuneautre,cestjuge.rCestencoreuneconfusiondidées.Autrechoseestlechoixl,apréférencedelintelligence;autrechoseest lechoix,lapréférencedelavolonté.JepréfèreCornelileàRacine,cest-à-direjelejugeplusgrandqueRacine;maisjeneveuxpas quecelasoit:celaestindépendantdemavolonté:jenypeuxrien.Lorsquejeprononcecejugemen,tjenentendspasseulement exprimermapréférenceetmongoût;maisjedéclarequecelaestainsi,indépendammentdemongoûtparticulier.lInyapaslà ombredevolonté.lIenestdemêmesi,auileudejugerdeshommesetdesécirts,jejugedesacitons,mêmedesactionsquisont miennesetquiseprésententàmoipourêtrefaites.Direquejepréfèreluneàlautre,quejelatrouveplusjusteouplusutlie,cenest pasencorelavouloir:cartantqulinyaquepréférenceintellectuelle,elleresteàlétatcontemplatif:ilnyapasdaciton.Quesiau contraireilsagitdunepréférencedelasensibliité,cestuneautrequestion.» Enrésumé,lavoilitonnenfermeaucuneafifrmation,etdautrepartlaffirmationestautrechosequelavoliiton.Examinonscesdeux points. Danscejugement:jeveuxmouvoirmonbras,oùestlaiffrmaiton?Assurémentilnesagitpasdedirequenvoulant,jaiffrmemon vouloir:cenestpasdanslexpressiondelacte,danslamanifestationextéireurequilfautchercherlaiffrmation:cestlevouloir mêmequidoi,tcommeleditfortbienM.Jane,têtrelaffirmation.Or,quest-cequevouloirunmouvementdubras?Cenestcertes paslexécuter:laccompilssementdelacte,M.Janetenconvientavectoutlemonde,nedépendpasdirectementdelavolonté. Vouloirunmouvementcorporel,puisqueaussibiennousignoronscomplètementcommentlisexécute,cestuniquementnousarrêter àlidéedecemouvement,luidonnerdanslaconscienceuneplaceàpar,técartertouteslesreprésentaitonscontraires,ou simplementautres:lemouvementréelvientaprès,suivantlesloisgénéralesdeluniondelâmeetducorps.Quest-cemaintenant quaiffrmer?Nest-cepasaussi,aprèsunedélibérationplusoumoinslongue,sarrêteràuneidée,écartercellesquilacontredisen,t luiconférerunesortederéalitél,amarquerdunepréférence?Envisagéseneux-mêmes,dansleforintérieuroùlissaccomplissent tousdeux,etoùlissaccomplissentseulemen,tlesdeuxactesnesont-ilspasdemêmenature? Ilresteunedifférencepourtantquenoussommesloindevouloirméconnaître.Quandcestlidéedunmouvementcorporelquisoffre àlespirt,lavolontéoulacroyanceapourrésultatdefairenaîtrelemouvementlui-même;aucontraire,ladhésionàuneidéene produitdirectementdumoins,aucuneffetdanslemondeextérieur.Maissiimportantequesoitcettedifférence,ellenempêchepas les deux actes d’être de même nature. C’est par une circonstance indépendante du vouloir et de la croyance que dans le premier cas,liseproduitunchangementdanslemondephysique.Cenestpasparcequenouslevoulons,dumoinscenestpasuniquement parcequenouslevoulonsquelemouvementsaccompilt:cestàlidée,ausimplefaitdereprésentationdanslaconscience,etnon auvouloir,questilécemouvemen.tLapreuveenestquelidéedunmouvement,dèsquelleseprésenteàlaconscience,etavant mêmetoutactedevolonté,estsuiviedelébauchedecemouvement,etsouvent,commedanslesomnambulismel,emouvementse produit en dehors de toute volonté. Dèslors,ilestfacilederépondreàlaquestiondeM.Janet.Lavoliitonnestnidanscejugement:monbrasestmû;nidanscelui-ci: monbrasaétémû;nidanscelui-ci:monbrasseramû.Onpourraitdirequelleestdanscelui-ci:monbrasdoitêtremû.Maisplutôt ilestimpossibledexpirmerpardesmots,nécessairementempruntésàlordreintellectuel,unactequiparessencenestpas intellectuel.Cequonenpeutdiredemieux,cestquecestunesortedeifa.t Par suite, nous pouvons accorder à M. Janet que affirmer un fait sera toujours autre chose que vouloir un acte. Nous conviendrons volonitersquedeuxtermesdistincts,ceuxdevoilitonetdaffirmaiton,seronttoujoursnécessairespourdésignerdeuxopéraitonsdont lesconséquencessontsidifférentes.Ladifférencecependantestànosyeuxtoutextirnsèque.Aiffrmerunfait,cestnonpascertes fairequliexistehorsdenous;maiscestfaireensortequilexistepournous.Vouloirunacte,cestchoisirentreplusieursidéesqui seprésententànous,etparuneconséquenceattachée,envertudesloisnaturelles, à la préférence que nous lui accordons, la réaliser hors de nous. Nousnedironspasnonplusquelavolontésoitunacteintellectuel,etnousaccorderonsàM.Janetquilfautdisitnguerentre lopérationquisaccompiltdansnotrepensée,lorsqueparexempleCorneillenousparaitsupérieuràRacine,etlaffirmaitonpar laquellenousdéclaronsquelunestsupéireuràlautre.Seulementcetteopéraitondeilntelilgence,distinctedelapréférencedela volonté,nousnelappelleronsniunjugemen,tpourlaraisonindiquéeplushau,tnimêmeunepréférence.Ànosyeux,dèsquilya réellementjugementoupréférence,lentendementetlavolontésunissent:lactevolontairesajouteàlareprésentaiton.Se représenterCornelilecommesupérieuràRacine,cenestpasassurémentvouloirquecelasoit,linyapaslàombredevolonté.Mais jusque-làcestunpurpossible.Enrevanche,aumomentoùjejugequeCornellieestsupérieuràRacine,jechoisisentredeux opinionségalementprésentesàmapensée;jeprendsunparit;jedécide:etcestlàunactedevolonté.Ilestbienvrai,commeledit M.Jane,tquenprononçantcejugemen,tjenentendspasseulementexprimermapréférenceetmongoût:jedéclarequecelaest ainsi,indépendammentdemongoûtparitculie.rTelleesteneffetlaprétenitondetoutecroyance:maisquinevoitquenréailté,jene faisquexprimermapréférencepersonnelleetmongoûtparitculier?Etilenestainsidetousnosjugements:lesvéirtéslesplus absolues et les plus universelles ne deviennent objets de croyance qu’en revêtant la forme de jugements individuels, acceptés, et comme ratifiés par telle personne donnée. EndehorsdesobjecitonssiingénieusesetsiifnesdeM.Janet,lathéoiredelacroyancevolontairesoulèveencorebiendes difficultés:examinons-enquelques-unes. OntrouvechezSpinozaunethéorieoriginaleetprofondedelacroyance.Lesidées,suivantcephliosophe,nesontpascommedes dessinsmuetseitnertestracéssuruntableau (Eth., II, pr. 43, pr. 48, schol.) : elles sont actives et en quelque sorte vivantes : c’est toujours une réalité qu’elles représentent. En d’autres termes, l’idée et la croyance ne sont jamais séparées (Eth., II, pr. 17 corol.) : l’analyse les distingue, etattirbueluneàlentendement,lautreàlavolonté.Maislentendementetlavolonténesontaufondquuneseuleetmêmechose (Eth., II, pr. 49, corol.) .Dèslors,penserunechose,dequelquemanièrequecesoit,cestycroirel:esimageselles-mêmesnefontpasexception (Eth., II, pr. 17, Cf. 49, corol., schol., p. 121.) : la croyance s’y attache, aussi longtemps du moins, que d’autres images, accompagnées d’autres croyances, n’y font pas obstacle. Par suite être certain, c’est avoir une idée que non seulement aucune autre ne vient contraautre moment, si la connaissance se complète et s’achève, peut rencontrer une idée antagoniste. Comme l’absence de doute est autre chose que l’impossibilité absolue de douterrier en fait, mais qu’aucune autre, absolument parlant, ne saurait contrarier. D’autre part, croire, c’est avoir une idée à laquelle aucune autre ne s’oppose actuellement, mais qui, à un (Eth., II, pr. 49, corol., schol.) ,liyaentrelacroyanceetlacerittudeunedifférencespécifique.Parsuite,lerreurnestjamaisquelabsenceduneidéevraie,cest-à-direunepirvaiton (Eth., II, pr. 35.) ,ouunenégaiton.Douterenifncest,ayantuneidée,enconcevoirenmêmetempsuneautrequifasseobstacleàlapremièreet arrête la croyance. Ilyauraitbiendesréservesàfairesurcettedisitncitonentrelimpossibilitédedouteretlabsenceactuelledudoute,surtoutsurla théoirequinevoitdanslerreurquunepirvaiton,et,parsuite,laréduitàlignorance.Toutefoisilfautreconnaîtrequeladoctirnede Spinozaestinattaquableencesensquejamais,ayantunepensée,nousnesuspendonsnotreassenitmentsansavoirpourcelaun moitf,sansopposeruneidéeàuneidée:nousnedoutonsjamaissansraison.Aucunecontestaitonsérieusenepeutséleversurce poin.tDèslors,commelappairitonduneidéedanslaconscienceparaîtdépendretoujoursdesilensquilunissentàuneidée antéireure,desloisdelassociationdesidéesoudecellesdelentendement,onpeutêtreamenéàsoutenirquelacroyance,en dernièreanalyse,estunfaitintellectue;loudumoins,siellenelestpas,siavecSpinozaonpersisteàlattribueràlavolonté,ilfaudra direquecestauxseulesloisdelapenséequelleobéit;lerôledelavolontéseratellementréduitquenréailtéilserasuppirmé: cestbienlàquabouittlathéoriedeSpinoza. Cette conclusion serait invincible si on pouvait prouver qu’une idée, capable de faire obstacle à une idée donnée, n’apparaît jamais danslaconsciencequesouscertainescondiitonslogiquesouempiriques,maissoumisesàuneirgoureusenécessité,ettellesque lavolonténaitsurellesaucuneaciton.Or,cestprécisémenltecontrairequiparaîtvrai.Quellequesoitildéequiapparaisse,onpeut toujoursfaireéchecàlacroyancequitendànatîreenévoquantsimplementlesouvenirdeserreurspassées.lInestpasbesoin dattendrequuneidéeamèneàsasuitelesidéesparitculièresquiluiseraientantagonistes,cequi,enbiendescas,pourraitêtre long:uneidée,unesynthèsequelconquepeuventtoujoursêtretenuesensuspensparcetteseuleraisonquenoussommesfaillibles:cetteraisonesttoujoursprête,oudumoinsnouspouvonslasusciteràvolonté:ellepeutserviràtoutesfins:elleestcommele factotumdudoute.Cestpourquoionpeuthésiteravantdadmettrelespropositionsmathémaitqueslesplusévidentes.Mêmele douteméthodiquenestpasautrechose.Avoirtoujourspar-deverssoicemotifdedoute,retlopposeràtoutecroyancequi commenceàpoindre,voliàleseulprocédéquelasagesserecommandepournousmettreengardecontrelerreur. lIyaplus.Indépendammentdecetteraisonconstantedesuspendresonassentiment,liestcertainquonpeuttoujoursencherchant bien, en trouver d’autres plus particulières et plus précises, qui, le doute une fois ébauché, viennent lui prêter appui. Quelle est la véirtéquonnaitjamaiscontestée?Quelestleparadoxeenfaveurduquelonnepuissetrouverdesraisonsspécieuses?cestlefait que,depuislongtemps,lessceptiquesontsignalédansleurfameuseformule:pantilogôlogosanitkeitai(«Àtoutargumen,t s’oppose un argument contraire », Sextus Empiricus, Hypotyposes, I, 6.). Qu’on ait tort ou raison d’agir ainsi, peu importe pour le moment:cestunfaitquenousconstatons.Maissildépendtoujoursdenousdefaireéquiilbreàuneidéedonnée,onrevientàla théoriedelacroyancevolontaire.Cesttoujoursparceque,pouvantfaireautrement,lavolontésattachedepréférenceàuneidée, cestparcequellecessedechercheretdévoquerdesraisonspossiblesdedoute,rquelacroyancesemainitent.Suppirmezla volonté,etilneresteraplusquunfantômedecroyance.Peut-oneneffetdonnercenomàcettesortedadhésioninstincitvequi sattacheàtouteidéenaissante,auximagesdurêveetdelhallucination,quaucunerélfexionnaccompagne,quaucundoutena précédée,quinaétésoumiseàlépreuvedaucunexamenattenitf?Cettesortedecroyance,sicenestune,estdumoinsfort différentedecelledelhommeraisonnablequiveutsavoir:cestdecelle-ciseulementqulisagit.Uneautreobjeciton,plusgrave peut-être, peut encore être opposée à la théorie de la croyance volontaire. Nous n’avons aucune conscience, quand nous croyons, de faireunactedevolonté;etqueseraitunactedevolontédontnousnauironspasconscience?Etsinousenavonsconscienceà quelquedegré,lacroyance,ipsofacto,disparaî,touperdsoncaractèreessenitel.Croireeneffet,croirecomplètementdumoins,et avecuneenitèresincéirté,cestconstatercequies.tToutelavaleurdelacroyanceànosyeuxvientprécisémentdecequelle simposeànous,decequenousnysommespourrien.Ymettrevolontairementquelquechosedenous,noussolliciteràcroire, seraitunesortedetircheirequivicieraitlacroyanceàsaracine;lecharmeseraitrompu.Lacroyancenestrien,sielle[n]est involontaire. lIfautbienconvenirquequandnousdonnonsnotreadhésionàunevérité,nousnecroyonspasordinairementfaireactedevolonté. Toutefois,lefaitquenousnavonspasconsciencedagirvolontairement,encroyan,tneprouvepasabsolumentquenousnele fassionspas.Nousnavonspasconsciencenonplus,quandnouspercevonslacouleuroulatempérature,demettreennos sensationsquelquechosedenous.Etpourtantbienpeudepersonnescontestentaujourdhuicettevéirté,quisembleencoreun paradoxeausenscommun.Nesepeut-lipasquelesujetintervienneencoreduneautrefaçondanslactiondecroire?Bienplus:liy a des cas, et ici c’est au sens commun lui-même que nous faisons appel, ou nous n’hésitons pas à faire à la volonté une large part dans nos croyances. Nous n’avons pas conscience de faire acte de volonté quand nous nous trompons ; se tromper volontairement estunecontradictiondanslestermes.Cependantliyadeserreursquonpunit:lepharmacienquidonneunpoisonpourunremède, laiguilleurquidiirgeuntraindechemindefersurunefaussevoie,nefontpasexprèsdesetromper.Yauraiti-lcependantquelque jusitceàlespunir,sileurvolonténétaitpourirendansleurerreur? Ilfautdisitnguerdeuxchosesdanscetteacitondecroirequiparaîtsimple,etquinelestpas.Lassentimentdanslactedecroire nestpas,danslavieordinaire,regardécommelélémentessenitel.Eneffet,nousnecroyonspaspourcroire,maispouratteindrele réell,achose,qui,enifndecompte,nousintéresseleplus,etpeut-êtrenousintéresseseule.Ilenrésutlequecetacte,subordonnéà uneifnquiluiestextérieure,seffaceenquelquesorteauxyeuxdelaconscience;ilestsacrifié;nousnefaisonsattenitonquau résutla;tnousoubilonslemoyenemployépourlatteindre.Cestunesortedlliusiondoptique,analogueàcellequenouscommettons quandnouslocailsonsnossensationsàlendroitoùagissentlescausesquilesprovoquen,tetnondansnosorganes,oudansle cerveau où elles se produisent réellement.
Pourdistinguercetélémentvolontaire,sanslequelpourtantlacroyancenexisteraitpas,ilfautuneétudeattentivee,tuneanalyse minuiteuse;sionyprendgardepourtan,tonifnitparlapercevoir.Lelangagelui-mêmeenconvientquelquefois:témoindes expressions comme, accorder son assentiment, se rendre à l’évidence, et bien d’autres.
Maisàparitrdumomentoùnousavonsprisconsciencedecetteintervenitondelavolonté,lacroyancenest-ellepasparlàmême amoindire?Croit-onencore,danslesensvraidumo,taumomentoùonsaitquonnestpasforcédecroire?Nousavouerons volonitersquenperdantsonapparencedenécessité,lacroyancechangedecaractère;maisnousnestimonspasquelleyperde beaucoup.Quelinconvénientyaurait-li,sitousleshommesétantbienconvaincusquliyaquelquechosedesubjecitfentoute croyance,mêmelapluscertaine,onnerencontraitplusdecesespritstranchantsetabsolus,quinedoutentderien,nadmettent aucunecontradiction,mépirsentceuxquinecroientpascequilscroien,tetsonttoujoursprêtsàimposerleursopinionsparleferet parlefeu?Onnestpasréduitpourcelaàêtrescepitqueouàcroiremollement.Aprèsdemûresréflexionsetdesérieuses recherches, on peut s’arrêter de propos délibéré à des croyances désormais fermes et inébranlables. La plupart du temps, ce qui décidedenoscroyances,cestlehasarddeléducaitonoudelanaissance,oulesexemplesquenousavonseussouslesyeux,ou lespremierslivresquenousavonslus,oulespremiersmaîtresquenousavonsentendus.Nosconvicitonsseraient-ellesmoinsfortes, siauileudelesavoirsubiesaveuglémen,tnouslesavionsforméesenconnaissancedecause,aprèsréflexion,àlâgedhomme? Lacroyancepeutsétabilrsoildementsansreniersesoirgines.Simaintenant,enraisondecesoirgines,onsongequepeut-être, malgrésabonnevolonté,onnapaspirslamellieurevoie,siuneombrelégèrededouteflotteparfoisautourdescroyances,quonna admisespourtantquàbonescient,sionestindulgentpourlesautres,siongardesonespirtilbreetaccessibleàtouteidéenouvelle, où sera le mal ? C’est une pensée de derrière la tête qui en vaut bien une autre. La vraie conclusion de la théorie de la croyance volontaire est une grande leçon de tolérance.
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents