La critique de la connaissance et la méthode de la philosophie - article ; n°18 ; vol.30, pg 137-153
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Revue néo-scolastique de philosophie - Année 1928 - Volume 30 - Numéro 18 - Pages 137-153
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Publié le 01 janvier 1928
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Langue Français
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Extrait

René Kremer
La critique de la connaissance et la méthode de la philosophie
In: Revue néo-scolastique de philosophie. 30° année, Deuxième série, N°18, 1928. pp. 137-153.
Citer ce document / Cite this document :
Kremer René. La critique de la connaissance et la méthode de la philosophie. In: Revue néo-scolastique de philosophie. 30°
année, Deuxième série, N°18, 1928. pp. 137-153.
doi : 10.3406/phlou.1928.2502
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1928_num_30_18_2502VIII
LA
CRITIQUE DE LA CONNAISSANCE
ET LA MÉTHODE DE LA PHILOSOPHIE •)
I
Pendant longtemps, l'idéalisme a si bien dominé la phi
losophie moderne qu'il paraissait en être la forme défini
tive. La critique de la connaissance semblait s'identifier
avec lui. N'était-elle pas une création de Kant, indissolu
blement unie à son idéalisme transcendantal ? Le réalisme
n'était-il pas un autre nom de ce dogmatisme qu'il avait
ruiné à jamais ? Dans sa prétention d'atteindre les choses
en soi, n'allait-il pas à l'encontre du résultat le plus assuré
de la critique, et même de son premier principe, à savoir
que l'esprit doit chercher en lui-même les lois de la con
naissance et du réel, et qu'il ne peut se dépasser lui-même?
En somme, le réalisme ne serait qu'une régression dans
l'histoire de la philosophie. Ce qui le montre le mieux, c'est
que les néo-réalistes en appellent à ce bon sens vulgaire
qui, raillait Kant, doit suppléer à l'évidence et à la clarté
des raisonnements dans les questions subtiles où la finesse
des dogmatistes est mise à une trop rude épreuve ]). En
fait, ont-ils seulement essayé de poser le problème de la
*) Ce chapitre est extrait d'un ouvrage intitulé Le néoréalisme anglais, cou
ronné par l'Académie royale de Belgique, et qui vient de paraître (N. D. L. R.).
1) Cf. Prolegomena zu einerjeden kiinftigen Metaphysik, die als Wissenschaft
wird auftreten wollen. Introduction, édit. Cassirer, Immanuel Kants Werke, IV,
Berlin, 1913, pp. 6-8.
1 138 R. Kremer
connaissance ? Ils se servent de notions, de principes, d'évi
dence, sans leur faire subir cet examen réfléchi qui est
l'objet de la théorie générale de la connaissance. Le réa
lisme analytique est une résurrection paradoxale d'un
platonisme naïf qui ne doute aucunement de la conformité
de l'esprit avec le réel. Il croit sans hésiter à la valeur des
concepts abstraits, en même temps qu'il accorde une con
fiance entière à l'expérience et aux sciences sans examiner
leur valeur.
Si le réalisme était conforme à cette description, il ne
mériterait assurément pas de retenir l'attention. Une cri
tique de la connaissance est indispensable à la philosophie.
Depuis Kant surtout, on s'est convaincu que la métaphys
ique et même la connaissance en général n'est possible,
— philosophiquement — que moyennant cette préface
générale de toute recherche particulière. Si toute science
suppose le discernement des certitudes vraies d'avec les
persuasions illusoires, la science des sciences exige un
jugement approfondi sur la vérité en général, et sur le
rapport de notre esprit à l'être.
Mais les néo-réalistes n'ont nullement négligé de poser
le problème de la connaissance, et même dans les termes
de l'idéalisme. Les lignes suivantes d'un réaliste d'une
autre école s'appliquent bien à leur position et indiquent
comment ils envisagent le problème : « Les idées sont-
elles de pures formes de notre intellect sans base manifeste
dans la réalité ? Ou bien entre nos perceptions et les êtres
existe-t-il un rapport fondamental, et ce rapport se laisse-
t-il, en de certaines limites, constater à la raison ? Pour
parler avec Kant, est-ce l'objet qui discipline la pensée, ou
bien est-ce la pensée qui impose ses formes innées à l'objet
de ses perceptions ? D'évidence, voilà le problème capital
de la science générale ; et toutes les recherches particu
lières sont solidaires de cette enquête » 1). Les réfutations
1) A. Van Weddinoen, Les bases de l'objectivité de la connaissance dans le La critique de la connaissance 139
de l'idéalisme qui tiennent une place plus ou moins large
dans les écrits de nos auteurs montrent bien qu'ils n'ont
pas négligé le problème. Quant au principe de l'imma
nence, l'un de leurs thèmes familiers, c'est précisément de
montrer qu'il est arbitraire, que la conscience se dépasse
toujours elle-même et nous fait connaître les objets trans
cendants. La critique de la connaissance, malgré certaines
tendances dogmatistes, n'est pas absente du néo-réalisme.
Nous reprocherons plutôt aux néo-réalistes de s'être
trop placés, dans leur critique, au point de vue négatif qui
consiste à réfuter l'idéalisme. Trop souvent ils se bornent
à juxtaposer leur épistémologie positive à cette discussion.
Une théorie générale de la connaissance ne doit pas
s'arrêter à ce point de vue, si important soit-il. Elle doit
avant tout considérer simplement la connaissance comme
telle, étudier sa nature propre et son rapport à l'être d'une
manière désintéressée et détachée de la polémique. Elle
deviendra tout naturellement une critique, mais ce n'est
pas sa seule, ni même sa principale fonction. Sans doute,
en fait, la théorie de la connaissance est sortie de la cri
tique. C'est à l'examen des oppositions entre certaines con
naissances ou certains aspects de l'être, à l'occasion encore
de théories sceptiques ou subjectivistes qu'elle a pris nais
sance. Mais elle a raison d'être en elle-même.
Par sa généralité même, cette considération doit occuper
la première place, au point de vue systématique et essent
iel, non au point de vue psychologique de l'exposition,
dans la science des principes. Elle appartient donc à la
métaphysique. La science de l'être doit être la science de
la connaissance de l'être l).
La théorie de la connaissance est si loin d'appartenir
domaine de la spontanéité et de la réflexion (Extrait du t. XLII des Mémoires
couronnés par l'Académie royale de Belgique). Bruxelles, Hayez, 1889, p. 3.
1) Cf. S. Thomas, In L. II Metaphys , 1. 1, 1. 2, I. 5, L. IV, 1. 5, 1. 6, L. XI,
1. 4, 1. 5, éd. Cathala, Turin, 1915, n05 273, 289-291, 331, 570-610, 2206, 2210,
2211-2213. R. Krcmei* 140
exclusivement à l'idéalisme, qu'elle a toujours fait partie
de toutes les philosophies, sous une forme ou sous une
autre. Il n'est pas de réflexion philosophique véritable, si
elle ne s'étend au rapport de l'objet avec le sujet, comme à
l'objet lui-même. Lorsque saint Thomas d'Aquin, au début
de son traité De ente et esseniia l), capital pour l'étude de
sa métaphysique, annonce qu'il étudiera les rapports de
l'être réel et de l'être logique, fait-il autre chose qu'in
diquer l'objet de la théorie générale de la connaissance ?
Et lorsque les scolastiques examinent à propos de diverses
questions si une distinction est réelle ou logique, lorsqu'ils
distinguent les concepts univoques et analogiques, n'appli
quent-ils pas la critique de la connaissance ? *) Descartes
et Kant, et d'autres après eux, nous ont appris que cette
réflexion doit être conduite d'une manière plus explicite et
que les résultats doivent être exposés plus systématique
ment. Un progrès de ce genre est assurément un gain pour
la philosophie ; il n'est pas une révolution.
Le réalisme contemporain se doit de constituer une
théorie complète de la connaissance et de la creuser jusqu'à
ses derniers fondements. Les néo-réalistes, estimant avoir
réfuté l'idéalisme, ont surtout fait consister la critique
dans l'étude générale des oppositions entre les qualités
sensibles. Ils ont trop négligé la question kantienne par
excellence de la possibilité de la métaphysique pure et de
la connaissance de l'être en soi. C'est sans doute pour ce
motif qu'ils

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