Le néo-dogmatisme (suite et fin) - article ; n°73 ; vol.19, pg 86-115
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Revue néo-scolastique de philosophie - Année 1912 - Volume 19 - Numéro 73 - Pages 86-115
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Publié le 01 janvier 1912
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Langue Français
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Extrait

L. Du Roussaux
Le néo-dogmatisme (suite et fin)
In: Revue néo-scolastique de philosophie. 19° année, N°73, 1912. pp. 86-115.
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Du Roussaux L. Le néo-dogmatisme (suite et fin). In: Revue néo-scolastique de philosophie. 19° année, N°73, 1912. pp. 86-
115.
doi : 10.3406/phlou.1912.2009
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1912_num_19_73_2009HI.
LE NÉO-DOGMATISME.
(Suite et fin *).
V.
Le problems fondamental.
Entre la connaissance et la réalité y a-t-il un rapport,
et lequel ? Est-ce un pur symbolisme entre signe et chose
signifiée, comme prétend le subjectivisme ? Est-ce un rap
port représentatif, une ressemblance expresse, comme entre
la copie et le modèle ? Dans ce cas, est-ce un rapport de
conformité et de vérité, adaequatio rei et intettectus ? Tel
est le problème fondamental en critique.
Dans la réalité ou chose en soi, les dogmatistes dis
tinguent l'être physique ou sensible, qui comme tel
n'arrive pas à l'intelligence, et l'être métaphysique ou
intelligible, qui en cette qualité échappe à nos sens l).
Les subjectivistes, par contre, ne laissent dans la chose que
le sensible, le phénomène, voile impénétrable derrière
lequel se dérobe à jamais la substance physique ; quant
à l'intelligible, ils le relèguent dans les concepts à priori,
lesquels par eux-mêmes ne représentent rien de réel, mais
s'ajoutent aux matériaux sensibles en guise de formes pour
constituer la connaissance des objets.
♦) V. la livraison de novembre 1911.
') La chose en soi dont il s'agit en ce problème, c'est l'être intelligible,
non l'être physique comme tel. Nous n'oserions certifier que les néo-
dogmatistes se soient toujours souvenus de cette distinction. LE NÉO-DOGMATISME 87
En face de cet ennemi commun, les dogmatistes anciens
et nouveaux se trouvent comme séparés en deux camps,
ils occupent des positions différentes et ne suivent plus le
même plan de bataille. Les divergences relevées à propos
des faits et des notions préliminaires reparaissent ici avec
plus d'acuité et vont sortir leurs pleins effets.
Commençons par déterminer nos positions respectives.
La question générale est de savoir si l'intelligence repré
sente les choses en soi, et si celles-ci réalisent les idées que
nous leur appliquons. Le sens commun répond par l'affi
rmative, mais que vaut cette certitude naturelle ?
Kant soutient que le jugement n'atteint pas la chose
en soi ; qu'il a uniquement pour objet la liaison entre les
concepts, lesquels ne se rapportent jamais immédiatement
à la chose ; que par suite la chose intelligible est une con
struction toute mentale selon des règles anempiriques ; que
la chose physique n'est jamais donnée en soi, mais seulement
dans le phénomène : bref, que la certitude de sens commun
en ce point est une illusion radicale 1). — Les néo-dogma-
tistes aussi soutiennent que le jugement a pour objet les
rapports entre sujets et prédicats, non la chose en soi,
laquelle n'est jugeable qu'en son concept ; que par consé
quent le point de savoir s'il y a des choses en soi et si
elles concordent avec nos pensées,loin d'être une donnée
immédiate de la conscience, est au contraire un point dou
teux qui réclame du critique une démonstration en règle.
— L'ancien dogmatisme, admettant que les choses sont
jugées en soi, soutient que l'attingence du réel par la pensée
est un fait d'évidence immédiate, qui n'est pas susceptible
de démonstration, mais seulement d'explication par l'ana
lyse introspective.
Pour Kant, connaître la vérité, c'est connaître la chose,
non pas en soi, dans l'unité qu'elle aurait en dehors de
*) Kant, R. Vernunft (Erdmann,p. 100). 88 L. DU ROUSSAUX
nous, mais dans l'unité mentale de son concept, dans sa con
formité avec ses prédicats et ses conséquences J). — Pour
les néo-dogmatistes aussi, connaître la vérité, c'est connaître
non pas la chose en soi, mais seulement la conformité d'un
concept avec les prédicats qui en découlent. — Pour nous,
au contraire, connaître la vérité, verum eocercitè, c'est con
naître ce qui est, c'est-à-dire l'être en soi, réalisé ou Réali
sable 2).
Les positions en face du Kantisme sont donc fort diffé
rentes. Les plans de combat ne diffèrent pas moins. —
L'ancien dogmatisme va du réel à l'abstrait. Nous com
mençons par opposer au Kantisme le fait primitif de con
science. Le moi connu du moi : voilà une chose en soi, ou
il n'y en a plus et le mot est à biffer du langage ; tout
l'arbitraire de Kant vient se briser contre ce simple fait.
Nous expliquons ensuite comment l'analyse dégage des
premiers intelligibles puisés dans l'expérience interne les
principes métaphysiques. Notre méthode est purement
défensive, car n'ayant rien cédé au Kantisme nous n'avons
rien aussi à lui reprendre. — Les néo-dogmatistes au
contraire vont de l'abstrait au concret. Ils partent des
principes pour en venir aux concepts, et de là aux réalités.
Dans la conviction où ils sont que la chose ne peut être
jugée en soi, leur premier soin doit être de briser aux
mains du Kantisme l'arme des synthèses à priori, pour
ensuite, par la force des principes, s'ouvrir un chemin de
retour vers la chose en soi.
Discutons un peu ces deux plans de guerre.
La première question qui se pose en critique, dit-on, est
celle des vérités idéales. — En effet, d'une part, ces vérités
possédant l'avantage d'être indépendantes des existences,
il importe peu de savoir s'il y a des choses en soi aux-
*) Kant, R. Vernunft (Erdmann, p. 112).
*) A ce propos les néo-dogmatistes nous reprochent de parler un
langage inintelligible. Nous rencontrons plus loin ce grief. NÉO-DOGMATISME 80 LE
quelles ces vérités trouvent à s'appliquer ; — d'autre part,
la portée réelle des simples concepts ne pouvant s'établir
qu'à l'aide des principes de causalité et de contradiction,
c'est nécessairement l'objectivité des principes qu'il con
vient d'assurer en premier lieu.
Nous sommes d'avis contraire. Encore que les jugements
d'ordre idéal ne soient pas le fruit d'une induction, qu'ils
portent eux-mêmes la raison de leur certitude, et
restent vrais en dehors des contingences, il est cependant
impossible qu'ils jouissent d'une objectivité supérieure à
celle des termes dont ils sont le rapport. Sans doute la réa
lité des uns et des autres est une évidence spontanée qui,
d'après la critique ancienne, se suffit et ne demande pas
à être contrôlée autrement ; mais il n'en va pas de même
selon la critique nouvelle : tant qu'une valeur de réalité
n'est pas réflexivement reconnue aux concepts, les principes
aussi n'auront officiellement qu'une simple valeur de forme.
Par conséquent, la preuve de réalité qu'on se flatte de
préparer ici pour les concepts, péchera par la base ; elle
préjugera la réalité des principes de contradiction et de
causalité, elle appliquera à l'ordre existentiel ces mêmes
principes dont la vérité n'est garantie encore que pour
l'ordre idéal.
Mais, dit-on, le mathématicien ne s'enquiète pas de savoir
s'il existe réellement des points, des lignes, des surfaces,
des nombres, des quantités, dans la nature : les sciences
exactes en sont-elles moins le type de la connaissance
certaine ? Vous ne pouvez donc nier que les principes
rationnels possèdent par eux-mêmes, sans considération des
contingences, toute la valeur dont ils sont susceptibles.
Cet appel au sens commun, à la certitude spontanée
comme telle, est une inconséquence de la part du néo-dog
matisme, puisque d'après lui la critique doit contrôler le
spontané avant de s'en servir. Nous concédons que l'év
idence des principes est au comble a priori et sans recours
à l'induction scientifique ; seulement, il ne s'agit pas ici de 90 L. DU ROUSSAUX
leur évidence intrinsèque, mais de leur portée extrinsèque.
Or, celle-ci comme celle-là n'est de prime abord qu

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