Le thomisme peut-il se présenter comme « Philosophie existentielle »? - article ; n°19 ; vol.48, pg 329-353
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Revue Philosophique de Louvain - Année 1950 - Volume 48 - Numéro 19 - Pages 329-353
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Publié le 01 janvier 1950
Nombre de lectures 42
Langue Français
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Extrait

Benoit Pruche
Le thomisme peut-il se présenter comme « Philosophie
existentielle »?
In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série, Tome 48, N°19, 1950. pp. 329-353.
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Pruche Benoit. Le thomisme peut-il se présenter comme « Philosophie existentielle »?. In: Revue Philosophique de Louvain.
Troisième série, Tome 48, N°19, 1950. pp. 329-353.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1950_num_48_19_4297Le thomisme peut-il se présenter
comme « Philosophie existentielle » ?
Le thomisme peut-il se présenter comme philosophie existent
ielle ? (1). Thème, actuel entre tous, question brûlante dont il n'est
pas interdit de croire qu'il est urgent de la poser.
Le terme de « philosophie existentielle » peut paraître équi
voque. L'a Existentialisme » s'en sert comme d'un doublet. Mais
cela même passe, aux yeux de certains, pour usurpation. L' Existent
ialisme, que le théâtre et la pensée de Sartre ont mis en vedette,
vise une attitude bien définie de refus d'un sens quelconque à l'exis
tence. Le vocable de Philosophie existentielle, sans contenu précis
mais déjà quelque peu galvaudé, est assez neutre encore, semble-t-il,
pour qu'il soit possible de lui donner, par opposition aux « existen-
tialismes », valeur d'« accueil » à toutes les révélations de l'existant.
C'est en ce sens que l'on définira plus bas, — et en ce sens seule
ment — que le thomisme peut se présenter comme « Philosophie
existentielle ».
• * *
Le thomisme est un vaste système dont l'amplitude théologique
marque sans doute la principale dimension. Mais, avant d'etre un
« système », il est une « manière de penser » qui, comme toutes
les manières de penser, relève d'une attitude et fait appel à cer
taines intuitions fondamentales, inspiratrices du « système » et organis
atrices d'un ■<( donné ». Les intuitions de base du thomisme, comme
système, au plan où il n'est encore qu'une manière de penser,
<"> Les pages qu'on va lire ont fait l'objet, sous ce titre, d'une communication
faite a Paris, le 21 février 1950, à l'Inetitut Catholique, a la réunion annuelle des
Professeurs de Philosophie des Instituts catholiques de France en présence de
Son Exe. Mgr Blanohet. Benoit Pruche 330
sourdent des profondeurs sans doute, mais sous le choc de l'« Autre »,
perçu comme existant. C'est dire qu'elles jaillissent au niveau de
pénétration intellectuelle répondant à ce que l'on est convenu d'ap
peler « métaphysique de l'être » ; qu'elles portent sur de la réalité-
existante, dont elles visent à dégager les structures, sous la carac
téristique de « réalité-existante-en-tant-qu'existante » (ens in quantum
est ens) ; qu'elles prennent, de ce fait, valeur nettement « existent
ielle » comme expression des lois mêmes de l'existant {dont l'ident
ité : •« ce qui est est ce qu'il est » se donne pour première et fon
damentale) ; qu'elles commandent une attitude d'âme accueillante
et attentive aux révélations qu'il nous fait, attitude qu'on a pu dé
finir comme étant celle d'un « consentement à l'Etre » (2).
Et c'est pourquoi le thomisme peut se présenter comme Philo
sophie existentielle, parce qu'il a sa source, comme manière de
penser, au niveau de l'a existentiel », au triple point de vue : du
« consentement » qu'il réclame et dont il s'inspire comme système ;
de l'existant qu'il interroge et dont il s'efforce de découvrir les
éléments de structure ; des intuitions fondamentales qu'il met en
œuvre et dont la principale, qui l'anime tout entier, est une saisie
d'identité, par rapport de structure à l'Acte d'Exister, des éléments
en dissociation intégrants l'existant « en-tant-qu'existant ».
On voudrait ici, sans autre prétention qu'instituer le débat au
plan de départ du thomisme, là où il n'est encore qu'une « méta
physique de l'être », et de ce triple point de vue : 1) de l'attitude
d'âme qui est la sienne ; 2) de l'existant qu'il considère ; 3) de
l'intuition qui l'anime, le présenter comme Philosophie existentielle
parce que impliquant :
— Le parti-pris d'accueillir toutes les révélations venues du
monde des existants ;
— Une attention portant uniquement sur l'existant ;
— Une intuition de base dégageant le sens d'un rapport de
structure d'existant à Exister, dont la valeur « existentielle » ne
paraît pouvoir être mise en doute.
Ce qui permettra de définir plus exactement le vocable de « Phi
losophie existentielle » par opposition aux « Existentialismes » (car
<21 A .FOREST, Du Consentement à l'Etre, Aubier, Paris. Au terme « con
sentement » (M. Forest emploie maintenant aussi « acquiescement ») on préfère
celui <T« accueil », parce qu'il n'implique, de soi, aucune référence spéciale au
domaine du t volontaire », Le thomisme, philosophie existentielle 331
le Thomisme n'est pas et ne semble point pouvoir être jamais un
« Existentialisme », fût-il « intellectualiste ») (3), d'affirmer que l'objet
de la Philosophie thomiste, comme Philosophie existentielle, n'est
ni l'essence, ni l'existence, mais la totalité concrète d' essence- en-
acte- d' exister qu'est Y existant ; de manifester en la doctrine, im
pliquée par n'importe lequel de ses aspects, d'une distinction réelle,
au sein de l'existant, entre essence et acte d'exister, l'intuition pro
fonde d'un rapport à l'Acte pur d'Exister, inspiratrice de toute phi
losophie qui se veut donner pour vraiment « Existentielle ».
On terminera en indiquant, par manière de conclusion, comment
le Thomisme, présenté sous le jour d'une authentique « Philosophie
existentielle », peut apporter au monde d'aujourd'hui, au plan de
l'athéisme qu'il professe, de la liberté humaine qu'il prétend dé
fendre, de l'amour dont il méconnaît le visage, une valable parole
de salut.
I
Le Thomisme, Philosophie de « Consentement à l'Etre »
C'est comme (Philosophie de « à l'Etre » (A. For
est), que le Thomisme paraît d'abord, et avant tout, pouvoir se
présenter comme « Philosophie Existentielle ». Que faut-il donc en
tendre ici par ce terme : « Philosophie Existentielle » ? Quelques
précisions de vocabulaire sont d'abord nécessaires : Saint Thomas,
certes, ne les a pas données, du moins avec cette rigueur ; mais
sous la poussée de l'Existentialisme en domaine d'existence, le mot,
et la réalité qu'on veut lui faire signifier sont devenus étrangement
équivoques. On ne fait donc que proposer ces ultimes précisions de
langage, dans le but de rétablir dans tous leurs droits des vocables
aujourd'hui galvaudés en tous sens, et dans les perspectives large
ment ouvertes par là détermination de sens que la pénétration méta
physique de S. Thomas leur avait donnée (4). Ce ne sera peut-être
<*) Cf. J. Maritain, Court Traité de l'Existence et de l'Existant, Hartmann,
Paris.
<4> Si l'on pense (et il n'est pas défendu de le penser, au contraire !) que ces
précisions ne font qu'expliciter de façon plus nette les diverses expressions que
S. Thomas a ipu donner de l'existence, on pourra dire, purement et simplement,
que le Thomisme est une «Philosophie existentielle». On serait même d'accord
avec M. Gilson pour déclarer {Le Thomisme, 5e édition, pp. 505 et sv.) qu'il 332 Benoit Pruche
pas le moindre bénéfice de l'Existentialisme d'avoir ainsi contraint
la Philosophie de a Consentement à l'Etre » qu'est le Thomisme à
revoir et préciser, dans la ligne de son génie propre, le vocabulaire
qui lui sert à traduire ses intuitions de base les plus profondes et
les plus fondamentales en métaphysique de l'Etre.
L'esse se présente comme une réalité analogique, qui se répartit
acte-d' à l'état pur (Dieu), premier analogue, et en acte- en exister
d'existant, analogue inférieur (5).

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