Pour une politique de la culture - article ; n°1 ; vol.14, pg 49-69
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Description

Communications - Année 1969 - Volume 14 - Numéro 1 - Pages 49-69
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1969
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Joseph Rovan
Pour une politique de la culture
In: Communications, 14, 1969. pp. 49-69.
Citer ce document / Cite this document :
Rovan Joseph. Pour une politique de la culture. In: Communications, 14, 1969. pp. 49-69.
doi : 10.3406/comm.1969.1194
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1969_num_14_1_1194Joseph Rovan
Pour une politique de la culture1
I. LA CONSTITUTION D UN DOMAINE PUBLIC
La tenue fréquente de réunions interministérielles consacrées à la coordi
nation des décisions gouvernementales en matière économique fait ressortir
par contraste ce phénomène étonnant, ou plutôt cette étonnante absence de
phénomène, cette lacune : la France, si fière de sa culture, n'a pas de politique
culturelle.
Ce n'est pas cependant faute de posséder des services publics qui s'in
quiètent, si l'on peut dire, des choses de l'esprit, des structures et des
équipements, des personnels et des carrières, des arts, des lettres, de l'édu
cation, des formations et de la culture des corps. Fait défaut plutôt, semble-
t-il, face à une multitude d'actions, de programmes, voire de politiques
particulières, une vue d'ensemble du domaine de la vie culturelle et des
changements, des transformations, des développements qui s'y produisent
de nos jours. A une époque où l'homme, et plus particulièrement l'homme
français, s'efforce avec des succès croissants de conquérir sur l'océan d'incer
titude de l'avenir des polders de probabilité où peuvent s'exercer de grandes
actions d'ensemble volontaires ayant des chances sérieuses d'atteindre leurs
objectifs, la culture reste chez nous soumise à des actions isolées et dispersées
dont les objectifs sont le plus souvent en retard sur les exigences des situations
auxquelles on les applique.
Ce retard du culturel sur l'économique se traduit dans la manière tardive,
i. Cette étude avait été rédigée en 1966 pour un ouvrage qui n'a pas vu le jour.
Nous la présentons aujourd'hui avec des changements relativement mineurs; l'approche
fondamentale nous paraît en effet toujours valable. Si nous avions pu recommencer ce
travail à partir de ses premiers commencements, nous aurions dû tenir un plus large
compte des principes et des conséquences de la Loi d'Orientation de l'Enseignement
supérieur de l'automne 1968. Dans l'ensemble, on est frappé de voir combien réduits
sont, par rapport à 1966, les changements affectant le domaine dont il est question
ici.
49 Joseph Rovan
hésitante et discontinue avec laquelle on aborde, dans l'administration comme
dans les organismes privés représentatifs des différents secteurs de l'activité
culturelle, les problèmes posés par l'extension au domaine culturel des
méthodes, procédures et attitudes de planification. Ce retard, cependant, n'est
pas inexplicable. Il tient en premier lieu, sans doute, à la manière dont s'est
constitué, à travers l'histoire, par étapes successives et souvent isolées les
unes aux autres, ce qu'on peut qualifier de domaine public, ou de secteur
public, de l'action culturelle.
Il y a eu d'abord, dans ce domaine, le mécénat royal appliqué aux arts,
aux lettres et aux sciences, la fondation du Collège français et des Académies,
les pensions aux écrivains, aux peintres, aux musiciens, aux savants, le rôle
prééminent de la Cour, et des petites cours imitatrices de la noblesse, dans
l'architecture et l'artisanat d'art. Ce fut longtemps le principal, sinon l'unique
secteur de la vie culturelle où s'exerçait d'une manière continue, quoique
soumise aux hasards et aux goûts des rois, des ministres, des maîtresses et
des favoris, l'action culturelle de la puissance publique. Elle fut d'abord
commandée par les désirs et les besoins privés du monarque et des puissants;
puis, au fur et à mesure que l'Etat apparaissait comme une entité différente
de la personne du Roi, que le domaine de l'Etat cessait d'être un bien privé
du Roi, cette action culturelle se tournait vers des publics plus larges, les
collections privées devenaient musées, la troupe de Monsieur ou les Coméd
iens du Roi furent les ancêtres des théâtres nationaux. Le mécénat royal,
au bout de trois siècles, est devenu, en quelque sorte, la règle du i %, ce
pourcentage des crédits de construction de l'Etat qui doit être affecté aux
œuvres artistiques destinées à orner ces constructions.
L'étape suivante fut celle de l'instruction. Une évolution furieusement
contrastée a peu à peu conféré à l'Etat le devoir d'assurer par divers moyens
— directement ou indirectement, — l'instruction de tous les Français. Ce
processus n'est pas encore achevé. Il intéressa d'abord l'instruction primaire.
Il est en train sous nos yeux de conquérir le secondaire, en voie de devenir
moralement obligatoire. Il s'étend même à l'enseignement privé, progrès
de la « publicisation » dont on ne peut manquer de s'étonner que les tenants
de ce dernier l'aient accueilli comme une victoire, et les partisans de l'e
nseignement public comme une défaite. Le même processus, en s'appli-
quant aux universités, a fait d'abord de celles-ci des services publics pour
les élargir et les ouvrir ensuite à des masses d'étudiants de plus en plus
considérables.
On pourrait dire qu'une troisième étape de la constitution du domaine
public de l'action culturelle a été celle de la formation. L'enseignement
technique, les centres d'apprentissage, la formation professionnelle des
adultes, la promotion sociale, des législations de plus en plus précises et de
plus en plus extensives en même temps, ont organisé dans le domaine de la
formation des secteurs publics, directement gérés et dirigés par l'Etat, et
autour de ces noyaux forts, des secteurs privés ou des secteurs mixtes, fort
ement influencés, contrôlés et surveillés.
Les progrès de plus en plus rapides des activités et institutions de « recy
clage », débouchant sur une conception de l'éducation et de la formation
continues, ne privilégiant plus d'une manière presque exclusive le premier
âge de formation, l'enfance et l'adolescence, vont également dans le même
sens. L'idée même de l'éducation permanente doit faire de l'Etat, — ou tout
5o une politique de la culture Pour
au moins des services publics — le promoteur et le coordinateur de cette
gigantesque entreprise.
Il n'est plus pensable dans ce pays, dans le domaine de la formation
comme dans celui de l'instruction, que l'Etat puisse venir à faire marche
arrière, et à se désintéresser des devoirs que l'évolution des choses et des
mœurs lui a imposés à leur égard. Mais il est concevable, et sans doute nécess
aire, de repenser dans son ensemble l'action publique qui s'y est développée
peu à peu suivant des impulsions différentes et divergentes.
La quatrième étape historique pourrait être celle de la Jeunesse, des Sports,
des Loisirs et du Tourisme. Ces termes ne se situent pas tous sur les mêmes
plans et ils entretiennent entre eux des relations complexes. Toutefois, ils
correspondent à des préoccupations publiques, et ensuite à des services publics
qui ont surgi depuis une trentaine d'années et qui sont, comme les précé
dents, en extension continue. Préoccupations et services — ils répondent à
des changements importants de la réalité sociale française : les sports, comme
activités autonomes, sont la conséquence des changements de mode de vie qui
suppriment, notamment en milieu urbain, une grande partie des efforts
physiques naguère indispensables à la survie individuelle et collective. Les
loisirs sont le fruit à la fois de la transformation de la nature, du travail
industriel ou bureaucratique, de plus en plus harassant et intense, et des
conquêtes sociales souvent obtenues seulement au prix de durs combats. Le
tourisme, comme phénomène de masse, procède lui aussi de l'urbanisation
accélérée qui fait vivre la majorité des gens loin de la nature, dans des
conditions malsaines; il est rendu possible par l'élévation du niveau de vie
des masses, et par une série de progrès techniques et d'inventions telles que

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