Quelques remarques sur des travaux nord-américains en biologie - article ; n°1 ; vol.45, pg 117-128
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Description

Les Cahiers du GRIF - Année 1990 - Volume 45 - Numéro 1 - Pages 117-128
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 28
Langue Français

Extrait

Evelyne Peyre
Joëlle Wiels
I. Quelques remarques sur des travaux nord-américains en
biologie
In: Les Cahiers du GRIF, N. 45, 1990. Savoir et différence des sexes. pp. 117-128.
Citer ce document / Cite this document :
Peyre Evelyne, Wiels Joëlle. I. Quelques remarques sur des travaux nord-américains en biologie. In: Les Cahiers du GRIF, N.
45, 1990. Savoir et différence des sexes. pp. 117-128.
doi : 10.3406/grif.1990.2445
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/grif_0770-6081_1990_num_45_1_2445Approches féministes des sciences
expérimentales
Qu' appelle-t-on critique féministe des sciences expérimentales, quels en sont
les points forts et les aspects les plus novateurs ? Pour répondre à ces questions qui
n'avaient pas été débattues lors du colloque européen sur les études féministes, les
Cahiers du Grif ont demandé à trois chercheuses françaises - Jeanne Peiffer,*
Evelyne Peyre et Joëlle Wiels - de rendre compte d'un numéro spécial de la revue
anglophone Women's Studies International Forum publié en 1989. La lecture
critique de ce numéro entièrement consacré au thème de la critique féministe des
sciences dites exactes révèle, notamment, les similitudes et divergences des études
féministes américaines et françaises dans ce champ particulier du savoir. Le texte
est scindé en deux parties ; la première, rédigée par Evelyne Peyre et Joëlle Wiels,
commente des recherches relevant de la biologie; la deuxième, rédigée par Jeanne
Peijfer, rend compte de travaux menés dans le domaine de V épistémologie et de la
philosophie des sciences. <
I. Quelques remarques sur des travaux
nord-américains en biologie.
Evelyne Peyre
Joëlle Wiels
Les «women's studies» se sont développées aux Etats-Unis depuis une vingtaine
d'années avec une grande ampleur. Elles y ont très rapidement acquis une structure
institutionnelle dans le cadre de départements interdisciplinaires d'universités. Le
récent numéro de Women's Studies International Forum consacré à Ruth Bleier1,
par sa liste prestigieuse d'auteurs et la diversité des thèmes abordés, est un bon
témoignage de la vigueur de ce champ d'étude. Nous avons choisi d'analyser et de
commenter ici les textes qui concernent plus particulièrement la biologie, notre
domaine de compétence. Nous souhaitons, par ailleurs, rendre hommage à Ruth 117 Bleier (1923-1988) dont la réflexion féministe sur les sciences débuta dans les
années 70. Professeur à l 'Uni versité du Wisconsin, elle partageait ses activités entre
le département de neurophysiologie et le programme des «women's studies».
Comme le dit Sue V. Rosser dans son editorial, «Ruth Bleier était une de ces rares
personnes qui s'intéressent à la fois aux sciences et au féminisme, ainsi qu'à leur
interaction.»3 Nous compléterons l'analyse des articles de ce numéro en évoquant
les recherches menées en France dans les domaines des critiques féministes des sc
iences et de la recherche féministe depuis 1976/ Notre première partie sera
consacrée à la biologie cellulaire, la seconde aux sciences de l'évolution.
Du sexisme en biologie et des stratégies de lutte féministes
Dans le domaine des sciences biologiques et médicales, ce sont surtout les
disciplines traitant de la détermination du sexe qui ont suscité des critiques
féministes. Les nouvelles techniques de reproduction (NTR) ont en particulier
donné lieu à une abondante littérature féministe, parfois polémique, aussi bien en
Amérique du Nord qu'en Europe/
Renate Duelli-Klein et Robyn Rowland5, qui travaillent depuis quelques années
sur les problèmes liés au développement des NTR, dénoncent ici ce qu'elles
appellent l' utilisation des femmes comme «éprouvettes vivantes». Elles s'intéressent
plus particulièrement à un produit utilisé dans certains traitements d'infertilité : le
citrate de clomiphène. Elles analysent tout d'abord les nombreuses publications
scientifiques et médicales, d'où il ressort que le mécanisme d'action de cette drogue
est assez obscur et que de nombreux problèmes de santé sont observés chez les
femmes traitées avec le citrate de clomiphène ou chez les enfants nés après
traitement. Elles exposent ensuite les résultats de leur enquête ainsi que ceux
d'autres études préalables effectuées auprès de femmes ayant subi ce traitement et
qui sont maintenues dans une ignorance totale des effets secondaires potentiels. Il
s'agit d'un travail exhaustif et intéressant, dont la conclusion souligne que les per
sonnes infertiles ne devraient plus être considérées comme des «machines défec
tueuses qui peuvent être réparées», mais bien plutôt des individus à part
entière dont la "vie sans enfants n'est pas un pis-aller».
Nous nous associons bien sûr à cette dénonciation des conditions dans lesquelles
sont appliquées les NTR. Nous ne sommes par contre pas d'accord avec les auteurs
118 qui rejettent finalement, en même temps que le produit incriminé, l'ensemble des NTR qu'il faudrait, selon elles, abandonner totalement car «même si ces techniques
étaient améliorées, les femmes seraient toujours utilisées comme des «incubateurs
vivants» dans lesquels les embryons fabriqués par les hommes seraient insérés.
Nous pensons qu'il faut dissocier l'aspect pratique de l'aspect théorique. Des
découvertes scientifiques qui rendent potentiellement «contournable» l'association
corps de femme/reproduction - l'une des bases de l'oppression des femmes dans le
système patriarcal -, devraient, si nous savons les utiliser, pouvoir constituer des
éléments importants de lutte contre ce système. D'autres chercheuses en France ont
développé ce point de vue, notamment Marie- Josèphe Dhavemas qui a brillamment
analysé les implications politiques des NTR dans le combat féministe.4
Anne Fausto- Sterling7 démontre, à l'aide de trois exemples, à quel point
l' idéologie dominante - patriarcale, bourgeoise et raciste - influence les orientations
de la biologie du développement. Dans un premier temps, elle montre comment
l'essor de la biologie moléculaire, au détriment de l'embryologie «classique», a
entraîné la mise en place de théories du développement embryologique qui accor
dent une place primordiale au noyau de la cellule-oeuf et négligent celle du
cytoplasme. Elle rappelle qu'il s'agit évidemment d'une lutte pour le pouvoir dans
le domaine de la génétique, mais, surtout, elle souligne que cette primauté accordée
au noyau revient en fait à minorer le rôle des femelles dans la transmission des
caractères. En effet, le gamète mâle et le gamète femelle participent de manière
inégale à la fécondation : le spermatozoïde ne transmet que son matériel nucléaire
alors que l'ovule fournit à la future cellule-oeuf tout son matériel cellulaire, c'est-
à-dire, à la fois son matériel nucléaire et son cytoplasme; le noyau des gamètes mâle
et femelle contient la matériel responsable de l'hérédité + l'ADN ~t mais le
cytoplasme également l'ADN de dite «maternelle»,
ainsi que les substances de réserve permettant à la cellule-oeuf de se développer.
Considérer que seuls les noyaux des gamètes jouent un rôle dans la détermination
des caractères de la descendance, c'est donc négliger le rôle de cet «en plus» qu'est
le cytoplasme du gamète femelle.
La deuxième partie de l'article d'Anne Fausto-Sterling, plus historique, montre
que la théorie de la lignée germinative - la lignée cellulaire qui ne participe pas au
développement de l'individu mais uniquement à sa reproduction, c'est-à-dire à tout
ce qui conduit à l'élaboration des gamètes -, qui est devenue peu à peu une théorie
universelle de biologie du développement, a favorisé la propagation de l'eugénisme
dans la première moitié du XXème siècle et donc a eu d'importantes conséquences
sociales. Elle souligne que l'existence d'une lignée germinative n'est valable que 119 pour une petite partie du monde vivant, et que l'on pourrait tout 

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