Recherches sémantiques - article ; n°1 ; vol.1, pg 5-43
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Description

Langages - Année 1966 - Volume 1 - Numéro 1 - Pages 5-43
39 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Tzvetan Todorov
Recherches sémantiques
In: Langages, 1e année, n°1, 1966. pp. 5-43.
Citer ce document / Cite this document :
Todorov Tzvetan. Recherches sémantiques. In: Langages, 1e année, n°1, 1966. pp. 5-43.
doi : 10.3406/lgge.1966.2864
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1966_num_1_1_2864T. TODOROV
RECHERCHES SÉMANTIQUES
Pendant une longue période, la sémantique a été la parente
pauvre des sciences linguistiques. Malgré le grand nombre de
théories générales et d'études concrètes inscrites dans son cadre,
on peut même dire que, récemment encore, la sémantique n'exis
tait pas comme science.
Depuis 1960 environ, des recherches intéressantes ont été
effectuées en France, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en
Union Soviétique. Notre premier dessein était de publier dans ce
numéro toutes les études importantes faites à l'étranger et qui sont
souvent les moins connues en France. Mais la longueur des textes
que nous aurions voulu présenter dépasse de loin les dimensions
d'un numéro de revue; aussi ne publions-nous que quelques-uns
de ces textes représentatifs, en discutant les autres dans l'intr
oduction. Nous avons également ajouté une étude où des idées
de J. J. Katz et J. A. Fodor, ainsi que d'U. Weinreich, sont appli
quées au domaine français.
I
THÉORIES GÉNÉRALES
Pour pouvoir progresser, la sémantique a besoin d'une concep
tion globale. Le Cours de Linguistique générale de Saussure, point
de départ de la linguistique moderne, n'en donnait que des élé-
* Je tiens à remercier MM. Uriel Weinreich et A. J. Greimas qui ont mis à ma
disposition des textes avant leur publication, ainsi que mes amis Nicolas Ruwet et
Delphine Perret qui m'ont aidé dans ce travail. Les références renvoient à la biblio
graphie critique qui se trouve à la fin du numéro. ments dispersés. Cette conception, il était nécessaire de la forger.
Deux voies différentes se présentèrent : l'une, vers un théorisme
extrême, l'autre, vers un praticisme extrême; d'un côté, la glossé-
matique, de l'autre, la linguistique descriptive dans la tradition
de Bloom field.
Il est difficile de juger de la validité de la première voie, car
elle n'a jamais dépassé le stade des prolégomènes; le caractère
abstrait de la doctrine n'a pas permis aux applications de se réali
ser. Nous ne croyons pas que cette absence d'applications s'explique
par la difficulté avec laquelle on accède aux textes de Hjelmslev.
Des théories plus complexes ont connu une grande extension; et
ce fut plutôt la clarté de l'exposé qui a attiré certains linguistes
vers la doctrine des glossématiciens. La véritable raison de sa sté
rilité est que ses principes mêmes rendaient la doctrine invérifiable;
leur rigueur se tournait contre eux-mêmes, devenant la raison de impuissance. Dans les Prolégomènes, d'ailleurs, Hjelmslev
laisse peu dé place à l'étude de la signification : la substance,
c'est-à-dire ce qu'un mot signifie, se trouve pour lui hors de l'objet
de la linguistique. Seule la forme de la substance, la grille abstraite
que composent les mots dans leurs corrélations, devait intéresser
le glossématicien orthodoxe. La grande distinction entre les types
de désignation que sont la dénotation et la connotation ne fut jamais
suffisamment illustrée et n'a été que source de confusions.
Dans les quelques articles, consacrés spécialement aux fonde
ments de la sémantique, la doctrine ne devint pas plus concrète.
Elle restait limitée soit à des réflexions générales sur la nature de
la signification, soit à des principes d'une valeur contestable, comme
celui-ci : « Une description structurale ne pourra s'effectuer qu'à,
condition de pouvoir réduire les classes ouvertes à des classes fe
rmées » (Hjelmslev, 1959, p. 110). Cet impératif suivait curieus
ement un passage dans lequel Hjelmslev remarquait que le lexique
n'était pas constitué de classes fermées. Il est clair cependant, que,
dans le vocabulaire d'une langue, il n'y a pas que des classes fe
rmées; faire une telle déclaration équivalait à renoncer à l'étude du
lexique. De plus une théorie qui ne rend pas compte de cette qual
ité essentielle du langage, à savoir posséder un lexique constitué
de classes ouvertes ne pouvait pas prétendre à une conformité
suffisante avee la réalité linguistique. S'il est vrai que l'introduc
tion d'un nouveau mot dans le lexique ne change en rien la struc
ture sémantique globale de la langue, c'est un phénomène que l'on
doit expliquer et non pas réduire. L'attitude de la linguistique descriptive américaine était diffé
rente, bien que les résultats fussent les mêmes. Bloomfield procla
mait que l'étude de la signification ne relève pas de la linguistique,
mais des sciences concrètes qui étudient telle ou telle partie de la
réalité (ainsi pomme signifie un fruit qui... pour le botaniste, mais
non pour le linguiste), ou d'une neuropsychologie qui atteindrait
l'essence de la signification en étudiant les fibres des nerfs dans
notre cerveau. Comme une telle psychologie n'existait pas, c'est
la psychologie behavioriste qui s'en chargea :les tests ont succédé
les uns aux autres; une théorie a été construite (Osgood); mais le
seul résultat positif pour la linguistique a été d'apprendre qu'il y
avait bien un sens des mots dont elle n'avait pas pour l'instant à
s'occuper (la « signification pragmatique », dans les termes d'Apres-
jan). Les linguistes américains ont fidèlement suivi les commande
ments de Bloomfield; et leurs manuels ont simplement exclu la
sémantique. Ainsi, Archibald A. Hill,, dans Introduction to Ling
uistic Structures, accorde 4 pages (sur 496) à la sémantique, et
pour dire que, bien qu'important, le champ de la signification
relève d'une « supra-linguistique ». Pour lui, la seule
proprement linguistique est celle qui nous permet de dire si deux
unités sont les « mêmes » ou si elles sont « différentes ».
Nous ne nous arrêterons pas longtemps à une troisième théor
ie, celle des linguistes anglais que l'on a essayé dernièrement de
présenter comme la seule qui soit restée à l'abri de ces vues extrêmes.
D'un côté, en sémantique, cette théorie n'existait, jusqu'à ces der
niers temps, que comme un vœu (voir maintenant Dixon, 1964,
et surtout Lyons, 1963). D'un autre côté, les prémisses dont elle
part et qui se trouvent dans les écrits de J. R. Firth sont loin
d'être évidentes. Nous n'en citerons que deux : « Chaque mot uti
lisé dans un contexte nouveau devient par là même un mot nou
veau » (Firth, 1957, p. 190). « Ma propre approche de la signification
en linguistique a toujours été indépendante des dualismes tels
qu'esprit et corps, langue et pensée, mot et idée, signifiant et
signifié, expression et contenu » (p. 227).
Une faible lueur théorique était apparue avec la théorie de
l'information qui a beaucoup influencé la linguistique pendant les
quinze dernières années, sans que l'on distingue bien à l'heure
actuelle les traces qu'elle y a laissées. Cette théorie identifiait
l'émission du langage aux chaînes de Markoff, successions de symb
oles dont la probabilité d'apparition était donnée par les symboles
précédents. Cette probabilité se trouvait dans une proportion 8
inverse avec l'information apportée par un mot. Ce rapport sem
blait ouvrir une voie à l'étude objective de la signification; mais la
voie était illusoire. Comme l'avaient d'ailleurs remarqué les créa
teurs de la cybernétique, cette information concernait uniquement
le symbole en tant qu'objet matériel, non sa signification. Shannon
insistait déjà sur le fait que cette dernière reste en dehors de sa
théorie, puisque le caractère inattendu d'un message n'a aucun
rapport avec sa valeur sémantique. Si un énoncé est répété plu
sieurs fois, il ne perd pas pour autant sa signification (Carnap et
Bar

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