Réflexions sur la politique et la science politique française - article ; n°1 ; vol.5, pg 5-20

Raymond Aron

Description

Revue française de science politique - Année 1955 - Volume 5 - Numéro 1 - Pages 5-20
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié le: 01 janvier 1955
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Extrait

Monsieur Raymond Aron
Réflexions sur la politique et la science politique française
In: Revue française de science politique, 5e année, n°1, 1955. pp. 5-20.
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Aron Raymond. Réflexions sur la politique et la science politique française. In: Revue française de science politique, 5e année,
n°1, 1955. pp. 5-20.
doi : 10.3406/rfsp.1955.402591
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1955_num_5_1_402591Réflexions sur Politique
et la Science Politique Fran aise
RAYMOND ARON
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La Constitution de la IIIe ou de la IVe République ne diffère
pas essentiellement des Constitutions multiples qui travers le
monde organisent le régime parlementaire Que le premier ministre
soit choisi par le président de la République comme sous la IIIe
République ou choisi par le président de la République et investi
par un vote de Assemblée comme sous la IVe avant la réforme Raymond Aron
constitutionnelle de 1954) il en résulte des différences mineures
On retrouve toujours les mêmes faits majeurs existence moyenne
des gouvernements est courte les changements de gouvernements
ne répondent toujours ni des de majorité ni des
changements de politique beaucoup de ministres passent sans dif-
culté une combinaison une autre le président du Conseil ne
dure pas le personnel ministériel dure la dissolution est jamais
pratiquée la menace même en disparu aussi bien dans la dernière
période de la IIIe que dans la première période de la IVe le texte
de la Constitution subordonne éventualité de la dissolution de
conditions rarement réalisées)
Ces faits sont bien connus et se prêtent une mise en forme
dialectique La politique fran aise est la fois stable et insta
ble Les mêmes hommes sont au pouvoir mais avec un chef et des
majorités qui varient fréquemment les cabinets sont faibles inca
pables accomplir de grandes réformes ils laissent aux groupes
intérêts et administration une autorité excessive On peut
juste titre dire que la politique fran aise par son instabilité super
ficielle traduit et favorise une stabilité exagérée des structures
économico-sociales ou encore que la politique fran aise camoufle
sous une instabilité des combinaisons ministérielles un immobilisme
fondamental
Les causes de cette instabilité stable apparaissent avec une par
ticulière clarté dans la chambre élue en 1951 Si nous laissons de
côté les communistes présent exclus des majorités gou
vernementales mais dont les votes comptent évidemment dans cha
que scrutin 520 députés sont susceptibles de participer la majo
rité qui se divisent en cinq groupes principaux plus quelques grou
pes secondaires Ecrivons le nom de chacun de ces cinq groupes
sur un morceau de papier mettons les cinq morceaux de papier
dans un chapeau et tirons-en trois au hasard Toutes les combi
naisons sauf une sont possibles et constituent une majorité Socia-
listes-radicaux-M.R.P radicaux-M.R.P.-indépendants et paysans
socialistes-radicaux-R.P.F seule la combinaison socialistes-radi
caux-indépendants et paysans paraît exclue par le refus de ces
derniers de collaborer avec les premiers Mais chacune de ces
majorités est insuffisante elle atteint pas 300 députés et 350 sont
nécessaires pour parer aux défections inévitables en chaque scrutin
contesté Aux trois groupes principaux doivent donc ajouter des
Quand la majorité comprend quatre groupes comme sous le Gouverne
ment Laniel le nombre des dissidents de la majorité augmente en proportion La Politique et la Science Politique Fran aise
petits groupes ou des transfuges de opposition Quand opposition
était constituée par les seuls communistes et gaullistes la majorité
confortable comprenait quatre groupes Quand avec avènement
de Pinay le parti socialiste entra dans opposition il fallut
la dissidence une fraction des gaullistes pour compléter la majo
rité des trois partis du centre droite radicaux M.R.P. indépendants-
paysans Quand Mondes-France appuie sur les socialistes
les radicaux et les gaullistes il lui faut une quarantaine de voix
modérées pour parfaire sa majorité
Les différents groupes ne se rangent plus dans hémicycle selon
un ordre strict extrême-gauche non communiste les socialistes est
susceptible de accorder avec extrême-droite2 gaulliste La
théorie des jeux et le bon sens indiquent également que plus il
de joueurs plus la liberté de chaque joueur est grande par
rapport ses voisins et plus il de combinaisons possibles La
composition de actuelle Assemblée le relâchement des liens in
térieur de la gauche et intérieur de la droite contribuent
accroître le nombre des combinaisons possibles et par suite ins
tabilité
Ce est pas tout le jeu des partis est un aspect de la
bataille parlementaire intérieur de chaque parti la discipline
est faible tantôt les chefs sont en désaccord les uns avec les autres
MM Queuille et René Mayer contre Mendès-France ou
Bidault contre Schuman) tantôt la piétaille le député
moyen non ministrable se rebelle contre les chefs tantôt enfin
dans un scrutin important des voix manquent au Gouvernement
parce que pour une raison ou pot une autre un certain pour
centage des députés de la majorité refusé de souscrire une
décision prise en Conseil des ministres
Rivalité des partis rivalité des personnalités indiscipline des
députés telles sont les causes évidentes de la complexité de la
bataille parlementaire tels sont les traits structurels du jeu
politique fran ais De temps autre la presse et opinion indi
gnent contre un phénomène qui est la conséquence presque inévi
table de la structure du jeu et qui en général ne présente pas la
moindre gravité par exemple la multiplicité des tours de scrutin
avant élection du président de la République
Réduite ses traits essentiels que fut la bataille de Versailles
Elle se divise en trois phases les différents partis se comptent
Je prends ce terme en espèce au sens spatial Les gaullistes sont assis
la droite de hémicycle Raymond Aron
er les man uvriers arrangent pour écarter immédiatement quel
ques candidats par exemple Bidault Laniel arrivé
en tête des candidats modérés essaie de se faire élire et emporter
son élection force de patience en usant la résistance il ignore
pas le chef en est un de ses ministres Laniel finit par
reconnaître son échec et après un premier choix malheureux du
candidat modéré Coty emporte assez aisément Finalement
on est revenu une tradition de la IIIe République Comme pour
diverses raisons on ne pouvait élire président de la République le
président du Conseil de la République on élu le premier vice-
Aurait-on pu réduire le nombre des scrutins coup sur
Laniel aurait pu comprendre plus vite il obtiendrait pas
les voix radicales et en particulier les voix sénatoriales pour attein
dre la majorité absolue On aurait pu ne pas commettre erreur
de choisir Jacquinot et Coty aurait pu obtenir la majorité
du premier coup Mais les trois phases étaient inévitables parce
que les partis auraient pu se mettre accord avance sur la
solution qui est finalement intervenue Pourquoi accord anticipé
était-il impossible Parce aucun négociateur ne pouvait être sur
du nombre de voix il détenait Dans un système de partis orga
nisés les états-majors sont capables de accorder sur un compro
mis Dans