Un réformateur religieux dans la France de Charles VI : Jean de Varennes ( + 1396 ?) - article ; n°4 ; vol.142, pg 1111-1130
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Un réformateur religieux dans la France de Charles VI : Jean de Varennes ( + 1396 ?) - article ; n°4 ; vol.142, pg 1111-1130

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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1998 - Volume 142 - Numéro 4 - Pages 1111-1130
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur André Vauchez
Un réformateur religieux dans la France de Charles VI : Jean de
Varennes ( + 1396 ?)
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 142e année, N. 4, 1998. pp.
1111-1130.
Citer ce document / Cite this document :
Vauchez André. Un réformateur religieux dans la France de Charles VI : Jean de Varennes ( + 1396 ?). In: Comptes-rendus des
séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 142e année, N. 4, 1998. pp. 1111-1130.
doi : 10.3406/crai.1998.15940
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1998_num_142_4_15940COMMUNICATION
UN RÉFORMATEUR RELIGIEUX DANS LA FRANCE DE CHARLES VI:
JEAN DE VARENNES (+1396 ?), PAR M. ANDRÉ VAUCHEZ
Jean de Varennes n'est pas à proprement parler un inconnu,
puisque deux des principaux chroniqueurs du règne de Charles
VI, Froissait et le Religieux de Saint-Denis, lui ont consacré deux
brefs développements, d'ailleurs fort ressemblants, et que les
lettres qu'il a adressées au pape Benoît XIII, en 1394/1396, ont été
éditées à deux reprises au XVIIIe siècle1. Sur le plan historiogra-
phique, un érudit rémois, Dom Guillaume Marlot a publié, au
XVIIe siècle, une intéressante notice à son sujet dans son Histoire de
la ville, cité et université de Reims, tandis qu'au tournant de notre
siècle Noël Valois a évoqué rapidement sa figure et son action dans
son grand livre classique, sur La France et le Grand Schisme2. Au
total cependant, la moisson est assez maigre et les jugements port
és sur le personnage demeurent sommaires. Ainsi, dans son
récent et excellent ouvrage sur le diocèse de Reims, P. Desportes
qualifie Jean de Varennes d'« illuminé clémentiste qui finit par
attaquer Benoît XIII », formule qui ne rend compte qu'imparfaite
ment de la réalité3. Si nous nous permettons de revenir sur ce doss
ier, c'est que diverses recherches récentes permettent d'enrichir
ce dernier et de retoucher sensiblement l'image du réformateur
champenois. Parmi ces éléments, tous ne sont pas nouveaux : en
1. Froissait, Chroniques, liv. IV, Kervyn de Lettenhove éd., t. XV (1392-1396), Bruxelles,
1877, p. 132 sq. ; Chronique du Religieux de Saint-Denis, L. Bellaguet éd., Paris, 1840, p. 124 sq.
A ces deux textes, reproduits en annexe du présent article, il faut ajouter une mention,
beaucoup plus imprécise, de Jean de Varennes dans Jean Jouvenel (ou Juvénal) des Ursins,
Histoire de Charles VI, J. F. Michaud et M. Poujoulat éd. (Mémoires sur l'histoire de France,
2), Paris, 1851, p. 396. Les lettres de Jean de Varennes ont été éditées dans l'édition des
Opéra omni de Jean Gerson par M. L. Ellies du Pin, t. II, Anvers, 1706, c. 841-866, ainsi que
par E. Martène et U. Durand, Veterumscriptorum... amplissima collectio, t. VII, Paris, 1733, c.
559-591, d'après les manuscrits BNF. lat. 14907 (f. 158v° et sq.) et 14643 (f. 296v° et sq.) qui
proviennent du fonds de Saint- Victor de Paris. Cette correspondance se compose de neuf
lettres : six adressées par Jean au pape Benoît XIII, une aux cardinaux d'Avignon et deux
réponses du pape.
2. Dom G. Marlot, Histoire de la ville, cité et université de Reims, métropolitaine de la Gaule
Belgique, 2' éd., Reims, 1846, t. IV, p. 124-129 ; N. Valois, La France et le Grand Schisme, Paris,
1896-1902, t. III, p. 28 sq. et 84 sqq. Voir aussi le mémoire de maîtrise inédit d'A. de La
Presle, Jean de Varennes, son œuvre, sa vie, Université de Paris-Sorbonne, 1984.
3. P. Desportes, Diocèse de Reims (Fasti Ecclesiae Gallicanae, 3), Turnhout, 1998, p. 419. 1112 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
effet, dans l'édition intégrale des œuvres de Gerson, publiée à
Anvers en 1706, par Ellies du Pin, figurent les Responsiones de Jean
de Varennes aux accusations qui avaient été lancées contre lui,
pour justifier son arrestation, le 30 mai 1396, par les hommes du
bailli de Vermandois4. Curieusement ce long texte, qui occupe une
quarantaine de pages sur quatre colonnes, ne semble pas avoir
retenu jusqu'ici l'attention des historiens, alors qu'il se révèle être
une source de tout premier plan ; d'autre part, une de mes élèves,
Claude Arnaud- Gillet, a publié en 1997 un texte en vieux français
assez étrange, que j'avais découvert vingt ans plus tôt. Il s'agit des
Visions d'une simple femme de Reims, Ermine de Reims, dont les
combats 1er novembre contre 1395 le démon et sa mort furent survenue rapportés le au 25 jour août le 1396, jour, par entre son le
directeur spirituel, Jean Le Graveur, sous-prieur de Saint-Paul du
Val-des-Ecoliers de Reims5. Or, dans ce texte, comme nous le ver
rons, il est fréquemment question de Jean de Varennes qui se
trouve même au centre de la crise spirituelle vécue par cette
pieuse laïque. Si l'on ajoute à cela la publication toute récente
d'une thèse sur l'ordre du Val-des-Ecoliers et la découverte par
Geneviève Hasenohr d'œuvres spirituelles de Jean de Varennes, il
semble que le moment soit venu de prendre la juste mesure de ce
personnage dont l'action et la prédication ont tenu la région
rémoise en haleine entre 1393 et 13966.
Mais, avant d'aller plus loin, résumons rapidement l'état actuel
de nos connaissances sur Jean de Varennes : sans doute originaire
de Varennes en Argonne, dans le diocèse de Reims, où il dut
naître vers 1340/1345, issu d'un milieu modeste — ce qui aide à
comprendre son attachement à la cause du petit peuple —, il fit
des études universitaires qui lui permirent d'entreprendre une
belle carrière ecclésiastique : docteur in utroque, il devint en 1378
professeur de droit à l'Université d'Angers, puis auditeur de rote à
Avignon en 1380, comme l'avait été quelques années plus tôt son
futur adversaire, l'archevêque de Reims, Guy de Roye. A la cour
pontificale de Clément VII, il fut le familier du jeune cardinal
Pierre de Luxembourg, mort en 1387, à l'âge de dix-neuf ans, en
4. Joannis de Varennis. . . . Responsiones ad capita accusationum quibus impetebatur, M. L. Ellies
du Pin éd., Joannis Gersonis opéra omnia, 1. 1, Anvers, 1706, c. 905-944.
5. Entre Dieu et Satan. Les visions d'Ermine de Reims (f 1396) recueillies et transcrites par Jean
Le Graveur, C. Arnaud-Gillet éd. (Millennio médiévale, 3/1), Florence, 1997, ad indicem.
6. C. Guyon, Les Ecoliers du Christ. L'ordre canonial du Val-des-Écoliers, 1201-1539, Saint -
Étienne, 1998, ad indicem ; je remercie très vivement Geneviève Hasenohr, qui a bien voulu
m'ouvrir ses fichiers et m'indiquer l'existence de deux œuvres de Jean de Varennes en
français : son Épître du miroir de chrétienté, sorte de manuel catéchétique à l'usage des
prêtres et des laïcs sachant lire (Bruxelles, Bibl. Royale, ms. fr. 10394-10414, f. 38v°-47v°
composée pendant son séjour à Saint-Lié), et un ars moriendi intitulé Médecine de l'âme en
l'article de la mort. JEAN DE VARENNES 1113
odeur de sainteté — ce qui fut peut-être à l'origine de sa propre
conversion — et passa ensuite au service de Guillaume Noëllet,
cardinal de Saint- Ange7. En bon curialiste, il accumula un certain
nombre de bénéfices ecclésiastiques dont les revenus annuels,
selon le Religieux de Saint-Denis, se montaient à 1500 écus d'or
et, selon Froissait, il aurait été sur le point de devenir évêque ou
cardinal lorsqu'il prit, en mai 1392, la décision de quitter la Curie :
en célébrant la messe, il aurait eu en effet une révélation par
laquelle Dieu l'invitait à monter sur la montagne, comme Moïse
sur le Sinaï, écrira-t-il plus tard pour sa défense, afin d'y prier
pour la paix et la réforme de l'Église8. Notons au passage que cette
démarche, pour rare qu'elle ait été, ne fut cependant pas isolée à
l'époque, puisque, quelques années plus tard, le dominicain cata
lan Vincent Ferrier allait quitter la cour pontificale d'Avignon, où
il occupait d'importantes fonctions auprès de Benoît XIII, pour
prêcher la pénitence et la conversion à travers toute l'Europe occi
dentale, entre 1399 et 1419, dans le but de mettre fin au Grand
Schisme en réformant en profondeur la chrétienté. Jean de
Varennes, pour sa part, choisit d'aller vivre en ermite à Saint-Lié,
un petit sanctuaire de pèler

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