Les Enjeux politiques et identitaires du tantrisme dans la vallée de Katmandou, Népal / Identity and Political Challenges at Stake in the Tantrism of the Katmandu Valley, Nepal - article ; n°1 ; vol.99, pg 33-46

Gérard Toffin.

Description

Archives des sciences sociales des religions - Année 1997 - Volume 99 - Numéro 1 - Pages 33-46
Tantrism, which was introduced into the Kathmandu Valley at a very early date (seventh to eighth centuries), has played an important political and social role in the development of the Newar civilisation. During the long Malla period (thirteenth to eighteenth centuries) this Tantric tradition was willingly used by the royal power to reorganise the local pantheon, to map the capitals of the kingdoms, to devise the religious geography of the Valley and, in a more general way, to reinforce the religious aspects connected with kingship. It rapidly became a distinctive feature of the Néwar culture and a means of unifying, to a certain point, the Buddhist and the Hindu sections of the population around common beliefs and rituals. After the conquest of the Kathmandu Valley at the end of the eighteenth century by the Indo-Nepalese (or Parbatiyas) and the unification of Nepal under the aegis of the Shah dynasty, Tantrism became a means for the Newars to demonstrate their difference from the Parbatiyas, who were less oriented towards this tradition than them. Tensions arose between the two groups regarding the status of certain tutelary divinities and the respective religious authorities. Still today, notwithstanding the unprecedent development of the Theravada movement in the Buddhist community, Tantrism continues to assume a not insignifiant role in Néwar society. Notably in terms of status (relation between the Rajopadhyaya Brahmans and Karmacarya saivaite priests) and of social control (dependence of the younger on the elder, the role of secrecy). Briefly commented, these elements reveal social and cultural usages of religious tradition at different periods of history. They contribute to sociology of Tantrism, a sociology which could be extended to other regions of the Indian subcontinent.
Le tantrisme, très tôt implanté dans la vallée de Katmandou (dès le VII-VIIIe siècle) a joué un rôle politique et social essentiel dans le développement de la civilisation néwar. Durant la longue période Malla (XIII-XVIIIe siècle), ce courant religieux a été volontairement utilisé par le pouvoir royal pour réorganiser le panthéon local, façonner les capitales des royaumes, dessiner la géographie religieuse de la Vallée et, d'une manière plus générale, renforcer les aspects religieux liés la royauté. Il devint rapidement une marque distinctive de la culture néwar et un moyen d'unifier, jusqu'à un certain point, les deux sections bouddhistes et hindouistes de la population autour de croyances et de rituels communs. Après la conquête de la vallée de Katmandou à la fin du XVIIIe siècle par les Indo-Népalais (ou Parbatiya) et l'unification du Népal sous l'égide de la dynastie Shah, le tantrisme devint un moyen pour les Néwar d'afficher leur différence envers les Parbatiya, moins tournés qu'eux vers cette tradition. Des tensions naquirent entre les deux peuples quant au statut de certaines divinités tutélaires et des spécialistes religieux respectifs. Aujourd'hui encore, et malgré le développement sans précédent du mouvement Theravada dans la communauté bouddhiste, le tantrisme continue de jouer un rôle non négligeable à l'intérieur même de la société néwar. Notamment en termes de statut (rapport entre brahmanes Rajopadhyaya et prêtres Karmacarya) et de contrôle social (dépendance des Cadets envers les Aînés, rôle du secret). Brièvement commentés, ces éléments dévoilent les usages sociaux et culturels d'une tradition religieuse à différentes époques. Ils contribuent à une sociologie du tantrisme, sociologie qui pourrait être étendue à d'autres régions du sous-continent indien.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Philosophie et théologie

Informations

• Publié par: Archives-des-sciences-sociales-des-religions
• Publié le: 01 janvier 1997
• Nombre de lectures: 43
• Langue: Español
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Extrait

Gérard Toffin
Les Enjeux politiques et identitaires du tantrisme dans la vallée
de Katmandou, Népal / Identity and Political Challenges at Stake
in the Tantrism of the Katmandu Valley, Nepal
In: Archives des sciences sociales des religions. N. 99, 1997. pp. 33-46.
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Toffin Gérard. Les Enjeux politiques et identitaires du tantrisme dans la vallée de Katmandou, Népal / Identity and Political
Challenges at Stake in the Tantrism of the Katmandu Valley, Nepal. In: Archives des sciences sociales des religions. N. 99,
1997. pp. 33-46.
doi : 10.3406/assr.1997.1131
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/assr_0335-5985_1997_num_99_1_1131Resumen
El tantrismo, implantado en época temprana en el valle de Katmandú (desde los siglos VII-VIII) a
desempeñado un rol político y social fundamental en el desarrollo de la civilización newar.
Durante el largo período de los Malla (siglos XIII a XVIII), esta corriente religiosa ha sido utilizada
voluntariamente por el poder real para reorganizar el panteón local, modalizar las capitales del reino,
configurar la geografía religiosa del Valle y, más ampliamente, renforzar los aspectos religiosos
relacionados con el polder real. Se convirtió rápidamente en una característica de la cultura newar y un
medio de unificar, hasta un cierto punto, los dos segmentos budistas e induistas de la poblacián en
torno a creencias y rituales comunes.
Después de la conquista del valle de Katmandú a finales del siglo XVIII por los Indo-Nepaleses (o
Parbatiya) y la unificación de Nebal bajo la égida de la dinastía Shak, el trantismo se convierte en un
medio, para los newar, de explicitar sus diferencias frente a los Parbatiya, menos marcados por la
tradición. Tensiones surgieron entre los dos pueblos en cuanto al estatuto de ciertas divinidades
tutelares y ante ciertas especificidades religiosas.
Aún hoy, y a pesar del desarrollo sin precedentes del movimiento Theravada en las comunidades
budistas, el tantrismo continua desempeñaldo un papel importante en el interior de la sociedad newar.
Sobre todo, en términos de estatuto (relación entre brahamanes Rajopadhyaya y sacerdotes
Karmacarya) y de control social (dependencia de los hermanos menores frente a el primogénito, rol del
secreto).
Comentados brevemente, estos elementos manifiestan los usos sociales y culturales de una tradición
religiosa de épocas diferentes. Contribuyen a una sociología del tantrismo, sociología que podrá ser
extendida a otras regiones del sub-continente indio.
Abstract
Tantrism, which was introduced into the Kathmandu Valley at a very early date (seventh to eighth
centuries), has played an important political and social role in the development of the Newar civilisation.
During the long Malla period (thirteenth to eighteenth centuries) this Tantric tradition was willingly used
by the royal power to reorganise the local pantheon, to map the capitals of the kingdoms, to devise the
religious geography of the Valley and, in a more general way, to reinforce the religious aspects
connected with kingship. It rapidly became a distinctive feature of the Néwar culture and a means of
unifying, to a certain point, the Buddhist and the Hindu sections of the population around common
beliefs and rituals.
After the conquest of the Kathmandu Valley at the end of the eighteenth century by the Indo-Nepalese
(or Parbatiyas) and the unification of Nepal under the aegis of the Shah dynasty, Tantrism became a
means for the Newars to demonstrate their difference from the Parbatiyas, who were less oriented
towards this tradition than them. Tensions arose between the two groups regarding the status of certain
tutelary divinities and the respective religious authorities.
Still today, notwithstanding the unprecedent development of the Theravada movement in the Buddhist
community, Tantrism continues to assume a not insignifiant role in Néwar society. Notably in terms of
status (relation between the Rajopadhyaya Brahmans and Karmacarya saivaite priests) and of social
control (dependence of the younger on the elder, the role of secrecy).
Briefly commented, these elements reveal social and cultural usages of religious tradition at different
periods of history. They contribute to sociology of Tantrism, a sociology which could be extended to
other regions of the Indian subcontinent.
Résumé
Le tantrisme, très tôt implanté dans la vallée de Katmandou (dès le VII-VIIIe siècle) a joué un rôle
politique et social essentiel dans le développement de la civilisation néwar.
Durant la longue période Malla (XIII-XVIIIe siècle), ce courant religieux a été volontairement utilisé par
le pouvoir royal pour réorganiser le panthéon local, façonner les capitales des royaumes, dessiner la
géographie religieuse de la Vallée et, d'une manière plus générale, renforcer les aspects religieux liés la
royauté. Il devint rapidement une marque distinctive de la culture néwar et un moyen d'unifier, jusqu'à
un certain point, les deux sections bouddhistes et hindouistes de la population autour de croyances et
de rituels communs.Après la conquête de la vallée de Katmandou à la fin du XVIIIe siècle par les Indo-Népalais (ou
Parbatiya) et l'unification du Népal sous l'égide de la dynastie Shah, le tantrisme devint un moyen pour
les Néwar d'afficher leur différence envers les Parbatiya, moins tournés qu'eux vers cette tradition. Des
tensions naquirent entre les deux peuples quant au statut de certaines divinités tutélaires et des
spécialistes religieux respectifs.
Aujourd'hui encore, et malgré le développement sans précédent du mouvement Theravada dans la
communauté bouddhiste, le tantrisme continue de jouer un rôle non négligeable à l'intérieur même de la
société néwar. Notamment en termes de statut (rapport entre brahmanes Rajopadhyaya et prêtres
Karmacarya) et de contrôle social (dépendance des Cadets envers les Aînés, rôle du secret).
Brièvement commentés, ces éléments dévoilent les usages sociaux et culturels d'une tradition
religieuse à différentes époques. Ils contribuent à une sociologie du tantrisme, sociologie qui pourrait
être étendue à d'autres régions du sous-continent indien.Arch de Sc soc des Rel. 1997 99 juillet-septembre 33-46
Gérard TOFFIN
LES ENJEUX POLITIQUES ET IDENTITAIRES
DU TANTRISME DANS LA VALL
DE KATMANDOU PAL
Promuigé religion Etat dès la création du royaume unifié du Népal dans
la seconde moitié du XVIIIe siècle hindouisme fut indéniablement ins
trument majeur grâce auquel la dynastie conquérante Shah imposa sa loi aux
différents groupes ethniques du pays Il servit forger une nouvelle identité
nationale et justifier une institution royale maintenue nos jours en
dépit des changements politiques Cependant hindouisme tel que défendu
Prithivi Narayan Shah celui du respect dû aux brahmanes premiers person
nages du royaume celui de interdiction de abattage de la vache et de la
prohibition du prosélytisme pour les musulmans et les chrétiens Gaborieau
1994) pas réduit loin en faut les différences culturelles encore nom
breuses qui caractérisent ce royaume himalayen Pour en tenir au fait reli
gieux en 1991 34 des Népalais se rattachaient au bouddhisme de type
tibétain 35 se réclamaient de islam 02 se déclaraient chrétiens un
pourcentage en constante augmentation de nos jours et une grande partie de
la population tribale des collines soit 214 des Népalais continuent de pra
tiquer une religion coutumière ayant un lointain rapport avec hin
douisme
En outre au centre politique et culturel même du pays la vallée de
Katmandou se maintient un système religieux lui aussi inspiration in
dienne mais fondé sur un syncrétisme hindou-bouddhiste très spécifique Ce
système religieux propre aux Néwar 1) est fondamentalement tantrique dans
son inspiration ses textes doctrinaires et ses rituels On se propose ici ana
lyser cette tradition non pas sous angle de histoire des religions comme
cela pu être fait ailleurs 2) mais sous celui de son insertion dans le corps
social et de ses implications sociologiques Plus spécifiquement on intéres-
Selon le recensement de 1991 les Néwar représenteraient un groupe un million de
personnes soit 5 environ de la population népalaise Ils parlent le néwari une langue tibé-
to-birmane
Cf par exemple John LOCKE 1980 et David GELLNER 1992 Ce dernier ouvrage
contient cependant lui aussi des vues sociologiques pénétrantes
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sera aux usages identitaires du tantrisme néwar ses enjeux intérieur du
groupe ethnique considéré comme dans ses relations avec les In