3.La maladie diabétique adolescencec]
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Le diabète insulinodépendant est une maladie La maladie diabétique difficile à cerner pour celui qui en souffre. La confrontation aux conséquences immédiates du déséquilibre de l’enfance à l’âge adulte : métabolique et la prise en compte des risques de complications dégénératives edulte/ les vicissitudes du rendent pourtant rapidement nécessaire l'acceptation du statut du sujet diabétique, “passage” adolescent? appelé à assumer la gestion de soins pluriquotidiens "sous contrôle médical ».De la qualité du "travail de la maladie", de l'élaboration psychique de l'atteinte organique, dépendent l'adhésion aux incontournables contraintes thérapeutiques et l'intégration des règles hygiéno-diététiques impératives. (Pr C Mille; Amiens)1 2Cette réorganisation de l'économie psychique, Quand le diabète se déclare en période pubertaire :qui ne s'accomplit pas sans aléas chez l'adulte, incompatibilité plus ou moins profonde et durable entre "travail de la s'avère souvent délicate pour un adolescent,maladie" et "travail d'adolescence » engagé dans d'autres réaménagements aux plans psychique et relationnel. Pour l'enfant diabétique : Les transformations pubertaires, et l'ouverture aux enjeux de la vie réactualisation du travail de la maladie sous l’effet du "travail sociale exercent une pression sur le sujet d'adolescence" qui doit affirmer son identité propre, conséquences aux plans des relations familiales et de l'observance ...

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Langue Français

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La maladie diabétique
de l’enfance à l’âge adulte : edulte/les vicissitudes du “passage” adolescent?
(Pr C Mille; Amiens)
Cetteréorganisation de l'économie psychique, qui ne s'accomplit pas sans aléas chez l'adulte, s'avère souvent délicate pour un adolescent, engagé dans d'autres réaménagements aux plans psychique et relationnel.
1
Lestransformations pubertaires, etl'ouverture aux enjeux de la vie socialeexercent une pression sur le sujet qui doit affirmer son identité propre, procéder à une remise en question de ses liens infantiles et un réajustement de sa place dans l'espace familial, tandis que se profilent d'autres perspectives de satisfactions pulsionnelles et affectives, comme d'autres voies de sublimation.
Le diabète insulinodépendant est une maladie difficile à cerner pour celui qui en souffre. La confrontation aux conséquences immédiates du déséquilibre métabolique et la prise en compte des risques de complications dégénératives rendent pourtant rapidement nécessaire l'acceptation du statut du sujet diabétique, appelé à assumer la gestion de soins pluriquotidiens "sous contrôle médical ». De la qualité du "travail de la maladie", de l'élaboration psychique de l'atteinte organique, dépendent l'adhésion aux incontournables contraintes thérapeutiques et l'intégration des règles hygiéno-diététiques impératives.
2
Quand le diabète se déclare en période pubertaire: incompatibilité plus ou moins profonde et durable entre "travail de la maladie" et "travail d'adolescence »
Pour l'enfant diabétique : réactualisation du travail de la maladie sous l’effet du "travail d'adolescence"
conséquences aux plans des relations familiales et de l'observance thérapeutique expression clinique passagère, à moins que ne se révèlent des troubles plus profonds de la personnalité.
Lesouci que soit correctement pris en charge le diabète, tout en prenant en comptele devenir adolescent vient infléchir la relation médecin malade incite à réévaluer l'implication familiale dans les soins, voire à envisager différentes modalités d'approches psychothérapiques en fonction des obstacles rencontrés.
La question ultime pour les thérapeutes soucieux de faciliter les passages “adolescents” houleux, difficiles ou bloqués se pose aussi en termes d’aménagement de l’espace de rencontre, impliquant l’entourage dont l’ambivalence ne saurait être négligée.
De nombreux écueilsrisquent de freiner ou faire obstacle à cette progression
Les expressions psychopathologiques à cet âge témoignent souvent des impasses développementales, mais aussi des détours comme des passages douloureux ou bruyants qui jalonnent le parcours.
Certainspassages “interminés, interminables”pourrraient caractériser les “éternels adolescents”, qui bien qu’ayant dépassé depuis longtemps l’âge de la majorité légale repoussent “sine die” les engagements et les responsabilités adultes.
Le moratoire adolescent. • Expression pour décrire “l’espace d’attente, de mise en suspension des exigences de la société” jugée nécessaire aux actions d’essai des adolescents, espace propre à faciliter les expériences parfois hasardeuses au travers desquelles ils trouvent à exercer leurs potentialités nouvelles. • Le rôle des adultes tutélaires serait outre – De s’armer de patience, – De faire en sorte que soit respecté et protégé ce temps de passage. • Ce moment de “purgatoire”, marqué par des oscillations entre affirmations d’indépendance et demandes régressives, aventures multiples et repli frileux tendrait à s’allonger. • Le recours à des modes de satisfaction infantiles de type oral ou anal n’est pas exclu, il est en général limité à certains cercles relationnels, et coexiste alors avec d’autres investissements plus conformes à l’âge.
La post-adolescence. • Seconde latence, marquant la fin de l’adolescence, et précédant l’état adulte proprement dit. – “phase de consolidation”, de stabilisation des fonctions et des intérêts du Moi. • Dans cette perspective, il y aurait bien un terme à l’adolescence, – Quand “l’individu possède, les moyens physiques et mentaux de son indépendance à l’égard de son milieu d’origine, ainsi que les ressources biologiques nécessaires à la sexualité et à la fonction génésique”, – Quand, surtout, survient un certain désenchantement, une déception durable à l’endroit des parents idéalisés de l’enfance. Cette seconde latence se traduirait concrètement par: . une “fragmentation des relations” : les diverses connaissances sont soigneusement maintenues dans des espaces séparés, . une “instrumentalisation” notamment des parents, souvent ignorés mais mobilisés sans délai en cas de besoin, .une mise en suspens indéfini des choix professionnels ou de l’habitat, par une instabilité dans les relations amoureuses, enfin par des liens groupaux serrés qui apparentent les cercles d’amis à des tribus...
DIABETE ET ADOLESCENCE : APPROCHE PSYCHODYNAMIQUE
Les représentations des transformations pubertaire s, des nouvelles exigences du corps libidinal ne paraissen t guère compatibles avec les représentations des défaillances physiques et des limitations du corps malade. – L'image de soi qui en procède n'est pas simple à élaborer, d'autant qu'aux fluctuations identificatoires propres à l'adolescence s'ajoute l’é reuve narcissique de la maladie. De la même façon que – le travail d'élaboration des représentations, liées au diabète peut se trouver infléchi par le processus d'adolescence, – le travail d’élaboration, du "pubertaire" peut se trouver compromis par le processus morbide;
Le passage à l’âge adulte. Processus d’adultisation comme exigence de travail psychique prolongeant celui de l’adolescence, mais s’en distinguant clairement. De nombreux jeunes adultes “après une adolescence facile se plaignent d’un mal être grandissant, de difficultés que rien ne laissait prévoir jusque-là”; – Le passage à l’âge adulte semble parfois « ranimer » avec une violence surprenante des mouvements dépressifs • déterminés par l’incapacité à se dégager de la problématique œdipienne... • déclenchés par la survenue inéluctable de déceptions dont les effets se révèlent dévastateurs pour le narcissisme”. Ces vicissitudes apparentes du processus d’adultisation pourraient surtout trahir les défauts d’élaboration du pubertaire.
• Or une facilitation réciproque n'est pourtant pas exclue, quand les relations familiales et l'organisation des soins, parviennent à s'ajuster à tous ces enjeux qui se superposent. Le "travail de la maladie-diabète" à l'adolescence. L'intégration harmonieuse d'une maladie somatique grave repose sur un processus d'objectalisation. l'élaboration de la blessure narcissique inhérente à la maladie, devenue représentable s'inscrit comme un objet d'investissement potentiel. S'effectuerait ainsi un travail de liaison entre affects de souffrance et « autoconceptions » de la maladie, • connaissances fondées et prolongements fantasmatiques, • savoir de portée générale et histoire personnelle.
Alimentée par des associations préconscientes, se forgerait ainsi – une théorie implicite, une fiction, donnant sens à cette effraction du réel, – une ouverture symbolique autorisant une ébauche de maîtrise. Concrètement, l'insistance sur de troublantes coïncidences entre les évènements signifiants et le déclenchement supp osé de la maladie – révèle un des aspects de ce travail aux ramifications multiples et complexes. Ces constructions qui répondent au besoin de l'écon omie psychique du sujet, ne sauraient se confondre avec – les descriptions minutieuses des symptômes, – les explications directement empruntées au discours médical. L'excès de "mise en objectivité" de la maladie pou rrait traduire à l'inverse l'échec du processus d'objectalisation – dont dépendraient pour beaucoup les chances de restauration narcissique.
Quand le diabète se révèle au moment de la puberté,
• l'adolescent est généralement précipité dans un éta t anxio-dépressif propre à l'inciter à rechercher des réponse s sur les origines et les significations de sa maladie, eu égard à son histoire et à la place qu'il occupe dans l'organisation fanta smatique familiale. • Or l'indisponibilité associative des parents, d'abo rd soucieux d'éviter les complications somatiques, la nécessité de s'initier rapidement aux gestes techniques, d'intégrer les informations sur la maladie favorisent le recours massif aux défense s intellectuelles et le développement d'un "fonctionn ement opératoire" dont se félicite l'entourage. – Malgré les bons résultats obtenus au plan des soins, cette hyper-adaptation pourrait masquer la persistance d'une blessure narcissique risquant de se révéler à distance sur le mode d'une dépression sévère.
• Pour le diabète, – l'absence de lésions visibles, de zones douloureuses ou de poussées évolutives, – la complexité des mécanismes physiopathologiques en cause, – le flou qui préside à la localisation du pancréas, – les incertitudes au plan étiopathogénique • pourraient contribuer à favoriser l'éclosion de théories "idiosyncrasiques", – certes, propres à soutenir le travail d'élaboration, – mais qui ne sont pas sans risque au plan de l'observance thérapeutique. • Par ailleurs, la survenue de malaises hypoglycémiques, – qui introduisent une discontinuité psychique et – livrent le sujet aux soins secourables d'autrui • est souvent vécue très douloureusement, • elle justifie et entretient l'ambivalence manifestée à l'égard de l'insuline à qui le patient doit son maintien en vie, mais qui est potentiellement vectrice de mort.
A l'inverse le processus d'adolescence peut contribuer à soutenir le travail d'élaboration de la maladie installée précocement. • Bien que participant à la prise en charge de son diabète, l'enfant délaisse généralement au couple mére-médecin la responsabilité de son corps malade. • Les transformations pubertaires viennent déranger cette forme de clivage. • Cette période critique souvent marquée par l'éclosi on de symptômes, ou par des difficultés dans l'observance du traitement, peut se révéler fructueuse, – quand elle traduit les aléas nécessairement liés à ce mouvement de réappropriation du corps, et de réelle prise en compte des questions restées en suspens autour du "sens de la maladie".
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• Des conflits qui surgissent de manière salutaire d ans le cadre familial viennent alors volontiers s'inscrire plus ou moins ouvertement dans le cadre de soins. • A l'inverse, la perpétuation des modalités interactionnelles, l'inamovibilité des aménagements défensifs mis en place depuis l'enfance sont de nature à faire entrave à l'élaboration adolescente
• La maladie diabétique impose donc un certain type de rapports avec le corps ; ce qui n'est pas sans incidence aux plans de la construction de l'identité et de l'organisation fantasmatique. • La perspective d'avoir à suppléer de manière indéfi nie la faille corporelle, la crainte de ne pouvoir éviter le déve loppement précoce d'atteintes dégénératives, la hantise d'acc idents de parcours contrarient les promesses de jouissance du corps pubère. • A la sortie de l'enfance, se profile le spectre d'un vieillissement prématuré, court-circuitant la période de l'adolescence et de la maturité. • Quand elle survient en pleine puberté, la maladie prend valeur de sanction de l'actualisation des désirs œdipiens et vient aussi matérialiser la force de la violence intergénératio nnelle qui circule dans l'inconscient collectif.
Travail d'adolescence et maladie diabétique
• Alors que l'adolescence engage le sujet dans le "c hamp des possibles", le diabète implique la prise en compte d'un dysfonctionnement irrémédiable; • les obligations et restrictions liées au traitemen t sont potentiellement vécues comme une série de handicaps , risquant d'invalider les projets d'avenir autonome, ou ruiner tout espoir de succès. • Le processus d'adolescence se heurte ainsi à des ob stacles spécifiques menaçant d'en compromettre le déroulement.
• L'angoisse et la culpabilité qui surgissent risquen t de sidérer les capacités d'élaboration de l'adolescent et de l'inciter à trouver refuge dans une position de dépendance infa ntile rassurante. • La sexualité, apparentée à un processus morbide e st tenue pour responsable de cette attaque du corps de l’intérieur, de la fatalité de ce dysfonctionnement organique ; – le repli et le renoncement étant supposés alors limiter les conséquences dangereuses de l'émergence du désir. • Les accidents hypoglycémiques accentuent probablement ce sentiment de menace corporelle ; – les symptômes qui annoncent l'imminence du malaise sont difficiles à identifier pour un adolescent traversé par de multiples sensations physiques nouvelles; – le sentiment d'étrangeté du corps s'en trouve majoré.
• L'ensemble des contraintes liées au traitement rep ose sur un savoir extérieur au sujet qui est invité à se plie r à une série de recommandations impératives. – Cette autosurveillance qu'il se doit d'exercer, fait l'objet d'une supervision attentive. • Il lui faut rendre compte de ce qu'il mange, de ce qu'il boit, recueillir et analyser à heures fixes sang et urines, doser en conséquence l'insuline à injecter. – Dans ce domaine il y a peu d'espace possible pour la créativité propre, et la recherche de l'équilibre métabolique ne permet pas d'échapper à l'appréciation exigeante, voire critique du médecin; • ce droit de regard exercé par l'autorité médicale, s’appuyant au besoin sur les données fournies par le lecteur de glycémie à mémoire, – maintient de fait une forme de tutelle – et constitue pour un adolescent une brèche dans son intimité.
Les responsabilités assumées dans la prise en char ge du diabète, la compétence acquise dans la réalisati on des gestes techniques, la capacité, d'apprécier les posologies nécessaires d'insuline, et de manier un produit aussi "actif", sont des sources potentielles de réconfort au plan narcissique; – par ce biais l'adolescent retrouve une certaine maîtrise dont il peut tirer profit dans ses rapports aux autres. Le travail d'adolescence pourrait s'en trouver facilité, si toutefois le travail de souffrance, (le processus d'objectalisation) s'accomplit parallèlement et n'est pas lui même entravé par la position inconsciente des parents ou du médecin référent.
• Certains aspects de la maladie diabétique peuvent r entrer en résonance avec d'autres limitations et appréhension s liées à l'histoire relationnelle du sujet; – en résulterait un investissement excessif du corps malade, implicitement chargé d'occulter les revendications pulsionnelles et d'offrir un écran projectif à tous les affects et pensées impossibles à contenir. – La gestion de la maladie occupe alors une place centrale dans l'économie psychique, au détriment de l'élaboration du "pubertaire" et de la conflictualité interne. • A l'inverse, il n'est pas exclu que le recours aux soins pour un adolescent captif d'un parent "exclusif" lui fournisse l'occasion d'un élargissement de son espace relationnel, ou d’une rencontre identificatoire salvatrice avec un adulte l'ouvrant à d'autres modes d'échange. – L'hospitalisation, en provoquant un éloignement du "cocon" familial, peut contribuer à soutenir le processus" de séparation individuation.
L'adolescent diabétique et sa famille. • Au moment du diagnostic, les parents traversent né cessairement une période critique d'autant plus prononcée que l' enfant est l'objet d'un investissement narcissique important, et leurs réactions dépressives sont fréquentes. – Ils ont, quelque soit l'âge de l'enfant, à accomplir aussi, de leur côté, un travail de la maladie, une mise en sens de cet événement qui les touche dans leur filiation. – Ils ont à trouver des réponses pour atténuer l'angoisse, la culpabilité, voire la honte qu'ils ressentent. • Ils puisent dans leurs mythes familiaux, s'appuien t sur leurs propres montages fantasmatiques pour que soit "pensable" le fait d'être parent d'un enfant porteur d'une maladie chronique. – De la qualité de cette élaboration dépendra l’adaptation de l’enfant mais aussi de l’adolescent à son diabète.
• Il revient aux parents – d'être là pour soutenir leur enfant puis leur adolescent dans les moments difficiles, – de savoir lui fournir les explications nécessaires, – De l’aider à formuler ses impressions ou ses rancœurs – de s'efforcer de restaurer son sentiment d'identité et de continuité mis à mal par la maladie et les aléas du traitement. • Chacune de ces fonctions se doit d'évoluer avec le temps et selon les circonstances. – Le maintien de la surprotection parentale constitue naturellement l'écueil majeur risquant de faire obstacle à la progression de l’adolescent dans le sens de l'autonomie. – A l’inverse, les réactions de désinvestissement ou de rejet sont rares, et ne sauraient en aucun cas faciliter le travail de séparation.
Il arrive aussi que les mouvements d'humeur: les p leurs comme les colères soient systématiquement interprétés en terme de déséquilibre métabolique; – dans un tel contexte les émotions paraissent "chiffrables" et dénuées de sens relationnel. Les dimensions multiples de la vie psychique ne so nt pas interrogées – et seules les erreurs de traitement sont envisagées quand "ça va mal" entre l’adolescent et ses parents. Pourtant les conflits ouverts autour des revendica tions d'indépendance, l’expression directe des points de désaccord, les discussions houleuses seraient plus fréquents c hez les adolescents diabétiques dont le contrôle métabolique est jugé satisfaisant.
– La vigilance excessive et prolongée des parents, l a sous-estimation systématique des capacités du grand enfa nt ou de l'adolescent, la dramatisation des incidents de par cours sont souvent sous-tendus par une angoisse ou une culpabi lité difficile à vaincre. – Mais les besoins de réassurance, et de réparation ne sont pas toujours seuls en cause; • une agressivité latente, un ressentiment réprimé trouvent parfois à s'exprimer à travers l’appropriation des soins et la dévalorisation du patient. – La démonstration de la supériorité du savoir de l'a dulte, de la pertinence de ses observations et de ses conseils p ourrait convaincre l'adolescent de l'inutilité de ses efforts • ses tentatives de contestations indirectes qui se traduisent volontiers par des négligences ou des écarts de régime ont naturellement pour conséquence de prouver le bien-fondé de l’emprise parentale
L'adolescent diabétique et son médecin La médiocre observance du traitement n'est pas l'a panage de l'adolescent – et les enquêtes réalisées auprès des adultes en font largement état. Les valeurs retranscrites sur le carnet n'ont parfois qu'un lointain rapport avec la réalité ; – l'usage des lecteurs de glycémie à mémoire vient attester de ces différences. Les mesures de l'hémoglobine glycosylée, considéré es comme offrant un bon reflet du niveau de contrôle métabolique pour les dix semaines précédentes autorisent des comparaison s rétrospectives. Ces moyens de contrôle "objectivant" les erreurs involontaires ou délibérées ne sont pas sans incidence sur l'évolution de la relation médecin/adolescent diabétique.
• Alors que la plupart des jeunes patients ont une c onnaissance correcte du schéma thérapeutique, ils prennent souvent la liberté de supprimer un ou plusieurs des composants qu'ils jugent superflus. – Prévaut alors leur appréciation subjective du rôle de certains examens ou contraintes. • La manière de rappeler les règles à suivre, de reju stifier l'importance de chaque consigne ne saurait être neu tre pour un adolescent enclin à attribuer au médecin une fonctio n dans son propre espace psychique; – les propos du praticien seront entendus très différemment selon qu'il sera situé en position de Surmoi, d'idéal du Moi ou de Moi auxiliaire; – l'écho fantasmatique de ses attitudes et de ses paroles risque parallèlement de conforter les scènes de séduction ou les scénario sadomasochistes qui peuplent les rêveries adolescentes. • Pourraient en résulter quelques transactions pathologiques
Les conflits autour de l'observance thérapeutique, parfois très vifs, sont peu évitables. – L'oubli de certains soins, – la suppression délibérée de certaines auto-analyses, – les négligences répétées au plan de l'hygiène corporelle, – les erreurs glissées dans la tenue du carnet, – les refus d'adaptation des apports en fonction des dépenses énergétiques L'insouciance ou la "tricherie" qui paraissent sou s-tendre la plupart de ces attitudes sont volontiers considérés comme des signes d'immaturité ou des marques d'opposition mala droite, voire dangereuses pour l'adolescent lui-même. Les mises en garde et admonestations sont souvent mal tolérées et presque toujours sans effet, :
DIABETE ET ADOLESCENCE : MANIFESTATIONS PSYCHOPATHOLOGIQUES
Expressions psychopathologiques « réactionnelles » – Le cumul de tâches développementales et d'une maladie difficile à assumer dépasse donc souvent les capacités d'élaboration de l'adolescent, et appelle la mise en œuvre d'aménagements défensifs dont l'expression clinique sollicite plus ou moins directement les adultes tutélaires. – Le déséquilibre métabolique fréquemment rapporté à l'adolescence peut évidemment être en lien avec les modifications hormonales et physiologiques de la puberté, ou provoqué par les fluctuations émotionnelles particulièrement marquées à cette période charnière de la vie. • Mais les problèmes d'observance ou les troubles des conduites alimentaires sont souvent au premier plan des préoccupations de l'entourage familial ou médical.
• Ces "actes manqués" à risque sont aussi des actions d'essai, témoignant dans ce contexte de la difficile gestion de l'ambivalence et des contradictions qui ne manquent pas de tourmenter l'adolescent diabétique. – S'y expriment de délicates négociations en grande partie inconscientes, où s'affrontent et s'ajustent • les revendications pulsionnelles, les aspirations narcissiques et la prise en compte de la maladie. • L'évitement du déplaisir et la recherche de satisf actions, l'affirmation d'autonomie et le rejet de la soumission, le désir de vaincre et d'assumer la réalité précipitent l'adoles cent dans des conduites paradoxales. – L'adolescent doit bien vérifier qu'il n'existe pas un moyen d'échapper à la maladie. – A travers ces tâtonnements, ces essais et erreurs ou ces apparentes dénégations pourrait se dessiner un espace de jeu, se dégager une voie ' '
Les troubles des conduites alimentaires sont particulièrement répandus chez les adolescents diabétiques; – Les impulsions boulimiques, les écarts de régime se produisent généralement moins d'une à deux fois par semaine • (Les préoccupations concernant le poids priment sur les craintes de déséquilibre métabolique et la réduction des doses d'insuline dans l'espoir d'éviter l'obésité n'est pas exclu). – Le plus souvent les adolescents compensent les frustrations inhérentes à la maladie, en s’alimentant à l’excès et la prise de poids est fréquentes chez les adolescentes diabétiques (14% d’entre elles souffrent d’un surpoids). – Le recours culpabilisé à des modes de gratifications orales, traduit conjointement l'intolérance aux frustrations imposées par la maladie, et la répression des désirs sexuels exacerbés par les transformations pubertaires ; – La résolution de ces désordres alimentaires est naturellement liée à la progression tant du travail de maladie que du travail d'adolescence.
Les peurs peuvent se déplacer et se systématiser s ur un mode phobique: – l'adolescent redoute alors les espaces où il ne se sent pas protégé ou fuit les lieux comme l'hôpital vécu comme menaçant. Toutes ces manifestations directes ou indirectes d e l'angoisse sont souvent transitoires ; – elles sont alors en lien compréhensible avec les aléas de la prise en charge du diabète ou avec des circonstances propres à émouvoir un adolescent. Elles risquent cependant de s'installer plus durab lement quand les incidents ou les événements ont un écho fantasmatique tel que s'activent de ce fait des angoisses de castrati on ou de séparation. – Une organisation névrotique pourrait trouver là l'occasion de se confirmer.
Les manifestations anxio-dépressives – Affects d’angoisse et sentiments dépressifs le plus souvent associés sont courants à la fois chez les patients diabétiques et chez les adolescents; • de fait, ils concernent la plupart des adolescents diabétiques à un moment ou un autre de leur parcours. – L'anxiété diffuse, s'accroche parfois aux résultats des glycémies qui sont inutilement répétées à intervalles rapprochés. • La détermination des posologies d'insuline ne se f ait pas sans beaucoup de craintes et d'hésitations. • La hantise des accidents et des complications se t raduit par la recherche constante de réassurance. – L'angoisse est parfois masquée par des exigences tyranniques à l'égard de l'entourage, les accès de colère ou les propos agressifs; – elle peut être soulagée par la ritualisation des soins ou la présence apaisante d'un parent. – Il arrive que les plaintes corporelles se multiplient ou se focalisent sur une manifestation fonctionnelle propre à susciter la perplexité du diabétologue. Des phénomènes de conversion labiles peuvent se produire
Les mouvements dépressifs sont souvent plus difficiles à repérer chez les adolescents qui ne font pas aisément part de leur souffrance. – La participation passive aux soins, le manque d'attention ou la dépendance excessive leur valent des reproches qui accentuent leurs besoins régressifs. • Ils sont pourtant sensibles aux marques d'intérêt, aux échanges valorisants, aux signes d'amitié de leurs pairs. – Les oscillations de l'humeur sont ainsi très marquées: les rires succédant aux larmes, l'optimisme à l'autodépréciation, le dynamisme au découragement. – Dans des moments privilégiés, ils font part des sentiments de honte et de culpabilité qui compliquent le deuil d'un corps sans faille qu'ils ont à accomplir; • et ce d'autant plus qu'au douloureux vécu de perte qui les accable s'ajoute le difficile renoncement au monde de l'enfance.
• Les apports narcissiques dont ils bénéficient dans leurs rapports à autrui suffisent généralement à restaurer leur estime propre; – ils parviennent ainsi à renouer avec leurs bons objets intériorisés et à s'appuyer sur cette sécurité interne retrouvée pour affronter les épreuves qui les attendent. • Il en va autrement quand ils ont eu à subir des rup tures, des incohérences ou des désinvestissements répétés ou p rolongés dans les premières années de la vie. – Le diabète et l'adolescence révèlent alors la précarité de leurs appuis narcissiques et risquent de les précipiter dans une dépression grave; – à moins qu'ils ne mettent en œuvre des mécanismes de défenses archaïques pour se protéger de cette souffrance trop intolérable à contenir.
• La dimension autodestructrice est encore plus flagrante quand il s'agit de fugues ou de gestes suicidaires par injection massive d’insuline. • Le point commun de toutes ces conduites est l'externalisation de la conflictualité propre. – L'adolescent en agissant, fait agir ses parents en retour; il les oblige à exercer une tutelle qu'il rend vaine en échappant à leur surveillance. – Il ne se reconnaît aucune souffrance, pourtant l'acharnement qu'il manifeste à l'égard de son corps pubère malade, révèle bien la haine qu'il porte à cette mauvaise partie de lui même, identifiée à un persécuteur interne dont il voudrait être soulagé. – En jouant avec sa vie, l'adolescent cherche aussi à assouvir son désir d'invulnérabilité et à s'assurer du pouvoir qu'il peut exercer sur autrui. Les liens de dépendance non reconnus comme tels, s'en trouvent renforcés.
Les pathologies narcissiques
Le déclenchement précoce du diabète, le désarroi d urable qu'il a pu provoquer chez des parents souffrant de troubles de la personnalité sont considérés comme des circonstances propres à faciliter l'émergence de pathologies limites, ne s' exprimant bruyamment qu'au moment de la puberté. Les agirs intempestifs, répétitifs caractérisent le fonctionnement de certains adolescents qui semblent en malmenant leur corps de diverses manières "saboter" la prise en charge de leur diabète. – Le suivi anarchique du traitement, se traduisant notamment par des injections irrégulières de doses d'insuline déterminées au hasard, oblige l'entourage à assurer une suppléance étroite. – Certains adolescents carencés, structurés sur un mode limite, cherchent parfois délibérément à provoquer des accidents hypoglycémiques qui déclenchent les interventions angoissées de leurs proches.
• A l'inverse le repli régressif de certains adolesc ents semble témoigner de leur installation délibérée dans un st atut de dépendance.. – Ils se déclarent incompétents pour assumer l'auto-surveillance de leur diabète et délèguent à leurs parents la responsabilité des soins. – Ils ne se sentent jamais prêts à prendre le relais. Ils se maintiennent ainsi avec la complicité de leur entourage dans une position de grand enfant "asexué". – Ils manifestent généralement peu d'intérêt pour les études et ne s'inquiètent guère de leur avenir. Le déclenchement d'une phobie scolaire vient parfois aggraver leur isolement et confirme l'intensité de leur angoisse de séparation. – Ces adolescents se présentent comme des patients dociles; toute tentative de mise en cause de cet aménagement pathologique se heurte à une résistance farouche de l’ensemble du groupe familial ou met en évidence de façon pathétique la massivité de la détresse sous-jacente
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