Aigeai, site des tombes royales de la Macédoine antique - article ; n°4 ; vol.121, pg 620-630
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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1977 - Volume 121 - Numéro 4 - Pages 620-630
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1977
Nombre de lectures 48
Langue Français

Extrait

Monsieur Georges Daux
Aigeai, site des tombes royales de la Macédoine antique
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 121e année, N. 4, 1977. pp. 620-
630.
Citer ce document / Cite this document :
Daux Georges. Aigeai, site des tombes royales de la Macédoine antique. In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des
Inscriptions et Belles-Lettres, 121e année, N. 4, 1977. pp. 620-630.
doi : 10.3406/crai.1977.13411
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1977_num_121_4_13411COMPTES RENDUS DE L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 620
COMMUNICATION
AIGEAI, SITE DES TOMBES ROYALES DE LA MACÉDOINE ANTIQUE*
PAR M. GEORGES DAUX, MEMBRE DE L' ACADÉMIE.
N.B. — Au moment où je me suis exprimé le 18 novembre, un doute subsis
tait dans l'esprit de quelques spécialistes, en Grèce même, sur l'identification
de la tombe du roi Philippe II de Macédoine, et l'heureux inventeur, le pro
fesseur M. Andronikos, avait ■ — par un scrupule que nous nous devions de
respecter — suspendu son jugement en attendant que l'examen des trouvailles
apporte des arguments décisifs. Or la découverte de plusieurs protomes d'ivoire
représentant des membres de la famille royale, découverte révélée seulement le
24 novembre, l'amenait à se prononcer sans réserve pour l'affirmative, dans
une déclaration officielle, au cours d'une séance solennelle de l'Université de
Thessalonique ; la séance était télévisée : à l'émotion de l'orateur répondait
celle de l'auditoire présent, hellène ou étranger. Il m'a donc été loisible, avant
même que ne commence l'impression de cet exposé, d'en modifier légèrement
la forme, de deux manières. D'abord les formules qui correspondaient à la rét
icence méthodique du fouilleur, maintenant abolie, étaient devenues inutiles.
D'autre part j'ai réduit au minimum tout ce qui concerne le monument lui-
même et les objets ; les indications données par les journaux manquent d'autorité,
et seuls les archéologues militants sont qualifiés pour révéler progressivement,
avec une illustration adéquate, les richesses et les enseignements de leur extra
ordinaire trouvaille. D'ailleurs le sujet central de ma communication portait
sur le site d'Aigeai.
Par l'habileté du premier des Ptolémées les restes d'Alexandre
le Grand avaient été amenés et retenus à Alexandrie d'Egypte ;
pendant des siècles, les archéologues — professionnels, amateurs,
clandestins — se sont mis en quête, à grands frais mais sans succès,
de la tombe royale, pillée et peut-être entièrement détruite dès
l'Antiquité. On vient en revanche de mettre au jour, dans un état
de conservation assez étonnant, une tombe qui est peut-être celle de
son père, Philippe II, au cœur de la Macédoine, dans la nécropole
royale d'Aigeai, et c'est de ce site, enfin identifié grâce à l'archéologie,
que je voudrais vous entretenir.
Aigeai (le mot dès l'Antiquité est écrit de diverses façons, et
notamment Aigai ; je choisis la forme la plus autorisée, celle des
inscriptions) est le nom de l'une des capitales de la dynastie macé
donienne, et c'est là que les princes étaient traditionnellement
enterrés. Or le site de la ville et de sa nécropole royale a été méconnu
jusqu'à une date récente ; considéré comme un des possibles depuis
quelques années, c'est grâce aux découvertes de M. Andronikos qu'il
vient d'être vraiment assuré.
Nous connaissons trois noms de villes-capitales (ou résidences
royales) dans le royaume macédonien : Aigeai, Edessa, Pella. Pella, LE SITE D'AIGEAI 621
la plus récente, est une création de Philippe II ; les fouilles dégagent
lentement le site, à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de
Salonique, et c'est maintenant un des centres archéologiques les
plus riches de la Macédoine au temps de sa grandeur. Il n'y a pas
davantage de problèmes en ce qui concerne Edessa ; elle n'a repris
son nom ancien qu'au début du siècle, après les guerres balkaniques ;
sous la domination turque, elle s'est appelée Vodena (avec l'accent
tonique sur la dernière syllabe, et un e, non un i comme on trouve
le nom écrit dans des ouvrages modernes, influencés par des sources
byzantines), Vodena, « la ville des eaux » dans la langue des envahis
seurs slaves1.
Or l'opinion unanime — du premier volume de la Real-Encyclo-
pàdie de Pauy-Wissowa (1893) jusqu'au premier volume du « petit
Pauly » (1967). en passant par le volume XIV de ladite RE (1928),
Makedonia (col. 657-658 et col. 662) — , l'opinion unanime des
spécialistes, sauf de rares exceptions que nous dirons tout à l'heure,
est qu'Aigeai est un autre nom d'Edessa ; disons même que pour
eux la question ne se pose pas.
L'unique responsable de cette erreur n'est autre que l'historien
romain2 Justin (VII 1, il s'agit de Caranos, fondateur de la dynastie
royale) : « Caranus, sur l'ordre d'un oracle, cherchant à s'établir en
Macédoine avec une nombreuse colonie grecque, vint dans l'Émathie.
Il s'y empara d'Édesse, à la faveur d'un orage et d'une pluie épaisse,
qui dérobèrent sa marche aux habitants. Il était en outre précédé
d'un troupeau de chèvres que le mauvais temps chassait vers la
ville ; se rappelant alors que l'oracle lui avait dit " qu'il régnerait
là où il serait conduit par des chèvres ", il fixa dans cette ville le
siège de son empire. Depuis, dans toutes les expéditions qu'il tenta,
il eut soin de faire marcher des chèvres devant ses troupes, pour
qu'elles le gardassent dans ses nouvelles entreprises comme elles
l'avaient fait dans sa première conquête. En reconnaissance de ce
bienfait, il donna le nom d'Aegeae (Aiyecd) à la ville d'Édesse
Introduisons une parenthèse. Les linguistes du siècle dernier3
abusaient volontiers de leur érudition et de leur imagination
lorsqu'ils se promenaient dans le maquis des origines ; et les Anciens
déjà, fort peu linguistes au sens où nous l'entendons, ont donné
libre cours à leur fantaisie. En ce qui concerne Aigeai, deux étymo-
1. La ville s'appelait bien Vodena (BoSevà en grec, et non BoStvà) avant les
guerres balkaniques de 1912 et 1913. C'est une question secondaire et compli
quée, qui n'intéresse pas notre propos.
2. « L'abréviateur ingénieux et piquant de Trogue Pompée », selon les termes
de Désiré Nisard ; nous reproduisons la traduction, raisonnablement fidèle,
de la collection que Nisard a dirigée (1871).
3. Et du début du xxe siècle : Sturtevant par ex. 622 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
logies rivales ont été présentées comme des évidences : l'une, c'est la
chèvre (<xî£), animal mantique entre tous, si proche et si mystérieux
à la fois, qui nous a valu la fable de Justin ; l'autre, plus élaborée,
regroupe, sans parler des gloses, les nombreux exemples de topo-
nymes où le radical aiy- (quelle que soit son origine : préhistorique
ou grecque) correspondrait à la présence de l'eau (mer, sources, etc.).
Divertissement dans le meilleur cas ou, plus souvent, billevesées qui
n'instruisent guère ; il est sage, pour échapper à ce délire verbal,
de revenir sur un terrain solide et de consulter les articles oùyiaXoç
et aï£ du dictionnaire étymologique de Pierre Chantraine4.
La fantaisie culmine lorsqu'on tente de ramener à la même image
les trois noms : Edessa, Aigeai, Vodena. Ce dernier, purement
slave, est simple et lumineux ; nous avons vu qu'il désigne la ville
aux belles eaux, et les eaux, de fait, abondent à Edessa. Or, selon
Tomaschek et Kretschmer (deux noms familiers aux macédono-
logues et thracologues), un mot phrygien ou thraco-phrygien,
(3é8u ou FéSu en transcription grecque, fournirait l'étymologie
d'Edessa : Ed-, Aig-, Vod-, ce serait toujours, dans trois langues
différentes, la ville des eaux. Ainsi, quand les Slaves, derniers venus,
ont rebaptisé la ville dans leur langue — comme ils l'ont fait pour
des centaines de toponymes en Grèce5 — , ils auraient « traduit »
(quelle

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