L ethnie, la religion et l État : le rôle des Peuls dans la vie politique et sociale du Nord-Cameroun - article ; n°1 ; vol.61, pg 73-102
31 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

L'ethnie, la religion et l'État : le rôle des Peuls dans la vie politique et sociale du Nord-Cameroun - article ; n°1 ; vol.61, pg 73-102

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
31 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Journal des africanistes - Année 1991 - Volume 61 - Numéro 1 - Pages 73-102
La question générale de l'articulation entre les structures socioculturelles locales et celles, englobantes, de l'État moderne est examinée à la lumière du cas peul au Nord-Cameroun. L'ethnicité peule, enjeu important, est considérée à travers deux variantes historiques : celle, très incorporée, des Peuls sédentaires, et celle, très distinctive, des pasteurs peuls. Les diverses modalités par lesquelles des identités ethniques se transforment vers le modèle dominant peul sont mises en rapport avec le concept de pulaaku (« mode de vie peul ») et avec le rôle de l'islam. Par comparaison avec Bayart et d'autres savants, l'auteur maintient que, si l'on veut comprendre les liens entre les structures globales et locales à l'intérieur de la formation politique de l'État camerounais, on doit prêter attention aux logiques culturelles que le concept d'ethnicité cherche à capter.
The case of the Fulani peoples of northern Cameroon is used to examine the general question of the articulation of local social and cultural structures with the modern state's encompassing structures. A key issue is Fulani ethnicity, which is analyzed through its two historically constituted variants : the highly incorporative sedentary Fulani's and the distinctive pastoral Fulani's. The varying modalities of « Fulbeization », as ethnic identities are transformed into the culturally dominant Fulani model, are related to the concept of pulaaku (the « Fulani way of life ») and the role of Islam. In contrast to Bayart and others, the author argues that an adequate understanding of global in relation to local structures within the Cameroon political formation requires paying close attention to the culturally specific logics which the concept of ethnicity seeks to capture.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 272
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Philip Burnham
L'ethnie, la religion et l'État : le rôle des Peuls dans la vie
politique et sociale du Nord-Cameroun
In: Journal des africanistes. 1991, tome 61 fascicule 1. pp. 73-102.
Résumé
La question générale de l'articulation entre les structures socioculturelles locales et celles, englobantes, de l'État moderne est
examinée à la lumière du cas peul au Nord-Cameroun. L'ethnicité peule, enjeu important, est considérée à travers deux variantes
historiques : celle, très incorporée, des Peuls sédentaires, et celle, très distinctive, des pasteurs peuls. Les diverses modalités
par lesquelles des identités ethniques se transforment vers le modèle dominant peul sont mises en rapport avec le concept de
pulaaku (« mode de vie peul ») et avec le rôle de l'islam. Par comparaison avec Bayart et d'autres savants, l'auteur maintient
que, si l'on veut comprendre les liens entre les structures globales et locales à l'intérieur de la formation politique de l'État
camerounais, on doit prêter attention aux logiques culturelles que le concept d'ethnicité cherche à capter.
Abstract
The case of the Fulani peoples of northern Cameroon is used to examine the general question of the articulation of local social
and cultural structures with the modern state's encompassing structures. A key issue is Fulani ethnicity, which is analyzed
through its two historically constituted variants : the highly incorporative sedentary Fulani's and the distinctive pastoral Fulani's.
The varying modalities of « Fulbeization », as ethnic identities are transformed into the culturally dominant Fulani model, are
related to the concept of pulaaku (the « Fulani way of life ») and the role of Islam. In contrast to Bayart and others, the author
argues that an adequate understanding of global in relation to local structures within the Cameroon political formation requires
paying close attention to the culturally specific logics which the concept of ethnicity seeks to capture.
Citer ce document / Cite this document :
Burnham Philip. L'ethnie, la religion et l'État : le rôle des Peuls dans la vie politique et sociale du Nord-Cameroun. In: Journal
des africanistes. 1991, tome 61 fascicule 1. pp. 73-102.
doi : 10.3406/jafr.1991.2307
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1991_num_61_1_2307PHILIP BURNHAM
L'ethnie, la religion et Г Etat :
Le rôle des Peuls dans la vie politique
et sociale du Nord-Cameroun
Cet article vise à élaborer la notion et le rôle de l'ethnicité dans les rela
tions politiques entre l'État et la société du Nord-Cameroun. Les points prin
cipaux développés dans ce texte concernent le problème de l'articulation des
structures sociales et culturelles locales avec les structures politiques et écono
miques, largement dominantes dans l'État moderne.
L'« ethnicité », selon la perspective adoptée et la discipline envisagée, peut
être perçue comme une notion à la fois idéologique et trompeuse n'ayant aucune
valeur analytique, ou s'avérer d'une importance décisive.
Dans la première partie, j'expose ma position théorique tout en la compar
ant à celle de Jean-François Bayart, telle qu'elle apparaît dans son ouvrage
(1979), et j'examine les antécédents politiques et historiques de la région de
l'Adamawa au Cameroun. J'explique ensuite les mécanismes d'incorporation
des populations subordonnées dans la catégorie hétérogène foulbé — proces
sus que j'appelle « foulbéisation » — et montre à quel point il est important
pour la compréhension des phénomènes politiques du Nord-Cameroun.
Dans la seconde partie, j'approfondis la discussion en prenant pour exemple
l'ethnie mbororo, c'est-à-dire les Peuls nomades.
I
Après une première période où la recherche en sciences sociales au Came
roun portait essentiellement sur le groupe ethnique considéré comme objet pr
imaire d'étude (Dugast 1949), on assiste aujourd'hui à une remise en question
de cette position : désormais, l'attention des chercheurs s'oriente plutôt vers
l'analyse des structures sociales régionales et nationales. C'est ainsi qu'au cours
des années 60, les spécialistes des sciences politiques (Lévine 1964) se sont pen
chés sur la composition ethnique du nouvel État du Cameroun, réfléchissant
sur les possibilités d'une nation unie à partir de groupes tribaux divers. Cette
approche, influencée par la théorie de la modernisation (Geertz 1963, Cole-
man et Rosberg 1969) et l'idée de « construction de la nation » {nation buil
ding), a été critiquée à juste titre pour avoir adopté d'une manière trop essen-
tialiste la notion de tribu ou de groupe ethnique. De même, dans le domaine
de l'anthropologie sociale, les nombreux ethnologues qui travaillaient au Came-
Journal des africanistes, (61) 1991 : 73-102. 74 PHILIP BURNHAM
roun ont eu tendance à se concentrer sur les groupes ethniques isolés, ne por
tant qu'une attention secondaire aux relations régionales interethniques ou à
d'autres structures sociales plus larges (Tardits 1981).
Par opposition, certains travaux plus récents se sont interrogés sur l'impor
tance accordée à l'ethnicité dans les relations sociales au Cameroun, comme
ailleurs en Afrique, ou ont même essayé de dissoudre complètement la notion
de groupe ethnique, la percevant soit comme une invention du colonialisme
européen soit comme une idéologie qui cache d'autres influences sociales en
fait plus déterminantes. Par exemple, Amselle (1990 : 22) écrit : « L'invention
des ethnies est l'œuvre conjointe des administrateurs coloniaux, des ethnolo
gues professionnels et de ceux qui combinent les deux qualifications. »
On rencontre — étroitement lié à ces positions théoriques — l'argument
qu'il est antiprogressiste, pour les spécialistes des sciences humaines en activité
dans les pays ayant acquis récemment leur indépendance, de trop insister sur
les conflits ethniques. Bien qu'il soit le résultat de considérations politiques plus
pragmatiques, cet argument rejoint l'attitude du gouvernement camerounais sur
la question de l'ethnicité. La discrimination fondée sur des critères ethniques
étant formellement interdite par la Constitution du Cameroun, les fonctionnair
es du gouvernement ne laissent jamais passer l'occasion de condamner le tr
ibalisme comme la menace la plus importante à rencontre de l'unité nationale.
Un commentateur important de la scène politique camerounaise a tenté,
à plusieurs reprises, de développer un cadre d'analyse qui soit moins centré
sur des considérations ethniques, pour comprendre la politique camerounaise :
c'est Jean-François Bayart, bien connu par son livre L'État au Cameroun (1979),
ainsi que par d'autres articles parus par la suite sur les mêmes thèmes.
En tant qu'ethnologue, je trouve l'œuvre de Bayart digne d'attention : au
lieu de considérer l'État camerounais comme un simple reflet d'influences métrop
olitaines capitalistes et néo-colonialistes, ou d'insister sur la politique élitiste
de la capitale, il a essayé de décrire l'essentiel des relations sociales dans la société
nationale camerounaise, ainsi que son articulation avec les structures d'État.
Le cadre adopté par Bayart (1979) pour analyser la politique camerounaise
fait un usage central des notions de « société civile », d'« État », et de « recher
che hégémonique » — qui doivent beaucoup au travail de Gramsci (1971). Dans
la version de Bayart, l'État est perçu comme un mécanisme de domination potent
iel à la disposition de la classe dominante, en train de se constituer. La notion
de société civile, qui n'est pas toujours très précise dans le livre de Bayart (pas
plus que chez Gramsci), semble se rapporter à des formes collectives d'organi
sation et aux modes populaires d'action politique.
Plutôt que d'accepter une analyse simpliste de la formation d'une classe
dominante camerounaise comme la simple conséquence du soutien colonial et
néo-colonial d'une bourgeoisie compradore, Bayart préfère examiner le phé
nomène de la création d'une élite nationale camerounaise comme un processus
beaucoup plus complexe et suivi, historiquement bien enraciné dans la struc
ture sociale camerounaise.
Laissant de c&#

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents