La construction médiatique des malaises sociaux - article ; n°1 ; vol.90, pg 64-76
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Description

Actes de la recherche en sciences sociales - Année 1991 - Volume 90 - Numéro 1 - Pages 64-76
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 874
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Patrick Champagne
La construction médiatique des "malaises sociaux"
In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 90, décembre 1991. pp. 64-76.
Citer ce document / Cite this document :
Champagne Patrick. La construction médiatique des "malaises sociaux". In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol.
90, décembre 1991. pp. 64-76.
doi : 10.3406/arss.1991.2997
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1991_num_90_1_2997PATRICK CHAMPAGNE
LA CONSTRUCTION MÉDIATIQUE
DES "MALAISES SOCIAUX"
Illustration non autorisée à la diffusion
contribuent à les faire connaître et à les faire entrer, lorsqu'ils malaises n'inventent-ils ne constitués, ceux-ci L'un partir parlent. se des du réduisent tendent Ils sociaux sont obstacles moment les peuvent ni surtout aperçoivent. reconnus pas à pas avoir pourrait de où même majeurs aux^ à toutes les une l'image comme seuls médias penser, bien existence pièces Sans au qu'en malaises traitement tels résider doute en non les par parlent, donnent visible problèmes sans dans médiatiquement la les presse. politique raison, journalistes seulement c'est-à-dire le les fait dont médias Or, qu'ils que des ils à comme on dit, dans le "débat public". Il reste qu'il serait
naif de s'arrêter à ce constat. Les malaises ne sont pas
tous également médiatiques et ceux qui le sont subissent
inévitablement un certain nombre de déformations dès
qu'ils sont traités par les médias car, loin de se borner à
64 Patrick Champagne
La construction médiatique des "malaises sociaux"
les enregistrer, le champ journalistique opère un véritable Mais si, de fait, on ne peut pas, sans simplification abusi
travail de construction qui dépend très largement des ve, parler d'une vision journalistique des événements, il
intérêts propres à ce secteur d'activité. serait tout aussi absurde de recenser une à une les
On pourrait presque dire que l'énumération des diverses visions journalistiques et de les considérer
"malaises" dont parlent les médias constitue surtout une comme autant de points de vue indépendants. En effet,
liste de "malaises pour journalistes" aux deux sens de le journalisme d'information constitue un champ d'activi
l'expression, c'est-à-dire d'une part les malaises dont la té qui fait système. D'une part, les journalistes, quel que
représentation publique a été explicitement fabriquée soit le type de média dans lequel ils travaillent, se lisent,
pour intéresser les journalistes et d'autre part les formes s'écoutent ou se regardent beaucoup entre eux. La
"revue de presse" est pour eux une nécessité professionnde malaise qui, spontanément, attirent les journalistes
parce qu'ils sont "hors du commun" ou dramatiques ou elle (sujets qu'il faut traiter, idées de reportage ou défi
émouvants et répondent ainsi à la définition sociale, nition d'angles originaux). D'autre part, toutes les visions
commercialement rentable, de l'événement digne de faire journalistiques n'ont pas le même poids à l'intérieur de la
"la une" des médias. De sorte que la manière dont ceux- profession et surtout à l'extérieur, dans le processus de
là choisissent et traitent ces malaises en dit peut-être constitution des représentations sociales. Lorsque l'on
autant sur le milieu journalistique lui-même que sur les relit ou revoit, à froid, tout ce qui a pu être écrit ou mont
groupes dont ils parlent (1). ré sur des événements tels que "la guerre du Golfe", "le
mouvement lycéen" de novembre 1990 ou "les émeutes
de Vaulx-en-Velin" par exemple, on peut certainement
trouver ici ou là un article ou un reportage particulièr
ement pertinents. Mais cette lecture, à la fois exhaustive et L'hypertrophie de "l'événement"
a posteriori, oublie que ces articles passent souvent
inaperçus du plus grand nombre et sont noyés dans un Ce n'est pas un hasard si tous les médias, mais aussi les
ensemble dont la tonalité est généralement très publics auxquels ils s'adressent, s'accordent pourtant à différente (2). Or, les médias agissent sur le moment et considérer comme "événements" un certain nombre de
fabriquent collectivement une représentation sociale, qui, faits tels que les vastes rassemblements, les incidents dra même lorsqu'elle est assez éloignée de la réalité, perdure matiques ou les catastrophes par exemple. Les journal
malgré les démentis ou les rectifications postérieurs parce istes ne font que reprendre, avec leurs moyens propres, que cette interprétation première ne fait, bien souvent, une définition sociale de l'événement qui existe presque que renforcer les interprétations spontanées et mobilise indépendamment d'eux.
donc d'abord les préjugés et tend, par là, à les redoubler.
Il y a, bien évidemment, de profondes différences dans le En outre, il faut prendre en compte le fait que la télévi
mode de traitement de l'information selon les types de sion exerce un effet de domination très fort à l'intérieur
médias et les publics auxquels ils s'adressent, les journal même du champ journalistique parce qu'elle n'est pas un istes de la presse écrite, par exemple, ne travaillant pas média parmi d'autres. Sa large diffusion - surtout en ce
de la même manière que ceux du secteur audiovisuel. A qui concerne les journaux télévisés - lui donne un poids l'intérieur même de chaque type de média, on trouverait particulièrement fort dans la constitution de la représentencore nombre de différences significatives dans les ation dominante des événements. Par ailleurs, l'informaconditions d'exercice de la profession, mais aussi dans le tion "mise en images" produit un effet de dramatisation recrutement et la formation des journalistes. C'est ainsi
propre à susciter très directement des émotions collectque, à l'intérieur même de la presse écrite, il faudrait dis
ives. Enfin, les images exercent un effet d'évidence très tinguer les journalistes de la de province et de la
puissant -plus sans doute que le discours-, bien qu'elles presse parisienne, ceux de la presse quotidienne et de la
soient également le produit d'un travail plus ou moins presse hebdomadaire, les journalistes spécialisés et ceux
explicite de sélection. Bien que la télévision s'alimente qui font de l'information générale, etc. Les journalistes
en grande partie à la presse écrite ou aux mêmes sources sont d'ailleurs les premiers à reconnaître, comme pour
marquer leurs différences, qu'"ils ne font pas tous le qu'elle (les dépêches d'agences essentiellement), elle a
même métier". une logique de travail et des contraintes spécifiques qui
pèsent fortement sur la fabrication des événements, et
cela, bien au-delà du média lui-même. Elle agit sur les
1- Ces malaises médiatiquement mis en scène peuvent donner par téléspectateurs ordinaires mais aussi sur les autres fois une image assez fantaisiste de la réalité, comme le montre, par médias, les journalistes de la presse écrite ne pouvant exemple, telle rétrospective télévisée récente réduisant l'histoire de
plus ignorer aujourd'hui ce qui, la veille, a fait "la une" la jeunesse depuis ces vingt dernières années à une succession
d'images d'Epinal d'un nouveau genre où l'on voit se succéder des des journaux télévisés de 20 heures. hippies, les concerts de Bob Dylan et la comédie musicale « Hair »,
des squatters pop, le hard rock, les concerts de SOS-Racisme, des
2- On ne peut voir les articles « pertinents - que lorsque l'on en sait jeunes de banlieues qui brûlent les voitures, des skins et autres
Zoulous, des rappeurs, des taggers et, pour finir sur l'actualité la déjà suffisamment sur le problème soulevé. Sur le moment, et sur
plus récente, des jeunes qui allument leur briquet lors des concerts les sujets que l'on connaît mal ou pas du tout, on ne peut que s'en
du chanteur Patrick Bruel. remettre à ceux qui en disent quelque chose.
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Lorsque les journaux télévisés décidèrent, par exemple, réticences à écrire sur ces événements, ce n'est pas seule
de couvrir les premières manifestations de ly

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