La pédologie - article ; n°1 ; vol.5, pg 299-331
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Description

L'année psychologique - Année 1898 - Volume 5 - Numéro 1 - Pages 299-331
33 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1898
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

E. Blum
La pédologie
In: L'année psychologique. 1898 vol. 5. pp. 299-331.
Citer ce document / Cite this document :
Blum E. La pédologie. In: L'année psychologique. 1898 vol. 5. pp. 299-331.
doi : 10.3406/psy.1898.3054
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1898_num_5_1_3054XII
LA PÉDOLOGIE
l'idée, le mot, la chose
Décrivant l'évolution des sciences, H. Spencer note qu'a la
période de dissentiment entre les chercheurs, qui suit d'abord
celle de l'unanimité entre les ignorants, succède celle « de
l'unanimité des sages », au moins sur certains points import
ants désormais incontestés. Cette ère semble venue pour
la science de l'éducation : sous le nom précis de pédologie elle
paraît entrer dans la voie vraiment scientifique où tant de
bons esprits s'efforçaient de la pousser depuis de nombreuses
années.
Comme toutes les idées neuves, celle de la pédologie est très
ancienne : dès 1847 Goltz, dans son « Buch der Kindheit »
réclamait l'institution d'une véritable science de l'éducation,
et de tous temps les esprits réfléchis ont compris l'impor
tance de la question et tenté, ne fût-ce qu'en posant des pro
blèmes, d'en préparer la solution. En France, l'idée semblait
assoupie lorsque, sous l'influence de catastrophes inattendues,
le mouvement ne fut pas seulement, comme l'écrivit très bien
Marion, la suite d'une évolution : il eut « le caractère d'un
réveil ». Subitement la pédagogie échange le rôle de Cen-
drillon contre celui de Reine et même de Reine despotique. On
la met partout, dans les programmes, dans les examens. On
l'installe en Sorbonne, où il était surprenant d'ailleurs qu'elle
ne fût pas depuis longtemps enseignée, et, comme toujours en
pareil cas, on lui demande, après tant de sacrifices et de preuves
de confiance, de réaliser immédiatement les espérances les plus
utopiques. Il faut même une pédagogie de la couture et on a dû
sans doute publier une culinaire. Sans doute elle MÉMOIRES ORIGINAUX 300
n'est pas encore à la mode et il est à craindre qu'elle ne le soit
jamais dans notre pays où l'on confond encore pédagogue et
pédant, mais elle est en honneur et même procure des hon
neurs. Bien mieux, comme tout ce qui est puissant, elle suscite
oppositions et inimitiés. On lui reproche ses insuccès, sa stéri
lité, ses palinodies et d'aucuns répètent encore que pour être
bon éducateur il faut surtout avoir évité la prétendue culture
pédagogique.
Il y a dans ces critiques une part de vérité que l'observateur
peut maintenant dégager : lorsqu'après une longue période
d'abandon ou tout au moins de négligence on réinventa la
pédagogie, il y eut nécessairement des exagérations commises.
De plus, il fallut recevoir les salutaires leçons de l'expérience
pour dissiper une dangereuse équivoque : on ne faisait pas
grand'chose tout en s'agitant beaucoup, parce qu'on n'avait pas
pu, dès le premier jour, préciser le champ d'action du savant
et du praticien, — les recherches du pédologue et l'œuvre du
pédagogue.
Sous l'influence des travaux accomplis en Allemagne et
surtout en Amérique, où des penseurs dégagés de tout lien
traditionnel et munis des instruments les plus positifs et les
plus nouveaux pouvaient immédiatement appliquer à la même
idée de l'éducation les méthodes expérimentales, on commence à
pressentir la différenciation qui va s'opérer : le célèbre rapport
de M. Buisson, les comptes rendus publiés sur les travaux
élaborés dans les Universités américaines, tout récemment la
mission de Chicago, révèlent les progrès accomplis. En All
emagne et en Italie, dans les laboratoires de psychologie ou
dans les séminaires pédagogiques, les problèmes sont posés le même esprit et, dès 1892, le mouvement était assez
accentué en France pour pouvoir être nettement décrit : l'idée
de la science nouvelle se précisait de mieux en mieux1.
On comprend que les progrès accomplis dans le sens expéri
mental par les sciences limitrophes avaient facilité et hâté
l'eclosion d'une théorie vraiment scientifique de l'éducation. On
venait de voir comment, en utilisant méthodiquement les don
nées fournies parles sciences physiques, biologiques et patholo
giques, s'était renouvelée et surtout élargie l'ancienne psycholog
ie : à la période descriptive et empirique avait succédé la phase
explicative et générale. Le succès donne toujours du courage,
(1) E. Blum. Le Mouvement pédagogique. Revue philosophique, sept. 1892. E. BLUM. — LA PÉDOLOGIE 301
surtout lorsqu'on en exagère encore la portée, comme c'est le cas
aux moments de réaction. Par une conséquence nécessaire, la
psychologie expérimentale et la psycho-physiologie de labora
toire devaient produire une pédagogie positive et une pédiomé-
trie. Gomme on n'en saurait contester la réalité, puisqu'elles
existent, il convient d'en préciser l'objet, d'en indiquer le déve
loppement actuel et d'en reconnaître la portée.
Annoncer une science nouvelle de l'éducation, n'est-ce pas
céder aux préjugés de tous ceux qui, ayant saisi un aspect
jusqu'alors obscur, croient découvrir le spectacle tout entier que
d'autres avaient depuis longtemps décrit? On parle en effet de
l'ancienne pédagogie comme on parlait il y a trente ans de la
vieille psychologie : il faut la supprimer, elle est totalement
faite de chic et on ne doit en attendre ni clarté ni utilité. Il
serait pourtant nécessaire de tirer quelque profit de l'expé
rience acquise : le procès de la psychologie expérimentale n'est
plus à gagner, mais il y a des arguments d'audience qui ont
fait leur temps. Il est juste de reconnaître que la vieille psy
chologie, loin d'avoir disparu, rend journellement de précieux
services à la psychologie expérimentale, qui lui emprunte
ses cadres, ses descriptions et l'instrument qui reste l'outil
nécessaire de toute recherche psychologique, — l'introspec
tion.
La pédagogie telle qu'on l'a comprise et qu'on doit la cultiver
pendant longtemps encore reste un art délicat ayant une portée
d'autant plus grande qu'elle sera mieux définie. Réduite à être,
comme le disait très bien M. Buisson dans sa leçon d'ouver
ture 1, « une science d'application et d'application de seconde
main », elle a pour fonction « de suivre les autres sciences mor
ales, et encore de les suivre d'assez loin pour ne s'engager
après elles dans une voie que quand la voie est bien frayée,
bien explorée, et parfaitement sûre ». Disons mieux : elle
n'est pas une science, elle occupe un espace compris dans l'en
ceinte sacrée mais distinct du sanctuaire, « le parvis de la
science ». D'un mot, elle est un art visant à la pratique, et par
conséquent prudent : donnant des avis techniques et immédia
tement réalisables, elle doit être dans une grande mesure
misonéïste. La pédagogie traditionnelle ne fait pas de découv
ertes, elle n'a pas le droit de pousser à l'expérimentation in
anima puerili. Elle recueille les données les mieux établies de
(1) F. Buisson. Leçon cVouverlure. Rev. int., 15 décembre 1896. MÉMOIRES ORIGINAUX 302
la science faite, les manie avec un doigté délicat, exerce ses
adeptes à les appliquer dans les circonstances usuelles de la
vie scolaire et domestique de l'enfant normal ou anormal, et
enfin, avant d'agir, elle pèse au trébuchet des notions morales
la qualité des applications qu'on lui propose. Quand celles-ci
sont réalisées, elle peut en d'intéressantes descriptions faire
connaître et aussi apprécier les résultats obtenus. Il y a là
toute une technique dont nul ne saurait exagérer l'importance
et la nécessité; si l'on ajoute que sur bien des points on sera
réduit à la concevoir en partant d'opinions empiriques ou de
théories plus ou moins rationnelles, on accordera sans doute
que nous ne songeons ni à récuser le concours n

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