Sur les problèmes paysans de la Révolution - article ; n°1 ; vol.232, pg 305-314
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Description

Annales historiques de la Révolution française - Année 1978 - Volume 232 - Numéro 1 - Pages 305-314
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 20
Langue Français

Extrait

Florence Gauthier
Sur les problèmes paysans de la Révolution
In: Annales historiques de la Révolution française. N°232, 1978. pp. 305-314.
Citer ce document / Cite this document :
Gauthier Florence. Sur les problèmes paysans de la Révolution. In: Annales historiques de la Révolution française. N°232,
1978. pp. 305-314.
doi : 10.3406/ahrf.1978.1023
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1978_num_232_1_1023MELANGES
SUR LES PROBLEMES PAYSANS
DE LA REVOLUTION *
L'intérêt pour les périodes de transition d'un mode de
production à un autre s'est ravivé depuis la dernière décennie.
Le XVIII* siècle et la Révolution française ont suscité de nombreuses
études nouvelles et contradictoires. La Révolution française demeure
une des clefs de l'histoire contemporaine : un vieux monde fut
balayé, un nouveau s'imposa, bourgeois et capitaliste. Mais
l'intérêt pour la Révolution française ne réside pas seulement dans
son déroulement et son résultat k plus évident : la prise de
pouvoir violente par une classe nouvelle, la bourgeoisie, ce qui
continue de constituer une utile leçon pour les classes opprimées
par celle-ci. Elle passionne aussi pour tout ce que le mouvement
populaire, si vigoureusement révolutionnaire, posa à la face du
monde : l'égalitarisme agraire et l'égalitarisme des sans-culottes
urbains dont l'explosion de 1792 à l'an II continue d'attirer ou
d'efirayer. A ce sujet, la polémique tourne autour de deux
problèmes fondamentaux. Quel fut le rôle des masses populaires
dans la révolution bourgeoise ? Le mouvement égalitariste était-il
rétrograde ou progressiste ?
**
G. Lefebvre fut un des premiers historiens à étudier en
profondeur la paysannerie pendant la Révolution française. Sa
grande étude sur les Paysans du Nord a permis, par un nécessaire
travail de recours aux sources, de jeter les bases d'une analyse
économique et sociale sérieuse de la question agraire. Rappelons
également, dans le domaine de l'histoire sociale, sa pénétrante
analyse des causes de la Grande Peur. Rares sont ceux qui ont
écrit l'histoire avec autant de rigueur scientifique que de chaleur
pour la cause du peuple. Néanmoins, G. Lefebvre a voulu voir
* Albert Soboul, Problèmes paysans de la Révolution (1789-1848). Paris, Maspero,
1976, 442 p. in-8°. ,
306 F. GAUTHIER
dans le mouvement paysan une révolution autonome caractérisée
par des tendances anticapitalistes. Ainsi, par rapport au double
problème que nous avons posé, G. Lefebvre a considéré que le
mouvement paysan était coupé de la révolution bourgeoise et
que son rôle n'était positif que dans la mesure où, objectivement,
il a aidé la bourgeoisie à renverser l'Ancien Régime, mais, ce
faisant, en opposition avec le mode de production capitaliste.
Curieusement, il existe un courant de l'historiographie française
qui, tout en éclipsant les aspects novateurs de l'œuvre de G.
Lefebvre, reprend certaines de ses conclusions qui appellent pourtant
une remise en question. Ainsi, E. Le Roy-Ladurie va répétant
inlassablement que les masses paysannes étaient rétrogrades et
conservatrices, incapables de progrès et tournées vers le passé.
N'est-ce pas un écho inavoué ? E. Le Roy-Ladurie veut même
voir l'intervention des masses paysannes comme une contre-offensive
réactionnaire dans la Révolution de 1789 (1). F. Furet et D. Richet,
également, se contentent de répéter que les masses paysannes étaient
rétrogrades, donc sans doute négligeables, puisqu'ils consacrent
une page, une seule, aux 85 % de la population de l'époque dans
leur livre sur la Révolution (2). Dans la même optique, Y.-M.
Bercé étudie d'une façon pour le moins unilatérale, les constantes
des révoltes paysannes. Il parvient à établir ainsi un modèle
intemporel de révolte, ce qui l'autorise à le retrouver identique
du XVIe au XIXe siècle. Ne va-t-il pas jusqu'à écrire : « C'est là
une confirmation de notre propos qui est de faire échapper
l'examen des troubles populaires à l'histoire politique et à ses
implications à court terme» (3). Cette négation du temps et de
l'évolution permet de décrire les révoltes paysannes comme des
convulsions cycliques qui attaquent le corps de la société immobile.
Des 'humains ? A peine, des animaux plutôt, selon la vieille
imagerie réactionnaire. On remarquera que cette vision d'un
monde paysan clos sur lui-même, va de pair avec la p théorie des
élites » reprise par F. Furet et D. Richet, et qui exclut du monde
pensant et seul capable d'initiative ce bas peuple (3 bis) que
d'aucuns s'étonnent de voir encore défendu par quelques attardés
sentimentaux et, pour sûr, populistes.
(1) « Pour un modèle de l'économie rurale française au XVIIIe siècle », in
Mélanges de l'Ecole française de Rome, t. 85, 1973, 1, pp. 6 à 29.
(2) La Révolution, Paris, 1965.
(3) Croquants et nu-pieds. Les soulèvements paysans en France du XVI' au XIX'
siècle (Paris, 1974), p. 191.
(3 bis) On aura appris avec stupeur jusqu'où cette négation du rôle du mouvement
populaire a pu conduire l'historien de R.F.A., E. Schmitt. Voir le compte rendu de
son livre, Einfiihrung in die Geschichte der Franzôsischen Revolution, Mùnchen, 1976,
par I. Hartig, dans A.H.R.F., 1977, p. 466. « S'appuyant sur une relecture de la thèse SUR LES PROBLEMES PAYSANS 307
Mais G. Lefebvre a eu aine autre postérité à la fois continuat
rice et critique de son œuvre. Son interprétation de la place du
mouvement populaire dans la Révolution française a été critiquée
par A. Soboul sur deux plans principaux. Dans son livre sur les
sans-culottes parisiens, A. Soboul précisait la nature de classe de
la sans-culotterie, ses revendications égalitaires et ses conceptions
politiques. Il donnait une analyse des classes qui soutinrent le
Gouvernement révolutionnaire fondé sur l'alliance politique 4es
sans-culottes et des Jacobins, et éclairait les causes de la rupture
de cette alliance, en (germinal an II, rupture qui allait précipiter
la chute de Robespierre. L'étude approfondie des tendances
politiques de la sans-culotterie permet de mieux saisir la double
nature du Gouvernement révolutionnaire : dictature contre les
ennemis du peuple, démocratie au sein du peuple, en particulier
grâce à l'organisation sectionnaire où les sans-culottes firent l'apprent
issage de la démocratie révolutionnaire. Ce fut cette double
pratique qui permit le fonctionnement du Gouvernement révolu
tionnaire. La rupture de cet équilibre le brisa. Cette double
pratique ne fut théorisée qu'ultérieurement par Babeuf, avant
que Marx ne la reconsidère en tirant les leçons de la Commune
de 1871.
L'étude de la sans-culotterie parisienne d'Albert Soboul
remettait en question une des interprétations générales de G.
Lefebvre sur le rôle du mouvement populaire dans la Révolution
bourgeoise. Celui-ci n'était plus réduit à une force d'appoint à
la bourgeoisie pour achever sa révolution, mais faisait partie orga
niquement de l'ensemble du mouvement. La sans-culotterie
retrouvait sa dimension réelle en tant qu'élément politiquement
le plus révolutionnaire de cette révolution bourgeoise.
De plus, en dégageant la nature de classe de la sans-culotterie
parisienne, A. Soboul donnait une clef. Ces artisans compagnons
porteurs d'une conception petite-bourgeoise du monde, aspiraient
à établir une société de petits producteurs libres et indépendants,
produisant et échangeant librement. Cette précision permit de
rompre avec une interprétation, qui, si généreuse qu'elle fût, n'en
était pas moins a-historique : celle qui confondait Je mouvement
sans-culotte avec un mouvement prolétarien (4). Les sans-culottes
de Soboul, il apparaît à l'auteur que le mouvement des sans-culottes de l'an II a
trouvé une continuation « inconsciente » dans l'extrême-gauche fasciste petite-
bourgeoise de l'entre-deux guerres. »
(4) D. Guerin, La lutte des classes sous la première République. Bourgeois et
bras-nus (1946), 2 vol., nouvelle édit

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