L entrée de l Espagne et du Portugal dans la Cée : enjeux, perspectives et premiers bilans - article ; n°2 ; vol.78, pg 19-51
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L'entrée de l'Espagne et du Portugal dans la Cée : enjeux, perspectives et premiers bilans - article ; n°2 ; vol.78, pg 19-51

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Description

Économie & prévision - Année 1987 - Volume 78 - Numéro 2 - Pages 19-51
L'entrée de l'Espagne et du Portugal dans la Cée,
par Guy Longueville.

Le troisième élargissement de la Communauté à l'Espagne et au Portugal semble relever avant tout de raisons politiques, la nécessité d'étendre l'Europe aux pays du Sud, d'une part, et la promesse faite aux deux Etats ibériques que leur retour a la démocratie permettrait leur entrée dans la Communauté, d'autre part.
Car il apparaît que les avantages économiques ne sont évidents pour aucun des contractants.
Alors que le rapprochement progressif entre les deux nouveaux venus et la Communauté européenne favorisait leur intégration, on constate que les écarts entre eux et la Cée, en matière de production, d'investissement et de niveau de vie, qui s'étaient progressivement réduits entre 1960 et 1974, se sont depuis lors maintenus. Durant les dix années de la phase transitoire, l'ouverture dissymétrique des barrières douanières contraindra l'Espagne et le Portugal à des efforts accrus d'assainissement et de compétitivité s'ils veulent éviter que la dégradation de leurs échanges commerciaux avec la Cée, très sensible au cours de l'année qui a suivi l'adhésion, ne se poursuive. Mais le taux de croissance économique ainsi freiné se révélera être difficilement compatible avec une baisse du taux de chômage en Espagne et une réduction des écarts de développement au sein de la Communauté élargie.
L'unification à moyen terme du marché des douze Etats de la Communauté pourrait accélérer un redéploiement sectoriel dans la Cée qui concernerait essentiellement l'industrie pour laquelle une contrainte de prix requiert l'efficacité optimale, à la différence de l'agriculture qui permet le maintien de productions locales à la limite de l'efficacité économique. La tendance à la spécialisation intra-européenne des activités, constatée pour l'Espagne et le Portugal depuis les années 1970, se renforcerait donc à l'avenir, avec un risque de hiérarchisation accru entre ces deux économies : tandis que l'Espagne développerait progressivement des pôles de compétitivité, le Portugal se limiterait à des créneaux utilisant intensivement une main-d'œuvre peu coûteuse.
Le pari de l'adhésion est donc plus risqué pour le Portugal, pays en retard de développement et aux possibilités d'expansion limitées, que pour l'Espagne à qui le potentiel de modernisation économique, en dépit des déséquilibres à prévoir, donne de nombreux atouts.
Concernant la Cée, ce troisième élargissement risque d'accroître les excédents agricoles et de renforcer les tensions sur le budget communautaire. De plus, l'harmonisation du développement des Etats de la Communauté, rapprochement des niveaux de vie, homogénéisation des conditions de la concurrence et complémentarité des productions, qui favorisait une avancée institutionnelle vers l'intégration communautaire, risque de pâtir du dernier élargissement comme cela a sans doute été déjà le cas à la suite des deux précédents. C'est pourquoi, si l'on souhaite éviter que ne s'impose progressivement une Europe institutionnelle à deux vitesses, face aux obstacles dressés par les écarts de développement, la solidarité au sein de la Communauté, déjà amorcée envers la Grèce et le Portugal, devrait se renforcer. Elle impliquerait notamment une redistribution accrue des pays les plus riches de la Cée vers les pays les plus pauvres.
The entry of Spain and Portugal
into the European economic Community,
by Guy Longueville.

The third extension of the European Community to include Spain and Portugal seems to have been motivated in the main by political considerations: on the one hand the need to extend Europe to the south European countries and on the other Europe's promise to both States that they would be eligible for membership as soon as they restored democracy.
For it appears that the economic advantages are not obvrious for any of the contractive parties.
While the two newcomers to the Community gradually closed the gap separating them from the other members, thus facilitating their membership, it appears that the gap between these two Iberian states and the Eec countries with regard to production, investment and standard of living, which narrowed progressively from 1960 to 1974, has since remained constant. During the ten-years transition phase the uneven customs barriers will oblige Spain and Portugal/to make a great effortto streamline their economies and become more competitive if they do not want their trade relations with the Common Market countries to continue deteriorating as they did quite sharply in the year period following membership. The resulting slowdown in economic growth, however, will scarcely be compatible with a decrease in the unemployment rate in Spain and a narrowing of the development gap within the enlarged Community.
The medium-term unification of the market of the twelve member States could accelerate a sectorial reshuffle within the Eec, mainly in industry, where price pressures demand maximum efficiency, unlike in agriculture, where local production has a part to play even if it is not particularly efficient. The tendency for intra-European specialization of activities, which reached Spain and Portugal in the 1970s, seems likely to increase in the future, with a risk of increased hierarchization between these two economies: as Spain gradually develops its poles of competitivity, Portugal would be limited to low-cost labour-intensive areas.
The membership stakes are therefore higherfor Portugal, a late-developing country with limited possibilities of expansion, than for Spain, whose economic modernization potential is an important asset even if certain inequalities are inevitable.
From the Community's point of view, this third enlargement looks likely to increase agricultural surpluses and pressures on the Community budget. What is more, the harmonization of development in the member States, the similar standards of living, the balanced conditions of competition and the complementary nature of products in different areas, which all encouraged an institutional advance towards greater Community integration, may well suffer from this latest enlargement as they doubtless did in the previous two cases of Community enlargement. So if we want to avoid the emergence of a two-speed institutional Europe in answer to the obstacles thrown up by different levels of development, Community solidarity, which has already been shown towards Greece and Portugal should nonetheless be further reinforced, which means among other things a redistribution by the wealthier Common Market countries in favour of the poorer members.
JEL: 121
33 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 32
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Guy Longueville
L'entrée de l'Espagne et du Portugal dans la Cée : enjeux,
perspectives et premiers bilans
In: Économie & prévision. Numéro 78, 1987-2. pp. 19-51.
Citer ce document / Cite this document :
Longueville Guy. L'entrée de l'Espagne et du Portugal dans la Cée : enjeux, perspectives et premiers bilans. In: Économie &
prévision. Numéro 78, 1987-2. pp. 19-51.
doi : 10.3406/ecop.1987.4979
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ecop_0249-4744_1987_num_78_2_4979Résumé
L'entrée de l'Espagne et du Portugal dans la Cée,
par Guy Longueville.
Le troisième élargissement de la Communauté à l'Espagne et au Portugal semble relever avant tout de
raisons politiques, la nécessité d'étendre l'Europe aux pays du Sud, d'une part, et la promesse faite aux
deux Etats ibériques que leur retour a la démocratie permettrait leur entrée dans la Communauté,
d'autre part.
Car il apparaît que les avantages économiques ne sont évidents pour aucun des contractants.
Alors que le rapprochement progressif entre les deux nouveaux venus et la Communauté européenne
favorisait leur intégration, on constate que les écarts entre eux et la Cée, en matière de production,
d'investissement et de niveau de vie, qui s'étaient progressivement réduits entre 1960 et 1974, se sont
depuis lors maintenus. Durant les dix années de la phase transitoire, l'ouverture dissymétrique des
barrières douanières contraindra l'Espagne et le Portugal à des efforts accrus d'assainissement et de
compétitivité s'ils veulent éviter que la dégradation de leurs échanges commerciaux avec la Cée, très
sensible au cours de l'année qui a suivi l'adhésion, ne se poursuive. Mais le taux de croissance
économique ainsi freiné se révélera être difficilement compatible avec une baisse du taux de chômage
en Espagne et une réduction des écarts de développement au sein de la Communauté élargie.
L'unification à moyen terme du marché des douze Etats de la Communauté pourrait accélérer un
redéploiement sectoriel dans la Cée qui concernerait essentiellement l'industrie pour laquelle une
contrainte de prix requiert l'efficacité optimale, à la différence de l'agriculture qui permet le maintien de
productions locales à la limite de l'efficacité économique. La tendance à la spécialisation intra-
européenne des activités, constatée pour l'Espagne et le Portugal depuis les années 1970, se
renforcerait donc à l'avenir, avec un risque de hiérarchisation accru entre ces deux économies : tandis
que l'Espagne développerait progressivement des pôles de compétitivité, le Portugal se limiterait à des
créneaux utilisant intensivement une main-d'œuvre peu coûteuse.
Le pari de l'adhésion est donc plus risqué pour le Portugal, pays en retard de développement et aux
possibilités d'expansion limitées, que pour l'Espagne à qui le potentiel de modernisation économique,
en dépit des déséquilibres à prévoir, donne de nombreux atouts.
Concernant la Cée, ce troisième élargissement risque d'accroître les excédents agricoles et de
renforcer les tensions sur le budget communautaire. De plus, l'harmonisation du développement des
Etats de la Communauté, rapprochement des niveaux de vie, homogénéisation des conditions de la
concurrence et complémentarité des productions, qui favorisait une avancée institutionnelle vers
l'intégration communautaire, risque de pâtir du dernier élargissement comme cela a sans doute été déjà
le cas à la suite des deux précédents. C'est pourquoi, si l'on souhaite éviter que ne s'impose
progressivement une Europe institutionnelle à deux vitesses, face aux obstacles dressés par les écarts
de développement, la solidarité au sein de la Communauté, déjà amorcée envers la Grèce et le
Portugal, devrait se renforcer. Elle impliquerait notamment une redistribution accrue des pays les plus
riches de la Cée vers les pays les plus pauvres.
Abstract
The entry of Spain and Portugal
into the European economic Community,
by Guy Longueville.
The third extension of the European Community to include Spain and Portugal seems to have been
motivated in the main by political considerations: on the one hand the need to extend Europe to the
south European countries and on the other Europe's promise to both States that they would be eligible
for membership as soon as they restored democracy.For it appears that the economic advantages are not obvrious for any of the contractive parties.
While the two newcomers to the Community gradually closed the gap separating them from the other
members, thus facilitating their membership, it appears that the gap between these two Iberian states
and the Eec countries with regard to production, investment and standard of living, which narrowed
progressively from 1960 to 1974, has since remained constant. During the ten-years transition phase
the uneven customs barriers will oblige Spain and Portugal/to make a great effortto streamline their
economies and become more competitive if they do not want their trade relations with the Common
Market countries to continue deteriorating as they did quite sharply in the year period following
membership. The resulting slowdown in economic growth, however, will scarcely be compatible with a
decrease in the unemployment rate in Spain and a narrowing of the development gap within the
enlarged Community.
The medium-term unification of the market of the twelve member States could accelerate a sectorial
reshuffle within the Eec, mainly in industry, where price pressures demand maximum efficiency, unlike
in agriculture, where local production has a part to play even if it is not particularly efficient. The
tendency for intra-European specialization of activities, which reached Spain and Portugal in the 1970s,
seems likely to increase in the future, with a risk of increased hierarchization between these two
economies: as Spain gradually develops its poles of competitivity, Portugal would be limited to low-cost
labour-intensive areas.
The membership stakes are therefore higherfor Portugal, a late-developing country with limited
possibilities of expansion, than for Spain, whose economic modernization potential is an important asset
even if certain inequalities are inevitable.
From the Community's point of view, this third enlargement looks likely to increase agricultural surpluses
and pressures on the Community budget. What is more, the harmonization of development in the
member States, the similar standards of living, the balanced conditions of competition and the
complementary nature of products in different areas, which all encouraged an institutional advance
towards greater Community integration, may well suffer from this latest enlargement as they doubtless
did in the previous two cases of Community enlargement. So if we want to avoid the emergence of a
two-speed institutional Europe in answer to the obstacles thrown up by different levels of development,
Community solidarity, which has already been shown towards Greece and Portugal should nonetheless
be further reinforced, which means among other things a redistribution by the wealthier Common Market
countries in favour of the poorer members.
JEL: 121L'entrée de l'Espagne
et du Portugal
dans la Cée
chargé de au mission moment à de la Direction la rédaction Economiste Guy de la Longueville de à prévision l'article, la Bnp/
// avait été promis à l'Espagne et au Portugal de les intégrer
dans la Communauté à partir du moment où ils devien
draient des démocraties. Ce sont donc des raisons politiques
— et non essentiellement des considérations économiques —
qui ont permis leur adhésion.
Cependant, même si ces deux pays risquaient de devenir
des concurrents non négligeables, surtout de la France et
de l'Italie, d'autres aspects politiques furent pris en considér
ation. Même avec la Grèce, la Communauté à 10 avait un
centrage septentrional marqué. Les pays méditerranéens
n'étaient pas assez représentés, ce que regrettaient parti
culièrement la France et l'Italie.
Avec l'entrée de l'Espagne et du Portugal, qui ont toujours
été des bastions de l'Europe de l'Ouest, la Communauté
regroupe enfin dans son champ — à l'exception de la
Suisse et de l'Autriche — tous les pays qui ont fait son
histoire. Elle peut, si elle le voulait, peser politiquement —
et même économiquement — vis-à-vis du reste du monde
au nom de l'ensemble des puissances qui ont participé
princi

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