Un cloarec morbihannais Le Nozerh. Un tournoi poétique au village - article ; n°1 ; vol.27, pg 17-55
40 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Un cloarec morbihannais Le Nozerh. Un tournoi poétique au village - article ; n°1 ; vol.27, pg 17-55

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
40 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Annales de Bretagne - Année 1911 - Volume 27 - Numéro 1 - Pages 17-55
39 pages

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1911
Nombre de lectures 29
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

E. Thibault
Un "cloarec" morbihannais Le Nozerh. Un tournoi poétique au
village
In: Annales de Bretagne. Tome 27, numéro 1, 1911. pp. 17-55.
Citer ce document / Cite this document :
Thibault E. Un "cloarec" morbihannais Le Nozerh. Un tournoi poétique au village. In: Annales de Bretagne. Tome 27, numéro 1,
1911. pp. 17-55.
doi : 10.3406/abpo.1911.1351
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1911_num_27_1_1351THIBAULT E.
Professeur an Lycée de Pontivy
" CLOAREC " M0R6IH1NN1IS LE NOZERH UN
UN TOURNOI POÉTIQUE AU VILLAGE
L'hiver dernier un de mes amis m'avait prêté un cahier
dans lequel il avait, sans ordre, — pêle-mêle avec des
chansons françaises, — copié un certain nombre de chansons
bretonnes inédites d). Gomme il me l'avait promis, ces der
nières m'intéressèrent dès l'abord malgré leur orthographe
ultra-fantaisiste qui les rendait assez difficiles à déchiffrer;
après ce premier travail d'approche, elles me parurent même
dignes d'une étude plus attentive pour ce qu'elles témoignent
chez l'un des poètes d'un état d'âme particulier et qu'elles
fixent le souvenir d'un tournoi littéraire au village.
L'auteur de toutes les chansons ou épîtres bretonnes du
cahier moins quatre est Jean-Marie Le Nozerh, de Séglien
(Morbihan) (2), dont la mémoire — bien qu'il soit mort depuis
trente ans — est encore très vivante au pays de Guémené où
l'on peut rencontrer nombre de ses amis et de ses parents,
où l'on chante même certaines de ses chansons dans les noces.
(1) Sauf l'Adieu que — sous le titre de Me hanveu de Séglian et avec
quelques modifications dans la forme des mots et leur choix — . M. Loeiz
Herrieu a publié dans Ar Vro, juillet 1905.
(2) J.-M. Le Nozerh (dont le vrai nom En Oheh est haut-vannetais) naquit
le 24 avril 1857 à Lesturgant en Malguénac, paroisse limitrophe de Séglien
mais haut-vannetaise. Son père, qui était né à Pluméliau, étant mort dès le
6 janvier 1858, sa mère revint peu d'années après à Séglien d'où elle était
originaire. Le Nozerh a donc passé toute sa jeunesse à Séglien dont il se
réclame exclusivement.
2 18 UN " CLOAREC " MORBIHANNAIS LE NOZERH.
Son existence fut si courte qu'elle ne comporte que peu de
biographie. Aussi bien les faits dont cet article va parler sont
si près de nous qu'il y aurait quelque indiscrétion à en dire
autre chose que ce que les acteurs — presque tous vivants
encore — ont voulu nous révéler. Port minces, ils seraient
d'ailleurs parfaitement négligeables, s'ils ne nous donnaient
l'occasion d'étudier le « cloarec » Le Nozerh.
Chacun sait le rôle du dans la littérature bretonne.
Bien des fois l'on a évoqué d'éloquente façon le personnage
du jeune séminariste hésitant devant la prêtrise, revenant à
la maison paternelle après des études plus ou moins comp
lètes et gardant au village la mentalité toute spéciale que
l'école lui a donnée. Ce jeune homme, plus instruit que ses
voisins, plus sensible qu'eux, sera tout naturellement porté
vers la poésie. S'il chante, sa chanson sera attendrie et sent
imentale — n'est-ce pas d'ordinaire l'amour qui l'a fait sortir
du séminaire ? — ou légèrement railleuse et ironique, car il
considère les événements du pays d'un œil plus averti et plus
critique que ne sauraient le faire les autres villageois. Or,
Le Nozerh est, semble-t-il, un type parfait et par là intéressant
de cloarec : les filles de Séglien lui donnent expressément, ce
nom dans leur deuxième réponse :
« N'en des ankoéheit er hloéreg »,
et sa carrière qu'il raconte suivant l'usage — un poète breton
trouve presque toujours l'occasion tle faire connaître sa vie
au lecteur — dans l'épître De me mestréz, est bien celle du
cloarec.
Vers 1872, J.-M. Le Nozerh, de Kerraeh en Séglien, était
élève au petit séminaire de Sainte-Anne-d'Auray. Il avait
quinze ans et pensait devenir prêtre.
Ér hours-sé ha m'em oé mé pemzek,
Hoen ér skoul é Santéz-Anna ar stûdi a véleg.
(De me mestréz). " CLOAREC " MORBIHANNAIS LE NOZERH. 19 XJN
Mais voilà que, pendant les vacances, l'écolier rencontre
Marie-Elise Le B... après la grand'messe au pardon de Loc-
maria, l'une des chapelles de sa paroisse. Leurs regards se
croisent; c'est le coup de foudre. C'en est fait de la vocation
ecclésiastique de Jean-Marie qui se sent « enflammé d'un
feu extraordinaire »,
Dré un tan ekstraordinér é hoen bet enflammet
(De me mestréz).
d'autant qu'il a cru voir luire dans les yeux de la toute jeune
fille (elle avait quatorze ans) un autre feu d'amour, d'amour
pour lui. Il n'a plus dès lors qu'un désir, quitter le collège
qu'il lui a fallu réintégrer après les vacances. Pendant les
heures d' « étude » son esprit, que nul maître ne saurait
attacher à son banc comme son corps, revient à Roscaday
en Séglien où demeure Marie-Elise.
Me horv e uezé ér studi, mes non pas me spéred
Rak er gér hanùet Roskadé ar me lerh oé chomet
(De me mestréz).
Enfin, après six mois qui lui semblent bien longs, il obtient
de partir pour toujours du collège, de rentrer au pays, au
pays Pourlette.
L'on s'imagine aisément la joie de notre écolier échappé
à la férule lorsque — sur la grand'route de Pontivy à
Guémené — il arriva, après avoir dépassé le village de
Kerbédic, sur le plateau de Toulgoët en Séglien près de la
lande de Pendavat. L'exilé était tout près de l'aimée et puis
il était rentré chez lui, il avait passé la frontière qui sépare
le pays de Pontivy de celui de Guémené et qui n'est point
une frontière imaginaire. Différence de costume accentuée
surtout chez les femmes, différence de langage : à Pontivy
Ton parle haut-vannetais, à Guémené le dialecte est bas-
vannetais, rien ne manque pour séparer les habitants des
deux pays qui, en voisins qu'ils sont, se taquinent cordia
lement. Le nom de Pourlette lui-môme, que le paysan pré
tend dériver du « bourrelet » de coiffe qu'auraient porté 20 UN " CLOAREC " MORBIHANNAIS LE NOZERH.
autrefois les femmes de Guémené, était plutôt péjoratif avant
que les Pourlettes l'eussent revendiqué comme un titre
d'honneur et le Pontivien qui veut amadouer un Pourlette
au marché l'appelle encore aujourd'hui de préférence pautr
er Gémené, gars de Guémené. Les paysans de Pontivy attri^
buent à ceux de Guémené des défauts innombrables, et tout
breton qui leur semble un peu étrange et différent du leur
est du breton pourlette. Il est donc permis de croire que Le
Nozerh, doublement amoureux de Marie-Elise et de son
village, se sentit bien plus à l'aise au sortir du pays haut-
vannetais quand il se retrouva sur le terroir pourlette, car
Séglien — que l'administration, insouciante des différences
linguistiques, a rattaché au canton de Gléguérec — est une
paroisse bas-vannetaise et a les yeux tournés vers Guémené.
Et ce fut vers Guémené, vers la capitale du pays pourlette,
que Le Nozerh dirigea ses pas après avoir, on l'imagine,
délibéré un certain temps avec sa mère sur la profession
qu'il convenait d'embrasser. Le cloarec était instruit; il entra
en qualité de clerc chez un notaire, Me Gadoret : il utilisait
ainsi les études quïl avait faites à Sainte-Anne.
Le Nozerh — pendant les deux ans qu'il passa à Guémené
— dut être heureux. Il n'y a que 6 kilom. 1/2 de
à Séglien, et tout Séglien se déverse à la petite ville le jeudi,
jour du marché. Il avait donc à chaque instant l'occasion de
voir celle qu'il aimait sans le lui dire expressément; les
dimanches d'été l'on courait les pardons, et Le Nozerh a
gardé un souvenir particulièrement agréable de celui de
Quelven (en Guern), en 1876.
Dalhet e hues chonj ag er blé huézek ha tri uigent,
Hoeh bet asan

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents