Ajustement structurel et désagrégation sociétale en Argentine - article ; n°117 ; vol.30, pg 161-174
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Description

Tiers-Monde - Année 1989 - Volume 30 - Numéro 117 - Pages 161-174
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Moïses Ikonicoff
Ajustement structurel et désagrégation sociétale en Argentine
In: Tiers-Monde. 1989, tome 30 n°117. pp. 161-174.
Citer ce document / Cite this document :
Ikonicoff Moïses. Ajustement structurel et désagrégation sociétale en Argentine. In: Tiers-Monde. 1989, tome 30 n°117. pp. 161-
174.
doi : 10.3406/tiers.1989.3825
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1989_num_30_117_3825AJUSTEMENT STRUCTUREL
ET DÉSAGRÉGATION SOCIÉTALE
EN ARGENTINE
par Moïses Ikonicoff*
I. — LA PROBLÉMATIQUE ARGENTINE
Si l'on voulait résumer la problématique de l'Argentine, un seul mot
suffirait : « dégradation ». Un lent mais inexorable processus de dégra
dation affecte en effet, depuis 1930, les infrastructures, l'appareil productif,
les relations sociales et le fonctionnement des institutions. C'est par
rapport à ce processus qu'il faut considérer l'ensemble des phénomènes
économiques, sociaux, politiques ou culturels qui ont marqué plus d'un
demi-siècle de l'histoire argentine.
Si l'on a pu observer, au cours de cette période, des moments d'essor
économique, un fonctionnement à peu près correct des institutions ou une
meilleure harmonie sociale, aujourd'hui il faut se rendre à l'évidence et
constater le caractère purement éphémère et ponctuel de ces phénomènes.
Ce processus de « dégradation » s'est manifesté dans tous les secteurs
de la société. Le système éducationnel et les infrastructures en constituent
deux exemples particulièrement significatifs.
L'éducation primaire à laquelle avait accès l'ensemble de la population
en âge scolaire et qui, de par son étendue et sa qualité était devenue le
plus puissant ferment d'intégration et le moyen le plus sûr de mobilité
sociale est actuellement en voie de dépérissement. Ce dépérissement entraîne
à son tour une fragmentation du système en une multitude de sous-
systèmes éducatifs alternatifs, consacrant par là une scission des structures
sociales. La dégradation atteint l'enseignement secondaire et supérieur,
loués jadis pour les qualités de formation qu'ils permettaient et l'on peut
encore en prendre pour preuve aujourd'hui le nombre d'Argentins presti-
♦ CNRS.
Revue Tiers Monde, t. XXX, n* 117, Janvier-Mars 1989 тм — 6 162 MOÏSES IKONICOFF
gieux qui se sont fait connaître dans tous les domaines de la science, la
technique et la culture et qui exercent leur talent de par le monde.
Les infrastructures des transports, des communications et de l'énergie
construites en grande partie avant la crise de 1930 et comptant, à l'époque,
parmi les plus efficaces du monde, n'ont pas été étendues d'une part, et n'ont
pas été entretenues convenablement d'autre part, et sont devenues, par
conséquent, totalement disfonctionnelles.
Ainsi, le réseau ferroviaire qui aujourd'hui couvre le pays était déjà
achevé à 75 % en 1910. Faute d'entretien, on estime que 50 % des voies
ferrées sont actuellement en très mauvais état et ne peuvent permettre un
trafic régulier. Le réseau téléphonique dont l'implantation démarre en 1886
permettait encore, en 1945, de satisfaire 85 % des demandes dans des délais
raisonnables. La vétusté des installations rend aujourd'hui aléatoire l'util
isation de ce moyen de communication et ne permet de satisfaire que 50 %
des demandes formulées de longue date.
Avec pour toile de fond ce processus de « dégradation » qu'aucun
gouvernement n'a pu ou su arrêter depuis 1930, il faut considérer dans
une perspective immédiate les deux sources de danger les plus graves
qui menacent la poursuite de l'expérience démocratique à partir de 1930 :
le problème économique et le problème militaire.
II. — LE PROBLEME ECONOMIQUE
L'évolution socio-économique de l'Argentine constitue, sans doute,
un test particulièrement significatif pour la mise à l'épreuve des théories
du développement. L'analyse de cette évolution montre aussi le besoin
urgent de définir de nouveaux cadres analytiques rendant possible la
formulation de projets alternatifs de développement.
Deux grands courants d'idées s'affrontent dans l'interprétation des
phénomènes économiques, sociaux et politiques qui caractérisent le pro
cessus historique de ce pays. Dans le premier courant, l'idée de déve
loppement est identifiée à l'idée d'un progrès universel auquel sont suscept
ibles de participer toutes les sociétés de la planète dans la mesure où
elles remplissent un certain nombre de conditions. L'ouvrage de Walter
W. Rostow1 constitue encore l'une des principales références de ce courant.
Dans le second courant, l'accent est mis sur l'asymétrie existant dans les
relations internationales qui ont marqué le fonctionnement du Système
économique mondial depuis le milieu du xixe siècle. Les rapports qui s'éta-
1. Walter W. Rostow, The Stages of Economie Growth, Cambridge up, 1960. ET DESAGRÉGATION EN ARGENTINE 163 AJUSTEMENT
blissent entre le « centre » et la « périphérie » constituent, dans cette
conception, la principale variable explicative du sous-développement. Les
premiers schémas élaborés à la cepal, dans les années 1950, ont été
suivis plus tard par les réflexions et les analyses de ce que l'on appelle
la « théorie de la dépendance ».
Tous ceux qui se sont inspirés plus ou moins directement de la pensée
de Rostow retrouvent dans l'histoire argentine le cheminement de croissance
« quasi naturel » que toute société parcourt, selon cet auteur2.
L'étape de la « société traditionnelle » qui commence en 1810 cor
respond à la période des luttes pour l'indépendance et au processus
d'unification territoriale et devrait s'achever en toute logique en 1853
avec l'organisation de l'Etat national.
Bien que l'implantation des premières colonies de peuplement date de
cette époque et que la première concession pour la construction du réseau
ferroviaire ait été octroyée en 1854, la plupart des auteurs situent le début
de la seconde étape : « création des conditions du démarrage » en 1880.
Si l'on se réfère à la logique rostowienne, on ne peut que constater un
premier retard de trente ans entre l'achèvement d'une phase et l'ouverture
d'une autre.
En tout cas, à partir de 1880, le réseau ferroviaire s'étend à un rythme
vertigineux — plus de 1 000 km de voies ferrées nouvelles par an —
pour atteindre une densité de 25 km en 1914 dans les régions de la pampa,
bien supérieure à cette époque à la densité ferroviaire de l'Angleterre ou
de la Belgique. En trente-cinq ans, la totalité des terres disponibles de la
région la plus fertile d'Argentine est mise en valeur, tandis que le flux
d'immigrants ne cesse de s'accroître. Ainsi, en 1914, la population a doublé
par rapport à 1880. La production et les exportations de viande et de
céréales atteindront, pendant cette période, leur rythme de croisière,
plaçant l'Argentine parmi les principaux exportateurs mondiaux de produits
agricoles et d'élevage.
Mais l'Argentine, pays agricole doté d'une puissante infrastructure,
connaîtra aussi, dès le début du siècle, un accroissement considérable de la
production industrielle qui en 1914 représente le même pourcentage que
la agricole dans le produit total.
Dans la mesure où, à cette même époque, le taux d'investissement est
trois fois supérieur aux 10 % fixés par Rostow pour atteindre la 3e étape,
on aurait pu considérer que toutes les conditions du « démarrage »
2. Si l'ouvrage de Guido Di Telia et Manuel Zymelman, Las e tapas del desarrollo economico
argent ino, eudeba, Buenos Aires, 1967, constitue à cet égard la tentative la plus connue pour
transposer à l'Argentine le schéma de Rostow, on retrouve aussi des traces de cette теше
démarche dans de nombreux autres ouvrages. 164 MOÏSES IKONICOFF
argentin étaient réunies en 1914. Pourtant, l'ensemble des auteurs fait
coïncider la rupture historique que suppose le démarrage av

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