Bolivie : Moyens de communication décentralisés : vers une expression politique et culturelle du peuple - article ; n°79 ; vol.20, pg 571-581
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Description

Tiers-Monde - Année 1979 - Volume 20 - Numéro 79 - Pages 571-581
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 18
Langue Français

Extrait

Alfonso Gumitio-Dagron
Bolivie : Moyens de communication décentralisés : vers une
expression politique et culturelle du peuple
In: Tiers-Monde. 1979, tome 20 n°79. pp. 571-581.
Citer ce document / Cite this document :
Gumitio-Dagron Alfonso. Bolivie : Moyens de communication décentralisés : vers une expression politique et culturelle du
peuple. In: Tiers-Monde. 1979, tome 20 n°79. pp. 571-581.
doi : 10.3406/tiers.1979.2881
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1979_num_20_79_2881BOLIVIE :
MOYENS DE COMMUNICATION
DÉCENTRALISÉS :
VERS UNE EXPRESSION POLITIQUE
ET CULTURELLE DU PEUPLE
par Alfonso Gumucio-Dagron*
La Bolivie est surtout connue par son « histoire turbulente», parses
« innombrables coups d'Etat militaires », par la « fragilité de l'appareil
d'Etat ». Ce pays est envisagé comme un petit bateau à la dérive sur
lequel de nombreux timoniers en uniforme se disputent la barre — à
coups de feu — et dirigent la barcarolle pendant un court délai dans
des directions opposées, mais toujours à la dérive. On oublie que les
secousses politiques correspondent à la saturation des contradictions
et qu'elles ne seraient pas si fréquentes si le rapport des forces en présence
n'était pas d'une certaine façon équilibré. D'un point de vue historique,
le petit pays a eu des soubresauts que d'autres pays frères du continent
n'ont pas encore connus. En 1952 une révolution a nationalisé 90 % des
entreprises privées (essentiellement minières), et a promulgué la Réforme
agraire, la seconde d'Amérique latine après celle du Mexique. Une
volonté nationaliste a tenté de sortir le pays de sa stagnation, avant de
retomber à nouveau dans l'orbite du puissant voisin du Nord, les
Etats-Unis.
La situation de la Bolivie, sans accès à la mer, entourée par le Brésil,
* Cinéaste (idhec) et écrivain bolivien, dirige la revue Fi/m/Historia (Boîte postale 5828,
La Paz - Bolivie). Il est membre du groupe Ukamau et a été assistant de réalisation de Jorge
Sanjinés dans Puera de Aqui. Il est le réalisateur du long métrage Seňores Générales, Seîiores
Coroneles (1976) et a publié Provocaciones (1977), Antologia del Asco (1978) et Bolivia, Le Seuil,
1979. Avec Guy Hennebelle il prépare Los dnes de America Latina.
Revue Tiers Monde, t. XX, n° 79, Juillet-Septembre 1979 57* ALFONSO GUMUCIO-DAGRON
le Paraguay, l'Argentine, le Chili, et le Pérou, l'empêchait une fois de
plus de mener à bien un projet de libération nationale. En 1964 la Bolivie
n'allait pas être l'exception au moment où les militaires commençaient
à se hisser jusqu'au sein des gouvernements latino-américains. Elle
allait cependant surprendre, en 1970 et 1971, ses voisins — sauf le
Pérou — avec deux gouvernements consécutifs dirigés par des militaires
progressistes, et surtout avec la création d'une Assemblée populaire
— dirigée par les mineurs — qui se dressa comme une alternative de
double pouvoir. Ce n'est pas en vain qu'on l'appela « le premier soviet
d'Amérique latine ». En août 1971, c'est à nouveau la droite militaire.
Le cycle se referme une nouvelle fois et cette fois-ci durant sept ans.
Ce n'est qu'en 1978 qu'une grève de la faim, entamée par de courageuses
femmes de mineurs, va obliger la dictature militaire à relâcher les
rênes, et à permettre une ouverture démocratique qui persiste sous le
gouvernement militaire du général Pereda, surgi en juillet 1978 à la
suite d'un nouveau coup d'Etat. Tel est donc le contexte historique et
politique.
Le déroulement de la vie politique est plus important dans des
pays où la liberté d'expression, le flux des informations, la dynamique
de la communication se trouvent étroitement conditionnés par les chan
gements de régime, par l'état d'exception, ou par l'intérêt plus ou moins
grand que manifestent les gouvernements à domestiquer et à utiliser en
leur faveur les moyens de communication, pour les convertir en moyens
de diffusion à sens unique. Et c'est précisément avec la période qui
démarre au début des années 70 (et qui n'est pas encore terminée) que
nous assistons aux manipulations les plus notables. Manipulation de
l'information, répression, lutte frontale des travailleurs de la presse et
de la radio pour conquérir leur liberté d'action. Nous citerons l'exemple
de El DiariOy doyen de la presse bolivienne. Progressiste à ses origines,
au début du siècle, il devient rapidement le porte-parole des classes
dominantes, de la bourgeoisie industrielle, du ressac de l'oligarchie
féodale et minière après la Révolution de 1952. Plus tard encore, en 1970,
le journal est occupé par ses travailleurs et mis en autogestion jus
qu'en 1971, date à laquelle se produit le coup d'Etat militaire du général
Banzer, et où El Diario (affilié à la Société interaméricaine de Presse,
organisme patronal dirigé depuis les Etats-Unis), est rendu à ses anciens
propriétaires.
Le cas du journal catholique Présenta, qui est le journal ayant le plus
fort tirage en Bolivie est assez exceptionnel. Il tire à 50 000 exemplaires
pour une population de 5 millions d'habitants, analphabètes en majorité
(Le Monde, 500 000 exemplaires dans un pays de 50 millions d'habitants, BOLIVIE : MOYENS DE COMMUNICATION DECENTRALISES 573
représente la même proportion — et il est diffusé à l'échelle nationale).
Son statut juridique — il appartient à l'Eglise catholique bolivienne —
lui confère une protection hors du commun et lui permet une marge
de manœuvre beaucoup plus grande. C'est ainsi que Presencia a exercé
et continue à exercer une influence fondamentale sur l'actualité nationale
par la simple action d'informer quand d'autres journaux censurent. Le
style de Presencia, sérieux, « objectif», a influencé tous les autres organes
de presse à tel point qu'il n'existe pas en Bolivie, par exemple, de presse
sensationaliste ou de chronique du crime, si communes dans des pays
comme le Chili, le Pérou, la Colombie, le Venezuela, le Brésil, etc. A
côté de El Diario et de Presencia est publié à La Paz Hoy, journal du matin
agrémenté d'une attirante présentation en couleurs, et le du soir
Ultima Hora. A l'intérieur du pays, chaque département — ils sont neuf
au total — possède un ou deux quotidiens dont la circulation ne dépasse
pas les limites départementales.
La presse ne constitue pas le thème de ce texte, mais comme elle
représente le moyen le plus ancien, le moyen traditionnel d'information,
et comme elle joue un rôle important dans les villes, elle ne pouvait être
ignorée. Pour en comprendre l'importance sur la vie quotidienne, il
suffit de citer par exemple les énormes tirages de Presencia tout au long
de la guérilla du Che Guevara en 1967; ces tirages se montaient pratique
ment tous les jours à 100 000 exemplaires. Tandis que le gouvernement
militaire interdisait aux journalistes l'accès de la zone de guérilla, ou
essayait de censurer les informations qui parvenaient à travers les
dépêches internationales, Presencia publiait, dans une édition spéciale
de 130 000 exemplaires, le Journal du Che dans la version qui avait été
confirmée par Fidel Castro. Et en 1978, au cours de la grève de la faim
à laquelle participèrent près de 1 500 personnes — l'un des groupes se
trouvait justement dans le local du journal — Presencia couvrit l'évén
ement allant même jusqu'à consacrer, un jour, toute sa première page
à la grève.
Bien que Presencia soit l'exemple d'une presse qui refuse de se mettre
à la disposition du gouvernement en place, et conserve son indépendance,
elle n'est pas un exemple de décentralisation, mais constitue plutôt un cas
isolé, exceptionnel.
Ce texte a pour objectif d'analyser les cas de la radio, de la télévision
et du cinéma, où l'on trouve effectivement une pratique concrète de
décentralisation, confirmée dans le cas de la radio au cours de nombreuses
années, et qui pour les deux autres cas présente un développement
prometteur. En ce qui concerne la radio nous ferons concrètement
référence aux radios syndicales des mineurs; en ce qui concerne la ALFONSO GUMUCIO-DAGRON 574
t

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