Ces signes qui font la délinquance - article ; n°4 ; vol.7, pg 299-316
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Déviance et société - Année 1983 - Volume 7 - Numéro 4 - Pages 299-316
Cet article rend compte des mécanismes de diffusion idéologique à l'œuvre au sein d'une presse régionale à Genève, en Suisse et à Nice, en France, à propos de la peur du crime.
On verra qu'une série de signes servent à désigner les auteurs d'actes avant tout violents, contribuant à les exclure du champ social et que ces signes sont quasiment absents des références dont usent les journalistes à propos d'auteurs délinquants d'affaires.
This article deals with the mechanism of ideological diffusion inside the regional press in France and in Switzerland, concerning the fear of crime. Several signs are used to designate the offender's violent acts and to exclude him from the social field. References used by journalists reporting on white collar crime lack practically all signs of this order.
Dieser Artikel zeigt die Mechanismen der ideologischen Diffusion in der Lokalpresse von Genf (Schweiz) und Nizza (Frankreich) am Beispiel der Angst vor dem Verbrechen auf. Dabei treten bestimmte Zeichen in Erscheinung, die der Beschreibung von Gewalttaten dienen und diese Gruppe von Straftatern aus dem sozialen Feld ausschliessen. Berichte liber Wirtschaftskriminalität lassen diese Zeichen beinahe gânzlich vermissen.
Dit artikel beschrijft de mechanismen ter verspreiding van idéologie, zoals die werkzaam zijn in een régionale pers te Genève in Switserland en te Nice in Frank- rijk met betrekking tot de angst voor de misdaad.
Men zal vaststellen dat een reeks kenmerken dienen om de daders van vooral gewelddadige handelingen te duiden en om hen uit te sluiten uit het sociale leven, ook dat die kenmerken zo goed als niet voorkomen wanneer de journalisten schrij- ven over economische misdadigers.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Francine Soubiran
Ch.-N. Robert
Ces signes qui font la délinquance
In: Déviance et société. 1983 - Vol. 7 - N°4. pp. 299-316.
Citer ce document / Cite this document :
Soubiran Francine, Robert Ch.-N. Ces signes qui font la délinquance. In: Déviance et société. 1983 - Vol. 7 - N°4. pp. 299-316.
doi : 10.3406/ds.1983.1384
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ds_0378-7931_1983_num_7_4_1384Résumé
Cet article rend compte des mécanismes de diffusion idéologique à l'œuvre au sein d'une presse
régionale à Genève, en Suisse et à Nice, en France, à propos de la peur du crime.
On verra qu'une série de signes servent à désigner les auteurs d'actes avant tout violents, contribuant à
les exclure du champ social et que ces signes sont quasiment absents des références dont usent les
journalistes à propos d'auteurs délinquants d'affaires.
Abstract
This article deals with the mechanism of ideological diffusion inside the regional press in France and in
Switzerland, concerning the fear of crime. Several signs are used to designate the offender's violent
acts and to exclude him from the social field. References used by journalists reporting on white collar
crime lack practically all signs of this order.
Zusammenfassung
Dieser Artikel zeigt die Mechanismen der ideologischen Diffusion in der Lokalpresse von Genf
(Schweiz) und Nizza (Frankreich) am Beispiel der Angst vor dem Verbrechen auf. Dabei treten
bestimmte Zeichen in Erscheinung, die der Beschreibung von Gewalttaten dienen und diese Gruppe
von Straftatern aus dem sozialen Feld ausschliessen. Berichte liber Wirtschaftskriminalität lassen diese
Zeichen beinahe gânzlich vermissen.
Dit artikel beschrijft de mechanismen ter verspreiding van idéologie, zoals die werkzaam zijn in een
régionale pers te Genève in Switserland en te Nice in Frank- rijk met betrekking tot de angst voor de
misdaad.
Men zal vaststellen dat een reeks kenmerken dienen om de daders van vooral gewelddadige
handelingen te duiden en om hen uit te sluiten uit het sociale leven, ook dat die kenmerken zo goed als
niet voorkomen wanneer de journalisten schrij- ven over economische misdadigers.Déviance et Société. Genève 1983. vol. 7, No 4, pp. 299-316
CES SIGNES QUI FONT LA DÉLINQUANCE...
F. SOUBIRAN ET C-N. ROBERT
Tenue
«Le garde des sceaux a une idée pour rassurer, à
peu de frais, les Français saisis par l'insécurité.
« Pourquoi, a dit M. Badinter, ne pas demander aux
policiers de se rendre en uniforme à leur travail?.
Cela ferait des milliers de policiers en tenue dans les .
transports en commun. »
On pourrait étendre l'obligation à tous les corps de
métier concourant à la protection des citoyens. Les
magistrats et les avocats déambuleraient en robe, les
gardiens de prison et les militaires circuleraient en
uniforme, les postiers garderaient leur casquette, les
médecins et les infirmières leur blouse blanche, les
pompiers leur casque et les prêtres reprendraient
leur soutane. Resterait à trouver une tenue pour les
malfaiteurs, seyante et louche. »
Bruno Frappât,
Le Monde,
15 avril 1983
1. Les signes de la peur
G. Auclair a parfaitement démontré en quoi le crime relève du fait
divers, et quelles en sont les conséquences. « La chronique, écrit-il, apparaît
alors surtout comme le lieu de la satisfaction symbolique des frustrations les
plus élémentaires, où l'on cherche à se donner l'équivalent illusoire d'une
expérience totale de l'homme à travers l'exceptionnel, l'atypique et le
déviant, à vivre fictivement l'impossible transgression de l'ordre social.»1
Cette fonction sociale, qui est assurément dévolue au fait divers, pourrait
toutefois accréditer l'idée que celui-ci est avant tout objet de consommat
ion, et rendrait compte d'une passivité de ses destinataires à son égard.
Une récente émission de télévision consacrée à la peur de la délinquance
pourrait renforcer encore cette conception, puisqu'elle s'intitulait « le mar
ché de la peur»2. Or il nous paraît que, complémentaire à cet aspect, le fait
divers, s'agissant du crime, prend des allures de production, ou de repro-
• Université de Genève
299 duction idéologique très marquées. Il ne s'agit donc pas avant tout de
consommer des faits divers, mais d'assurer, par eux et pour eux, une pro
duction et une reproduction de signes et d'images, de certaines formes de
délinquance, et d'assurer par là même, la permanence de peurs.
D'un élément analytique à prédominance passive, nous suggérons, au
moins, la complémentarité d'un élément actif, relevant d'une production et
d'une reproduction d'images. Voyons comment.
A cause précisément d'une considérable amplification quantitative
(multiplication des faits divers relatés et élargissement de leurs origines géo
graphiques) et qualitative (multiplication d'analyses plus ou moins globali
santes sur le phénomène3) des discours sur la criminalité, mise en constant
rapport avec de très sérieuses réserves quant à l'augmentation toujours pré
tendue de la criminalité réelle, il peut être pertinent de s'interroger sur la
nature de cette peur du crime, alimentée par le fait divers, et l'alimentant
tout à la fois.
La distinction faite par J. Delumeau entre peurs spontanées et peurs
réfléchies nous semble ici particulièrement opérationnelle : la peur du crime
apparaît toujours plus et toujours mieux, comme « découlant d'une interro
gation sur le malheur conduite par les directeurs de conscience de la collect
ivité »4, et relevant donc des peurs réfléchies. Elle est construite en quelque
sorte par ceux que Becker qualifiait entrepreneurs moraux. Et tout cela
s'explique par le fait que peurs et images se côtoient, et que « le pouvoir doit
se tenir là où est l'image »5 ; donc, là où est le signe, pour tenter de le maîtris
er. Il y a donc une ou des idéologies, sécrétions plus ou moins institution
nelles, ou informelles qui contribuent à créer, alimenter et renforcer les
images sociales de la délinquance. « La justice pénale », écrivait Ph. Robert,
«élabore un ordre au sein de la réalité sociale; puis elle proclame cet
ordre6.» Mais est-ce bien elle qui commence? Qui met en mouvement ce
que B. Kutchinsky appelle le carrousel du crime?
Nous avons délibérément choisi de procéder à l'analyse de faits
divers ; ceux-ci nous apparaissent tout d'abord comme un ensemble cohé
rent de messages et de signes formant un système, liés les uns aux autres par
des règles ou l'usage ; d'autre part il n'est guère contestable que ce « maté
riau» idéologique est le plus répandu, au moins matériellement, s'agissant
de la diffusion d'images et de signes relatifs à la délinquance.
Or ces signes sont lourds de sens : ils désignent des délinquants, pres
que toujours les mêmes, et constituent la délinquance, en focalisant l'accu
sation sur une certaine violence physique et directe contre les personnes et
les biens.
2. Données et méthodologie
Nous avons recueilli un certain nombre de données dans le cadre
d'une recherche portant sur les représentations de la peur du crime.
Nous nous intéressons aux mécanismes sous-jacents à des récits de
presse mettant en scène des atteintes aux biens, susceptibles d'insécuriser les
lecteurs ; cette phase de recherche étant rapprochée d'une autre analyse non
300 ■
encore achevée : la représentation de la peur du crime chez les lecteurs des ?
';\ journaux analysés.
La structure des récits de presse a été examinée successivement au tra-
l vers de l'analyse des catégories de l'idéologique à l'œuvre dans l'ensemble du
corpus retenu, des stratégies d'argumentation des récits. Nous ne rendrons
,| compte ici que de certains aspects de l'analyse des catégories de l'idéologi-
\ que.
a Pourquoi deux journaux? Pourquoi Nice-Matin à Nice et pourquoi
La Suisse à Genève? Il nous a paru intéressant d'effectuer une étude compar
ative, partant du contexte de deux villes aussi différentes que Nice en
v France et Genève en Suisse, de quotidiens aux tirages très
bles7 paraissant dans des climats socio-politiques distincts : l'un,

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