Coexistence pacifique et géostratégie - article ; n°35 ; vol.9, pg 703-717
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Coexistence pacifique et géostratégie - article ; n°35 ; vol.9, pg 703-717

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Description

Tiers-Monde - Année 1968 - Volume 9 - Numéro 35 - Pages 703-717
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1968
Nombre de lectures 10
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

P. Célérier
Coexistence pacifique et géostratégie
In: Tiers-Monde. 1968, tome 9 n°35-36. Coexistence pacifique. pp. 703-717.
Citer ce document / Cite this document :
Célérier P. Coexistence pacifique et géostratégie. In: Tiers-Monde. 1968, tome 9 n°35-36. Coexistence pacifique. pp. 703-717.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1968_num_9_35_2460COEXISTENCE PACIFIQUE ET GÉOSTRATÉGIE
par P. Célérier
Jamais sans doute le désir de vivre en paix et la crainte de la guerre n'ont
été aussi vifs chez autant d'hommes. Le souvenir des souffrances engendrées
par le dernier conflit mondial, la vanité de trop d'épreuves de force, le spectre
toujours menaçant des destructions inimaginables que provoqueraient les
armes nucléaires, devraient en effet suffire à faire rejeter l'idée même du recours
à la violence... Pourtant, l'actualité nous oblige à constater que le monde n'a
pas cette sagesse, s'il doit jamais l'atteindre, et que le calme relatif que nous
connaissons est avant tout fondé sur un certain équilibre des forces de tous
ordres entre les antagonistes éventuels : forces économiques, idéologiques et
autres aussi bien, d'ailleurs, que forces armées. C'est là, nous semble-t-il, ce
qui donne ici sa place à cette brève étude : celle de quelques-uns des facteurs
de cet équilibre et de leur influence sur les tendances lorsqu'ils changent de
mains ou simplement varient en eux-mêmes.
La volonté générale d'union et de travail en vue d'une prospérité égale de
tous les pays est en effet bien loin, hélas ! d'être unanimement admise parmi
eux. Elle ne pourrait l'être que par une doctrine morale universellement suivie
comme ligne de conscience ; nous pouvons espérer qu'elle s'imposera un jour,
mais pour très longtemps encore sans doute les idéologies s'affrontent. Nous
voyons au contraire les orgueils nationaux, les haines raciales et la volonté
de puissance gagner en virulence, les erreurs de jugement politique porter
leurs fruits, la menace et le chantage devenir monnaie courante jusque dans
les plus hautes instances internationales. La paix mondiale demeure précaire,
les paix « régionales » sont sans cesse violées. Comment ne pas se soucier
d'une telle situation ? Refuser de voir ces faits ne les efface pas, c'est seulement
refuser une part de responsabilité, c'est admettre une certaine démission qui
n'entraîne jamais, dans le cours de l'Histoire, que confusion et malheurs.
* *
Tout cela se passe dans un cadre physique et dans des conditions dont il
convient de souligner d'abord quelques traits.
La vie moderne engendre nécessairement des luttes dans tous les domaines,
703 P. CÉLÉRIER
car elles conditionnent le progrès qui serait atrophié sans un esprit d'émulation.
Mais l'émulation devient vite concurrence, et la lutte affrontement difficilement
contenu. D'autre part, ce progrès offre à l'homme d'immenses possibilités
et des avantages, très inégalement répartis selon les pays : ceux qui en disposent
détiennent non seulement un pouvoir plus grand en soi, mais aussi un moyen
de s'attirer une « clientèle » et d'accroître d'autant leur pouvoir; ceux qui en
sont plus ou moins dépourvus ont soif de les obtenir sans toujours se soucier
de la valeur et de la qualité des moyens d'y parvenir... L'objet des concurrences
et des luttes s'est ainsi beaucoup déplacé en un siècle, et les frontières ne sont
plus guère territoriales sur ce plan. Les forces utilisées ne sont plus seulement
les armes : nous verrons que la stratégie générale n'est plus que secondaire
ment une conception militaire.
Par ailleurs les idéologies et les passions sont des forces plus puissantes
que jamais et, surtout, aux effets plus étendus à tous. C'est là encore une consé
quence normale du progrès, qui a extraordinairement multiplié les facilités de
communication et de diffusion des idées. Elles sont aussi plus incontrôlables
dans leurs emballements, leurs excès et leurs conséquences. Or elles s'opposent,
ouvertement ou sournoisement, et sont mises au service de l'ambition des uns
et du désir des autres. Leur répartition dans le monde et ses changements, leur
implantation — l'un chassant l'autre — dans les « zones clés » du monde
moderne sont un élément primordial de la conjoncture et de son évolution :
l'étude des facteurs de la géopolitique et de la géostratégie aide à le comprendre,
ainsi qu'à expliquer et prévoir certaines poussées et leur direction.
Un autre caractère de la vie moderne dont il nous faut ici tenir compte
est sa complexité. « Tout se tient », cela est bien connu. Il en résulte d'abord
deux conséquences capitales : d'une part aucun pays ne peut plus s'enfermer
dans une tour d'ivoire, vivre et se défendre par lui-même, encore moins pros
pérer et rayonner; d'autre part cette interdépendance dans tous les domaines
a donné une extrême importance aux moyens et aux voies de communication
et d'échanges. C'est pourquoi des événements qui, naguère encore, seraient
restés dans l'ombre ou dans d'étroites limites, ont toujours aujourd'hui des
répercussions lointaines et une résonance mondiale dont il n'est pas possible
de circonscrire facilement les effets. Chaque pays est toujours concerné, qu'il
le souhaite ou non; « l'égoïsme sacré » national est devenu un leurre, de même
que le neutralisme systématique.
Il s'agit au contraire pour chacun de participer à la vie du monde; mais
cela, dans ce monde d'aujourd'hui, implique un choix, une option politique...
c'est-à-dire, compte tenu de l'interdépendance inévitable, d'appartenir ou tout
au moins de s'apparenter à l'un des groupes de nations qui le divisent.
Il nous faut donc considérer les problèmes qui nous occupent ici dans la
conjoncture d'ensemble et les placer pour cela à l'échelle planétaire, qui est
704 COEXISTENCE PACIFIQUE ET GÉOSTRATÉGIE
celle de la géopolitique et de la géostratégie. Nous reviendrons sur ce cadre.
Mais nous devons voir auparavant, dans les limites de notre sujet et dans notre
optique bien entendu, les conditions qui déterminent la conjoncture d'ensemble,
c'est-à-dire en fait l'état de « coexistence pacifique ».
* * *
La coexistence pacifique est une nécessité imposée par le danger, plus qu'un
aboutissement. Elle est mutuellement consentie, mais cependant en quelque
sorte négative en ce sens que son but fondamental est d'éviter les catastrophes
irrémédiables, et non de bâtir un monde dans l'union. Elle a ouvert la porte à
une détente appréciable, à des dialogues et donc à des possibilités de compréh
ension, mais non à des solutions constructives. Elle demeure un état de fait
fragile et instable, un palliatif provisoire précieux, mais que des affrontements
constants menacent chaque fois qu'ils semblent devoir modifier l'équilibre
des forces. Elle est en effet beaucoup moins un état d'esprit qu'un expédient
que trop de pays exploitent à leurs fins : c'est, pour certains, un « parapluie »
semblable au « parapluie atomique » de la dissuasion, sous lequel les luttes se
poursuivent pourvu qu'elles ne déclenchent pas l'ultime conflit. Or les chances
de conflagration générale sont à la mesure des enjeux, c'est-à-dire aujourd'hui
de l'importance des changements possibles dans la valeur, la répartition et la
position des éléments de la puissance : richesses naturelles, régions clés écono
miques, voies de communication vitales, etc. Ce sont donc ces éléments qu'il
faut connaître.
Un autre caractère essentiel de la coexistence pacifique réside dans le fait
qu'elle a été décidée entre les deux seules puissances « géantes » et ne dépend
pratiquement que d'elles : les États-Unis et l'U.R.S.S. Les « Grands » n'ont
guère le pouvoir de la compromettre ou de la consolider sans leur consente
ment; la Chine elle-même est encore impuissante à la modifier de son propre
chef. Seule peut-être une véritable Europe unifiée étroitement aurait un poids
suffisant...
Quant aux pays de moindre importanc

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