Écriture et divination sous les Shang - article ; n°21 ; vol.21, pg 11-35
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Description

Extrême-Orient, Extrême-Occident - Année 1999 - Volume 21 - Numéro 21 - Pages 11-35
Writing and divination during the Shang dynasty
After a brief exposition of the main techniques of divination using bones and tortoise shells which were practised during the Shang dynasty (14th-11th century B.C.) in China, this article reviews the main endeavours to describe the relationship between this practice and the religious beliefs of that period. It is shown that pieces of evidence bear witness to the fact that the inscriptions engraved on bones and shells were not in themselves of the nature of divinations or incantations according to their textual characteristics. The hypothesis proposed here is that the act of divination in its practice and the act of writing from all its linguistics dimensions correspond to two artefacts and correlate in fact to two different types of rationality.
Après un bref exposé des principes techniques de la divination par l'os et l'écaillé de tortue pratiquée en Chine à la cour des Shang (XIVe-XIe siècle avant notre ère), l'article rappelle les principales tentatives décrivant l'articulation entre cette pratique et les croyances religieuses de l'époque. Par ailleurs, un certain nombre d'observations viennent témoigner du fait que les inscriptions gravées sur les os et écailles en question n'avaient pas en elles-mêmes (dans leur matérialité scripturaire) de valeur divinatoire ou incantatoire. L'hypothèse proposée ici est que l'acte divinatoire dans sa technicité et l'acte scripturaire dans toute sa dimension langagière correspondent à deux artefacts et répondent en fait à deux types différents de rationalité.
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Redouane Djamouri
Écriture et divination sous les Shang
In: Extrême-Orient, Extrême-Occident. 1999, N°21, pp. 11-35.
Abstract
Writing and divination during the Shang dynasty
After a brief exposition of the main techniques of divination using bones and tortoise shells which were practised during the
Shang dynasty (14th-11th century B.C.) in China, this article reviews the main endeavours to describe the relationship between
this practice and the religious beliefs of that period. It is shown that pieces of evidence bear witness to the fact that the
inscriptions engraved on bones and shells were not in themselves of the nature of divinations or incantations according to their
textual characteristics. The hypothesis proposed here is that the act of divination in its practice and the act of writing from all its
linguistics dimensions correspond to two artefacts and correlate in fact to two different types of rationality.
Résumé
Après un bref exposé des principes techniques de la divination par l'os et l'écaillé de tortue pratiquée en Chine à la cour des
Shang (XIVe-XIe siècle avant notre ère), l'article rappelle les principales tentatives décrivant l'articulation entre cette pratique et
les croyances religieuses de l'époque. Par ailleurs, un certain nombre d'observations viennent témoigner du fait que les
inscriptions gravées sur les os et écailles en question n'avaient pas en elles-mêmes (dans leur matérialité scripturaire) de valeur
divinatoire ou incantatoire. L'hypothèse proposée ici est que l'acte divinatoire dans sa technicité et l'acte scripturaire dans toute
sa dimension langagière correspondent à deux artefacts et répondent en fait à deux types différents de rationalité.
Citer ce document / Cite this document :
Djamouri Redouane. Écriture et divination sous les Shang. In: Extrême-Orient, Extrême-Occident. 1999, N°21, pp. 11-35.
doi : 10.3406/oroc.1999.1098
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/oroc_0754-5010_1999_num_21_21_1098Extrême-Occident 21 - 1999 Extrême-Orient,
Écriture et divination sous les Shang
Redouane Djamouri
La forme de divination la plus ancienne attestée en Chine est la divination par l'os
(ostéomancie). Ses premières traces remontent au néolithique l. Le principe de cette
divination consistait à interpréter les craquelures obtenues sur des os après les avoir
soumis au feu ou à une source ardente. Cette pratique connut probablement son apogée
en Chine à la fin de l'âge du bronze, sous les règnes des derniers souverains de la
dynastie des Shang (xnT-xr* siècles avant notre ère) 2. À cette époque, c'est en très
grand nombre et de manière extrêmement fréquente que l'on utilisa, non seulement des
os (en majorité des omoplates de buf), mais aussi des écailles de tortue (essentie
llement des plastrons). À la différence des os divinatoires du néolithique, les os et les
carapaces de l'époque Shang portent des inscriptions gravées. À ce jour, ces inscrip
tions témoignent du plus ancien usage de l'écriture chinoise 3. Si l'on en croit les textes
ultérieurs, cette pratique de divination aurait perduré jusqu'à la dynastie des Tang (618-
907 de notre ère) 4; mais les dernières attestations archéologiques remontent à la
période des Zhou Occidentaux (XIe- vin* siècles avant notre ère) 5.
Je ne reprendrai pas ici le débat sur la place et sur la symbolique de la divination
par la tortue en Chine ancienne. Je me contenterai d'essayer de répondre au problème
que pose la présence de textes sur les os et les carapaces que les Shang utilisaient pour
la divination 6. À supposer qu'ils communiquaient avec les esprits par le truchement de
ces supports, est-ce que les textes qu'ils y gravaient ne faisaient que rendre compte par
écrit du contenu de leur communication avec les morts ? Que dire de l'écriture à
l'uvre dans ces inscriptions ? A-t-elle été forgée à des fins de communication avec les
esprits ? Revêtait-elle un caractère ésotérique, sacré ou magique aux yeux de ses
utilisateurs ? Loin de couvrir toute l'étendue du champ ouvert par ces questions, je
considérerai ici le lien entre écriture et divination sous les Shang et montrerai que l'on
a affaire à deux pratiques qui diffèrent à la fois par leur nature et par leur fonction. Je
me propose pour cela d'en décrire séparément les principaux aspects, puis de voir la
manière dont elles s'articulent et nous renseignent l'une sur l'autre. Redouane Djamouri
Conduite et fonction de la divination par l'os et la carapace
Je rappellerai brièvement les principes techniques de la divination par omoplate de
buf (scapulomancie) et écaille de tortue (chéloniomancie) pratiquée par les Shang 7.
Avant que le texte ne fût gravé, les supports devaient être préparés. L'omoplate était
lissée après que le cartilage scapulaire et l'épine dorsale eurent été sciés. Parfois,
l'omoplate était divisée en tablettes oblongues. De la carapace de tortue, seul le
plastron était régulièrement utilisé. Une fois séparé du reste de la carapace, ses bords
étaient polis. Quelquefois, des annotations marginales étaient portées sur les bords
inférieurs ou supérieurs de la carapace ou de l'omoplate. Elles indiquaient la
provenance de ces dernières, le nom de la personne qui les avait apportées et, dans
certains cas (pour les carapaces uniquement), leur date de réception ; ces annotations
pouvaient mentionner aussi le nom du devin qui les avait réceptionnées et, éventuel
lement, celui de la personne qui les avait préparées de manière rituelle afin de les rendre
propres à servir d'outil divinatoire.
Une fois ces annotations marginales gravées, des cavités régulières étaient
pratiquées sur la face interne de l'os ou de la carapace. Sur les plastrons, les cavités sont
le plus souvent rigoureusement symétriques par rapport à l'axe central (voir fig. 1).
Leur forme oblongue était manifestement spécialement étudiée pour faciliter la
production de craquelures ; elle était obtenue à l'issue d'un double évidage au moyen
d'instruments tranchants en jade ou en bronze 8. C'est alors que les prédictions devaient
être soumises à l'oracle. Pour cela, un tison ardent ou un poinçon incandescent était
apposé dans les cavités (pas nécessairement toutes) et, sous l'effet de la chaleur, des
craquelures symétriques apparaissaient sur la face externe du support. Ce sont
précisément ces craquelures que l'on interprétait pour connaître le résultat de la
divination. L'interprétation relevait de la prérogative du roi ou d'un devin ; la façon
dont elle se faisait reste, aujourd'hui encore, objet de conjectures. Une fois ces diverses
opérations achevées, et après un temps plus ou moins long, les inscriptions proprement
dites étaient enfin gravées. Dans certains cas, les signes graphiques étaient
préalablement réalisés à l'encre rouge ou noire. Il arrivait aussi que le tracé de certaines
craquelures fût souligné d'une incision et marqué à l'encre. C'est donc avec une
régularité et une précision remarquables que les Shang préparaient et utilisaient les
supports de leur divination.
L'extrême fréquence de la scapulo-chéloniomancie et les difficultés matérielles
qu'elle impliquait (de l'approvisionnement en écailles et en omoplates, jusqu'à
l'incision des caractères) nous amènent à penser qu'il s'agissait là d'une pratique tenue
en grande considération à la cour des Shang. On ne saurait pour autant en définir la
place exacte au regard des autres institutions religieuses ou politiques. La longévité de
cette forme de divination, du néolithique à l'époque impériale, en confirme certes
l'importance mais n'en livre pas davantage l'influence réelle.
Il est difficile de s'interroger sur la fonction exacte d'une pratique divinatoire sans
avoir une connaissance préalable du contexte religieux dans lequel elle s'inscrit. On
12 Écriture et divination sous les Shang
notera que c'est avec précision que les inscriptions Shang nous livrent les noms des
rites et des sacrifices, ceux des lieux et des jours où ils devaient être accomplis, ceux
des esprits et ancêtres auxquels ils étaient dédiés, mais qu'elles nous disent

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