Financement, échanges et investissement: le cercle vicieux de l Afrique subsaharienne - article ; n°139 ; vol.35, pg 685-700
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Financement, échanges et investissement: le cercle vicieux de l'Afrique subsaharienne - article ; n°139 ; vol.35, pg 685-700

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Tiers-Monde - Année 1994 - Volume 35 - Numéro 139 - Pages 685-700
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 46
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Marc Fontaine
Financement, échanges et investissement: le cercle vicieux de
l'Afrique subsaharienne
In: Tiers-Monde. 1994, tome 35 n°139. pp. 685-700.
Citer ce document / Cite this document :
Fontaine Jean-Marc. Financement, échanges et investissement: le cercle vicieux de l'Afrique subsaharienne. In: Tiers-Monde.
1994, tome 35 n°139. pp. 685-700.
doi : 10.3406/tiers.1994.4909
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1994_num_35_139_4909ÉCHANGES FINANCEMENT,
ET INVESTISSEMENT : LE CERCLE VICIEUX
DE L'AFRIQUE SUB-SAHARIENNE*
par Jean-Marc Fontaine**
L'Afrique pourrait être surnommée le continent de l'Ajustement. Sur
les 8 premiers « Prêts d'ajustement structurels » consentis par la Banque
mondiale en 1981, 4 concernaient l'Afrique1 et en 1992, 35 pays avaient
été à un moment ou un autre soumis à des programmes d'ajustement de
la Banque ou du Fonds, totalisant 162 à haute condition-
nalité, contre 126 seulement pour le reste du monde, anciens pays
du COMECON compris (Banque mondiale, 1992, Annexes). C'est dire
l'importance que revêt pour ce continent l'évolution des conceptions
qu'on se fait du développement à Washington.
Depuis quelques années, un vent nouveau semblait souffler sur les
rives du Potomac : le ton du dernier rapport d'ensemble consacré à
l'Afrique au sud du Sahara (Banque mondiale, 1989)2 semblait indiquer
une rupture avec un certain simplisme macro-économique et réduire
l'écart entre les conceptions des institutions de Bretton Woods et celles
de plusieurs Agences des Nations Unies comme I'unicef (Cornia et al.,
1987 et 1991) ou la CNUCED (Trade Develoment Reports, notamment
depuis 1989). L'apparition de la notion ď « Ajustement tourné vers la
croissance » (Corbo, Goldstein et Khan, 1987) et le retournement appar
ent de la position de la Banque concernant les politiques des pays Est-
* Vincent Geronimi et Eric Saint-Alary m'ont fourni une précieuse assistance dans les recherches pré
liminaires à cet article. Leur première version de ce texte a été discutée en détail avec Yilmaz Akyûz et a
bénéficié des commentaires de Gerry Helleiner. Je voudrais tous les remercier, tout en conservant l'entière
responsabilité des erreurs ou incohérence qui auraient échappé à leur vigilance.
•• Centre de Recherche Economique, iedes, Université Panthéon-Sorbonne, Paris I.
1. Kenya, Malawi, Maurice et Sénégal.
2. Dont les thèmes principaux concernaient l'investissement humain, le renforcement de la capacité
industrielle, notamment du secteur informel, et des associations d'agriculteurs, le rétablissement des infras
tructures, et l'intégration régionale, le tout placé dans une perspective de croissance durable.
Revue Tiers Monde, t. XXXV, n° 139, juillet-septembre 1994 686 Jean-Marc Fontaine
asiatiques (Banque mondiale, 1993) s'accompagnait d'un scepticisme
grandissant à l'égard du credo de la stabilisation pure et dure.
Or le dernier rapport publié par la Banque (Banque mondiale,
1994), exclusivement consacré à l'analyse des politiques de stabilisation
de court terme et à la réaffirmation du catéchisme libéral sur les vertus
de la libéralisation interne, tire un trait sur cette évolution. Cet article
vise à montrer les limites des politiques proposées par la Banque mond
iale à partir de l'analyse de deux phénomènes passés sous silence dans
ce rapport, outre la question de l'intégration régionale (Coussy et
Hugon, 1992), à savoir le comportement de l'investissement et la struc
ture du commerce extérieur. Les deux premières parties rappellent les
contraintes que le financement et la structure des échanges extérieurs
font peser sur les perspectives de redémarrage africain. La troisième rap
pelle les liens entre investissement et diversification des activités product
ives. La conclusion présente les contours et les préalables de politiques
alternatives.
LA FRONTIÈRE FINANCIÈRE
La première chose à rappeler, c'est que l'Afrique a besoin de temps.
C'était un message sur lequel les « Pionniers du développement »
(Meiers et Seers, 1988) s'accordaient. Selon le « Pionnier » le moins sus
pect de tiers-mondisme, Walt Rostow, auteur du célèbre Manifeste non
communiste et inspirateur de la politique d'aide du général Eisenhower
— mais on devrait évidemment également évoquer Ragnar Nurkse ou
Arthur Lewis — , une économie qui stagne avec une technologie simple
doit épargner une proportion de son revenu proche du taux d'accroiss
ement démographique — disons 4 % à 5 %. Pour croître et modifier les
méthodes de production, il faut atteindre, disait-on à l'époque, un taux
d'épargne de 12 % à 15 % — on dirait aujourd'hui 20 à 25 %. Il s'agit
là d'un bouleversement qui prend du temps. Pour Rostow, optimiste
mais intuitif, il faudrait vingt ans pour « décoller ». Pour Chenery
(1986), homme de chiffres, il faudrait soixante ans pour passer de la
phase primaire à la phase industrielle.
Or la transformation des économies africaines a réellement com
mencé au milieu des années 60, il y a donc trente ans, dont dix, voire
quinze, ont été engloutis dans une interminable « décennie perdue ».
L'épargne intérieure brute n'a jamais été élevée en Afrique. En 1970, elle
représentait environ 16 % du PNB, contre 21 % pour l'ensemble des
pays en développement, et n'atteint plus aujourd'hui, selon les estima- échanges et investissement en Afrique 687 Financement,
tions, qu'environ 10 % {World Economie Survey, ONU), 12 % {Perspect
ives de l'économie mondiale, FMI) ou 13 % (Banque mondiale, Rapport
sur le développement dans le monde) du PNB. Ce dernier chiffre (faible,
moins de la moitié du taux moyen de 27 % des économies à « faible
revenu ») est trompeur : il tombe à 10,6 % si l'on exclut le seul Nigeria,
il est inférieur à 5 % pour la moitié des pays africains, et négatif ou nul
pour plus d'un tiers d'entre eux (10 sur 27) avec quelques chiffres vert
igineux : Tchad : — 17 %, Tanzanie : — 11 % pour ne citer que les plus
spectaculaires.
Entre-temps, tout le monde l'admettait, il faudrait suppléer à la défi
cience de l'épargne domestique par des transferts internationaux : aide,
prêts, investissements directs. Or, si les flux financiers envers l'Afrique
sont importants, ils sont insuffisants, et orientés à la baisse. Constants
en termes nominaux depuis 1989, les transferts nets aux pays d'Afrique
sub-saharienne (ASS) représentaient en 1992 11,5 milliards de dollars
(World Debt Tables) — soit environ 6,5 % du PNB. C'est un chiffre
important : plus du quart des transferts nets à l'ensemble des pays du
Tiers Monde (50 milliards de dollars). S'il a permis que l'investissement
(16 % du PNB, en moyenne, contre 24 % pour du Tiers
Monde) chute dans des proportions moindres que l'épargne intérieure,
il n'en a pas pour autant empêché la décroissance au rythme annuel de
— 3,3 % pendant les années 80. Pour se maintenir dans le scénario
« réaliste »' de la Banque mondiale (1989), les transferts nets auraient
dû représenter 8 % du PNB en 1990 — environ 14,5 milliards, soit 3 mil
liards de plus que le montant effectif de 1992. On est donc loin des
19 milliards nécessaires en l'an 2000 — qui représenteraient, en chiffres
réactualisés2, quelque 22 à 24 milliards de dollars de 1992.
Certes, l'Afrique bénéficie de remises, d'allégements et de rééchelonne
ments de dette, mais l'effet en est presque négligeable. Même dans l'hypo
thèse favorable où les « termes de Toronto élargis » seraient appliqués à
l'ensemble de la dette africaine, l'encours total serait diminué d'environ
2,5 milliards de dollars, soit de 1,2 % {World Debt Tables, 1992-1993). En
ajoutant les diverses réductions unilatérales (Allemagne, Belgique, Etats-
Unis, France et Grande-Bretagne) décidées entre 1987 et 1991, soit
0,85 % de l'encours total (Lancaster, 1991), on obtient un chiffre de
l'ordre de 2 %, ce qui représente le taux d'accroissement « naturel »
annuel de la dette africaine depuis le début des années 90. L'application
1 . Hypothèse : Taux de croissance du PNB passant de 4 à 5 % par an, soit un taux de croissance par
t

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