Intervention étatique et réarmement en France 1935-1939 - article ; n°4 ; vol.31, pg 743-781
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Intervention étatique et réarmement en France 1935-1939 - article ; n°4 ; vol.31, pg 743-781

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Revue économique - Année 1980 - Volume 31 - Numéro 4 - Pages 743-781
State interference and rearmament in France 1935-1939
Robert Frankenstein
The considerable increase of State interference in French economy during the' 30s came less from the political will to find a solution to the crisis than from the necessity to re-arm imposed from the outside by the hitlerian threat. As a matter of fact, the burden of the military commitment on public expenditure, on national income and on industrial production was never so heavy. In view of the evident failure of private initiative, the State had to turn itself into manufacturer and banker ; this was achieved by the Front Populaire in 1936. After its fall, the reversed political trend in the following wage struggle during 1938-1939 favoured the employer s retaliation and the return of the profit margin. This was the price paid for the industrialists' co-operation to National Defence. In this contradictory process, the State gave itself a new industrial and bank interférence capacity and a new social arbitrage pcnver. The State's position came out of this rearmament period assuredly transformed on the eve of the second World War.
publiques, sur le revenu national et la production industrielle, n'a jamais été aussi important. Devant les défaillances évidentes de l'initiative privée, l'Etat a dû se faire usinier et banquier — ce fut l'œuvre du Front populaire en 1936. Puis, après la défaite de celui-ci, lorsque le courant politique s'inverse, il favorise, dans la bataille des salaires qui s'engage en 1938-1939, la revanche patronale et la restauration du taux de profit : c'est alors le prix payé par lui pour la coopé­ration des industriels à l'effort de Défense nationale. Dans ce processus contradictoire, il s'est donné une nouvelle capacité d'intervention industrielle et bancaire, un nouveau pouvoir d'arbitrage social. Le rôle de l'Etat sort assurément transformé de cette période de réarmement, à la veille de la deuxième guerre mondiale.
39 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 69
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Robert Frankestein
Intervention étatique et réarmement en France 1935-1939
In: Revue économique. Volume 31, n°4, 1980. pp. 743-781.
Abstract
State interference and rearmament in France 1935-1939
Robert Frankenstein
The considerable increase of State interference in French economy during the' 30s came less from the political will to find a
solution to the crisis than from the necessity to re-arm imposed from the outside by the hitlerian threat. As a matter of fact, the
burden of the military commitment on public expenditure, on national income and on industrial production was never so heavy. In
view of the evident failure of private initiative, the State had to turn itself into manufacturer and banker ; this was achieved by the
Front Populaire in 1936. After its fall, the reversed political trend in the following wage struggle during 1938-1939 favoured the
employer s retaliation and the return of the profit margin. This was the price paid for the industrialists' co-operation to National
Defence. In this contradictory process, the State gave itself a new industrial and bank interférence capacity and a new social
arbitrage pcnver. The State's position came out of this rearmament period assuredly transformed on the eve of the second World
War.
Résumé
publiques, sur le revenu national et la production industrielle, n'a jamais été aussi important. Devant les défaillances évidentes de
l'initiative privée, l'Etat a dû se faire usinier et banquier — ce fut l'œuvre du Front populaire en 1936. Puis, après la défaite de
celui-ci, lorsque le courant politique s'inverse, il favorise, dans la bataille des salaires qui s'engage en 1938-1939, la revanche
patronale et la restauration du taux de profit : c'est alors le prix payé par lui pour la coopé-ration des industriels à l'effort de
Défense nationale. Dans ce processus contradictoire, il s'est donné une nouvelle capacité d'intervention industrielle et bancaire,
un nouveau pouvoir d'arbitrage social. Le rôle de l'Etat sort assurément transformé de cette période de réarmement, à la veille de
la deuxième guerre mondiale.
Citer ce document / Cite this document :
Frankestein Robert. Intervention étatique et réarmement en France 1935-1939. In: Revue économique. Volume 31, n°4, 1980.
pp. 743-781.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1980_num_31_4_408550INTERVENTION ÉTATIQUE
ET RÉARMEMENT EN FRANCE 1935-1939
II est en France, et ailleurs, un domaine privilégié et traditionnel,
voire ancien de l'intervention économique de l'Etat : l'armement. Au
xixe siècle, bien que ce siècle fût « libéral », ou justement parce qu'il
l'était, on reconnaissait à la puissance publique le droit d'exercer un
rôle industriel dans cette sphère d'activités, et on souhaitait même l'y
circonscrire. Dans le grand paradis des « libertés » pour les product
eurs, les champions du « laissez-faire » avaient délimité un espace
étroit et précis, un purgatoire en forme d'îlot, où les « lois du marché »
pouvaient ne pas fonctionner tout à fait naturellement 1.
Grâce à l'armement, l'Etat, de la façon la moins neutre qui fût,
pesait donc d'un poids certain sur quelques points bien localisés du
tissu industriel et capitaliste français : métallurgie, constructions navales
et industries mécaniques...
De nos jours, bien que le « complexe militaro-industriel » se soit
considérablement développé, l'intervention de l'Etat a acquis de nouv
elles lettres de noblesse dans le domaine civil. La régulation étatique
de l'économie, de ponctuelle est devenue systématique ; et l'armement
n'est plus son point de passage exclusif ni même privilégié.
Cette dernière tendance cependant est récente en France : elle
date de 1945 environ. Des deux phénomènes de l'interventionnisme du
xxe siècle, à savoir la forte croissance du domaine traditionnel — l'a
rmement — et l'apparition de nouveaux champs d'activités — l'écono
mie civile — , le premier, à n'en point douter, reste encore le plus
important dans notre pays entre 1918 et 1939.
1. Voir F. Crouzet : « Recherches sur la production d'armements en France,
1815-1913 », Conjoncture économique — Structures sociales, Hommage à Ernest
Labrousse, Mouton, Paris — La Haye, 1974, p. 307. Voir aussi pour la GB :
R. Frankenstein : « L'industrie de l'armement britannique. Essor et concentration
1889-1905 », Revue d'Histoire économique et sociale, 1973, 4.
743
Revue économique — N" 4, juillet 1980. ■
économique Revue
Malgré la crise des années 1930, malgré les idées nouvelles que
celle-ci peut susciter et les velléités d'investissements publics dans des
programmes de Grands Travaux 2, le rôle de l'Etat dans le domaine
civil demeure pendant ce premier xxe siècle diffus, dispersé et à fai
ble efficience macroéconomique. Son développement est précisément
retardé par les nécessités du réarmement de 1935-1939. En effet, ce
n'est pas tant la grande dépression qui pousse l'Etat français plus
avant sur la scène économique que la menace hitlérienne. Et, cet
effort en direction des fabrications de guerre, justement parce qu'il
n'est pas le résultat d'un choix volontaire comme solution à la crise,
qu'il est imposé au contraire de l'extérieur par les circonstances politi
ques, s'est d'abord greffé douloureusement en 1934-1935 sur une écono
mie française inapte à le recevoir ; il faut paradoxalement les boule- -
versements du Font populaire en 1936-1938 pour que l'Etat mette en
place dans l'industrie de l'armement les nouvelles structures capables
de dénouer la situation. Mais le déblocage définitif ne s'effectuera que
tardivement, en 1938-1939, lorsque le nouveau type d'intervention
étatique née pendant la période précédente devient après la chute
du Front populaire « compatible » avec le système économique envi
ronnant.
C'est donc le nouveau poids de l'armement qui a changé en quel
ques courtes années le visage de l'interventionnisme français, non sans
quelques balbutiements et tâtonnements contradictoires. Assurément,
pour cette époque riche en soubresauts et conflits, il est difl icile de
parler du nouveau rôle économique de l'Etat, sans évoquer le rôle
politique des gouvernements qui le représentent, le servent ou tentent
de le transformer 3.
I. LE NOUVEAU POIDS DE L' ARMEMENT
ET L'INADAPTATION DE L'ECONOMIE FRANÇAISE (1934-1938)
Le réarmement français s'est d'abord manifesté par un effort finan
cier. C'est à travers les dépenses militaires et les dépenses d'armement
de l'Etat qu'on peut apprécier son nouveau poids dans l'économie.
2. Voir l'article de P. Saly dans ce même numéro.
3. Cet article résume les développements des derniers chapitres d'une thèse
de troisième cycle intitulée Le financement du réarmement français, 1935-1939,
soutenue à l'Université de Paris I en mai 1978.
744Robert Frankenstein
A, La croissance structurelle des charges militaires
Leur évolution générale
Entre les deux guerres, les dépenses de Défense nationale (dépens
es militaires coloniales comprises, car dans l'esprit de l'époque, défense
de l'Empire et défense de la France se confondent) connaissent une
évolution en quatre étapes. Après un dégonflement prévisible entre
1918 et 1924 (voire 1926 en francs constants), elles reprennent leur
ascension jusqu'en 1930-1931, à cause des guerres du Rif et de Syrie,
du renforcement de l'armée de métier jugé nécessaire après la dimi
nution du service militaire à un an en 1928, à cause également des
débuts de la construction de la ligne Painlevé mieux connue sous le
nom de ligne Maginot. Puis — troisième phase — , elles furent l'objet
de la double dépression pacifiste et surtout déflationniste des années
1932-1934, pour enfin prendre un second envol, pendant la période
de réarmement proprement dit, dès 1935, et surtout de 1936-1937
jusqu'à la guerre 4.
Le tableau 1 met en relief plusieurs phénomènes intéressants.
Entre 1918 et 1939, la part des dépenses militaires dans le total
des dépenses de l'Etat suit l'évolution en q

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