L échange inégal des ressources humaines : migrations, croissance et crise en Europe - article ; n°69 ; vol.18, pg 7-20
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L'échange inégal des ressources humaines : migrations, croissance et crise en Europe - article ; n°69 ; vol.18, pg 7-20

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Tiers-Monde - Année 1977 - Volume 18 - Numéro 69 - Pages 7-20
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1977
Nombre de lectures 29
Langue Français

Extrait

Bernard Kayser
L'échange inégal des ressources humaines : migrations,
croissance et crise en Europe
In: Tiers-Monde. 1977, tome 18 n°69. pp. 7-20.
Citer ce document / Cite this document :
Kayser Bernard. L'échange inégal des ressources humaines : migrations, croissance et crise en Europe. In: Tiers-Monde. 1977,
tome 18 n°69. pp. 7-20.
doi : 10.3406/tiers.1977.2686
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1977_num_18_69_2686L'échange inégal des ressources humaines :
MIGRATIONS, CROISSANCE
ET CRISE EN EUROPE
par Bernard Kayser
Au début des années soixante, lorsque s'étaient amorcés en direction
de l'Europe occidentale industrielle les flux migratoires de travailleurs
qui devaient devenir les plus importants de l'histoire démographique du
continent, il n'avait pas manqué, dans les sphères politiques, de bons
esprits pour y voir les prémisses d'une nouvelle dynamique de dévelop
pement : l'émigration devait apporter aux pays du sud non seulement
le soulagement de leur « surpeuplement », mais encore les transferts de
tous ordres indispensables à leur « décollage ». Depuis cette date, des
millions d'hommes et de femmes se sont mis en mouvement, quittant
leurs régions d'origine, s'installant dans les grandes concentrations
urbaines étrangères, rentrant chez eux temporairement, rarement à titre
définitif, subissant toujours la dure condition du déraciné et du tra
vailleur étranger. Vers le milieu des années soixante-dix, brutalement et
de façon unilatérale, la décision d'interrompre les flux d'immigration
est prise par les pays dominants, qui « oublient » les promesses du
développement par l'échange des ressources humaines et financières. Un
tel retournement, après une longue évolution de la dynamique migrat
oire, permet d'interpréter correctement la place et le rôle des migrations
de travailleurs dans l'économie et la société européenne contemporaine,
place et rôle bien particuliers qu'il faut rattacher à une notion tout à fait
simple : le statut de l'étranger. Le pouvoir dont disposent non seulement
l'Etat mais tous les agents de la société à l'égard de Г étranger est la clé
Revue Tiers-Monde, t. XVIII, n° 69, Janvier-Mars 77 7 BERNARD KAYSER
de l'analyse du système migratoire dans les pays d'économie libérale, où
ce pouvoir donne les seuls moyens d'une régulation directe du marché
du travail.
i. Migrations et croissance
L'histoire économique de l'après-guerre montre que la division
« Nord-Sud » de l'Europe n'a pas cessé, du moins jusqu'à la fin des années
soixante, de s'accentuer : le « Nord » comprenant essentiellement l'All
emagne, la France, la Suisse, le Benelux, la Suède, et le « Sud » s'élargissant
des péninsules méditerranéennes à d'autres pays riverains, la Turquie et
l'Afrique du Nord. Aux pays dominés s'ajoutait, d'une part, la Finlande;
tandis que, du côté des pays dominants, le Royaume-Uni, lié par des flux
intenses au Commonwealth, échappait à la classification géographique,
sinon sociologique. Entre ces deux groupes de pays, les migrations se
sont amplifiées tant dans leur importance quantitative que dans leur
extension spatiale. Elles correspondent à l'installation (provisoire) d'une
situation de plein-emploi de la force de travail nationale et de déficit
chronique, localisé, sectoriel, de main-d'œuvre.
Avec le taux de croissance et d'élévation du niveau de vie qu'ont
connu les pays industriels, non seulement la main-d'œuvre s'est en effet
raréfiée, mais encore elle est devenue de plus en plus difficile à utiliser.
Par exemple, en même temps qu'elle était attirée vers des emplois tou
jours mieux rémunérés ou plus satisfaisants, elle était privée d'une
partie de son renouvellement par l'allongement de la scolarisation. Les
contraintes d'ordre démographique ou d'ordre technique, d'autre part,
ainsi que la rigidité toujours renforcée des structures et des comporte
ments, pesaient sur le marché du travail d'une façon considérable,
malgré les flux imposants dégagés par l'exode rural. C'est dans ces
conditions que le recours à la main-d'œuvre étrangère, limité au début à
un recrutement quasi-saisonnier pour le bâtiment et l'agriculture, voire
à un conjoncturel dans des activités industrielles diverses,
est rapidement devenu habituel la plupart des secteurs de l'industrie
et même dans certains secteurs des services. Tant en ce qui concerne la
branche économique que le poste de travail, les immigrants ont pro
gressivement occupé des « poches » bien définies où il est évident que leur
présence a, à la fois, dévalorisé le statut de l'emploi et permis d'y freiner
l'augmentation des salaires, contribuant ainsi à renforcer la tendance de INÉGAL DES RESSOURCES HUMAINES L'ÉCHANGE
la main-d'œuvre nationale à l'ascension vers les emplois les moins
pénibles et/ou les mieux rémunérés.
Ainsi, les pays industriels d'Europe ont-ils pu se trouver, en règle
générale, dans la situation théoriquement la plus favorable du point de
vue de la croissance économique : une offre de travail illimitée, avec une
large disponibilité de personnel qualifié et de capitaux. Ces conditions
ont stimulé les investissements, nationaux et internationaux; il est vrai
qu'en même temps elles ont permis, pendant un temps, de ne pas avoir
à moderniser les structures de production et qu'elles ont donc engendré,
sur ce plan, un retard lourd de conséquences futures.
Comme l'ont montré, en 1972 et 1973, c'est-à-dire à la fin de la
période, les travaux de I'ocde (groupe de travail sur les migrations) et
en particulier les rapports de W. R. Bôhning et D. Maillât, l'immigration
et l'emploi des travailleurs étrangers ont pris incontestablement, au cours
du cycle de croissance accélérée, un véritable caractère structurel. Les
marchés du travail de la plupart des pays industriels européens se sont
divisés en deux ensembles, en règle générale non concurrentiels et sou
vent même complémentaires : d'une part la force de travail nationale,
proche du plein-emploi et tendant vers la conquête progressive de
meilleurs emplois; d'autre part la force de travail étrangère, largement
ouverte sur l'extérieur, et dont la place dans le système productif aug
mentait sans cesse. De plus, la croissance démographique provoquée par
l'immigration suscitant des besoins supplémentaires de consommation et
d'équipement alimentait par là-même le circuit économique et soutenait
l'expansion.
Ainsi le caractère structurel de l'emploi des étrangers est-Д devenu,
en peu d'années, si évident que le caractère temporaire ou conjoncturel
qui lui était lié à l'origine a disparu, jusque dans la conscience de l'opinion
publique. L'emploi des étrangers dans les secteurs de biens de production
durable ou d'équipement comme dans ceux de certains services essentiels
est devenu indispensable à l'économie nationale et la possibilité de les
remplacer par la mise en place de technologies nouvelles est restée du
domaine du mythe. En même temps, la désaffection affichée des nationaux
pour les emplois généralement tenus par les étrangers, désaffection qui
est en même temps cause et conséquence de l'immigration, a rigidifié la
structure désormais nettement dualiste du marché du travail en expansion. BERNARD KAYSER
2. Migrations et politique
Pourtant, soudain, le système grippe. Alors que les flux migratoires
sont en pleine force, accompagnant une phase de croissance rapide, les
gouvernements de la plupart des pays industriels d'Europe décident
brutalement de les interrompre, usant de leur pouvoir discrétionnaire à
l'égard des étrangers. Ceci se passe en 1973 et 1974, à la veille de, c'est-à-dire
avant, la crise. Si l'on revoit les journaux et documents de l'époque, si
l'on réussit à reconstituer l'atmosphère qui y règne et qu'on n'exagère
pas en la qualifiant de vague de xénophobie, l'interprétation de l'é

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