L'économie cachée en France : état du débat et bilan des travaux - article ; n°4 ; vol.35, pg 691-732

Jocelyne Gaudin, Michel Schiray

Description

Revue économique - Année 1984 - Volume 35 - Numéro 4 - Pages 691-732
L'article réexamine le thème de l'économie cachée, souterraine ou non officielle en France à partir des courants de travaux socio-économiques existants. Il tente de dégager les acquis de recherche et de mettre en évidence des intersections entre champs disciplinaires différents. Une première partie présente une synthèse du débat récemment engagé qui s'organise autour de questions essentielles, la régulation et le dualisme socio-économique et l'articulation de l'économie cachée avec l'économie officielle. Une deuxième partie analyse les travaux, parfois anciens, sur chacune des réalités de ce thème : l'économie domestique, l'économie communautaire et associative, le travail au noir et l'économie monétaire non enregistrée. Il apparaît qu'un bilan des travaux sur l'économie cachée nécessite d'élargir la réflexion à d'autres orientations de recherche qu'elle traverse directement. La troisième partie aborde successivement les styles clé vie, la consommation élargie, l'organisation du temps et le temps de travail, la segmentation du marché du. travail, les nouvelles formes d'organisation du travail et l'économie sociale. Instituant sur l'importance d'une réintégration du thème de l'économie cachée dans l'analyse économique, la conclusion propose également de développer des recherches d'économie anthropologique pour construire des bases de comparaison à l'échelle nationale et internationale.
The hidden economy in France : a state of the art review
Jocelyne Gaudin, Michel Schiray
This article re-examines the concept of the hidden, underground or informal economy in France based on a review of the socio-economic literature. By using established rescarch in different fields it attempts to shed more light on this interdisciplinary subject. The first part presents a synthesis of recent debute on the hidden economy revealing its basic themes including its regulating role vis-a-vis the economic crisis, the socio-economic dualism and its interaction with the formal economy. The second part analyses contributions, often longstanding, on the different levels of production, that is household, informal networks, community and voluntary organizations, as well as different types of undeclared monetary activities both legal and illegal. An assessment of research on the hidden economy indicates the need to expand the scop involved to include other fields of research that intersect this subject. The third part subsequently deals with lifestyles and market/non rnarket consumption, patterns of time-use as well as working time, the segmentation of the labour force, new forms of work organization, and the French concept of the social economy, i.e., non profit organizations, co-ops and mutual societies. Emphasizing the importance of integrating the reality of the hidden economy in analyses of the formal economy, the conclusion proposes the development of anthropological economic research in order to provide comparative studies at the national and international levels.
42 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: REVUE_ECONOMIQUE
• Publié le: 01 janvier 1984
• Nombre de lectures: 37
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

Madame Jocelyne Gaudin
Monsieur Michel Schiray
L'économie cachée en France : état du débat et bilan des
travaux
In: Revue économique. Volume 35, n°4, 1984. pp. 691-732.
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Gaudin Jocelyne, Schiray Michel. L'économie cachée en France : état du débat et bilan des travaux. In: Revue économique.
Volume 35, n°4, 1984. pp. 691-732.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1984_num_35_4_408800Résumé
L'article réexamine le thème de l'économie cachée, souterraine ou non officielle en France à partir des
courants de travaux socio-économiques existants. Il tente de dégager les acquis de recherche et de
mettre en évidence des intersections entre champs disciplinaires différents. Une première partie
présente une synthèse du débat récemment engagé qui s'organise autour de questions essentielles, la
régulation et le dualisme socio-économique et l'articulation de l'économie cachée avec l'économie
officielle. Une deuxième partie analyse les travaux, parfois anciens, sur chacune des réalités de ce
thème : l'économie domestique, l'économie communautaire et associative, le travail au noir et
l'économie monétaire non enregistrée. Il apparaît qu'un bilan des travaux sur l'économie cachée
nécessite d'élargir la réflexion à d'autres orientations de recherche qu'elle traverse directement. La
troisième partie aborde successivement les styles clé vie, la consommation élargie, l'organisation du
temps et le temps de travail, la segmentation du marché du. travail, les nouvelles formes d'organisation
du travail et l'économie sociale. Instituant sur l'importance d'une réintégration du thème de l'économie
cachée dans l'analyse économique, la conclusion propose également de développer des recherches
d'économie anthropologique pour construire des bases de comparaison à l'échelle nationale et
internationale.
Abstract
The hidden economy in France : a state of the art review
Jocelyne Gaudin, Michel Schiray
This article re-examines the concept of the hidden, underground or informal economy in France based
on a review of the socio-economic literature. By using established rescarch in different fields it attempts
to shed more light on this interdisciplinary subject. The first part presents a synthesis of recent debute
on the hidden economy revealing its basic themes including its regulating role vis-a-vis the economic
crisis, the socio-economic dualism and its interaction with the formal economy. The second part
analyses contributions, often longstanding, on the different levels of production, that is household,
informal networks, community and voluntary organizations, as well as different types of undeclared
monetary activities both legal and illegal. An assessment of research on the hidden economy indicates
the need to expand the scop involved to include other fields of that intersect this subject. The
third part subsequently deals with lifestyles and market/non rnarket consumption, patterns of time-use
as well as working time, the segmentation of the labour force, new forms of work organization, and the
French concept of the social economy, i.e., non profit organizations, co-ops and mutual societies.
Emphasizing the importance of integrating the reality of the hidden economy in analyses of the formal
economy, the conclusion proposes the development of anthropological economic research in order to
provide comparative studies at the national and international levels.L'ÉCONOMIE CACHÉE EN FRANCE
ÉTAT DU DÉBAT
ET BILAN DES TRAVAUX
L'article reprend une contribution à la conférence internationale
« L'économie cachée, conflits sociaux et l'avenir des sociétés indust
rielles » organisée par le Conseil italien des sciences sociales avec le
concours de la Maison des sciences de l'homme à Frascati (Rome), du
22 au 25 novembre 1982 *.
Cette conférence avait pour objectif de dresser un bilan des travaux
nationaux réalisés sur ce thème dans dix pays industrialisés : Canada,
Espagne, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Hongrie, Italie, Répu
blique Fédérale d Allemagne, Suède, Yougoslavie. Le résultat attendu
de cette confrontation est rengagement d'une coopération scientifique
internationale entre les équipes de recherclie présentes.
Cet article propose donc un état du débat et un bilan des travaux
français sans rendre compte des nombreux travaux étrangers qui ont
pu participer à la réflexion des auteurs cités.
Le thème de l'économie cachée, traité le plus souvent sous le nom
d'économie informelle, souterraine, non officielle, est apparu dans sa
globalité à la fin des années 1970 *. Il recouvre en réalité un ensemble de
domaines et de préoccupations anciens, et il est au centre de la réflexion
théorique sur les sphères non marchandes et leur rapport avec les
sphères marchandes. Cette question est depuis longtemps abordée par
les recherches historiques sur l'économie paysanne comme elle a été
largement débattue par les économistes et sociologues du développe
ment des pays du Tiers-Monde. Elle a aussi été relancée, plus récem
ment, à propos du fonctionnement réel de l'économie des pays de l'Est.
* Une synthèse en a été présentée dans MSH-Informations, Paris, Maison des
sciences de l'homme. 43, mars 1983.
1. Pour la discussion sur les terminologies et leurs sens, voir J. Gaudin,
M. Sohiray, L'économie informelle, Paris, La découverte (à paraître fin 1984).
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Revue économique — N° 4, juillet 1984. économique Revue
La crise économique, et celle de la théorie qui lui est liée, est bien
certainement à l'origine du renouveau d'intérêt pour l'ensemble des
activités rassemblées sous ce thème avec, comme caractère commun
le plus évident, celui de n'être pas pris en compte dans la comptabilité
nationale ni, dans une large mesure, par les politiques économiques.
Apparemment, certaines de ces activités, comme le travail au noir,
semblent avoir pris un essor d'une importance inégale dans la plupart
des pays. Des auteurs ont pu également faire l'hypothèse d'une croi
ssance de l'économie domestique, communautaire et associative, avec
le ralentissement de la croissance de l'économie officielle.
Mais il semble que le débat soit beaucoup plus fondamental que
le simple constat de ces réalités et l'explication de leur évolution. En
donnant un intérêt nouveau à ces domaines d'activité, le débat intègre
et développe tout un courant de pensée ressurgi à partir des années
1970, autour des thèmes du bien-être et de la qualité de la vie. Avec
lui, la notion de développement apportait une vision critique de celle,
plus restrictive, de croissance, pour élargir les objectifs des politiques
économiques au-delà de la maximisation simple du produit et du revenu
et de leur répartition. Le développement du thème de la crise de
« l'Etat-Providence » a en même temps complété le débat en condui
sant à reposer dans son ensemble la question des rapports entre le
marché, l'Etat et la société civile, de leurs champs d'intervention
respectifs et de leur articulation. C'est donc à un réexamen des activités
développées au niveau des individus et des formes d'organisation for
melles ou informelles de la société civile et de leurs rapports avec les
forces du marché et les institutions de l'Etat qu'introduisent le débat
et les travaux engagés sur l'économie cachée.
Cet article s'attache à montrer que le débat récent sur l'économie
cachée en France a été abordé de diverses manières, mais il s'est
organisé finalement autour d'enjeux simples et assez clairement définis
que l'on exposera dans une première partie.
En même tenvps, l'approfondissement de la réflexion sur l'économie
cachée permettant de mieux saisir les réalités qu'elle sous-tend montre
qu'existent des travaux parfois très anciens, notamment sur
domestique, l'économie associative, le travail au noir et l'économie
illégale, desquels nous tenterons un bilan dans une seconde partie.
Par ailleurs, il apparaît de mieux en mieux que ce débat rejoint
un certain nombre de travaux t