L Église orthodoxe russe et le territoire - article ; n°4 ; vol.35, pg 149-171
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Revue d’études comparatives Est-Ouest - Année 2004 - Volume 35 - Numéro 4 - Pages 149-171
The breakup of the Soviet Union and accelerated globalization raise several issues for the Russian Orthodox Church. Since this church was, from the start, organized around the Russian state, emergence of the new states has been unsettling. Migrations following the fall of the Berlin Wall have also shifted the equilibrium; and the ecclesiastical hierarchy has, once again, raised the question of jurisdiction over persons living outside Russia. Even as conflicts have arisen among the Orthodox (between the Moscow and Constantinople patriarchates), on Russian territory the salvation market is increasingly competitive despite the Russian state's support for the Church. Important political and economic issues have been grafted onto religious differences. In this context, the Russian Orthodox Church is designing new spaces and affirming collective identities around the notions of canonical territory and civilization, which are far removed from an ever moving reality in the religious sphere.
La disparition de l'Union soviétique et l'accélération des processus de globalisation ont lancé de nombreux défis à l'Église orthodoxe russe. Alors qu'elle s'organise depuis ses origines autour de l'État russe, elle est ébranlée par l'émergence des nouveaux États. Les migrations issues de la chute du Mur transforment elles aussi les équilibres et donnent aux appareils ecclésiastiques l'occasion de soulever de nouveau la question de l'organisation juridictionnelle des diasporas. Tandis que des conflits éclatent, au sein même du monde orthodoxe, entre le Patriarcat de Moscou et le Patriarcat de Constantinople, sur le territoire de la Russie, le marché des biens du salut devient de plus en plus concurrentiel malgré le soutien de l'État russe à l'Église orthodoxe. Sur les oppositions religieuses, se greffent d'importants enjeux politiques et économiques. Dans ce contexte, l'Église russe dessine de nouveaux espaces et développe un discours centré sur l'affirmation des identités collectives - construit autour des notions de « territoire canonique » et de « civilisation » - fort éloigné de la réalité d'un religieux de plus en plus fluide.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Kathy Rousselet
L'Église orthodoxe russe et le territoire
In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 35, 2004, N°4. Religions, identités et territoires. pp. 149-171.
Abstract
The breakup of the Soviet Union and accelerated globalization raise several issues for the Russian Orthodox Church. Since this
church was, from the start, organized around the Russian state, emergence of the new states has been unsettling. Migrations
following the fall of the Berlin Wall have also shifted the equilibrium; and the ecclesiastical hierarchy has, once again, raised the
question of jurisdiction over persons living outside Russia. Even as conflicts have arisen among the Orthodox (between the
Moscow and Constantinople patriarchates), on Russian territory the salvation market is increasingly competitive despite the
Russian state's support for the Church. Important political and economic issues have been grafted onto religious differences. In
this context, the Russian Orthodox Church is designing new spaces and affirming collective identities around the notions of
"canonical territory" and "civilization", which are far removed from an ever moving reality in the religious sphere.
Résumé
La disparition de l'Union soviétique et l'accélération des processus de globalisation ont lancé de nombreux défis à l'Église
orthodoxe russe. Alors qu'elle s'organise depuis ses origines autour de l'État russe, elle est ébranlée par l'émergence des
nouveaux États. Les migrations issues de la chute du Mur transforment elles aussi les équilibres et donnent aux appareils
ecclésiastiques l'occasion de soulever de nouveau la question de l'organisation juridictionnelle des diasporas. Tandis que des
conflits éclatent, au sein même du monde orthodoxe, entre le Patriarcat de Moscou et le Patriarcat de Constantinople, sur le
territoire de la Russie, le marché des biens du salut devient de plus en plus concurrentiel malgré le soutien de l'État russe à
l'Église orthodoxe. Sur les oppositions religieuses, se greffent d'importants enjeux politiques et économiques. Dans ce contexte, russe dessine de nouveaux espaces et développe un discours centré sur l'affirmation des identités collectives - construit
autour des notions de « territoire canonique » et de « civilisation » - fort éloigné de la réalité d'un religieux de plus en plus fluide.
Citer ce document / Cite this document :
Rousselet Kathy. L'Église orthodoxe russe et le territoire. In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 35, 2004, N°4.
Religions, identités et territoires. pp. 149-171.
doi : 10.3406/receo.2004.1681
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_2004_num_35_4_1681d'études comparatives Est-Ouest, 2004, vol. 35, n° 4, pp. 149-171 Revue
L'Église orthodoxe russe et le territoire
Kathy ROUSSELET *
Résumé : La disparition de l'Union soviétique et l'accélération des processus
de globalisation ont lancé de nombreux défis à l'Église orthodoxe russe. Alors
qu'elle s'organise depuis ses origines autour de l'État russe, elle est ébranlée par
l'émergence des nouveaux États. Les migrations issues de la chute du Mur tran
sforment elles aussi les équilibres et donnent aux appareils ecclésiastiques l'occa
sion de soulever de nouveau la question de l'organisation juridictionnelle des
diasporas. Tandis que des conflits éclatent, au sein même du monde orthodoxe,
entre le Patriarcat de Moscou et le Patriarcat de Constantinople, sur le territoire
de la Russie, le marché des biens du salut devient de plus en plus concurrentiel
malgré le soutien de l'État russe à l'Église orthodoxe. Sur les oppositions
religieuses, se greffent d'importants enjeux politiques et économiques. Dans ce
contexte, l'Église russe dessine de nouveaux espaces et développe un discours
centré sur l'affirmation des identités collectives - construit autour des notions de
« territoire canonique » et de « civilisation » - fort éloigné de la réalité d'un
religieux de plus en plus fluide.
Abstract: The breakup of the Soviet Union and accelerated globalization raise
several issues for the Russian Orthodox Church. Since this church was, from the
start, organized around the Russian state, emergence of the new states has been
unsettling. Migrations following the fall of the Berlin Wall have also shifted the
equilibrium; and the ecclesiastical hierarchy has, once again, raised the question of
jurisdiction over persons living outside Russia. Even as conflicts have arisen
among the Orthodox (between the Moscow and Constantinople patriarchates),
on Russian territory the salvation market is increasingly competitive despite the state's support for the Church. Important political and economic issues
have been grafted onto religious differences. In this context, the Russian
Orthodox Church is designing new spaces and affirming collective identities
around the notions of "canonical territory" and "civilization", which are far
removed from an ever moving reality in the religious sphere.
Étroitement liée à l'Empire russe puis soviétique, l'Église orthodoxe
russe a été ébranlée par l'éclatement de l'Union soviétique et la formation
des États qui a suivi. Des conflits ont surgi entre les Patriarcats de Moscou
et de Constantinople autour des Églises orthodoxes nationales, apparues
ou réapparues sur les nouveaux territoires étatiques, et les débats se multi
plient au sujet de l'organisation juridictionnelle des diasporas, tant dans
l'étranger proche qu'en Europe ou en Amérique du Nord. Enfin, la glo-
Chargée de recherche au CERI, Fondation Nationale des Sciences Politiques (rousse-
let@ceri-sciences-po.org). 150 Kathy Rousselet
balisation et les migrations remettent en cause le principe national sur
lequel se fondent aujourd'hui de nombreuses Églises orthodoxes 1.
L'ouverture des frontières, certes de plus en plus contrôlées, et l'entrée en
Russie de mouvements religieux de toutes sortes favorisent le développe
ment d'un certain pluralisme religieux qui répond à des logiques d'affi
rmations identitaires, non plus nationales mais individuelles. Au-delà des
rivalités institutionnelles, la situation de l'Église orthodoxe russe et ses
prises de position en Russie et dans le monde renvoient aux relations
qu'elle dessine entre religion, identité, communauté et territoire.
L'Église orthodoxe russe représente un ensemble très hétérogène d'ac
teurs dont les positions - au-delà de considérations normatives - reflètent
des intérêts particuliers. Plus que jamais, les voix de l'orthodoxie russe
sont diverses. Si les Fondements de la doctrine sociale, adoptés lors du
Concile de 2000, reflètent les positions du patriarcat, et en particulier du
département des Relations extérieures dirigé par le métropolite Kirill de
Smolensk et Kaliningrad, ils ne sont en aucune façon le résultat de débats
au sein de l'Église ni le reflet d'une quelconque position majoritaire. Nous
privilégierons néanmoins dans cette analyse la parole publique de l'Église
sur les questions liées à la nation, au territoire et à la globalisation, à savoir
celle d'Alexis II et du département des Relations extérieures du patriar
cat. Au-delà de l'étude même des nombreux textes produits par l'institu
tion ecclésiastique, nous chercherons à comprendre en quoi ces positions,
qui s'inscrivent dans un contexte socio-historique tout en faisant écho à
une conception théologique du monde, répondent également à des straté
gies des acteurs religieux. Leurs prises de position s'expliquent en effet
largement par un souci d'affirmation de leur pouvoir dans un marché des
biens du salut de plus en plus concurrentiel. La catégorie du territoire
glisse du registre religieux vers le registre politique.
1. Le discours ecclésial : un peuple, un territoire, une Église
Alors que, dans l'Église orthodoxe, le nombre de pratiquants réguliers
est faible (6 % de la population disent participer régulièrement à la
liturgie), alors que le pourcentage de ceux qui déclarent croire en Dieu
l'est tout autant, la part de ceux qui se disent appartenir à l'Église ortho
doxe est de 60 %. L'Église, quant à elle, affirme réunir en son sein de 80 à
100 millions de personnes. Comme le considère A. Soldatov, elle
1. L'ecclésiologie orthodoxe se fonde sur un principe eucharistique, selon lequel les ortho
doxes d'u

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