L hindouisme nationalisé et internationalisé - article ; n°173 ; vol.44, pg 99-126
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Tiers-Monde - Année 2003 - Volume 44 - Numéro 173 - Pages 99-126
Djallal G. HEUZÉ — Nationalized and internationalized Hinduism
Hinduism might be the set of religious practices and ideologies which endured the deepest evolution during the past thirty years. The process of change was the result of a long maturation made of reformism and reaction combined and com- plexely interacting. New phenomenas as the rise of unemployed youth, specific inferiority complexes and armed confrontations, helped to pave the way for a new kind of hinduism and hindu attitudes, nationalist, politicised, somewhat centralised and more and more simple. The contribution explains how the complex set of communal attitudes and history between hindus and muslims have helped to promote this evolution. It also introduces the major role played by the polemics about a small mosque of the Gangetic Plain. As it is finally argued, the process of internationalisation of hindu perspectives and organisations is related to its nationalisation.
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 16
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Djallal G. Heuzé
L'hindouisme nationalisé et internationalisé
In: Tiers-Monde. 2003, tome 44 n°173. pp. 99-126.
Abstract
Djallal G. HEUZÉ — Nationalized and internationalized Hinduism
Hinduism might be the set of religious practices and ideologies which endured the deepest evolution during the past thirty years.
The process of change was the result of a long maturation made of reformism and reaction combined and com- plexely
interacting. New phenomenas as the rise of unemployed youth, specific inferiority complexes and armed confrontations, helped to
pave the way for a new kind of hinduism and hindu attitudes, nationalist, politicised, somewhat centralised and more and more
simple. The contribution explains how the complex set of communal attitudes and history between hindus and muslims have
helped to promote this evolution. It also introduces the major role played by the polemics about a small mosque of the Gangetic
Plain. As it is finally argued, the process of internationalisation of hindu perspectives and organisations is related to its
nationalisation.
Citer ce document / Cite this document :
G. Heuzé Djallal. L'hindouisme nationalisé et internationalisé. In: Tiers-Monde. 2003, tome 44 n°173. pp. 99-126.
doi : 10.3406/tiers.2003.5489
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2003_num_44_173_5489L'HINDOUISME NATIONALISE
ET INTERNATIONALISÉ
par Djallal G. Heuzé*
L 'hindouisme est peut-être le corps de doctrines et de pratiques qui a
le plus vite évolué au cours des trente dernières années. Bénéficiant, ou
victime d'une maturation sur plus d'un siècle, exaspéré par des phéno
mènes comme le chômage des diplômés, les complexes d'infériorité pro
pres aux hindous et les conflits armés intérieurs et frontaliers à l'Union
indienne, l'essor d'un nouvel hindouisme, politisé, nationaliste, centralisé
et simplifié, est le premier élément frappant puisque des hommes issus de
cette mouvance sont au gouvernement depuis 1998. Le texte montre
comment ces évolutions s'enracinent dans la complexité en miroir des
communautarismes hindous et musulmans. Il explique aussi comment une
polémique menée avec succès autour d'une mosquée désaffectée a boule
versé la donne. Enfin, le processus d'internationalisation des organisat
ions et des perspectives hindoues est mis en lumière.
L'hindouisme s'est caractérisé par la diversité de ses composantes,
l'absence d'organisation centralisée, la profusion des corps de doctri
nes, la pluralité des philosophies, des conceptions et des pratiques
sacrées, la popularité de mouvements piétistes et sa relation mouvante
mais constante aux castes et à la hiérarchie. Cet ensemble, qui
concerne un milliard d'humains, manque de visibilité médiatique, stra
tégique et socioreligieuse. Tout se passe comme si les hindous étaient
hors du temps, trop religieux pour intégrer le flux hégélien de Г « his
toire »' pour certains, pas assez religieux, puisque distanciés des mono-
théismes, pour d'autres. Même lorsque des milices hindoues se manif
estent en faisant des carnages, de musulmans, il paraît tentant de ne
parler que de ces derniers, parce qu'il est devenu habituel de parler de
musulmans, usuellement placés dans le mauvais rôle mais qu'il est
aussi possible d'idéaliser comme victimes.
* Centre d'anthropologie, Toulouse.
1 . Que l'auteur considère comme une « incontournable absurdité ».
Revue Tiers Monde, t. XLIV, n° 173, janvier-mars 2003 Djallal G. Heuzé 100
LES NATIONALISTES HINDOUS VERS LE POUVOIR
La politisation de certaines tendances hindoues date du milieu du
XIXe siècle durant lequel la plupart des hindous, et une forte minorité de
musulmans, se trouvaient sous la domination des Britanniques. Le
mouvement est parti de tentatives pour réformer les mœurs, influencées
par l'enseignement des missionnaires. Le but était de renforcer la cohé
sion populaire afin de faire avancer le pays. Le mouvement réformiste
se répandait à partir de membres de hautes castes dans les milieux
anglicisés quand, en 1857, une insurrection militaire et populaire boule
versa la plaine du Gange avant d'échouer. L'événement prêta à réflé
chir. Le réformisme revint sur la scène en cherchant à valoriser les raci
nes culturelles. L'Arya Samaj (1875) introduisit le thème de la grande
civilisation védique1 puis s'engagea dans le champ éducatif. Un retour
aux sources devait être le passage vers l'authenticité nationale et le pro
grès. Un mouvement littéraire prénationaliste surgit au Bengale, en
associant la déesse, la terre mère et le sentiment patriotique2. Des petits-
bourgeois posaient les jalons de la sacralisation de la patrie. Le mouve
ment eut son répondant dans l'Ouest, où le réformisme se trouva con
fronté à des revendications nationalistes de plus en plus claires. Au
tournant du siècle, le mouvement nationaliste se lança dans le terro
risme, promu par des étudiants qui furent rapidement exterminés ou
emprisonnés3. Ce fut le cas de V. D. Savarkar qui fut condamné au
bagne. Dans le Nord, une série d'assemblées tenta d'unifier la cons
cience et les rangs de ceux que l'on n'appelaient pas toujours alors « les
hindous ». Entre 1900 et 1920, ces Hindus Sabhas (Jaffrelot, 1993),
popularisèrent le concept d'une communauté victime de l'histoire et de
ses divisions. Les tentatives pour mettre un terme aux secondes butèrent
sur l'arrogance de membres influents de castes supérieures. Des él
éments issus de la mouvance de la réforme mirent en cause la hiérarchie
de caste. C'était le vœu du jeune brahmane Savarkar dans son bagne. Il
écrivit un livre inspiré s'appelant Hindutva, l'hindouité4. Les 74 pages
insistaient sur un petit nombre de thèmes. L'Hindustan, gouverné
durant mille ans par des non-hindous, tenait son génie de caractères
1. K. W. Jones (1976), Arya Dharma, New Delhi, Manohar.
2. В. С Chatterjee (n.d.), Ananda Math, Calcutta, Basumati Sahitya Mandir ; A. P. Sen (1993),
Hindu Revivalism in Bengal, Delhi, Oxford University Press.
3. P. Heehs (1993), The Bomb in Bengal, Delhi, OUP.
4. V. D. Savarkar (1924-1966), Hindutva, Vir Savarkar Academical Trust. L'hindouisme nationalisé et internationalisé 101
immanents associés à la sacralité d'un sol unique et unifié. L'Inde était
la terre des seuls hindous. L'hindouité n'était pas une doctrine religieuse
mais un sentiment d'allégeance à la terre. Savarkar était un réformiste
en ce qui concerne les mœurs et un révolutionnaire en religion. En
revanche, il n'admettait plus d'expression politique des membres
d'autres religions, reléguée dans la sphère privée. Il exigeait de ces
derniers qu'ils fassent allégeance aux symboles hindous d'une religion
nationale. En 1923, il fut élu président de la Hindu Mahasabha,
fédération issue du mouvement des Sabhas auquel s'étaient agrégés des
éléments révolutionnaires. L'organisation fit partie du Congrès natio
nal indien jusqu'en 1937. La Hindu Mahasabha, devenue instrument
des hautes castes et de privilégiés, n'eut pas grand impact sur la scène
politique indienne, en dépit de son chef instruit et novateur1. Elle
connut une heure de célébrité indésirée quand un de ses ex-membres
assassina Gandhi en 1948 puis sombra dans une suite de combats
d'arrière-garde.
Le nationalisme hindou était aussi étranger que la laïcité au
Mahatma Gandhi (Markovits, 2000). Soucieux d'englober les minorit
és de musulmans et d'intouchables dans son projet de nation agraire
et décentralisée, il ne pouvait que se heurter à des mouvements qui
préconisaient la nationalisation agressive de la religion. Il était parti
san de l'ordre des varnas, malmené par Savarkar, respectueux de la
vache mère et soucieux d'imposer en politique un pouvoir notabiliaire.
Ce n'est pas pour ces positions qu'il fut abattu mais pour avoir
accepté le fait accompli d'une Partition qu'il récusait. Gandhi côtoyait
de nombreux conservateurs, menés notamment par Pandit Malavya,
fondateur de l'Université hindoue de Varanasi en 1926. Ce conglomér
at imposant de personnalités, regroupé dans le Parti du Congrès der
rière le Sardar Patel, fut toujours sensible aux thèses nationalistes

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