L induction chez Albert le Grand (suite) - article ; n°51 ; vol.13, pg 246-264
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Revue néo-scolastique - Année 1906 - Volume 13 - Numéro 51 - Pages 246-264
19 pages

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Publié le 01 janvier 1906
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Langue Français
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Auguste Mansion
L'induction chez Albert le Grand (suite)
In: Revue néo-scolastique. 13° année, N°51, 1906. pp. 246-264.
Citer ce document / Cite this document :
Mansion Auguste. L'induction chez Albert le Grand (suite). In: Revue néo-scolastique. 13° année, N°51, 1906. pp. 246-264.
doi : 10.3406/phlou.1906.1943
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-5541_1906_num_13_51_1943X.
L'INDUCTION CHEZ ALBERT LE GRAND
(Suite*).
II.
I, INDUCTION DANS LES SCIENCES DE LA NATURE.
§ 1 . — De ï absence ordinaire dt induction dans les sciences
de la nature.
L'induction employée dans les sciences de la nature
repose sur la méthode expérimentale et engendre une certi
tude égale à celle du syllogisme. Or, si nous exceptons
quelques vues fugitives de Duns Scot, nous n'avons pas
rencontré de théorie sur pareille induction dans les volu
mineux commentaires d'Aristote, où les docteurs médiévaux
ont consigné leur logique. L'explication de cette lacune est
bien simple : il était inutile d'analyser un procédé dont on
ne faisait aucun usage, parce qu'on ne se souciait pas de
constituer les sciences qui en réclament l'emploi. Les anciens
avaient à vrai dire leur physique, leur alchimie, leur ana-
tomie, leur physiologie, leur zoologie, leur botanique, leur
minéralogie, leur astronomie, toutes sciences dont on peut
même trouver les noms dans les titres des ouvrages d'Albert
le Grand. Mais ces sciences n'étaient pas ce qu'on appeller
ait, de nos jours, des positives ; elles constituaient
des sciences proprement philosophiques, recherchant l'es-
*) Voir Revue Néo-Scolastique, mai 1906, p. 115. L'INDUCTION CHEZ ALBERT LE GRA.ND 247
sence dernière de la catégorie d'êtres dont elles traitaient.
Comme on incorporait toutes les sciences dans la philo
sophie, on concevait naturellement les particulières
d'une manière philosophique.
L'objet d'une science positive est l'exacte détermination
des faits et de leurs lois. Au contraire chez les scolastiques,
chez Albert le Grand par exemple qui résume en lui les
sciences naturelles de son temps, les faits, les activités des
corps ne sont étudiés que parce qu'ils peuvent révéler leur
quod quid est 1). Une autre preuve du caractère philoso
phique des sciences particulières, au xine siècle, c'est qu'on
y trouve des chapitres entiers remplis de spéculations sur
les formes substantielles ou accidentelles des corps dont il
est question 2).
Voila deux ordres de soucis auxquels les expérimentat
eurs modernes sont bien indifférents, eux qui ne s'occupent
en général que de déterminer la mesure mathématique des
phénomènes et n'accordent aux théories explicatives géné
rales d'autre valeur que d'être des expositions synthétiques
des faits.
Les anciens étaient plus hardis, et si leur hardiesse
n'avait pas été quelquefois de la témérité, il faudrait les louer
de ce que, sans s'arrêter à éplucher la matière dans les
moindres manifestations de son activité, ils se soient élevés
d'une observation vulgaire et rapide de la nature, à la con
ception d'un système du monde, au moyen duquel ils pou
vaient, croyaient-ils, expliquer en un retour synthétique
toute l'échelle des variétés qu'on trouve dans les corps et
leurs diverses opérations. La partie la plus générale de ce
système avait été élaborée par Aristote dans sa Physique,
dans ses traités du Ciel et du Monde, de la Génération et
de la Corruption, et des Météores, — tous livres commentés
tract. *) De 1, Vegetalibus, cap. 1. lib. VI, tract. 2, cap. 1 ; De Animalïbus, lib. IX,
2) Albert le Grand, De Mineralibus, lib. I, tract. 1, c. 2 ; De Veget
alibus, lib. VI, tract. 2, c. 22 ; De Animalibus, lib. XII, tract. 1, c. 4. 248 A. MANSION
et repris en grande partie pour leur compte par les scolas-
tiques médiévaux.
De nos jours, on fait souvent aux anciens le reproche
d'avoir édifié a priori cette construction qui ne manque
cependant pas de grandeur. Ce reproche n'est pas entièr
ement fondé ; dans toutes les déductions qui servent à
l'étayer, à côté d'un principe idéal, on en trouve un autre
tiré de l'observation, — observation souvent vulgaire, rudi-
mentaire même et incomplète, mais dont le rôle était
apprécié à sa juste valeur. Saint Thomas notamment à la
suite d'Aristote reproche aux Platoniciens, en termes assez
vifs, leur « inexperienlia *> au sujet de la nature : ils se
fondent, dit-il, uniquement sur des principes trop généraux
au lieu de prêter leur attention aux choses sensibles 1). Le
reproche d'apriorisme devrait plutôt porter sur le contenu
peu sûr des principes idéaux avancés par Aristote et ses
disciples, que sur leur emploi : en effet, comment édifier
une théorie générale du cosmos, sans recourir à des prin
cipes ? D'autre part, comment les appliquer à la réalité, si
on ne l'a pas observée d'abord ? — On ne peut donc pas
nier dans l'école péripatéticienne toute observation de la
nature, à moins de rendre absolument impossible la con
stitution de n'importe quel système du monde.
Aussi, que s'est-il passé ? On s'est basé sur ce principe
qu'il faut d'abord établir les sciences les plus générales
pour descendre ensuite à celles qui le sont moins "2) ; en
conséquence, on a étudié d'abord, dans la philosophie de
la matière, d'une manière générale ce qui est commun
à tout corps, le mouvement, et puis les espèces de mouvem
ents. Pour cela, comme c'était indispensable, on a
•) De Generatione, lib. I, lect. II, 8.
'; « In quolibet génère rerum necesse est prius considerare communia
et seorsum, et postea propria unicuique illius generis: quem quidem
modum Aristoteles servat in Philosophia prima. In Metaphysica enim
primo tractât et considérât communia entis inquantum ens, postea vero
considérât propria unicuique enti. Ejus ratio est, quia nisi hoc fieret,
idem diceretur frequenter. » S. Thomas, De Anima, lib. I, lect. 1. L'INDUCTION CHEZ ALBERT LE GRAND 249
observé les faits ; mais comme il s'agissait de phénomènes
généraux de la nature, on s'est contenté en grande partie
des résultats de l'observation vulgaire : ceux-ci étant à peu
près les mêmes partout, les scolastiques ont accepté natu
rellement ce qu'Aristote affirmait sur ce sujet. — On trouve
bien çà et là dans les grands traités du Stagirite la mention
de l'emploi de l'induction, mais pour lui, comme pour ses
commentateurs Albert et Thomas, elle n'apparaît que
comme illustration, manifestation, ou confirmation, soit
d'un principe tenu pour évident, soit d'une vérité qu'on
démontre d'une manière deductive avant ou après l). Dans
un seul cas, Albert le Grand considère expressément le
procédé comme une induction complète. Au fond, c'est
toujours d'une observation vulgaire qu'il s'agit, laquelle
peut donner lieu naturellement à une induction abstractive.
De même, au livre Ier de la Physique 2), Albert le Grand
et S. Thomas nous avertissent qu'ils recourent à l'induction
aux fins de montrer qu'il y a dans les corps certains mou
vements ! — Après cela, il ne faut pas s'étonner qu'ils ne
regardent nullement cette induction comme une démons
tration, mais comme la mise en lumière d'une chose évi
dente, « manifestum », qu'il serait même ridicule de vouloir
prouver, ainsi qu'ils le font remarquer 3).
Ce n'est pas à dire que les travaux basés sur l'observa
tion vulgaire aient été nuls. D'abord, n'ont-ils pas conduit
à la belle doctrine de la composition hylémorphique des
corps ? D'un autre côté, la psychologie que les anciens
appelaient physique ou naturelle, a-t-elle besoin d'une con
statation plus minutieuse pour pouvoir se constituer entièr
ement ? Toutefois cette psychologie a rendu accidentellement
tract. ') Physic, 1, c. 6; lib. — 1. IV, V, c. c. 5, 3, text. text. 26; 50; S. S. Thomas, Thom., lect. lect. 8; 4; Alb. Magn., Magn.,
tract tract. 1, 3, c. c. 4. 5 — ; — De 1. Coelo, VII, c. 1. 2, I, text. c. 7, text. 11 ; S. 75 ; S. Thom., lect. 4 lect. ; Alb. 15,

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