L'urbanisme utopique pendant la révolution culturelle soviétique - article ; n°1 ; vol.32, pg 87-105

S. Frederickstarr

Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1977 - Volume 32 - Numéro 1 - Pages 87-105
During the Cultural Revolution of 1928-1931, diverse strains of radical town planning blossomed in the U.S.S.R. This essay demonstrates that the two leading currents, usually characterized as urbanist and disurbanist, in fact shared an antipathy to the city as such, and to the concentration of political power and productive forces represented by the modern urban center. In their common hostility towards all forms of centralization, Russia's anti-urbanist planners stood squarely within the tradition of in dividualistic anarchism that had flourished in Russia during the nineteenth century and which existed as a submerged current even within Bolshevism. It is the more surprising, therefore, that these same anti-urbanists could have gained the support and patronage of many of the most powerful agencies within the Soviet government and, briefly, of the Communist Party itself. This occurred, it is argued because the specific conditions existing in Russia at the time imparted to the anti-urbanists' program the appearance of realism and practicality. By 1930-1931, however, the political implications of the anti-urbanists' position had become clear, and the movement was quickly suppressed by the rising forces of political and economic centralization headed by J.V. Stalin
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: ANNALES_ECONOMIES_SOCIETES_CIVILISATIONS
• Publié le: 01 janvier 1977
• Nombre de lectures: 65
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

S. Frederick Starr
L'urbanisme utopique pendant la révolution culturelle soviétique
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 32e année, N. 1, 1977. pp. 87-105.
Abstract
During the "Cultural Revolution" of 1928-1931, diverse strains of radical town planning blossomed in the U.S.S.R. This essay
demonstrates that the two leading currents, usually characterized as "urbanist" and "disurbanist", in fact shared an antipathy to
the city as such, and to the concentration of political power and productive forces represented by the modern urban center. In
their common hostility towards all forms of centralization, Russia's anti-urbanist planners stood squarely within the tradition of in
dividualistic anarchism that had flourished in Russia during the nineteenth century and which existed as a submerged current
even within Bolshevism. It is the more surprising, therefore, that these same anti-urbanists could have gained the support and
patronage of many of the most powerful agencies within the Soviet government and, briefly, of the Communist Party itself. This
occurred, it is argued because the specific conditions existing in Russia at the time imparted to the anti-urbanists' program the
appearance of realism and practicality. By 1930-1931, however, the political implications of the position had
become clear, and the movement was quickly suppressed by the rising forces of political and economic centralization headed by
J.V. Stalin
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Starr S. Frederick. L'urbanisme utopique pendant la révolution culturelle soviétique. In: Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations. 32e année, N. 1, 1977. pp. 87-105.
doi : 10.3406/ahess.1977.293801
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1977_num_32_1_293801URBANISME UTOPIQUE PENDANT
LA VOLUTION CULTURELLE SOVI TIQUE
La plupart des révolutionnaires contemporains ont affirmé leur volonté
édifier une culture nouvelle Les Russes plus que quiconque ont poursuivi ce
but avec imagination et ténacité On connaît depuis longtemps le plan en
semble de leurs efforts en ce sens pendant la Guerre civile et sous la NEP En
revanche intermède bref brutal et néanmoins prometteur entre la et le
stalinisme pas fait ici objet une étude attentive Durant les années
1928-1931 le Comité de la révolution culturelle fut son apogée étendant son
action tous les domaines Cette étude en concerne un seul urbanisme et
avec lui idée essentielle qui dominé les conceptions des urbanistes de
époque la suppression des villes La révolution culturelle trouva en ce slogan
ses expressions les plus extrêmes mais aussi les plus significatives
Vers la fin du premier Plan quinquennal la presse de la Jeune Garde de
Moscou publiait un livre pour enfants intitulé La Ville Verte En postface
auteur demandait ses jeunes lecteurs ils désiraient habiter ces anti-villes ver
doyantes il venait de décrire
Enfants Tout ce que ai dit de la Ville Verte est pas un conte de fées
Nous ne possédons pas encore ce genre de villes mais on est en train de cons
truire la campagne des villes pour les ouvriers de nouvelles Villes Vertes. qui
mettront fin aux vieux villages crasseux
Ces implantations devaient également mettre fin aux villes telles on les
connaissait depuis des siècles Krupskaia la veuve de Lenine venait de le rap
peler II plus désormais obstacle technique la diffusion peu près
équitable sur la totalité du territoire de toutes nos richesses scientifiques et artis
tiques concentrées pendant des siècles dans un petit nombre de villes était
là sans doute une vision grandiose mais édition de 1930 de Encyclopédie
soviétique abrégée la traduisait en des termes plus concrets Comme ex
pliquait froidement la même année éditeur une série de mémoires sur le sujet
est hui la vie elle-même qui se charge de nous faire découvrir com
ment réaliser Utopie
87 MOD LES URBANISATION
Ne faut-il voir là que les élucubrations de rêveurs isolés ignorant les réalités
de ce un journaliste américain appelé âge de fer de la Russie Il
en était rien quelque surprenant que cela puisse paraître hui Il ne
agit nullement du phénomène occasionnel un délire temporaire ces recher
ches témoignent bien au contraire un vaste effort dans le but utiliser urba
nisme comme le facteur le plus capable organiser la psyché des masses
Avant un edit du Parti communiste ne mette un frein au ou aux mou-
vement(s en juin 1931 un très grand nombre de spécialistes avaient fait valoir
leurs projets visant une transformation radicale des modes de vie travers un
urbanisme et une architecture utopistes
Leurs auteurs étaient convaincus que le nouveau monde auquel ils rêvaient
se réaliserait de leur vivant Si en 1923 architecte Alexander Lavinskii publiait
son Utopie réalisée sans donner de prévisions7 en 1929 Leonard Sabsovich
affirmait tout bonnement que son projet une société sans ville pouvait se réa
liser en espace de quinze ans estimation il se sentit contraint de réduire de
moitié la même année Sabsovich faisait preuve un optimisme exceptionnel
mais même ceux qui le critiquaient reconnaissaient urgence un plan en vue
de ère nouvelle
Leur principal adversaire le leader de opposition Georgii Zinoviev était
élevé en 1917 contre le projet de Lenine trop audacieux son gré un coup
tat bolchevique mais par la suite il était rallié la tendance du Parti favo
rable une surindustrialisation Il mettait en garde contre le scepticisme
tempéré que manifestent des gens trop pragmatiques face aux projets de cons
truction de villes socialistes Où les construira-t-on demandent-ils et com
ment elles ne seront jamais construites ou dans un siècle peut-être etc II
faut tout prix rejeter ces préjugés petit-bourgeois
Entre 1928 et 1930 un monde nouveau semblait possible Les planificateurs
attendaient impatiemment de le voir prendre forme et tâchaient en décrire les
merveilles dans leurs projets et dans leurs uvres théoriques Mais au même
moment de profondes divergences apparurent sur la nature de ce nouvel ordre
social Ces polémiques restreintes et mineures encore en 1928 eurent tôt fait de
élargir en débats houleux Académie communiste en 1929 10 on en vint
rapidement aux insultes et le paroxysme fut atteint lorsque un eux traita ses
collègues de trotskistes fascistes et bâtards cubo-futuristes Les dissensions
entre les principaux urbanistes soviétiques prirent une telle place dans la presse
professionnelle du moment que les commentateurs renoncèrent trouver un
seul élément commun entre ces multiples visions de avenir La critique his
torique en revanche tenté identifier les factions opposées et établir des
rapports entre chacune elles et les diverses hérésies politiques On donc
reconnu dans le mouvement une droite et une gauche 12 bien que ces termes
appliqués urbanisme soient souvent une exactitude douteuse ou même
simplement erronés Quoi il en soit personne ou presque ne comprit que le
mouvement formait un tout il agissait là un phénomène global
Parmi tous les débats qui divisèrent les urbanistes visionnaires en Russie
aucun eu plus audience que celui qui opposa les urbanistes aux
disurbanistes comme on les appela Avec le recul il est évident que cette
polémique-la domine ce qui est connu de cette histoire Un survol de la question
ne peut rendre compte de tous les points de divergence entre les deux groupes
pas plus il ne peut permettre de mesurer ce ils avaient en commun et en
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donner la signification Il peut néanmoins montrer comment urbanisme et le
disurbanisme répondent en fait une situation économique sociale et idéolo
gique précise et il donc lieu de les considérer fondamentalement un et
autre comme des visions anti-urbaines de avenir
anti-urbanisme des urbanistes et des disurbanistes
Le principal théoricien des perspectives urbanistes rien un urba
niste Il agit de Léonard Moisevich Sabsovich qui en 1930 affirmait avec
satisfaction que bientôt nos plus grandes villes seront les lieux les plus arriérés
où vivre en U.R.S.S 13 et que toutes les existantes seraient balayées de
la surface de la terre 14 Un an plus tôt il était devenu membre de la Com
mission pour un plan ensemble du Gosplan et publiait un livre intitulé
U.R S.S dans quinze ans Hypothèse pour un plan ensemble pour édi
fication du socialisme en U.R.S.S 15 Son hypothèse de départ on vu était
une simplicité séduisante puisque dans un délai de quinze ans la transition
économique et sociale menant au communisme serait achevée il fallait cons