La signification géographique de la première colonisation grecque - article ; n°2 ; vol.45, pg 179-200
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Description

Revue de géographie de Lyon - Année 1970 - Volume 45 - Numéro 2 - Pages 179-200
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 51
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre Lévêque
Paul Claval
La signification géographique de la première colonisation
grecque
In: Revue de géographie de Lyon. Vol. 45 n°2, 1970. pp. 179-200.
Citer ce document / Cite this document :
Lévêque Pierre, Claval Paul. La signification géographique de la première colonisation grecque. In: Revue de géographie de
Lyon. Vol. 45 n°2, 1970. pp. 179-200.
doi : 10.3406/geoca.1970.2666
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geoca_0035-113X_1970_num_45_2_2666SIGNIFICATION GÉOGRAPHIQUE LA
DE LA PREMIÈRE COLONISATION GRECQUE
par Pierre Lévêque et Paul Claval
Les géographes s'intéressent volontiers à l'histoire ancienne, quoi
qu'elle soit de toute évidence moins directement utile pour la compré
hension des répartitions et des groupements actuels que ne le sont
l'histoire moderne et l'histoire médiévale. Cet intérêt n'est paradoxal
qu'en apparence. La géographie humaine s'interroge sur les liens que
les hommes tissent dans l'espace, sur ceux qui les unissent avec le
milieu. Elle a besoin de prendre un certain recul pour saisir la véri
table profondeur des faits sociaux ; celle-ci échappe à l'œil fatigué par
la fréquentation quotidienne des objets. Le géographe, comme le socio
logue, a besoin du point de vue ethnologique ; il doit être le persan qui
s'étonne, et ne peut le faire que pour des sociétés qui lui sont exté
rieures et à l'égard desquelles il se sent une espèce de détachement.
L'histoire ancienne offre au géographe une possibilité de dépay
sement : il gagne en liberté à analyser une civilisation éloignée dans
le temps. Mais cette société a le privilège d'être à l'origine d'une bonne
partie de notre culture, si bien que le dépaysement se trouve plus fécond
encore que s'il était purement ethnologique. Certaines transformations,
certains épisodes de l'histoire de l'Antiquité exercent de la sorte une
particulière fascination sur le géographe. Les grandes constructions
politiques de l'Antiquité classique, de la ligue de Délos à l'Empire
d'Alexandre et à l'hégémonie romaine lui posent un problème irritant.
Quelle est la part des hommes, des événements fortuits, quelle est celle
de la société et de ses relations avec le milieu dans l'épanouissement de
ces Etats, de ces Empires ? La carte suggère des causalités géogra
phiques, mais la difficulté est de suivre leurs voies.
C'est sans doute pour une période plus ancienne encore que les
problèmes les plus irritants et les plus intéressants se posent. Dans
la Grèce pré-classique, toute une série de mutations, de transformat
ions se produisent qui sont comme auréolées de légende, et semblent
cacher sous leur mystère apparent la clef de certains problèmes perma
nents de l'analyse géographique. Max Sorre, après beaucoup, aimait 180 PIERRE LÉVÊQUE ET PAUL CLAVAL
à revenir sur les synœcismes qui se multiplient au moment où l'histoire
cesse d'être légendaire, et qui correspondent au passage d'une société
sans histoire, la société d'ethnologue, à la société prométhéenne moderne.
Pour le géographe et pour le sociologue, il y a un miracle grec et il
se situe à ce niveau. Ailleurs, l'histoire révèle la lente progression de
groupes humains qui prennent progressivement conscience de leur
destin. Ici la prise de conscience semble se faire d'un coup, sans la longue
suite des tâtonnements qui correspondent généralement aux sociétés
de type folk. On a beau savoir que ce passage à la société prométhéenne
a été longuement préparé par les siècles obscurs du Moyen Age grec,
le sentiment de mystère, de miracle demeure : car nulle part la prise de
conscience collective du devenir historique n'est aussi claire, aussi
profondément significative que dans les récits de ses synœcismes.
L'impression de révélation demeure : ce qui ailleurs est le résultat d'une
multitude de pas hésitants, de démarches contradictoires paraît avoir
été ici délibérément choisi. La formation de la cité est voulue par des
groupes qui cherchent à entrer dans l'histoire, qui rompent avec un
passé différent, où le temps n'avait pas la même consistance, la vie
humaine la même signification.
La colonisation grecque se développe à une époque postérieure aux
premiers synœcismes, mais elle se situe dans une même ambiance, et
de ses paradoxes, de ses contradictions apparentes surgissent toute
une série de questions qui peuvent sans doute permettre de mieux
comprendre les révolutions dont est sortie la Grèce classique.
Au premier regard, elle se présente pourtant comme un phénomène
simple, et dont l'explication géographique ne soulève pas de difficultés
particulières. A partir du VIIIe siècle, on voit se produire un véritable
essaimage de cités grecques tout autour du bassin de la Méditerranée
occidentale et orientale, puis du Pont. Ces centres sont, en règle génér
ale, des ports ; ils seraient nés du besoin d'élargir les bases d'une
économie à l'étroit sur une terre pauvre, dure, qui nourrit mal ses fils.
La surpopulation aurait engendré l'émigration, et du même coup, une
colonisation que lui imposait une nature avare.
L'analyse précise montre que cette explication est trop simple pour
rendre compte de tous les aspects de la colonisation, et plus spécia
lement de la première, celle qui se dessine au vine siècle. Là, des traits
contradictoires apparaissent. Au cours des migrations qui avaient mis
en place successivement les peuplements ionien, éolien, achéen et dorien
en Grèce et sur la côte occidentale de l'Asie Mineure, la prise de pos-
session du sol s'était effectuée comme on le voit habituellement lors
des migrations agricoles ou pastorales. Il s'agissait d'une occupation
largement étalée en surface. Sur la carte, les établissements grecs appa
raissent comme des taches se disposant d'une manière continue. Les
différents ensembles naturels d'une région sont occupés, il n'y a pas de
préférence marquée pour tel ou tel type de terroir, tel ou tel type de
milieu. En Anatolie, où le peuplement est littoral, la zone occupée est
assez profonde. Il ne s'agit pas d'une série d'échelles accrochées à un PREMIÈRE COLONISATION GRECQUE 181 LA
littoral. Si la répartition demeure côtière, c'est sous l'effet de la compét
ition avec les peuples déjà installés dans le pays. Ceux-ci tiennent
solidement l'intérieur ; les Grecs les refoulent, s'interposent entre eux
et la mer dans une zone d'un seul tenant.
La colonisation qui se développe à partir du VIIIe siècle se présente
sous des traits différents. Elle est faite de foyers isolés. Elle est sélec
tive, car certains milieux l'intéressent seuls ; elle évite délibérément de
s'installer dans les zones de collines et de montagnes qui auraient permis
de donner une continuité spatiale aux établissements échelonnés le
long des mêmes littoraux. En Grande-Grèce, en Sicile, où les fondations
furent rapidement nombreuses, on aurait de la sorte facilement imaginé
une prise de possession aboutissant à la création de régions assez
vastes. Les Grecs ne semblent pas avoir cherché à se constituer de
la sorte des bases de grande dimension. Ils y auraient sans doute
éprouvé des difficultés, car les régions où ils s'installaient étaient déjà
humanisées — mais c'était aussi le cas des pays où s'étaient effectuées
les migrations achéennes et doriennes. Là, par refoulement, conquête,
assimilation, la prise de possession avait fini par être à peu près continue.
Ici, de tels efforts manquent totalement. Cela ne veut pas dire évidem
ment que les Grecs se désintéressent des peuples qui sont leurs voisins.
Leur sécurité dépend des rapports qu'ils entretiennent avec eux. Tantôt
ils nouent des alliances avec eux, tantôt ils les réduisent en servage.
En tout cas les Barbares se trouvent petit à petit intégrés dans la
zone d'influence de la civilisation grecque. Mais les colons sont des

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