La techouva. Nouvelle orthodoxie juive et conversion interne - article ; n°2 ; vol.57, pg 275-296
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Description

Annales. Histoire, Sciences Sociales - Année 2002 - Volume 57 - Numéro 2 - Pages 275-296
Laurence Podselver.
La techouva. Nouvelle orthodoxie juive et conversion intern.
Le judaïsme, plus que toute autre religion, a été affecté par un ample mouvement de sécularisation lié à son émancipation politique. Toutefois, depuis quelques années en France, on peut observer un mouvement de retour au judaïsme. Bien qu'il ne représente qu'une minorité des juifs revenus à la religion, le hassidisme Loubavitch a anticipé un mouvement plus large et hétérogène de re-conversion interne, après que les juifs eurent dans leur ensemble été acquis à la laïcité. C'est ce « retour » que nous considérons comme une véritable conversion puisqu'il opère, chez les nouveaux adeptes, des changements profonds concernant tout autant l'organisation de la vie au quotidien que le sentiment identitaire.
The techouva: the new Jewish orthodoxy and internal conversion.
Judaism more than any other religion has been affected by a wide movement of secularisation connected with its political emancipation. A return to Judaism however has occurred over the last few years. Although only a minority of Jews have come back to religion, Loubavitch Hassidics have anticipated a wider and heterogeneous movement of internal reconversion, taking place after most Jews have become secular. This article shows that this return is in fact a true conversion, operating deep changes among its new adepts and affecting the organization of their daily lives as well as their feeling
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Laurence Podselver
La techouva. Nouvelle orthodoxie juive et conversion interne
In: Annales. Histoire, Sciences Sociales. 57e année, N. 2, 2002. pp. 275-296.
Résumé
Laurence Podselver.
La techouva. Nouvelle orthodoxie juive et conversion intern.
Le judaïsme, plus que toute autre religion, a été affecté par un ample mouvement de sécularisation lié à son émancipation
politique. Toutefois, depuis quelques années en France, on peut observer un de retour au judaïsme. Bien qu'il ne
représente qu'une minorité des juifs revenus à la religion, le hassidisme Loubavitch a anticipé un mouvement plus large et
hétérogène de re-conversion interne, après que les juifs eurent dans leur ensemble été acquis à la laïcité. C'est ce « retour » que
nous considérons comme une véritable conversion puisqu'il opère, chez les nouveaux adeptes, des changements profonds
concernant tout autant l'organisation de la vie au quotidien que le sentiment identitaire.
Abstract
The techouva: the new Jewish orthodoxy and internal conversion.
Judaism more than any other religion has been affected by a wide movement of secularisation connected with its political
emancipation. A return to Judaism however has occurred over the last few years. Although only a minority of Jews have come
back to religion, Loubavitch Hassidics have anticipated a wider and heterogeneous movement of internal reconversion, taking
place after most Jews have become secular. This article shows that this "return " is in fact a true conversion, operating deep
changes among its new adepts and affecting the organization of their daily lives as well as their feeling
Citer ce document / Cite this document :
Podselver Laurence. La techouva. Nouvelle orthodoxie juive et conversion interne. In: Annales. Histoire, Sciences Sociales. 57e
année, N. 2, 2002. pp. 275-296.
doi : 10.3406/ahess.2002.280045
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_2002_num_57_2_280045La techouva
Nouvelle orthodoxie juive
et conversion interne
Laurence Podselver
Au cours des années 1980, la visibilité sociale des Juifs au sein de la nation
française témoignait d'un profond changement dans la manière dont la commun
auté juive vivait son identité, tout comme évoluait la représentation que les non-
Juifs se faisaient d'une minorité contrastée et que certains voudraient univoque.
L'identité des Juifs s'est alors manifestée par une production culturelle spécifique,
un foisonnement littéraire sans précédent, des expressions artistiques souvent très
populaires — médiatisées par la chanson ou le cinéma — et par la multiplication de
cercles d'études dédiés essentiellement à l'étude des textes religieux. Nous nous
attacherons ici à l'analyse de la techouva (le retour) qui, employé en hébreu dans
le langage courant, traduit une dimension religieuse de l'identité tout en partici
pant d'un mouvement identitaire plus large. Il aspire, au-delà de la simple affirma
tion culturelle, à des changements profonds dans la vie de chacun. Des études de
terrain menées chez les Loubavitch1, à Paris, puis une enquête faite en banlieue
Avec cet article, se clôt la publication des résultats de l'enquête conduite entre 1994 et
1999 au Centre de recherches historiques (EHESS), avec le soutien du ministère de la
Recherche, sur l'histoire comparée des phénomènes de conversion ; voir Annales HSS,
54-4, 1999 et Mercedes Garcia Arenal, Conversions islamiques. Identités religieuses en
Islam méditerranéen, Paris, Maisonneuve et Larose, 2002.
1 - Laurence Podselver, « Le mouvement Loubavitch : déracinement et réinsertion
des Sépharades », Pardes, 3, 1986, pp. 54-68 et, Id., « La séparation, la redondance et
l'identité : les hassidim de Lubavitch à Paris », Pardes, 7, 1988, pp. 167-173. « Les Luba-
vitch et la question de l'État: défiance traditionnelle et pragmatisme messianique », in
Pierre Birnbaum (dir.), Histoire politique des Juifs de France, Paris, Presses de la Fonda- ^ ' ^
Annales HSS, mars-avril 2002, n°2, pp. 275-296. LAURENCE PODSELVER
parisienne2, ont mis en évidence le développement intense d'une nouvelle ortho
doxie chez les jeunes Juifs originaires de l'immigration d'Afrique du Nord. Le
développement d'un groupe issu de la tradition hassidique3 et la multiplication
des lieux de culte en banlieue constituent des éléments essentiels pour observer
ces retours au religieux dans leur expression la plus forte. Ce « retour » qui engage
chacun dans une nouvelle vie est, à bien des égards, comparable à une conversion
car, au sens du judaïsme, il signifie tout à la fois une reconnaissance de la loi et la
pratique des commandements qui recouvrent l'ensemble de la vie quotidienne et
dont le degré d'observance varie. Ici, cependant, la ferveur des nouveaux adeptes
conduit non seulement à la pratique totale des commandements mais, plus encore,
à les redoubler ou à en exagérer la mesure. Leur attitude maximaliste s'explique à
la fois par la crainte de ne pas être conformes à une loi qu'ils ne connaissent
qu'imparfaitement, et aussi parce qu'ils pensent que « le plus est le mieux ». Ainsi
les changements dans la vie quotidienne sont-ils d'autant plus importants que la
demande de normes est forte, outrepassant même les exigences de la tradition4.
Pour les juifs issus des milieux traditionalistes d'Afrique du Nord, pratiquant une
religion tranquille de fidélité, et plus encore pour les juifs des milieux très sécula
risés d'origine ashkénaze, le retour modifie style de vie et sociabilité. Les amitiés
antérieures liées au passé sont abandonnées d'autant plus que la plupart des nou
veaux adeptes font le choix de la techouva à leur entrée dans la vie adulte, au
moment de fonder une famille, et que, hors de la tutelle parentale, s'affirme leur
identité propre. Le retour a d'abord concerné une classe d'âge, celle qui avait entre
vingt et trente ans dans les années 1980. Au cours de cette décennie, les retours
se sont faits sur le mode savant dans des cercles d'études auprès de rabbins envoyés
des États-Unis par le mouvement loubavitch. La tradition hassidique et la culture
yiddish bénéficiaient de l'attrait pour l'exotisme et de la fascination pour un autre
soi-même, plus authentique et moins compromis avec la culture majoritaire.
tion nationale des sciences politiques, 1990, pp. 244-257. Id., « L'attrait du particula
risme et les risques de séparation : le mouvement de retour des juifs à la religion au
sein de la société française », Religion et identité, Aix-en-Provence, Presses universitaires
d'Aix-en-Provence, 1998.
2 - Laurence Podselver, « La communauté juive ou la singularité sarcelloise », Hommes
et migrations, 1181, 1994, pp. 37-40. Laurence Podselver et Annie Benveniste,
«Sarcelles, une communauté bien dans sa ville», Urbanisme, 291, 1996, pp. 77-81;
« Incidences du religieux dans l'organisation communautaire et la pratique des
espaces urbains », in N. Haumont (dir.), La ville, agrégation et ségrégation sociale, Paris,
L'Harmattan, 1996, pp. 19-30.
3 -Tradition piétiste née en Europe orientale au xvillle siècle ; nous reviendrons sur cet
aspect un peu plus loin.
4 - Voir, à ce sujet, les travaux de Menachem Friedman, « Life Tradition and Book
Tradition in the Development of Ultraorthodox Judaism », in H. Golberg, Judaism
Viewed from Within and from Without, New York, State University of New York Press,
1987, pp. 232-255, et Haïm SoloveITCHIK, « Rupture and Reconstruction: The Trans
formation of Contemporary Orthodoxy », Tradition, 28-4, Rabbinical Council of America,
276 1994, pp. 64-130. LA TECHOUVA
Malgré une visibilité sociale largement amplifiée par les médias et les nomb
reuses recherches sociologiques, « le retour du religieux » - juif ou non - n'était
pourtant pas aussi important quantitativement en France qu'on pouvait le penser. En
effet, les sondages effectués en 1994, puis en 1998 montraient un net recul de l'autorité
des Églises5, ainsi qu'un glissement général vers l'indifférence religieuse, confirmant
le mouvement profond de la société française vers la sécularisation. Mais l'intérêt
disproportionné pour le religieux face à l'ampleur du phénomène tenait peut-être à
la forte visibilité des Nouveaux Mouvements Religieux (NMR)6, à la recomposition
de

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