Le développement agricole, spécialement tropical, exige un enseignement totalement repensé - article ; n°17 ; vol.5, pg 13-38
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Description

Tiers-Monde - Année 1964 - Volume 5 - Numéro 17 - Pages 13-38
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1964
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

René Dumont
Le développement agricole, spécialement tropical, exige un
enseignement totalement repensé
In: Tiers-Monde. 1964, tome 5 n°17. pp. 13-38.
Citer ce document / Cite this document :
Dumont René. Le développement agricole, spécialement tropical, exige un enseignement totalement repensé. In: Tiers-Monde.
1964, tome 5 n°17. pp. 13-38.
doi : 10.3406/tiers.1964.1376
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1964_num_5_17_1376« LE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE
SPÉCIALEMENT TROPICAL
EXIGE UN ENSEIGNEMENT
TOTALEMENT REPENSÉ »<0
par René Dumont (2)
Nous allons étudier successivement, dans une première partie, le
rôle de l'agriculture au départ du développement, les difficultés de la
modernisation agraire et les principaux besoins d'une plus rapide modern
isation. Ceux-ci seront examinés sous l'angle des futures élites, des
cadres moyens (moniteurs) et de la masse des paysans : ce qui nous
amènera à poser le problème des langues vernaculaires. Après avoir
analysé rapidement les méthodes actuelles d'éducation, et montré qu'elles
répondent mal à ces besoins, nous chercherons à esquisser, dans une
deuxième partie, les grandes lignes d'une structure d'enseignement qui
nous apparaît mieux adaptée à la situation réelle, en 1963, des pays en
voie de développement. Après avoir montré la nécessité du travail à
l'école, en citant notamment l'exemple soviétique, et le rôle de cette
école dans la vulgarisation agricole, nous traiterons de la formation
spéciale que requièrent les maîtres d'un enseignement totalement
rénové. Nous nous placerons souvent dans le cadre de l'Afrique tropi
cale, que nous avons étudiée plus récemment (3).
(1) Ce texte a été présenté à la Conférence de l'Unesco à Frascati en juin 1963.
(2) Professeur à l'Institut national agronomique, à l'Institut d'Etudes Politiques, à
l'Institut d'Etude du Développement Economique et Social.
(3) Cf. notre livre : L'Afrique noire est mal partie, Editions du Seuil, 1962 ; et la revue
Impact, 1962. Nous avons aussi étudié une série de problèmes agraires, notamment d'Inde,
d'Europe orientale, d'Afrique, d'Israël et d'Amérique du Sud dans Terres vivantes (Pion, 1961).
1З DUMONT RENÉ
I. — Les besoins en éducation de la modernisation agricole
i° Le développement agricole est indispensable au « take off»
Les pays en voie de développement accordent à l'industrie, à juste
titre, une importance essentielle, primordiale. Seule celle-ci élève très
rapidement la productivité du travail, permet de dégager de gros surplus
pour les investissements de la période suivante, et se révèle finalement
indispensable à la modernisation agricole elle-même, car elle lui fournit
les moyens modernes de production, qu'il n'est pas possible de tous
acheter au-dehors sans compromettre les autres possibilités d'équipe
ment. Si la vitesse de croissance industrielle peut souvent dépasser celle
de l'agriculture, elle rencontre cependant des limites certaines.
Thomas Balogh rappelle que, d'après les expériences connues jus
qu'ici, l'emploi de main-d'œuvre industrielle dans un pays donné n'avait
jamais doublé en moins de huit ans. Ne compter que sur le seul dévelop
pement industriel, dans les pays où l'industrie est encore très peu déve
loppée, serait donc une lourde erreur. Le taux de croissance général
resterait longtemps tout à fait insuffisant, le sous-emploi rural ne pourrait
être résorbé avant plusieurs décennies, les ressources en devises reste
raient exsangues. L'industrie ne pourrait s'autofinancer, l'expérience sovié
tique l'a bien montré, avant très longtemps ; et elle manquerait de matières
premières agricoles à transformer. Enfin l'industrie naissante ne pourrait
jamais trouver dans le pays même un débouché suffisant, si les masses
rurales restaient aussi pauvres et aussi dépourvues de pouvoir d'achat.
Le développement agricole nous apparaît donc absolument indi
spensable au général. Il pourra largement contribuer
à l'amélioration de la balance des comptes, et pas seulement par l'accroi
ssement des exportations. Car si chaque jeune pays ne visait que ce but,
l'effondrement du cours des denrées agricoles, déjà marqué pour le
café, en résulterait vite, dans l'état actuel de véritable anarchie des
marchés internationaux. Et cependant il faut développer l'agriculture
vite et largement. Il est facile de sortir de ce dilemme, seulement appar
ent, en visant trois autres directions principales ď expansion araire.
La réduction des importations alimentaires, souvent somptuaires et dan
gereusement développées ces dernières années, tant en Afrique qu'en
Amérique latine, est généralement plus facile à réaliser qu'un accroiss
ement des exportations. Car le débouché existe sur place, ce qui permet de
faire une double économie de frais de transport et de distribution.
14 LE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE SPÉCIALEMENT TROPICAL
U amélioration de la nutrition, la suppression des plus graves carences
alimentaires exigeront d'abord l'accroissement de la production des pro
téines, végétales (légumineuses) et animales (poisson, lait ; ensuite la viande,
plus coûteuse). Plus facile sera le développement des denrées horticoles,
fruits et légumes, source essentielle de vitamines et de sels minéraux, qui
peuvent être obtenues avec un travail relativement réduit, si on sait mieux
s'organiser. Enfin la production de matières premieres industrielles, desti
nées non plus seulement à l'exportation, mais aussi à la transformation sur
place, permettra de faciliter le démarrage de toute une série de petites
et moyennes industries de transformation, moins exigeantes de capital.
L'industrie n'a pas seulement un intérêt, au départ, sous sa forme la
plus moderne, qui exige bien plus de capital que de travail. Pour cer
taines d'entre elles, et quand c'est économiquement réalisable, il y a
souvent intérêt à partir de l'artisanat, de l'atelier. A condition que celui-ci
ne cesse de chercher à se moderniser, et que des subventions ne servent
pas à le maintenir artificiellement au stade le plus archaïque, comme cela
se passe pour le khadi, filage et tissage à la main du coton et de la soie,
en Inde. L'industrie enfin ne doit pas laisser de côté les moyens de
modernisation de l'agriculture : outils à main améliorés, puis machines
simples à traction animale pour débuter ; ensuite les engrais, et plus tard
les machines plus complexes et les tracteurs.
Sans contribution très notable de l'agriculture, le « décollage »
d'une économie en retard serait donc à tout le moins considérablement
retardé, sinon totalement compromis (i).
2° lues difficultés du développement agricole, spécialement à ses débuts
Toute l'histoire récente du développement nous montre qu'il est
plus facile de développer l'industrie, quand on en a les moyens (capitaux,
techniciens...), que l'agriculture. Ceci se vérifie dans des régimes pol
itico-économiques aussi divers que l'Inde et la Chine, le Brésil et l'Union
soviétique. La Chine a réalisé, de 1957 à 1962, un gigantesque effort pour
brûler les étapes, accélérer le rythme de sa croissance ; et il est permis
de dire que, dans l'ensemble, elle n'y est malheureusement pas arrivée.
Les raisons de ces difficultés sont multiples : la première, souvent
oubliée, me paraît être l'absence ou l'insuffisante présence d'une véri
table philosophie du développement. Le paysan tropical est souvent
(1) Cf. P. Bairoch, Révolution industrielle et sous-développement, Sedes, 1963. RENÉ DUMONT
soumis à des conditions naturelles plus ou moins ingrates : sols pauvres,
climats inadaptés et irréguliers, moussons capricieuses... Il a plus de mal
à croire à la possibilité réelle de gros progrès devant ces « préalables »,
entraînant souvent l'échec de ses premières tentatives. Il sait ne pouvoir
*" commander à la pluie et au beau temps. Et il a de ce fait tendance à r

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