Le droit comme forme dans une forme - article ; n°2 ; vol.11, pg 205-219
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Description

Déviance et société - Année 1987 - Volume 11 - Numéro 2 - Pages 205-219
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 8
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

J.M. Broekman
Le droit comme forme dans une forme
In: Déviance et société. 1987 - Vol. 11 - N°2. pp. 205-219.
Citer ce document / Cite this document :
Broekman J.M. Le droit comme forme dans une forme. In: Déviance et société. 1987 - Vol. 11 - N°2. pp. 205-219.
doi : 10.3406/ds.1987.1510
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ds_0378-7931_1987_num_11_2_1510Déviance et Société, 1987, Vol. 11, No 2, pp. 205-219
LE DROIT COMME FORME
DANS UNE FORME*
J.M.BROEKMAN»
« Dans une forme doivent se trouver plusieurs formes et dans plusieurs
formes doit se retrouver une seule forme. »
Serge Poliakoff
I. Les peintres font quotidiennement cette expérience dans leur oeuvre.
Ils mobilisent des formes et ces formes contiennent d'autres formes qui
demandent impérativement à se réaliser. Il n'y a pas à y échapper : la puis
sance évocatrice est radicalement au service de la puissance mimétique.
Cette dernière vit manifestement de la mimesis de la forme. Le premier
coup de pinceau est décisif ; aussi décisifs semblent être le premier mot, la
première phrase. «Call me Ishmael. » Dans ces trois mots est enfermée
toute l'épopée de l'homme, de la mer et de la baleine, dont Moby Dick fait
le récit. Proust dit : « Longtemps, je me suis couché de bonne heure », et
dans cette phrase est contenue toute l'expérience du temps qui est dévelop
pée dans son oeuvre. J.P. Hartley écrit: «The past is a foreign country:
they do things differently there » et toute la dynamique du livre « The Go-
Between » est immédiatement perceptible. Un premier coup de pinceau, la
première phrase contient une mystérieuse puissance de détermination. «Au
nom du peuple...», «Nous, Roi des...», «A mon humble avis...» — le droit
ne constitue visiblement pas une exception. Mais cette puissance de déter
mination à l'oeuvre dans le droit ne concerne-t-elle que le droit comme
texte ou si on veut, comme art — et non le droit comme savoir ?
Nous avons manifestement affaire à une problématique extrêmement
dynamique qui concerne, dans sa totalité, le phénomène de l'émergence
d'un discours. Un commencement n'est pas un rituel qu'on peut laisser rap
idement derrière soi pour se plonger dans le vif du sujet. Un commencement
est une force cachée, une force déterminante qui fournit une structure, crée
des conditions de nécessité, trace des lignes directrices pour l'établissement
de valeurs et de normes et contient la forme du discours qui doit venir au
jour. Pas un rituel donc, mais une source d'énergie. Cela vaut-il également
pour le droit et la science du droit ? Il faudrait assurément répondre à cette
question dans la ligne du courant d'idées qui vient d'être esquissé, mais une
telle réponse n'est possible qu'à partir du moment où on serait parvenu à un
accord général autour de l'idée que le droit est un texte qui s'écrit et s'ins
crit continuellement dans la société. Mais il n'y a pas de consensus à ce pro-
Katholieke Unhrersiteit Leuven.
205 et on ne se réfère pas à cette idée, la plupart du temps, quand on parle pos
de la scientificité de la science du droit. Cette dernière problématique a pris
beaucoup d'importance ces dernières années. Dans la théorie du droit sur
tout, on a établi des liens entre la scientificité du droit et son caractère para-
digmatique, sa rationalité, les problèmes de sa validité et de sa légitimation,
ses relations avec les structures logiques et argumentatives. Mais cela ne
résoud pas toutes les questions. On parle avec conviction et satisfaction de
la scientificité du droit. Mais avec la même et la même satisfac
tion, des juristes évoquent, depuis des siècles, le fait que la science du droit
ne semble pas être capable de donner une définition définitive du droit,
alors que celui-ci fonctionne manifestement d'une manière effective et
recouvre tout. Quel type de science et quel type de rationalité sont à
l'oeuvre dans ce cas ? Une rationalité exclusivement pratique, accidentelle,
non réceptive à la science, constituerait-elle, dans notre culture, la base
d'un processus aussi profond que le droit ?
Comme on l'a dit, parler de science et de scientificité du droit est très
à la mode. On espère, par cette approche, parvenir à la connaissance du
penser juridique dans sa spécificité et à la compréhension de ce qui consti
tue le fondement et le moteur de l'activité juridique. Cette approche vise à
fournir un éclaircissement sur les antinomies de l'existence du droit, sur les
contradictions dans lesquelles il est précisément empêtré et qu'elle doit
dénouer. Est-ce possible ? La science du droit peut-elle, comme science,
s'acquitter d'une telle mission ? Peut-on dire de cette science du droit, avec
MM. Ost et van de Kerchove, qu'elle « ne peut se contenter de répondre à
un intérêt soit technique, soit pratique, mais doit également procéder d'un
intérêt émancipatoire » ? Ceci a-t-il un quelconque rapport avec la science
du droit comme science, ou ne s'agit-il pas plutôt d'une modalité très parti
culière d'application de la science du droit, telle que la voit justement le
praticien du droit ? N'assiste-t-on pas ici à une confusion de deux perspect
ives, celle du théoricien et celle du praticien ? Et cette opposition n'est-elle
même pas trop simple pour indiquer la complexité de la problématique ?
Voilà ce qu'il faut se demander. Le thème de cette complexité touve en
grande partie sa retombée dans l'idée selon laquelle la science du droit doit
être conçue comme interdisciplinaire. On court cependant le risque qu'un
tel objectif n'aille pas au-delà de la construction d'une image réfléchie de
l'idéologie juridique elle-même. L'interdisciplinarité est le plus souvent
l'arrière-fond pour une prise de position relative au but et à la fonction
d'une théorie du droit. L'essentiel en est qu'un point de vue est développé
sur la manière dont le droit se réfère à la réalité sociale. Mais cette théorie
ne décrit alors, en dernière analyse, que la manière dont le concept théori
que lui-même est vu à partir de la pratique juridique. Les propositions
énoncées sont toujours indirectement liées à la pratique et surtout à la dog
matique juridique en vigueur. Ce n'est pas la relation de la théorie au droit
qui est mise en avant, mais la relation du droit à la théorie, à la philosophie
ou à d'autres sciences avec lesquelles on entretient un lien interidiscipli-
naire. Dans une telle optique, le droit est et reste son propre sujet ! Même la
différence entre points de vue interne et externe n'apporte pas de modifica-
206 tion à cette directivité intentionnelle. En elle est déjà contenue la question
du changement de paradigme du droit, c'est-à-dire la présomption relative
à l'impossibilité de fait d'un tel changement.
Ces considérations ne concernaient que le point -de vue à partir
duquel on exprime des attentes quant aux moyens et à l'énergie de la
science du droit. Mais des problèmes de même nature surgissent quand on
se rend compte des thèmes qui sont amenés à l'ordre du jour par cette pro
blématique. On l'a déjà dit : dans la discussion internationale, l'attention est
très généralement portée sur les structures argumentatives et logiques du
droit, sa rationalité, la validité et la légitimation. Mais il est beaucoup moins
souvent question, à ce propos, de la solidarité étroite du droit avec sa dog
matique; de la nature et de la fonction du discours dogmatique dans la
science du droit; du fait qu'il existe au moins deux interprétations diffé
rentes du concept «théorie» à l'intérieur du cadre de la science du droit,
celle du dogmaticien et celle du théoricien ' — entre lesquelles le fossé sem
ble grand sinon infranchissable, dans le débat relatif à la nature de la
science du droit *. Ceci vaut pour la discussion globale et internationale,
essentiellement anglo-saxonne. MM. Ost et van de Kerchove font ici except
ion, au moins en ce qui concerne la présentation de la problématique en
question. Ils lien

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