— Le Guatemala  - article ; n°1 ; vol.69, pg 189-201
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Description

Journal de la Société des Américanistes - Année 1983 - Volume 69 - Numéro 1 - Pages 189-201
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Gilles Bataillon
2. — Le Guatemala
In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 69, 1983. pp. 189-201.
Citer ce document / Cite this document :
Bataillon Gilles. 2. — Le Guatemala . In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 69, 1983. pp. 189-201.
doi : 10.3406/jsa.1983.3062
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1983_num_69_1_3062D'INFORMATION SUR LES AMÉRINDIENS 189 CHRONIQUE
Nous tenons donc, Monsieur le Président, à exprimer notre indignation devant ce projet de légali
sation de la discrimination raciale et de l'ethnocide qui émane du Département « Études et
Recherches » de l'organisme officiel chargé de la protection des communautés indiennes du Brésil.
Il est inacceptable, sous peine d'entacher gravement l'image internationale du Brésil, que la Fon
dation Nationale de l'Indien compte plus longtemps parmi ses fonctionnaires les responsables de
mesures aussi indignes.
Dans l'espoir que soit officiellement désavoué tout projet visant à l'élaboration ď « Indicateurs
d'Indianité », nous vous prions, Monsieur le Président, d'agréer l'assurance de notre haute considérat
ion.
2. — LE GUATEMALA
Les Indiens du Guatemala entre l'enfer et le « paradis »
Les affrontements militaires opposant au Guatemala les forces armées régulières à la
guérilla, principal argument des thèses officielles et des analyses par trop manichéennes
de nombreux médias, ne suffisent pas à rendre compte d'une violence, qui plonge ses
racines dans le racisme plutôt qu'elle ne s'explique par de prétendus « atavismes cultu
rels », et dont les objectifs avoués sont le génocide partiel et l'ethnocide massif.
Acteurs passifs et ou participants actifs, les Indiens sont dans tous les cas les victimes
désignées et l'enjeu d'un projet dont les caractéristiques, l'ampleur et les moyens — opéra
tions militaires, réduction villageoise, sujétion politique et économique, « conquête évangé-
lique » — ne sont pas sans évoquer d'autres entreprises de complète refonte des paysages
géographique, humain, social #et culturel du pays.
Le terrorisme d'État n'est pas, au Guatemala, un fait nouveau. La répression brutale a
toujours répondu aux revendications et aux tentatives d'organisation, qu'elles soient
paysannes (indiennes ou non), ouvrières ou étudiantes.
L'année 1954 a marqué, après dix ans de paix sociale, l'effondrement des espoirs que
les réformes entreprises par les régimes successifs d'Arévalo et Arbenz avaient permis de
fonder, en même temps que le retour, dûment orchestré par la C.I.A. et les intérêts nord-
américains menacés \ des dictatures militaires. Depuis trente ans, des vagues de répression
secouent cycliquement le pays pour briser tant les initiatives syndicales et coopératives
que les mouvements politiques et religieux qui les soutiennent. À plus forte raison lorsque
des plus radicaux prônent et développent la lutte armée.
Un fait nouveau est, aujourd'hui, que la terreur ne s'exerce plus « en réponse », mais
est érigée en principe actif de gouvernement ; qu'elle n'est plus ni sélective ni ponctuelle,
mais généralisée ; que le pays vit la guerre. Le général José Efraín Ríos Montt, au pou
voir depuis le coup d'État du 23 mars 1982, l'exprimait en ces termes : « C'est nous les
guerillas... Je suis le premier subversif de ce pays : je dois renverser l'ordre pour aller
contre l'ordre subversif... C'est l'unique façon d'attaquer, le feu se combat avec le feu » 2.
Un autre fait récent est qu'une fraction des populations indiennes, qui représentent
globalement entre 55 et 65 % de la population nationale, est maintenant engagée dans ces
mouvements « réformistes » et « révolutionnaires » au sein desquels elle milite plus ou SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTES 190
moins activement, combat plus ou moins ouvertement, et où elle assume également des
fonctions de direction et d'encadrement 3.
S'il ne fait aucun doute que la répression a poussé de nombreux paysans indiens à
rejoindre la lutte armée, celle-ci a par ailleurs connu un développement important depuis
quelques années, à la suite notamment du tremblement de terre de février 1976
— 27 000 morts, 77 000 blessés, 1 000 000 de sans-abri, 20 % des habitations du pays
détruites, la plupart dans le centre et l'ouest du pays — qui a mis en évidence l'incapac
ité des autorités à organiser et gérer les secours (les aides internationales empruntant les
canaux institutionnels ont été le plus souvent détournées) mais leur promptitude à milita
riser les régions rurales sinistrées 4.
Les conséquences politiques et économiques du séisme ont fortement contribué à boule
verser l'équilibre déjà fragile des inégalités structurelles.
Essentiellement rurale, la population indienne du Guatemala se concentre dans les
départements de l'ouest et du centre du pays (majoritaire à plus de 90 % dans certains
d'entre eux) où dominent les petits propriétaires parcellaires et les paysans sans terre, fai
sant traditionnellement de ces régions une réserve de main-d'œuvre pour les grandes plan
tations commerciales (fincas) des versants et de la côte pacifique 5. Depuis plus d'un
siècle, des migrations internes déplacent chaque année des milliers de saisonniers, entre
300 000 et 400 000 personnes, auxquelles s'ajoutent les quelque 30 000 travailleurs tempor
aires qu'embauchent clandestinement les fincas mexicaines du Soconusco. Situation fon
cière critique des hautes terres qui a, par ailleurs, provoqué un vaste mouvement de colo
nisation vers les basses septentrionales (le Petén et le nord des départements de
Huehuetenango, El Quiche, Alta Verapaz) ; une zone qui, outre ses potentialités agricoles,
/avérait riche en ressources minérales et énergétiques (barrages hydro-électriques réalisés
sur le Chixoy, en projet sur l'Usumacinta).
Simultanément ces vingt dernières années ont vu la montée den mouvements
coopératifs б qui tentaient et de pallier la crise dans les hautes terres et d'endiguer la
colonisation des basses terres convoitées. S'y sont exprimées d'une part des tentatives de
développement rural se réclamant de la « révolution verte », où l'Église et l'Action catho
lique ont joué un rôle prépondérant, et d'autre part des expériences d'encadrement pdysan
qui, financées notamment par l'A.I.D. et sous le contrôle de l'armée, prétendaient à
l'époque offrir une alternative positive à la misère, génératrice de tensions et de conflits 7.
Mais la réalisation du plan général d'aménagement de ces régions de basses terres, ou
Franja Transversal del Norte, a finalement montré comment étaient confondus l'intérêt
« national » et celui de la nouvelle oligarchie militaire, alors que d'énormes portions de
ces territoires ont été accaparées au profit de quelques personnalités 8 et de compagnies
extractrices (pétrole, nickel) 9.
Le massacre par l'armée de plus de 100 paysans kekchi, le 29 mai 1978. à Panzos
(Alta Verapaz), répondait à la réclamation des terres qu'après leur avoir promises le gou
vernement avait concédées à la société Exmibal (capitaux canadiens et nord-américains)
pour l'exploitation du nickel.
Depuis lors, de nombreux massacres ont obéi aux mêmes objectifs, notamment ceux des
coopératives du Petén et ďlxcán (El Quiche) ou ceux de Rio Negro (Rabinal, Baja Verap
az), qui ne visaient rien d'autre qu'une expropriation pure et simple.
352 Indiens chuj et kanjobal ont péri, le 17 juillet 1982, dans la finca San Francisco
(Nentón, Huehuetenango), propriété d'un colonel Victor Manuel Bollanos : ils étaient
demandeurs de titres de colonisation sur ces terres réputées « nationales »... CHRONIQUE D'INFORMATION SUR LES AMÉRINDIENS 191
Week-end au Guatemala
Samedi 17 juillet 1982, 13 heures : plusieurs centaines de soldats (de 500 à 600)
investissent la finca San Francisco. L'un des deux survivants témoigne :
De ahí pasó el ejército a masacrarnos, con todo y familia, sin comprobación. Ellos decían que
somos guerillos, pero dónde esta

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