Le Régicide dans le roman français (1824-1853) - article ; n°119 ; vol.33, pg 21-33
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Romantisme - Année 2003 - Volume 33 - Numéro 119 - Pages 21-33
A great part of the nineteenth century in France may have been overshadowed by the execution of King Louis XVI. We intended to draw of a sketch of its presence in thirty novels written from 1825 to 1850, less known than works by Balzac, Stendhal and G. Sand. In 1832 legitimists stopp[p]ed voicing their detestation and liberals stopped being cautious. From then on, few writers considered regicide as an eternal curse; some wondered whether terror was legitimate and aimed at showing the consequences of regicide on the political institutions of a country which for a long time was divided over this issue. At that point, a kind of political compassion was born, aiming at reconciliation. These two periods once studied, two subjects were broached: the staging and setting of regicide, and the family novel. Following L. Hunt, we can acknowledge that, in the first half of the nineteenth century, the family remains an essential criterion to understanding political power. Private life is a metaphor for a political existence which is all but peaceful. Here history is drama, as it stages death, and consequently an attractive material for novelists who intended to create a «dramatic» literature. History is thus close to myth.
Peut-être l'exécution de Louis XVI, a-t-elle projeté son ombre sur une bonne part du XIXe siècle. Nous voulons offrir, à travers trente œuvres, une étude de ses représentations dans l'ensemble, peu connu (en dehors des œuvres de Balzac, Stendhal et G. Sand), des romans des années 1825-1850. Vers 1832 la représentation du crime inexpiable disparaît ou devient marginale. On commence alors à analyser la légitimité de la terreur, les conséquences du régicide sur les institutions politiques d'une France qu'il a durablement coupée en deux: alors s'exprime (chez Dumas) une compassion politique qui se voudrait réconciliatrice. Nous avons voulu étudier ces deux périodes grâce aux mises en scène et au roman familial. En effet, on peut admettre, à la suite de L. Hunt, qu'en ce début du XIXe siècle, la famille reste une catégorie essentielle pour la compréhension du pouvoir politique. La vie privée qui est la métaphore d'une existence politique vraiment inapaisée - sujet de prédilection pour le roman qui se veut «dramatique» et pathétique - acquiert la dimension du mythe. On saisit dans la littérature - en cela irremplaçable -de manière privilégiée le travail de l'imaginaire, l'imaginaire au travail.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Alex Lascar
Le Régicide dans le roman français (1824-1853)
In: Romantisme, 2003, n°119. pp. 21-33.
Citer ce document / Cite this document :
Lascar Alex. Le Régicide dans le roman français (1824-1853). In: Romantisme, 2003, n°119. pp. 21-33.
doi : 10.3406/roman.2003.1177
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_2003_num_33_119_1177Résumé
Peut-être l'exécution de Louis XVI, a-t-elle projeté son ombre sur une bonne part du XIXe siècle. Nous
voulons offrir, à travers trente œuvres, une étude de ses représentations dans l'ensemble, peu connu
(en dehors des œuvres de Balzac, Stendhal et G. Sand), des romans des années 1825-1850. Vers
1832 la représentation du crime inexpiable disparaît ou devient marginale. On commence alors à
analyser la légitimité de la terreur, les conséquences du régicide sur les institutions politiques d'une
France qu'il a durablement coupée en deux: alors s'exprime (chez Dumas) une compassion politique
qui se voudrait réconciliatrice. Nous avons voulu étudier ces deux périodes grâce aux mises en scène
et au roman familial. En effet, on peut admettre, à la suite de L. Hunt, qu'en ce début du XIXe siècle, la
famille reste une catégorie essentielle pour la compréhension du pouvoir politique. La vie privée qui est
la métaphore d'une existence politique vraiment inapaisée - sujet de prédilection pour le roman qui se
veut «dramatique» et pathétique - acquiert la dimension du mythe. On saisit dans la littérature - en cela
irremplaçable -de manière privilégiée le travail de l'imaginaire, l'imaginaire au travail.
Abstract
A great part of the nineteenth century in France may have been overshadowed by the execution of King
Louis XVI. We intended to draw of a sketch of its presence in thirty novels written from 1825 to 1850,
less known than works by Balzac, Stendhal and G. Sand. In 1832 legitimists stopp[p]ed voicing their
detestation and liberals stopped being cautious. From then on, few writers considered regicide as an
eternal curse; some wondered whether terror was legitimate and aimed at showing the consequences
of regicide on the political institutions of a country which for a long time was divided over this issue. At
that point, a kind of political compassion was born, aiming at reconciliation. These two periods once
studied, two subjects were broached: the staging and setting of regicide, and the family novel. Following
L. Hunt, we can acknowledge that, in the first half of the nineteenth century, the family remains an
essential criterion to understanding political power. Private life is a metaphor for a political existence
which is all but peaceful. Here history is drama, as it stages death, and consequently an attractive
material for novelists who intended to create a «dramatic» literature. History is thus close to myth.Alex LASCAR
Le Régicide dans le roman français (1824-1853)
«Scène primitive et centrale de la révolution française», selon Mona Ozouf ', le
procès de Louis XVI, n'aurait-il pas projeté l'ombre du régicide sur une bonne part du
XIXe siècle, ce «Temps des révolutions»?2
On sait aujourd'hui qu'assumer le passé fut ardu pour maints enfants des convent
ionnels 3 et que l'événement occupa une grande place dans le cœur, l'imaginaire, la
réflexion d'un Chateaubriand4. J. de Maistre marque le siècle dès l'abord: il maudit les
régicides, mais la politique à ses yeux est violente par essence, et le Bourreau immol
ant, au besoin, l'innocent, un acteur primordial de toute histoire. Ballanche, fascinant
et solitaire, tient le sacrifice de 1793 pour une étape essentielle de la marche vers un
monde totalement régénéré: «Le roi a racheté la France comme Jésus-Christ a racheté
le genre humain.»5 L'étude historique fleurit aussi de 1819 à 1847, de l'Histoire de
Cromwell (Villemain) à celle des Girondins (Lamartine). Mignet, en 1824, peint sans
acrimonie le roi durant le procès et l'exécution avec sobriété. Mais reste «la catastrophe
du 21 janvier»6. Thiers, en 1828, rappelle 1' « atmosphère sombre et terrible du vote».
«Les fédérés les plus exaltés» sont «placés auprès de l'échafaud». Partout ailleurs
règne une stupéfaction écrasée. «Les mots» de M. Edgeworth «furent alors sublimes»
et la résignation de Louis XVI remarquable7. Mais le «terrible événement» est un de
ceux qui sauva la République. Bûchez dans les préfaces-synthèses ouvrant chaque
volume de son Histoire Parlementaire de la Révolution (1834-1838) défend la Montagne
car «la Terreur, ni moyen à réprouver» absolument, «ni moyen à employer à tout
propos» est «une méthode [...]: c'est par son but qu'on la juge»8. Pour Louis Blanc,
en 1841, la mort du roi, qui plus tard ramena les Bourbons au pouvoir, fut sur l'instant
1. Dictionnaire critique de la Révolution française, Flammarion, 1988, «Le Procès du roi», p. 134.
2. «Le Temps des révolutions (1780-1880)» est le titre donné par F. Furet au t. IV de l'Histoire de
France, Hachette, 1988.
3. S. Luzzato, Mémoire de la Terreur, Presses universitaires de Lyon, 1991.
4. Il s'interroge de l'Essai sur les Révolutions (1797), republié en 1828, aux Mémoires d'outre-tombe. Il
présage cette mort au siège de Thionville en 1792 (édition et notes de J.-P. Clément, Gallimard, coll.
«Quarto», 1997, t. I, p. 579). Rentré à Paris, il associe intimement, place de la Révolution, son frère, sa
belle-sœur, le roi exécutés là (ibid. p. 756). La fin du duc d'Enghien ravive sa douleur (ibid. p. 910). Tout
au long des Mémoires il compatit au sort du roi-martyr. Par le régicide, il en est convaincu dès 1797 : les
Jacobins se voulurent les «plagiaires» des Puritains (ibid., p. 536). Mais, différence essentielle avec l'Anglet
erre, la Convention tout entière a jugé Louis XVI. Il en vient finalement à écrire: «un échafaud élevé entre
un peuple et un roi les empêche de se voir: il y a des tombes qui ne se referment jamais» (ibid. p. 2887).
5. Ballanche, Œuvres, t. III (1833), Slatkine Reprints, 1967, p. 264.
6. Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814, Firmin-Didot, 1827, t. I, p. 359
et 361.
7. Histoire de la Révolution française, Lecointe et Alexandre Mesnier, 1828, t. III, p. 399-400 et t. IV,
p. 6. Pour Chateaubriand Thiers «a fondé l'école admirative de la terreur» (Mémoires d'outre tombe, éd.
citée, t. II, p. 2889)
8. Bûchez et Roux, Histoire parlementaire de la Révolution française, Préface: «De la terreur et de la
crainte comme méthode sociale», Paulin, 1834-1838, t. 20, p. VI.
ROMANTISME n" 129(2003-1) 22 Alex Lascar
d'une complète nécessité9. Et il faudrait évoquer Guizot, Michelet évidemment. Voilà
pour l'essentiel.
Le régicide est traité par les historiens et certains écrivains, comme l'a montré
Susan, dans son livre, The Deaths of Louis XVI 10, où elle analyse les œuvres de Hugo,
Lamartine, Michelet entre autres. C'est aussi un sujet pour le théâtre romantique n et
pour Balzac 12. G. Sand se préoccupa surtout des origines intellectuelles et spirituelles
de la Révolution 13. Afin d'esquisser une étude générale des représentations du régicide
dans les 1825-1850 nous avons utilisé des ouvrages de genre divers: romans de
mœurs 14, romans historiques, in- 12 pour cabinets de lecture, «nobles» in-8°, s' appa
rentant à l'occasion, les uns et les autres, au roman sentimental, au roman noir. L'ana
lyse a donc pu porter sur trente œuvres, outre celle de Ballanche sur laquelle existe
déjà des travaux 15.
L'année 1832, année de choléra, de colère politique, se distingue des autres. Vigny
publie Stello, une «Histoire de la Terreur». En un temps où l'on exalte Robespierre, il
est féroce à l'égard des «tueurs d'un homme, des tueurs de cent mille», frères des
Jacques Clément, des Ravaillac, mais n'évoque pas expressément la mort du roi. Il
attaque aussi longuement et avec une virulence inouïe la «Substitution des souffrances
expiatoires» et Joseph de Maistre 16. Quatre romans, de tendances diverses, accordent
encore une place au régicide. Parmi eux, L'Écolier de Cluny (de R. de Beauvoir), le
grand succès de 1832, est publié l'année où Buri

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