Les conceptions opposées de la victimologie et leur implication dans la recherche - article ; n°3 ; vol.11, pg 295-310
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Description

Déviance et société - Année 1987 - Volume 11 - Numéro 3 - Pages 295-310
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Donald R. Cressey
Les conceptions opposées de la victimologie et leur implication
dans la recherche
In: Déviance et société. 1987 - Vol. 11 - N°3. pp. 295-310.
Citer ce document / Cite this document :
Cressey Donald R. Les conceptions opposées de la victimologie et leur implication dans la recherche. In: Déviance et société.
1987 - Vol. 11 - N°3. pp. 295-310.
doi : 10.3406/ds.1987.1517
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ds_0378-7931_1987_num_11_3_1517Déviance et Société, 1 987, Vol. 1 1 , No 3, pp. 295-31 0 DÉBAT
LES CONCEPTIONS OPPOSÉES
DE LA VICTIMOLOGIE ET LEUR IMPLICATION
DANS LA RECHERCHE*
D. CRESSEY**
Les suffixes « o » et « logie » dans le mot « victimologie » font penser à
une branche spéciale de la science. Le caractère scientifique implicite de la
victimologie suggère à son tour une focalisation sur des problèmes abordab
les par les méthodes empiriques. Il semble opportun d'examiner ici cette
dernière conception de la victimologie et les conceptions alternatives.
La victimologie n'est pas une discipline scientifique. Ce n'est pas non
plus un champ académique (comme la criminologie ou l'écologie), auquel
des érudits et des scientifiques, formés dans diverses disciplines, apportent
les contributions de recherches théoriques et empiriques. C'est plutôt un
programme non académique dans lequel on a groupé, d'une manière assez
arbitraire, un amalgame d'idées, d'intérêts, d'idéologies et de méthodes de
recherche. Il est même possible que le créateur du mot «victimologie»,
Benjamin Mendelsohn, ait inventé ce terme non pas perce qu'une discipline
ou une orientation scientifiques étaient présentes ou envisagées, mais parce
que «victimologie» était vite dit. Comme je l'ai noté ailleurs, le mot se pro
nonce facilement, même s'il occulte des préoccupations opposées pour les
victimes, préoccupations dont seules quelques-unes sont scientifiques 1.
Plus spécifiquement, la victimologie se caractérise par un conflit entre
deux positions, également souhaitables, orientées vers la souffrance
humaine : l'humaniste et la scientifique. Ce conflit n'est pas perçu par cer
tains victimologues et rarement mentionné par d'autres. Il semble néan
moins entraver les efforts humanitaires et scientifiques entrepris en faveur
des victimes. Le travail des humanistes tend à être dénigré parce que propa
gandiste plutôt que scientifique, et le travail des scientifiques tend à être
désapprouvé parce qu'insuffisamment orienté vers l'action sociale. Chaque
groupe de victimologues se porterait probablement mieux, s'il divorçait de
l'autre et formait des alliances en dehors de la sphère de la victimologie.
Je discuterai ces deux positions tout en relevant l'existence de plu
sieurs types d'intérêts particuliers à l'intérieur de la victimologie, intérêts se
recouvrant partiellement mais néanmoins différents. Après avoir caractérisé
* Allocution présentée au Vème Symposium international de victimologie (Société mondiale
de victimologie), Zagreb, 18-23 août 1985 et reproduite avec l'aimable autorisation de
l'auteur ; traduction : Claude Chevalier, assistante à l'Institut de police scientifique et de
criminologie de Lausanne.
** University of California, Santa Barbara.
295 brièvement chacune d'elles, j'identifierai d'importantes différences dans les
orientations, vis-à-vis de la recherche scientifique.
La destruction de l'être humain
Un groupe de généralistes en victimologie pourrait être appelé les
« anti-destructionnistes indignés». Ils tendent à définir et à identifier
comme des victimes tous les individus et tous les groupes dont les droits
d'êtres humains ont été violés. Certains de ces humanistes s'efforcent de
faire savoir que des personnes sont victimisées injustement et de façon inhu
maine par ceux qui mettent officiellement en oeuvre des politiques gouver
nementales destructives. Sont ainsi des victimes les personnes qui n'ont
commis aucun crime, mais qui sont néanmoins punies ou privées de leur vie,
de leur liberté ou de leur espoir de bonheur par des fonctionnaires d'état.
Les victimes d'holaucaustes sont celles qui ont reçu le plus d'attention 2. Les
victimes de guerre et les prisonniers politiques leurs ressemblent par le
genre, mais pas par le degré de victimisation.
Les anti-destructionnistes essaient aussi de faire connaître la situation
des personnes victimisées par les gens, officiers de police corrompus et
membres des escadrons militaires de la mort compris, qui appliquent les
politiques destructives non officielles des agences gouvernementales.
Enfin, les anti-destructionnistes identifient et dénoncent les personnes
qui contrôlent les machines ou les organisations destructives non gouverne
mentales. Sont concernées ici les victimes de conditions de travail peu sûres,
les victimes de la pollution de l'environnement, les victimes dans le tiers-
monde des corporations multinationales et même les victimes d'accidents de
voiture. Comme indiqué, on ne peut pas dissocier le concept des droits de
l'homme de l'idée que les anti-destructionnistes se font de la victimologie.
L'exploitation institutionnelle
Les humanistes comptent un second ensemble de victimologues,
encore qu'il présente des plages de recouvrement avec le premier. Les memb
res de ce groupe travaillent à identifier et ensuite à atténuer le drame des
personnes qui souffrent des injustices commises, délibérément ou non, par
les dirigeants des cinq institutions sociales de base : l'économie, la politique,
l'éducation, la religion et la famille. Sont incluses les victimes d'exploitation
économique, de droits politiques restreints, de discriminations dans l'éduca
tion, de persécutions religieuses et de crimes « familiaux », tels que les mauv
ais traitements vis-à-vis des enfants ou des épouses. Dans tous les cas, les
membres de groupes minoritaires sont victimises par un groupe qui les
domine en tenant des discours tels sur « la condition de personne » que les
membres de ces minorités apparaissent comme un peu moins que des êtres
humains. Les esclaves sont dominés de cette manière par les maîtres ; les
noirs, les juifs, les femmes et d'autres groupes minoritaires le sont par les
groupes majoritaires ; les citoyens du Tiers-monde par les fonctionnaires
des nations puissantes ; et même les pauvres par les riches. Il n'y a pas si
longtemps, les enfants constituaient un groupe minoritaire de ce type.
296 peu et de plus en plus, on reconnaît que les femmes aussi sont vicDepuis
times d'exploitation et de discrimination institutionnelles.
Une peine cruelle et inhabituelle
Le souci des victimologues de rechercher et de dénoncer les peines,
ou certains types de peines, infligées aux criminels condamnés est très étro
itement lié à leur souci de diminuer la destruction et l'exploitation de
l'homme. Assez curieusement, cette préoccupation est rarement mentionnée
dans les conférences de victimologie. Peut-être que le conflit, dont on par
lera plus loin, qui oppose les droits des victimes et les droits des criminels, a
conduit à négliger le fait que certains condamnés sont aussi les victimes de
politiques gouvernementales destructives. Encore que la plupart des crimi-
nologues qui suivent les traces de Sellin et Sutherland déplorent autant la
victimisation des criminels que les autres types de victimisations. Certains,
comme Marvin Wolfgang, ont aidé des juristes présentant des dispositions
humanistes, à démontrer en justice que les peines particulièrement destruct
rices devaient être abandonnées parce que cruelles et inhabituelles. On
peut illustrer ce problème en attirant l'attention sur les mots étranges ins
crits sur une plaque commemorative dédiée à John Augustus, le père de la
liberté surveillée.
Entre 1841 et 1858, Augustus accorde la liberté sous caution, fournit
une assistance financière et donne une aide personnelle a près de 2000
condamnés bostoniens. Il persuade ensuite les autorités du Massachusetts
de reprendre le système qu'il avait inventé pour atténuer les peines des cr
iminels et pour, dans le même temps, les aider. La probation, nom sous
lequel on vint à le connaître, tire son origine de ce programme. Augustus
viva

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